Chapitre 05.2

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Pourquoi en avoir effectué un tirage papier ? En général, les gens gardaient leurs souvenirs dans les mémoires virtuelles du S.Cloud. En observant la photo avec plus d’attention, elle se rendit compte qu’il avait été pris avec un appareil sans doute ultra perfectionné, mais pas le dernier modèle, sans quoi elle serait en 3D. Ce n’était pas non plus une prise de vue interne, une caméra embarquée greffée à l’intérieur de l’œil.

Le genre de chose qu’elle n’avait jamais voulu se faire implanter. Elle avait d’ailleurs toujours refusé la moindre manipulation génétique ou chirurgie physique, malgré les conseils de Kolya. Ce qui laissait supposer que lui en avait subies si discrètes fussent-elles.

Elle retourna la photo et y lut les noms des trois compagnons qui entouraient Jenna Benedict : Jaimini Latchoumaya, Matthew Cutter et Jor POnyl.

Le cliché avait été pris le 1er janvier de l’année 2081. Tout un symbole.

Pour autant qu’elle le sache le lieu indiqué, Olympia AJ25, n’était pas sur la Terre.

Il y avait une estampille en bas, à droite du cliché.

Elle y lut tant bien que mal Admunsen-Scott South Pôle Station.

Elle remit les photos en place. Il était temps de quitter les lieux. Elle n’y trouverait rien de plus.

Un peu plus tard, en quittant l’immeuble, dans le taxomatique qui la reconduisit à l’appartement qu’elle avait loué le temps de sa mission, elle songea qu’il était assez curieux que Benedict ait ces photos dans son sac à main. Elle le croyait en sécurité dans ses propres locaux, alors qu’il ne l’était pas. Elle pouvait se le faire voler à n’importe quel moment, ici, ou dans les rues sombres et grouillantes de monde dans lesquelles elle appréciait de musarder après des heures d'enfermement.

Les clichés étaient-ils truqués ? Destiné à piéger ceux qui étaient trop curieux ?

Benedict pouvait le prétendre si quelqu’un publiait ces photos sur les réseaux. Surtout si ce quelqu’un était un journaliste… ou bien une espionne. Mais Esmelia savait qu’il n’en était rien. Ce n’était pas des faux.

Esmelia avait quitté le service de traduction quelques semaines plus tard.

De son côté, Kolya avait des recherches sur la base d’Admunsen-Scott et sur l’Antarctique. Il avait découvert que deux fois par an, il y avait un contingent d’une vingtaine de militaires de l’ONU pour le Pôle Sud, et un autre avec à peu près autant d’hommes et de femmes en revenaient.

En contactant divers scientifiques sur les centres de recherche du continent, il avait découvert que ces derniers n’avaient pas vu de militaires de l’ONU débarquer depuis au moins une dizaine d’années. Il en avait déduit que si base il y avait en Antarctique, le personnel des autres bases n’en avait pas connaissance.

Il y avait longtemps que la population et les conditions de séjours n’étaient plus réglementées en Antarctique. Depuis que les premières terres s’étaient découvertes de leur glace… Alors, rien d’étonnant à ce qu'une base secrète y ait été construite sans que personne ne le remarque.

La suite avait été un jeu d’enfant : observation de l’environnement, du personnel… et manipulation d’identité.

Esmelia était parvenue à prendre place au sein du contingent militaire en partance pour l’Antarctique.

Elle eut rapidement la confirmation que les militaires n’étaient pas en poste sur Admunsen-Scott, comme indiqué mais dans une station qui n’apparaissait sur aucune carte.

Elle n’eut aucun mal à donner l’illusion qu’elle était bien celle qu’elle prétendait être. Les membres du contingent venaient d’un peu partout dans le monde. Elle devait avoir entendu parler au moins six langues. Les deux tiers des soldats avaient déjà été affectés sur la base de l’AMSEVE. Ceux du dernier tiers effectuaient leur première mission en Antarctique et ne connaissaient pas leurs équipiers.

La sécurité au sein de la base de l'AMSEVE était d'un niveau élevé. À tout moment, elle avait craint que quelqu’un découvre que sa présence était une anomalie. Mais Kolya connaissait son travail, et elle son rôle.

Elle avait intégré l’équipe d’exploration en qualité d’interprète. Personne ne lui avait posé de questions sur son travail ou sur les missions qu'elle avait déjà effectuées. Elle était entrée dans le C.E.T. deux jours après son arrivée. Deux jours à être briefée sur ce qui l'attendait avant, pendant et après son passage dans le C.E.T. et sur les consignes à respecter.

Le voyage devait la conduire sur Feloniacoupia, une planète située dans un système de l’Ecu-Croix, l’un des bras de la Voie Lactée. D’après le peu qu’elle avait appris, la population qui vivait sur la planète s’était développée sur le seul et unique continent. Et il semblait qu’elle ait beaucoup de points communs avec les Vikings. À ceci près, que les individus de cette peuplade n’étaient pas tous humanoïdes. L’être humain n’était pas la norme dans cette partie de la galaxie.

L’équipe dont elle faisait partie avait été réduite à quinze personnes, et uniquement des soldats de métier. Elle était la seule venue du civil. Habituellement, l’effectif était le double, constitué pour moitié de soldats professionnels, et pour autre moitié de spécialistes de diverses disciplines : exobiologistes, exoarchéologues, et autres exos.

Au cours de cette mission, qualifiée d’exceptionnelle du fait qu’elle n’entrait pas dans le calendrier initial, ou dans programme, ils devaient récupérer un scientifique terrien qui avait pris la tangente sur la planète lors de leur précédente mission.

Elle s’était dit que ce type avait été suffisamment malin pour avoir trouvé le moyen de déserter sans encourir de sanctions de ses supérieurs hiérarchiques. Du moins si ses collègues de l'AMSEVE ne lui remettaient pas la main dessus. Elle allait devoir trouver la bonne occasion pour en faire de même, une fois là-bas. En espérant que le hasard la servirait en la conduisant sur la piste de celui qu’elle recherchait.

Elle n’avait aucune idée de ce qu’elle trouverait sur Feloniacoupia, mais elle sentait qu’elle était sur la bonne voie. C’était comme si, enfin, l’aboutissement d’une longue recherche était proche.

Esmelia reporta son attention sur le bâtiment tout en replaçant une mèche de cheveux, blond roux, échappée de son bonnet. Celui-ci ne laissait voir que son visage un peu trop pâle et aux taches de rousseur prononcées. Ses yeux étaient d’un vert si sombre qu’ils paraissaient ne pas avoir d’iris.

Elle ne craignait plus qu’on la reconnaisse. Elle s’en fichait même. Elle arrivait au bout de sa mission. Surtout, si elle était arrêtée, elle trouverait le moyen de s’échapper, grâce à ses "pouvoirs".

Aucune prison ne pouvait plus la retenir désormais.

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