Chapitre XIV : C'est mon choix avant tout

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Mardi 06/12/22,

Reeve avait envie à nouveau de prendre un bol d’air pur, les informations qu’elle venait d'encaisser se mélangeaient dans son crâne. Elle fila dans la chambre, enfila un jean, un pull, ses baskets et attrapa son blouson qui trainait sur le canapé. Etienne l’observait sans rien dire, il avait conscience qu’elle aurait besoin d’un peu de temps pour digérer ce que son oncle venait de lui balancer sans trop calculer que cela pourrait la déstabiliser.

Dans sa tête les questions valsaient. Comment avait-on pu décider à sa place ? Comment pouvait-il connaître autant de choses sur sa vie ? Sûrement Etienne avait dû parler de leur situation. Qu’est-ce que Marc faisait avec Sarah ? Pourquoi étaient-ils partis ensemble ? Qui avait mis la tête à l’envers à l’autre ? Et pourquoi Etienne ne lui avait-il pas avoué que l’immeuble était une de ses propriétés ? Quel autre secret cachait-il ? L’avait-il manipulé ? Est-ce que l’amour l’avait rendu si stupide qu’elle ne voyait rien ?

La jeune femme prit le vélo qu'elle avait abandonné sous l'averse d'hier quand ils étaient rentrés. Le soleil paradait en cette fin de matinée dans un ciel sans impuretés. Elle enviait les astres de ne pas avoir cette capacité de penser. Elle rêvait les yeux ouverts comme à chaque fois qu'elle se baladait dans cette nature qui l'apaisait. Elle appuyait fort sur la pédale sans savoir où elle allait échoué. Ce petit bout de terre lui plaisait, elle s'y sentait libre. En repensant aux deux jours qu'elle venait de partager avec Étienne l'avaient comblé. Les moments fous qu'ils avaient vécu se superposaient, milles feuilles de douceurs.

Arrivée à la pointe de l'île, essoufflée, les joues en feu, les battements de son coeur à cent à l'heure, les jambes chancelantes, elle posa son vélo appuyé contre le muret du phare. Elle avancait attiré par l'océan si paisible. Des goélands l'accompagnaient curieux. Ils se jaugeaient, l'oiseau espérait quémander quelques miettes, la jeune femme observait le volatile libre de ses mouvements. Elle s'assit sur le sable, prit ses genoux entre ses bras. Qu'allait-elle faire maintenant ? La décision devenait une évidence. Accepter ce que le destin lui proposait. Si leurs routes s'étaient croisées ce n'était pas juste un hasard. Elles ne voulait plus vivre seule, elle avait envie d'avoir des enfants qui couraient dans ses jupes. De petites bouilles à caliner, les voir grandir.

Les larmes s'accumulaient au bord de ses yeux, elle tentait de les retenir, mais à quoi bon. Laisser ses angoisses se déverser pour partir demain le coeur leger. Elle avait conscience que la seule famille sur laquelle elle pourrait s'appuyer sombrait peu à peu dans l'oubli et elle ne pourrait rien changer à cet état de fait. Alors pourquoi ne pas offrir à son grand père une seconde vie dans un lieu qui leur serait inconnu à tous les deux. Ils seraient ainsi à égalité. Pour son boulot, c'était une nouvelle opportunité qu'elle devait saisir. Elle devrait encore une fois s'imposer. Montrer qu'elle n'était pas arrivée là parce que son corps pourrait servir tremplin pour gravir les échelons. Son chef n'était rien, juste un pauvre mec, elle n'avait aucun compte à rendre. S'il devait mettre la main au portefeuille ça serait un minimum à côté de ce qu'elle avait dû endurer.

Perdue dans ses pensées, elle n'avait pas réalisé qu'elle n'était plus seule sur ce petit bout de terre. Une main se posa sur son épaule.

  • Je peux ? demanda-t-il
  • Depuis combien de temps es-tu là ?
  • Difficile à dire, je ne sais pas quand tu es arrivée.
  • Depuis trop longtemps je pense, j'ai froid.

Etienne posa une couverture sur ses épaules et le panier qu'il avait préparé.

  • Je comprends que tu trouves que les évènements s'accélérerent mais je ne veux pas te perdre.
  • Et si je te dis que pour moi tout est claire.
  • Profitons de cette après midi, laissons tout ça de côté encore un instant et ce soir tu me diras.
  • Tu es venu comment ?
  • Ophélie m'a prêté sa voiture. Et elle est repartie avec ton vélo.
  • Tant mieux, je ne sais pas si j'aurais été assez courageuse pour faire le chemin retour.

Etienne attrapa deux verres et servit le rosé qu'il avait trouvé dans la cave du grand père, il avait découvert que l'homme avait une collection de qualité. Reeve vint caler sa tête sur son torse, il en profita pour la serrer contre lui. Elle semblait si fragile. Ce soir, peut-être qu'elle ne voudrait pas le suivre. Pour l'heure, il voulait encore profiter de celle qui était dans ses bras, sa nouvelle réalité. Elle lui avait redonné goût à la vie.

Après avoir mangé le repas qu'avaient concocté leurs nouveaux amis, ils partirent main dans la main le long de la plage. Les grains de sable étaient froids et pourtant procuraient une délicate sensation. Quand sa belle alla affronter l'eau glacée comme elle avait osé le faire hier, il ne put retenir son sourire qui se dessinait sur son visage. Elle illuminait ses journée et avait cette folle insouciance qui le charmait. Il aurait voulu être aussi téméraire, mais il préférait la laisser libre de vivre ses rêves pleinement. Le soleil glissait délicatement dans l'océan, il était temps de rentrer.

Dans la voiture, le silence les accompagna. Aucun n'osa dire le moindre mots, même la radio était muette. Devant la porte, une hésitation les saisit, comme s'ils redoutaient ce que cela signifiait de la franchir. Les mains tremblantes, Etienne ne trouvait pas la serrure, il échappa les clés, l'obscurité les enveloppait ne facilant pas les choses. Reeve ne put résister, elle avait besoin de lui. Elle saisit son homme par la taille et lui murmura à l'oreille :

  • Je suis prête. Je ne veux plus avoir de regrets. Ma vie est à tes côtés. Demain, je partirai avec toi.

*A.R*

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