A bas bruit

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C'est déjà presque la nuit noire. De gros flocons nappent le Val d’Aran, cette vallée pyrénéenne à la croisée des chemins et des langues. Soudain, l’espace de quelques secondes, les objets suspendus dans la quiétude de l’après-souper se mettent à trembloter. Mais aussi les fenêtres, les plats, les assiettes et jusqu’aux loquets de portes. Un peu comme si un train de marchandises venait de traverser la terre endormie. Le lendemain matin, au-dehors, rien n’a changé : l’église est toujours au milieu du village. La terre a tremblé, confirme les experts, une magnitude de 3,5 sur l’échelle de Richter. Pas d’effondrements, pas de crevasses, pas d’animaux qui tournent fous, de l’eau au robinet, du courant dans la prise, la vie qui va, quoi. En apparence, tout au moins. Mais la tectonique des plaques, à force de tremblotements légers et réguliers, ne prépare-t-elle pas le grand effondrement ? Celui qui nous reléguera, nous et nos cathédrales, dans les entrailles terrestres du 36ème dessous ? Comment va la terre sous son plancher des vaches ? Déjà inquiets du désordre et du chaos hors sol, on ne se pose pas trop la question de l’état du noyau, du manteau et de la croûte. Et si l’on se risquait à un parallèle avec nos démocraties lasses ? Ces convulsions qui nous font claquer les dents et demeurer là, pauvres diables, dans un état de sidération, combien en avons-nous eues ces dernières décennies ? Les dates sont fichées dans nos mémoires. Le 11 septembre, le 21 avril, le 7 janvier, le 13 novembre, le 7 octobre… Nous sommes encore debout, certes, mais à quel prix ? Fissurés, coupés en deux parfois, inquiets, terrorisés parfois, perdus et sans cap, désorientés toujours. Le 1er septembre 1923, le tremblement de terre du Kanto, d’une magnitude de 7,9 ravageait Tokyo. 105 000 morts. L’année suivante, les autorités nippones publiaient le premier code de constructions antisismiques. Quel séisme faudra-t-il à l’Occident pour s’éveiller ? Pour l’heure, on suit la pente. Les extrémistes vont gagner les européennes, un retour de Trump est envisagé et, dixit Chirac, la maison brûle à petit feu et nous regardons obstinément ailleurs.

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