Chapitre 4 : la première princesse

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Au bout de ses deux mois, Dame Orella me prévint avec indifférence que je devais rentrer au palais. Alors un matin, l'on me prépara tel qu'on ne l'avait jamais fait. Pour que je ressemble à l'image qu'on voulait me donner, l'image d'une fille fragile, innocente et pure, l'on me vêtit d'une robe blanche en apparence simple. Malgré les couches de maquillage, celui-là semblait discret et naturel. Ma coiffe presque enfantine était bien lourde pour la simplicité apparente. Je n'avais jamais eu l'impression d'avoir été aussi fausse, me demandant bien qui pourrait tomber dans le panneau.

Toute cette matinée de préparation, les servant pleurèrent mon départ. Seule Aliéna m'accompagnerait, ce qui m'attristait un peu, je m'étais légèrement rapproché de ces gens qui s'occupaient de moi. Même si le fait qu'ils ne connaissaient me faisait garder la distance. Je n'appréciais guère que l'on me serve, encore moins que l'on me soit loyale sans vraiment me connaître et juste grâce à un titre. Cette réalité a toujours eu cours, je n'aime aucun des cultes sur moi, mais si maintenant, je peux influencer les choses ; à cette époque, j'étais impuissante.

L'on me fit monter dans une voiture de toute beauté. Le carrosse impérial n'avait rien à voir avec la carriole dans laquelle j'étais arrivée. Aliéna monta au côté du cocher tandis que dame Orella me tenait compagnie.

La nuit était tombée quand le trajet pris enfin fin et pourtant hors de la voiture la luminosité était tels qu'en plein jour. J'entendais depuis que l'on était arrivé aux approches du palais des acclamations et dame Orella m'avait parlé d'un accueil. De ce que je pouvais entendre, une grande fête battait son plein. Je ne savais si c'était pour fêter le retour de la fille tant attendu, celle que toute l'histoire pleuré, ou si c'était juste une occasion comme une autre. Je ne vous cacherais pas qu'en réalité, je doutais de leur sincérité. Le bruit de la fête populaire avec les rires et les musiques festives s'estompa pour se transformer en une musique d'orchestre et en conversation pleine de tenue et de noblesse.

Je sus ainsi que nous venions de rentrer dans la cours du palais où j'allais sans nul doute être accueillis par une foule de nobles coincées. Le carrosse s'arrêta et la porte s'ouvrit. Un chevalier de la garde impériale me tendit la main pour m'aider à descendre. En bas de l'escabeau, le couple m'attendait la bouche plein d'un affreux et faux sourire. Je me demandais si j'étais la seule à voir l'hypocrisie de leur joie. Avec le recule, il est possible que leur sourire ne sonne pas si faux puisque que faisant partie de la royauté, ils étaient d'excellents comédiens.

L'empereur fut le premier à me prendre dans mes bras tout en conservant une posture digne. Bien que l'on ne m'ait pas préparé à cela et que rien dans mes cours d'étiquette me permettait de savoir comment réagir ; je rendis l'embrassade essayant de me rappeler mon rôle de sa fille. Enfin, d'une fille qui l'aurait aimé, parce que si j'étais bel et bien sa fille, j'avais toujours craint qu'il ne le découvre.

Puis l'impératrice, s'approcha pour jouer son rôle de gentille belle mère. Son embrassade me parut plus sincère, sans aucun doute, parce que j'allais sauver l'une de ses filles des bras d'un horrible démon. Je lui répondu avec plus de retenue. Après tous, je venais juste de faire sa connaissance. Enfin, d'après l'histoire que tous devaient connaître.

Une fois le moment d'émotion terminé, je fus menée vers le palais entre le couple impérial, à travers d'une longue haie d'honneur et sous les applaudissements. À ce moment, je commençais à me dissocier pour mieux supporter le stresse et l'angoisse. Pour détendre, j'imaginais les différentes manières détournées qu'aurait dame Orella pour me rappeler que je ne suis rien et que je ne méritais en rien l'honneur d'un tel accueil. Une fois dans le palais, nous fûmes guidés vers un balcon qui donnait sur une salle de banquet pleine des plus aux membres de l'aristocratie d'Imatall. Le silence se fit sans qu'on n'eut à le demander, les regard se portant sur cette nouvelle princesse sortant des mythes pour devenir une réalité.

Ce fut l'empereur qui rompit le silence :

— Peuple d'Imatall, j'ai l'immense joie de vous présenter ma première fille, la première princesse Elayne d'Imatall. J'espère que vous l'accueillerait tous avec la même joie que nous sa famille en n'oubliant jamais les épreuves qu'elle a dut traverser et celle qu'elle a choisit pour protéger son pays et notre pays. Traité là avec tout le respect et l'amour qui lui ai du et bien plus encore. Je remercie également la grâce des dieux de lui avoir accordé la guérison. Fêtons tout le son retour autour de ce banquet !

Après se signale, l'empereur m'invita à le rejoindre sur la table installée sur le balcon nous donnant une vue plongeante sur la salle du banquet. Ma place se trouvait à sa gauche tandis que l'impératrice et ses filles s'installaient à sa droite laissant ses fils s'installer à mes côtés. Un vrai repas de famille...

Quand la famille impériale fut installé, le reste des convives prirent place.

Je ne vous mentirais pas, je n'ai aucun réel souvenir de ce premier banquet. Tout reste flou, et certains ce mélange à d'autres banquets. Je suis cependant sûre que rien d'important ne se passa, rien qui ne mérite d'être relayé dans ses mémoires. Parlons plutôt du lendemain matin, lorsque je me réveillais dans mes nouveaux appartements. Tout comme le banquet ne valais pas la peine d'être d'écrit, mes appartements n'ont guère plus de valeur. Sachez juste qu'il faisait le double de ceux que je possédais au manoir et qu'ils étaient encore plus richement décorés.

Non, ce qui est intéressant à relater, c'est la manière dont c'est déroulé mon réveil. Habituellement, si je n'étais pas déjà levée, c'était Aliéna qui le faisait sans guère de ménagements. Ce ne fut pas ce qu'il se passa ce matin-là. C'est une voix forte qui me tira de mon sommeil agité :

– Diable, vous n'êtes pas encore levé ! Vous avez pris de mauvaises habitudes jeunes fille !

Je me redressai, étudiant la scène et finissant difficilement de me réveiller. Devant mon lit, se trouvait l'impératrice au côté de Dame Orella qui me fixaient sévèrement. Derrière, se trouvait ma servante personnelle, essoufflée et le regard désolée. Sur le moment, je ne voyais aucunement comment mettre en application l'étiquette que l'on m'avait enseigné. À croire que la famille impériale s'amusait à me faire sortir des règles.

Je ne mis cependant guère de temps à m'en remettre et sortis de mon lit avec adresse, faisant tout de suite la révérence que je devais faire à une impératrice en tant que princesse impériale. J'espérais qu'elle ne souhaitait pas celle d'une servante. Mais jusqu'à présent Dame Orella avait insisté pour qu'elle soit tout le temps dans son rôle.

Cela eut l'air de plaire à l'impératrice, je continua donc :

– Votre Altesse, mère, Dame, que les plumes des anges vous soit douce et qu'elle vous couvre contre le mal. Cet un honneur, votre majesté d'avoir votre présence dans mes humbles appartements. Pardonnez ma tenue.

La noble dame me regarda avec un sourire amusé. Elle savait tout comme moi, que c'était elle qui avait commis une faute en se rendant dans mes appartements sans se faire inviter ou annoncer. Elle savourait également que sa faute me soit reprochée, mais c'était ainsi dans l'empire, comme dans beaucoup d'autre endroit ou époque, la faute du supérieur revenait à son subordonné. L'impératrice, écourta cependant la punition, sa nouvelle fille ayant parfaitement su réagir :

– Détendez-vous, je ne vous en tiendrez pas rigueur. Je vois que part ailleurs, vos horribles origines ne sont plus perceptible. Vous pouvez être fière de vous. Votre travail sera récompensé si vous persévérez.

– C'est un honneur, votre majesté.

Bien que ces mots m'aient écorché la gorge, personne ne le perçu. J'avais amélioré mon jeu, l'impératrice avait parfaitement raison.

– J'espère que vous saurait vous montrer digne de mes compliments au repas. Vous aurez votre premier évènement social dans peu. J'ai cru comprendre que le mieux pour vous se serait de commencer par un salon. Soit.

Sans plus attendre, elle quitta mes appartements me laissant seule avec une Aliéna tout affolée. J'avais finalement réussi à me rapprocher d'elle durant les deux derniers moi. Je pense que cela faisait même un moment qu'elle avait arrêté de me comparer avec son ancienne maîtresse, mais elle ne me considérait pas pour autant comme une amie. Ce que je pouvais comprendre, jamais au cours de toutes mes vies, je n'ai pu observer d'amitié sincère entre un maître et un serviteur. Le problème étant que moi, je ne me considérais pas comme ça supérieur. J'avais cependant accepté que je n'aurais pas son amitié, mais elle était tout de même devenue ma confidente.

La voir aussi affolée ne me faisait pas plaisir, je choisis donc de la rassurer :

– Tu devrais te détendre, ni toi ni moi n'avons commis de faute. Viens plutôt m'aider s'il te plait. Tu as une idée de ce que je vais devoir porter ?

– Votre tenue d'aujourd'hui est déjà prête. Il me semble que c'est le styliste de Sa majesté l'impératrice qui vous l'a préparé. J'ai été également informée, qu'en-dehors des deux repas que vous prendrez avec votre famille, vous n'aviez rien de prévu.

Je soupirai, cela faisait bien longtemps que j'avais abandonné l'idée que lorsque l'on se trouve que tous les deux, elle me tutoie. Je n'étais pas sûre de comprendre pourquoi, si je n'avais pas d'obligation, je dois tout de même porter une robe choisie par un serviteur de ma charmante mère.

– Ils veulent sûrement que je m'habitue à mes nouveaux appartements. Je ne vais tout de même pas y rester indéfiniment. Je me demande où se trouve la bibliothèque.

– Vous n'allez quand même pas recommencer, protesta Aliéna tout en commençant à me préparer pour ma toilette. Vous êtes maintenant au palais impérial, vous ne pouviez pas vous rendre partout sans autorisation. Et puis, je pense que vous avez fait le tour du sujet. Il ne vous reste plus rien à apprendre des démons !

– Je vois que tu compatis toujours autant pour mon sort, ironisai-je. Si je doute avoir fait le tour du sujet, je suis d'accord avec toi, il faut que j'arrête.

La jeune fille, me lança un regard qui signifiait qu'elle sentait le piège. Elle commençait à bien me connaître, j'aimais cela.

– Tu pourrais me faire confiance, je ne vais plus faire des recherches sur les démons, juste sur la magie.

Elle leva les yeux au ciel, s'occupant toujours de me peignait les cheveux. Je regrettais toujours le temps où j'étais une simple lavandière comme les autres et où il ne me fallait guère longtemps pour me préparer.

– Pourquoi vous intéressez vous à la magie ? Demanda-t-elle de bonne grâce.

– J'ai cru comprendre que le monde des démons avait bien plus de magie, que le monde terrestre. Ne vaut-il pas mieux pour moi de bien me préparer au monde infernal ?

Aliéna ne rebondit pas sur mon explication, elle devenait de plus en plus gênée à l'évocation de mon avenir. Si au début, elle s'en servait pour essayer de me blesser. Maintenant, qu'elle avait fini par s'attacher à moi, c'était elle qui en était blessé. Et ce n'était nullement mon but. À plusieurs reprises, je lui avais expliqué que cet avenir ne me rebuter juste à cause du mariage. Visiter un autre monde, cela réveillait une curiosité bien trop longtemps endormis.

Quand l'heure du déjeuner arriva, un messager nous invita à nous diriger vers la salle à manger privée. Il faut savoir, qu'en tant que personne publique, l'empereur comme l'impératrice manger principalement en public. Que ce soit dans des banquets en compagnie des nobles influant comme avec les ministres et le conseil, pour le divertissement, comme pour la politique et la diplomatie. Ces repas se faisaient rarement en famille, l'impératrice épaulant son mari bien souvent à distance. Toutefois, pour conserver l'image d'une famille soudée, une fois par semaine, l'empereur, l'impératrice et leurs enfants mangeaient ensemble.

Ce jour n'était cependant pas celui dédié aux retrouvailles familiales, mais il fallait bien leurrer le reste du monde, et faire croire que le reste de ma nouvelle famille m'accueillait les bras ouverts. Les époux impériaux avaient déjà bien joué leur rôle, mais maintenant, nous devions tromper ma nouvelle fratrie. Seul le dauphin était au courant de la mascarade et pour des questions de sécurité d'État, les autres enfants impériaux ne devaient pas être mis dans la confidence. Seul l'empereur avait déjà rencontré la vraie première princesse, cela devrait faciliter les affaires.

Quand l'on annonça mon arrivée et que la porte s'ouvrit, je pus remarquer qu'il ne manquait plus que l'empereur et sa femme. Ce qui signifiait que je n'avais pas commis de nouvelles fautes, les convives devant arriver avant le membre le plus haut placer de la table. Je fis la meilleure de mes révérences avant de rejoindre la place qui m'était attribuée à gauche de l'impératrice, en face du dauphin.

Le trajet était suffisamment long pour me permettre d'étudier sans trop d'insistance tout ce beau mon monde. Déjà attablé, se trouvaient trois garçons et deux filles. Je déduis que le plus jeune des princes n'avait pas l'âge pour ce genre d'évènement. Le dauphin devait avoir trois ans de moins que moi, il ne laissait paraître aucune émotion, son regard s'étant posé sur moi qu'un instant. Tout dans sa posture démontrait une certaine arrogance, mais surtout une grande éducation. Le reste de sa fratrie savait moins bien se tenir. Le troisième jeune homme de la tablée ne cachait en rien sa curiosité, son regard me détaillant. Je ne lui en tins pas rigueur, n'oubliant pas qu'il n'était qu'un enfant d'une dizaine d'années, élevé avec l'optique qu'il était intouchable. Le cadet, un jeune homme d'une quinzaine d'années, me démontrait une certaine forme de haine qui ressemblait fort à ce qui ressortait de sa jumelle, la plus jeune des deux filles.

Ce fut ce que je vis chez la dernière personne qui m'étonna le plus. Ma voisine de gauche, l'ainée de cette fratrie, me regardait avec une certaine pitié. Pas une pitié méprisante que les aristocrates se plaisaient à afficher à la vue d'un roturier. Son regard était rempli d'une pitié sincère et d'une forme de reconnaissance. Je compris sans mal que si elle ignorait mes origines, elle savait que j'étais celle qui prendrait sa place pour le mariage.

Alors que sa sœur semblait ressentir de la jalousie, sûrement, car je correspondais bien plus au critère de beauté et de noblesse que tous les autres enfants autour de cette table ; elle ne voyait en moi qu'un sacrifice qui allait lui permettre de rester dans ce monde. Et elle avait assez de compassion pour ressentir une forme de tristesse. Je ne vous cache pas que cela m'a réellement surprise.

Aucune discussion ne démarra après mon arrivée, laissant un malaise autour de la table. Par chance, nos chers parents ne tardèrent pas à arriver à leur tour. Nous nous levons tous pour les accueillir. L'empereur fut le premier à s'asseoir, faisant signe à tous de l'imiter comme le voulait le protocole. Je commençais déjà à trouver que leur vie de famille était bien triste. Tout était toujours une question d'étiquette et de protocole. Je n'étais même pas sûr qu'un amour familial puisse naître dans de telles conditions. Quand nous fûmes tous bien installait, une armée de serviteur amena une quantité tel de plat, que je n'envisageais même pas que l'on puisse en servir autant à seulement huit personnes. Surtout quand la guerre affamait depuis des générations le peuple. Chaque plat, tout aussi grandiose les uns que les autres, était présenté par un héraut d'une voix tout aussi impersonnelle que forte.

— Avant de commencer le repas, je souhaite réitérer mes remerciements aux anges pour avoir permis le rétablissement de notre fille et de votre grande sœur. Bien que vous n'ayez jamais pu faire sa connaissance à cause de sa faiblesse, j'espère que vous vous entendrez bien.

Ce vœu pieu ne me semblait même pas sincère. Pour la première fois, je remarquais de la douleur dans les paroles de cet homme. Je ne comprendrai que bien plus tard qu'en réalité, il pleurait sincèrement la perte de sa fille aînée. Et je ne peux alors imaginer alors la douleur d'un père qui remercie pour le rétablissement d'une enfant déjà morte. Je comprends alors pourquoi dans le regard de cet homme qu'alors, je méprisais, pensant qu'il ne faisait que paraissant d'être un homme aimant, je voyais de la souffrance quand il me regardait.

Mais à cette époque, je ne percevais que de l'hypocrisie autour de cette table. Je ne voyais que la jalousie du cadet envers son ainé, la jalousie de la cadette envers moi. Je fus tout de même surprise de voir que les conversations fleurissaient. La mère prenant des nouvelles de tous ses enfants, moi compris, le père semblant intéressait, mais plus concentré de parler politique avec son ainé. Je ne m'étais pas vraiment attendu à une atmosphère aussi détendue.

Et pourtant, je trouvais plaisir à parler avec le plus jeune, bien qu'ignorant de sa chance, il me paraissait bien plus pur que le reste de sa fratrie. Il avait également la même passion que moi pour l'histoire. Bien que son jeune âge ne lui permette pas de réellement comprendre tous. Je pus par ailleurs échanger poliment avec ma voisine. Celui qui siégeait en face de moi, se retint de m'adresser la parole, mais m'étudia tout le repas.

Finalement, nous quittons la table en milieux de l'après-midi. Et j'étais convaincu de ne pas pouvoir manger d'ici bien une journée. Au lieu de rentrer vers ma chambre, je me dirigeais vers une destination tout autre avec Aliéna sur mes talons. Elle avait du mal à cacher son exaspération, ce qui secrètement m'amusait, mais par respect, je ne lui montrais pas.

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