Chapitre XXXIII. C'est quoi ce bolide

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*A.R*

Sarah avait suivi ce brave Aristide sans un mot, tel un fantôme errant entre deux mondes. En une nuit, elle avait découvert une sœur et l'avait perdue aussitôt. Elle avait cru en l'amour et une fois de plus s'était fait avoir. Dans quelques heures, l'Oncle d'Étienne devrait venir la chercher. Où allait-t-il l’emmener ? Que pourrait-elle avouer ? On lui avait fait promettre de ne rien révéler. Tous devraient continuer à croire que Catherine était morte. Tout s'embrouillait dans son esprit, tour à tour elle se voyait au fond de l'eau noyant tous ses maux et aussitôt une bouffée d'oxygène la ramenait à la vie. Assise en face d'Aristide, elle l'observait ce vieil homme toujours droit dans ses bottes malgré les déboires de la vie. Il venait de tout perdre, s'effondrer et pourtant c’était lui qui la soutenait et souriait.

- Aristide, penses-tu que j'ai fait le bon choix ?

- Tu as fait celui de repartir sur de nouvelles bases, d'oublier ce passé qui t'a meurtri et peut-être construit. Peuchère, tu es une belle femme qui mérite un homme bien qui prenne soin de toi. Tu ressembles tellement à ta mère. J'ai tout fait pour la rendre heureuse et pourtant elle ne rêvait que de lui celui qui l'avait meurtri, trahie. Ne fais pas la même erreur.

- Et si je venais à trahir ma sœur.

- Oublie -la, il fallait qu’elle change d’air, ici ce n’était plus vivable, un prince charmant est passé et l’a emportée. Je l'ai élevée comme ma fille, je l'aimerais comme telle jusqu'à mon dernier souffle. Marc est un bon bougre, j'ai toujours pensé qu'il serait l'homme qui lui faudrait. Et c'est ainsi, elle a aimé Etienne de façon différente, Michel lui, il lui a pourri la vie jusqu'à qu'il la croit morte et se casse d'ici pour le bien de tous.

- Tu sais que c'est moi qui l'ai tué.

- Ne te martèle pas, il ne méritait pas mieux. Si j'avais eu le courage je l'aurais balancé au fond du Verdon. C'était un monstre.

- Et maintenant ? Vas-tu m'accompagner ?

- Non, c'est ici ma terre et le temps venu elle me tendra ses bras bienveillants pour m’acceuillir et je reposerai auprés de la seule femme que j’ai aiméi. Je lui rendrai tout mon amour en retour. Mes brebis sont mes compagnes de toujours, elles seront m'écouter et me réconforter. Et si tu as besoin tu sauras me trouver.

Sarah se leva et vint serrer Aristide dans ses bras, elle sentait les battements de cœur s'apaiser. Ils étaient dans leur bulle, deux âmes en peine libérées de leurs maux.

E.Y

  • Oh, Aristide, c'était quoi ce bolide qui a failli me percuter, c'était pas la voiture d'Etienne ? c'est qui l'imbécile qui conduisait, ne me dit pas que...
  • Si, c'était Marc !
  • Seul ?
  • Oui, Sarah est là, elle t'attend,
  • Bon, je vais téléphoner aux gendarmes de Grasse et d 'Annot ! un hurluberlu en route pour l'Italie dans une voiture volée...

_ Laisse-lui sa chance, vous ne lui avez jamais fait de cadeau à Marc, ce salopard de Michel sous couvert de solidarité familiale... vous lui devez bien ça, Etienne a les moyens de s'acheter une autre voiture, vous la déclarez volée dans 24 heures, vous la retrouverez dans un aéroport Italien j'imagines !

  • Mais je vais pas le laisser filer sous prétexte que...
  • Tu préfères que je dise tout à Etienne et Sarah !
  • Bon, bon...ce n'est que du menu fretin après tout !
  • Tu crois pas qu'il faudra que tu dises la vérité un jour Philippe !
  • Jamais !
  • Bon arrête ton moteur, la planète est déjà bien assez abîmée comme ça !

L'oncle de Montolieu gara enfin son véhicule, une vieille estafette blanche bardée d'écussons de toutes les couleurs

Vive le Larzac libre

Vivre au pays

Langue d'oc

Non au nucléaire

Il y avait sur cette vieille carrosserie des années de luttes écologistes. C'était le parfait véhicule du bobo post 68 ! Aristide se moqua gentiment de Philippe !

  • Tu aurais pu venir avec ton bolide, tu ne vas pas me dire que tu es toujours... C'est pas comme si tu n'étais pas propriétaire de quelques centaines de terre en Occitanie...
  • Oh, Aristide, tu arrêtes avec tes jugements, je suis toujours un vieil écologiste, j'ai déjà été arrêté à Superphénix, à...
  • Pour être relâché immédiatement après un coup de fil au préfet de l' Aude...Anarchiste de papier mâché !
  • Bon, on va pas sortir tous les vieux clichés, Giuletta est au garage, je vais acheter une hybride ou une électrique
  • Tu aurais mieux fait d'acheter la Mito, ça te ressemblerait plus !
  • Elle est ou Sarah ?
  • Je t'aurais bien invité pour partager le roti mais ma table n'est pas assez luxueuse
  • Oh ça suffit ! Je suis venu chercher Sarah et je file.. Sarah !
  • Je suis là mon oncle, j'attends que tu aies fini de te chamailler avec ton ancien salarié...vous vous êtes partagés ma mère entre toi, ton frère et... C'est toi mon père ou c'est lui...En temps et en heure je vous ferai passer des tests ADN, je vais prendre un avocat, j'ai le droit de savoir qui je suis...oui je te suis, Tonton, je monte avec toi... dois-je t'appeler Papa ?
  • C'est toi Aristide qui lui a dit tout ça !

_ Tu viens de tomber dans son piège Philippe, non je ne dis jamais rien, tu devras te débrouiller avec tes cachotteries, filez maintenant, vous êtes sur une propriété privée, j'ai acheté ses terres à ton frère, vous êtes sur mes terres, je ne veux plus vous voir, filez avant que …

Et sur ce, le vieux berger, tourna les talons, cachant ses larmes et la chienne sur les talons, il fila à l’arrière de la maison.

*A.R*

Sarah rattrapa le berger avant qu’il ne disparaisse, elle ne pouvait pas partir sans aller une dernière fois se recueillir sur la tombe de sa mère. Elle s’agenouilla, caressa du bout de doigts la plaque où se trouvait le nom et prénom gravés. Elle aurait voulu lui poser tout un tas de questions, lui crier dessus pour l’avoir abandonnée, pleurer parce qu’elle n’avait jamais essayé de la retrouver, elle aurait voulu une seule fois la prendre dans ses bras pour sentir son parfum, poser un baiser sur sa joue pour tatouer pour toujours dans son cœur. La seule image qu’elle emmenait avec elle serait un tas de terre où poussait un rosier sauvage.

-Aristide avant de partir, je voulais te remercier, continue à veiller sur la femme qui m’a donné le jour comme tu l’as fait depuis toujours ?

- Pars mon enfant et sois heureuse.

Sarah lui adressa une dernière accolade, échappa une larme et reçut celle du vieil homme comme le plus beau des cadeaux. Elle se dirigea vers la voiture, se retourna et adressa un petit geste de la main avant de s’asseoir à côté du chauffeur.

– Sarah, nous pouvons partir ? demanda Philippe.

– Oui, est-ce que j’ai vraiment le choix ?

– On a toujours le choix, il suffit de faire le bon.

– Elle est bien bonne celle-là, tu l’as lu sur l’emballage d’un carambar. Tu en as d’autres de remarques aussi fines, dit-elle avec amertume.

– Je ne sais pas, je pense que le voyage va être long et j’aurai tout le temps de répondre à tes questions.

Sarah plongea dans un mutisme total, elle voulait s’extraire de ce monde, son corps était dans l’habitacle, son âme voyageait au loin. Elle avait besoin de prendre une pause avant de se lancer dans une confrontation directe. Ses poings serrés sur ses genoux, elle observait les paysages défilant à grande vitesse, toute sa vie suivait les vallons et les creux que la route lui offrait. Son passé lui avait éclaté au visage, encore une fois elle n’était pas prête à se déferlement. Tout n’était que flou. Les courbes de ses histoires s’effaçaient avec les kilomètres. Comment arriverait-elle à sortir de l’eau ? Était-il nécessaire de plonger dans l’eau, finalement elle se noyait depuis toujours. Pourquoi est-ce qu’en ce matin de décembre en aurait-il été autrement ? Elle avait un père mais qui était-il vraiment et serait-elle prête à pardonner ? Comment allait-elle réagir en retrouvant Étienne ? Et lui pourrait-il accepter ses excuses. Elle manquait d’air, elle avait la tête qui tournait, elle voulait crier et hurler sur le chauffeur qui se tenait à ses côtés, frapper du poing jusqu’à voir de fines gouttelettes s’échappaient de son corps, seule preuve qu’elle était encore vivante. Les battements de son cœur s'accélèrerent, comme si celui-ci voulait s’extraire à jamais et ainsi ne plus souffrir. Elle était malheureuse et derrière tout ça la colère prenait plus de place.

E.Y

Philippe observait sa fille, ressentant sa souffrance et son désarroi prit la parole :

  • Je suppose que je te dois des explications...je l'ai aimé ta mère, c'était un rayon de soleil, mais elle ne m'aimait pas, elle préférait mon frère le beau le gai, le talentueux...
  • Je demanderais tout de même un test ADN...
  • Ce que tu veux, je paierai tout, les frais d'avocats, tout, je n'ai pas d'enfant, tu seras donc ma fille, tu hériteras de tout...
  • Mais c'est pas ça que je voulais, j'aurais voulu, une enfance normale, une sœur, une mère, qu'on me dise...bien sûr je vais hériter de toi, et alors, tu es mon père et après, tu ne seras jamais mon père, Tu seras un nom sur un bout de papier c'est tout
  • Je comprends
  • Non tu ne comprends rien... quand je pense que j'aurais pu, avec Etienne, il est quoi, mon cousin, il avait déjà été marié avec sa cousine... Et ma mère, mais était-ce vraiment ma mère ? couchait avec l'autre cousin, comme moi, avec les deux frères, mes deux cousins, ça s'appelle de l'inceste tout ça, moi ça compte pas, je l'ignorais, mais toi, tu le savais tout ça, tu n'as rien dit, tu es un criminel, tu avais peur de quoi, de perdre ta femme...Tu me dégoutes, je prendrais ta filiation, pour hériter...j'ai tant eu faim dans ma vie, j'ai tant de fois côtoyé l'abime, mais je ne renierai pas ton nom, pire, il ne représenteras jamais rien pour moi, ma mère vaut guère mieux, elle n'a jamais rien fait pour...
  • Tu juges sans savoir
  • Mais tais-toi ! je suis Sarah, Sarah toute seule, Sarah sans nom, je n'ai eu ni père, ni mère, ni sœur, les seuls qui m'ont montré un peu d'humanité, c'est mon cousin Etienne, sa chérie Reeve et Marc, le beau Marc, j'espère qu'il sera heureux avec Cath...
  • Oh putain, c'était Catherine avec Marc ! Moi j'ai vu Dolorès...mais Catherine est morte non ! Sarah tu as donc vu Catherine...quand je pense que Aristide me fait la morale, il ne vaut pas mieux que moi...
  • Oui ! C'est Catherine qui était avec Marc, ne le dis pas à Etienne !
  • Mais putain, il y en a marre de dis pas ci, ne dis pas ça, voilà ou on en est...allez hop ! À Aix en Provence, on s'arrête pour manger...je vais tout raconter depuis le début, après tu jugeras si tu en as envie ….

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