chapitre 5

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Solal rêvait. Il rêvait d'Ariela. Dans son rêve Ariela était immense, grande comme le grand chêne. Sa tête disparaissait dans les nuées. Elle riait et son rire faisait trembler l'air comme un orage d'été. Puis elle se penchait sur lui, le prenait dans sa belle main blanche, l'élevait jusqu'au ciel si bleu. Ils riaient ensemble, soufflaient sur les nuages rose et blanc.

Elle le tenait fermement, il se sentait en sécurité. Il ne comprit pas pourquoi, soudain, elle le lâcha. Il vit le beau visage de son amie devenir terne, son sourire avait disparu. Sa chute fut interminable, il hurlait à en perdre sa voix.

Solal ouvrit les yeux. Que faisait-il là ? Où était Ariela ? Il se frotta les yeux pour chasser les derniers relents du rêve affreux dans lequel il était plongé quelques instants plus tôt. Sa gorge lui faisait mal. La paillasse sur laquelle il était allongé était mince et dégageait une odeur entêtante de pourriture.

Un rat assis devant lui le regardait en lissant ses moustaches.

Il se trouvait dans une sorte de pièce qui avait pu servir de garde-manger, ou de cave à une autre époque. Des toiles de plusieurs générations d'araignées pendaient du plafond.

Le soupirail à barreau était bien trop haut pour qu'il puisse voir à l'extérieur. Il s'avança vers la lourde porte en bois. Le rat s'enfuit.

Fermée.

Il était prisonnier.

Il ne comprenait rien de ce qu'il lui arrivait. Comment pouvait-il se retrouver enfermé ici alors qu'il s'était endormi auprès d'Ariela dans le petit cercle sur le chemin hier soir ? Il eut froid.

Un bruit de clé tournant dans la serrure de la porte le fit sursauter. Dans un grincement affreux, elle s'ouvrit.

– Alors mon chaton, on a bien dormi ? La voix rouillée de Gregor lui fit mal aux oreilles.

- Il faut manger à présent, mon lapin. Faut être en forme pour la suite oh oui !

Il déposa à même le sol un plateau avec une assiette remplie d'un brouet indéfinissable qui embaumait l'ail, une timbale en métal et un cruchon d'eau croupis.

– Tu vas voir comme elle est délicieuse l'eau de la mare mon petit chat hin hin hin !

Solal s'était redressé. – Où est Ariela ? Souffla-t-il.

– Tu le sauras bien assez tôt mon lapinou oh oui, bien assez tôt ! Il referma la porte en ricanant.

De nouveau seul, Solal réfléchis. Du haut de ses huit ans, il possédait une force intérieure qui n'avait pas encore pu s'exprimer pleinement. Depuis sa naissance, son père le couvait et le protégeait des difficultés et des problèmes, entourant son existence d'une ouate bienveillante mais illusoire.

Ariela tenait aussi ce rôle protecteur d'arrondisseuse d'angle, de facilitatrice de vie. Jusqu'à présent, il s'était laissé porter, laissant en sommeil sa combativité et son courage.

Mais là, dans ce cachot, il était seul au monde.

Le temps était venu de laisser jaillir le flot de ces capacités. De ne compter que sur lui. Il en fut un peu étourdi. Il prit une grande respiration et son esprit s'éclaircit.

Où est donc passé ce rat ? S'il a pu sortir, alors moi aussi !

Il regarda au bas des murs, mais ne vis rien. Il souleva sa paillasse et aperçu l'entrée ou le rat était passé. Juste en dessous du soupirail, vers l'extérieur et le soleil. C'était bien étroit tout de même.

Le sol de la cellule était constitué de terre sableuse, qui une fois la première couche compacte enlevée, devenait meuble et tendre.

À l'aide de la timbale, il élargissait le trou du rongeur s'en servant comme d'un outil excavateur.

Bientôt, l'ouverture fut assez large pour que son petit corps pût s'y glisser.

Le trou passait sous le mur. Solal était en sueur et ses mains lui faisaient mal à force de creuser. Il se motivait en se disant qu'il verrait bientôt la lueur du jour et de sa liberté. Qu'une fois dehors, il irait prévenir son père et Gidéon et qu'il ferait payer Gregor pour ses actions. Et surtout, il retrouverait Ariela.

Sans prévenir, le sol se déroba sous lui. Il fut emporté dans un éboulement qui l'entraîna dans une chute sans fin dans le noir.

Ses bras battirent l'air en vain.

De la vase molle et puante amortit sa chute. Il se redressa. Il était tombé dans un tunnel humide et sombre. Au-dessus de lui, à plusieurs mètres, il vit le trou de lumière par lequel il avait chuté. Impossible de remonter.

Il ne pouvait qu'avancer. Ses pieds s'enfonçaient dans la boue visqueuse qui collait à ses chaussures. Il avançait dans le noir se tenant à la paroi, sursautant quand ses doigts rencontraient des choses molles et gluantes.

Il se traîna un long moment, glissant et se relevant maintes fois. Son courage s'effritait. Dans le noir, l'imagination amplifiait le moindre bruit.

Il se sentait suivi et entouré par des créatures horribles, il sentait leurs souffles, leurs haleines puantes. Il pouvait imaginer leurs crocs acérés.

Lorsque son espoir était sur le point de s'éteindre, emporté par sa panique, il aperçut au loin une lueur...

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