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L’homme de Florès – Homo floresiensis – a été découvert en 2003 dans les sédiments de la grotte de Liang Bua, au cœur de l'île indonésienne de Florès. Cet homme fossile, contemporain de l’homme moderne – Homo sapiens – vivait il y a environ 50 000 ans. Sa petite taille, et surtout le volume très modeste de sa boîte crânienne, ont surpris les paléoanthropologues. Il était néanmoins capable de façonner des outils lithiques et maîtrisait l’usage du feu. La taille réduite de celui que les journalistes ont surnommé « le hobbit » s’explique par le phénomène du nanisme insulaire, bien connu en biologie.

La découverte de l’homme de Florès a été rapprochée de la légende des Ebu Gogos (« vieille femme gloutonne » dans la langue locale des habitants de l'île), une créature légendaire censée avoir vécu sur Florès avant d’être exterminée par les hommes. D’autres observateurs ont pensé à l’Orang Pendek, un autre homme sauvage mythique signalé sur l’île voisine de Sumatra. Des rapports rédigés par les colons néerlandais à la fin du XIXe et au début du XXe siècle relatent des rencontres avec ces créatures venues chaparder des produits agricoles dans leurs plantations.

Tout cela, Stella et Dewi le savaient parfaitement. Si Numéro 1 se révélait être un représentant de l’homme de Florès, cela signifierait qu’il existe aujourd’hui deux espèces humaines vivantes sur Terre.

— Une chose que l’on croyait révolue depuis 30 000 ans, depuis la disparition de l’homme de Néandertal…, se dit Stella.

Ses pensées fusaient à une vitesse surnaturelle. Tout en repassant le film de cette découverte dans sa tête, elle profita du silence de Dewi pour poursuivre :

— Les données morphologiques collent parfaitement. Je suis certaine que Numéro 1 est un survivant de l’homme de Florès. Bien entendu, Florès, ce n’est pas la porte à côté… mais cette espèce a très bien pu s’installer ailleurs, un peu partout dans les îles de la Sonde, au fil du temps.

Dewi toussota. Il sortait de sa stupeur.

— Stella, ce que tu me dis est… extraordinaire. Je ne sais pas pourquoi nous n’y avions pas pensé plus tôt, mais l’hypothèse de l’homme de Florès est tout aussi vraisemblable que celle d’un mystérieux homme des bois comme l’Orang Pendek !

Stella compléta avec enthousiasme :

— Oui, mais l’une n’exclut pas l’autre ! Peut-être que la légende de l’Orang Pendek ne fait que refléter la persistance de groupes d’Homo floresiensis à Sumatra. C’est fascinant ! Dire que nous étions obnubilés par l’idée de découvrir une nouvelle espèce, alors que nous avons sans doute affaire à une espèce supposément éteinte… Je n’en reviens pas !

Dewi l’interrompit, essayant de tempérer l’enthousiasme débordant de sa collègue. Il était lui aussi très excité, mais gardait les pieds sur terre.

— Attendons tout de même les résultats d’analyses génétiques pour nous prononcer.

Stella répondit sur un ton de regret :

— Malheureusement, personne n’a jamais réussi à extraire de l’ADN des ossements d’Hommes de Florès. Les conditions de fossilisation en milieu tropical humide ne permettent pas une bonne conservation de l’ADN. Nous n’aurons donc aucun point de comparaison pour confirmer notre diagnostic avec des données génétiques.

Dewi grogna :

— Je sais. Mais les paléoanthropologues placent Homo floresiensis dans une branche parallèle à celle de l’homme moderne, dans laquelle on retrouve nos cousins Néandertaliens et Dénisoviens. Ces trois espèces sont censées partager un ancêtre commun : Homo erectus. Et qui descend directement d’Homo erectus ? L’homme de Florès !

— Tu veux dire qu’en comparant les génomes, on pourrait montrer que Numéro 1 est un cousin éloigné, appartenant à la même famille mais plus proche de l’ancêtre commun que nous ne le sommes ? Même si on obtient ce résultat, ça ne suffira pas à prouver que Numéro 1 est réellement un homme de Florès…

— C’est juste, Stella, tu as raison. La preuve, c’est la forme et les proportions des différents os du squelette. Et là, je crois que tu as des résultats très probants.

Dewi faisait confiance à sa collègue. Son sérieux et son application ne faisaient aucun doute.

Il reprit, comme emporté par un élan déclenché par la découverte :

— Il y aura forcément des grincheux pour contester nos données et remettre en question nos conclusions. Et seul l’examen complet du squelette de Numéro 1 pourra les faire taire.

Stella poussa un petit cri.

— Que veux-tu dire par « analyse du squelette » de Numéro 1 ? On a des radios, oui, mais pas question de le tuer pour récupérer ses os, juste pour satisfaire une bande de vieux paléoanthropologues probablement jaloux de notre découverte !

— Non, bien sûr, répondit Dewi. Pas question.

Mais… j’ai une autre idée.

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