Chapitre 45 : Avec la lune pour témoin

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Lentement, comme pour ne pas l’effrayer, Erwann pose sa main sur le visage de Gwendoline, près de sa bouche, exactement comme il l’a fait précédemment pour lui enlever la trace de chocolat. Son pouce caresse le coin de ses lèvres pulpeuses, le début de sa joue puis sa main saisit et soulève son menton, délicatement. Plus l’espace entre leurs deux corps diminue, plus il sent son ventre se contracter.

La jeune femme tremble sans avoir froid, parcourue de frissons incontrôlables. Elle le regarde dans les yeux, soutenant ses pupilles dilatées, dans lesquelles elle peut lire tout le désir qu’il a pour elle.

Dans le clair de lune, leurs peaux paraissent diaphanes, éblouies par cette lumière naturelle.

Le photographe s’approche de son visage et se lance enfin, posant sa bouche sur la sienne avec délicatesse.

Leurs yeux se ferment, s’abandonnant à ce premier baiser, découvrant avec ravissement la saveur de leur bouche encore sucrée, la chaleur de leur haleine, la douceur de leur langue timide.

Le cœur d’Erwann tambourine dans sa poitrine lorsqu’il pose une main sur sa hanche.

Les jambes de la jeune femme semblent ne plus vouloir la porter. Succombant au plaisir intense de cet échange intime, elle se laisse guidée par Erwann, qui ne semble plus vouloir s’arrêter. Sa bouche est charnue, ferme et aussi délicieuse qu’elle l’avait imaginée.

Les deux mains masculines aux bijoux argentés viennent à présent encadrer son visage pour mieux se perdre au cœur de ses lèvres avides.

La modèle remarque que son piercing au labret vient lui chatouiller le menton. Elle s’était déjà demandée si l’objet allait la gêner et constate qu’il n’en est rien.

De son côté, Erwann découvre avec excitation le contact froid et rigide du piercing qu’elle porte sur la langue. Il l’avait vu lorsqu’elle riait aux éclats mais n’avait pu qu’imaginer la sensation étrange que cela devait procurer d’embrasser quelqu’un portant ce bijou secret. Il n’avait jamais eu l’occasion d’embrasser une femme percée à cet endroit, auparavant. Cette nouveauté l’excite et, à présent, il se délecte de pouvoir jouer avec, laissant libre cours à sa créativité…

Un premier baiser passionné qui tient toutes ses promesses pour deux jeunes gens n’ayant pas été embrassés depuis des années.

Dans le silence de la nuit, la sonnerie d’un téléphone sur vibreur retentit…

C’est celui d’Erwann. A cette heure tardive, il s’oblige à répondre, pressentant que cet appel est important. Il jette un œil, puis après s’être excusé auprès de Gwendoline qui lui fait signe que tout est ok, décroche et prend l’appel. A l’autre bout, une voix féminine et nasillarde jaillit du portable. La conversation est courte mais Gwendoline en a compris la substance et au-delà de son inquiétude pour les informations qu’il reçoit, elle sent poindre la frustration de devoir déjà le quitter.

La soirée a été si merveilleuse…

Lorsqu’il raccroche, elle sait déjà qu’il y a eu un problème avec sa fille et qu’il va lui annoncer qu’il prend la route pour la Bretagne aujourd’hui.

— Je dois y aller, annonce-t-il calmement. J’en suis vraiment, vraiment, vraiment désolé.

— Tu sais bien que je comprends. Je ferais pareil si c’était ma fille.

— Non, en fait c’est Mama, ma mère, explique-t-il pour dissoudre son erreur.

— Ah mince. Est-ce grave ? demande-t-elle, sincèrement inquiète.

— Elle a fait un malaise pendant qu’elle se promenait avec Manon, et dans la panique, ma fille a appelé sa mère au lieu des secours. Mon ex-femme, Alice, a pris le relais. Elle est encore à l’hôpital à l’heure qu’il est, c’est pour cela qu’elle m’a appelé. Elle ramène Manon à la maison et voulait me prévenir de la situation, qui n’a pas l’air trop inquiétante.

— Tu les rejoins là-bas ?

— Oui, même si je n'arriverai à Brest que dans la nuit. C’est là où ma mère a été transportée, précise-t-il en se pinçant l’arête du nez. Au moins, je serai avec elle demain matin, à la première heure.

— Bien sûr. Fais attention sur la route. Envoie-moi un petit sms s’il te plaît, quand tu pourras. Juste pour me rassurer. Même si je dors, je le verrai à mon réveil.

— Entendu. Je ferai ça à mon arrivée.

Il hésite à poursuivre, prend quelques secondes de réflexion, perdu dans ses pensées. Soupirant longuement, il reprend, la mine sombre :

— Je ne voyais pas vraiment notre premier baiser ainsi. Je voulais te faire rêver, pas t’angoisser.

— Ce sont des choses qui arrivent et qui ne peuvent pas se prévoir, tu le sais aussi bien que moi. Et… tout a été néanmoins parfait, souligne-t-elle avec un sourire.

Il se penche vers elle et lui offre une nouvelle démonstration de son attirance. Toute la tendresse qu’il déploie pour la toucher, l’embrasser et prendre soin d’elle, transparaît dans chacun de ses gestes. Désormais s’y ajoutent aussi la passion et le désir qu’elle perçoit lorsque leurs lèvres sont scellées.

Un couple passe en chuchotant à côté d’eux. Pour autant, les tourtereaux ne se laissent pas distraire et continuent de profiter de cet instant délicieux qui semble déjà se faner.

— Il y aura d’autres soirées comme celles-ci, promet-il de sa voix suave et grave. Je reviens à Nantes dans quinze jours normalement, sauf si la santé de ma mère m’oblige à rester là-bas. Mais Alice avait l’air rassurant et optimiste. Et ce n’est pas franchement sa spécialité, ajoute-t-il goguenard.

Ils redescendent dans la salle de réception en prenant par l’escalier. Ce dernier semble glissant. Erwann se porte à son secours en lui tenant la main jusqu’à ce qu’elle soit bien arrivée en bas. Gwendoline remarque qu’il ne se force pas pour veiller sur elle, tant ses réactions sont naturelles. Il se montre prévenant à tout instant, comme une seconde nature. A chaque fois qu’elle pourrait être incommodée, il a le réflexe de devancer ses attentes non formulées et de parer à toutes les éventualités.

Même si son humeur s’est quelque peu assombrie par l’annonce de l’hospitalisation de sa mère, Erwann essaie de faire bonne figure et de rester romantique jusqu’à ce que la soirée touche à sa fin. Il profite encore de la présence de la jeune femme durant le trajet en voiture, portant à plusieurs reprises quelques œillades dans sa direction.

Gwendoline le captive et l’intrigue tout à la fois, et les révélations qu’elle lui a faites durant cette magnifique soirée, ne font que confirmer l’intérêt qu’il lui portait déjà. Il désire vraiment apprendre à la connaître davantage et découvrir qui se cache derrière ses grands yeux verts, y compris les secrets les plus intimes qu’elle semble encore garder. Il sait bien qu’à ce stade de leur relation, elle ne lui a révélé que l’essentiel, ce qu’elle était prête à lui apprendre d’elle. En la regardant attentivement, le photographe perçoit tout le mystère l’entourant encore, comme une aura nébuleuse dans laquelle elle se serait drapée avant de le rejoindre, une seconde peau dans laquelle elle se serait glissée pour se vêtir.

Erwann n’a nullement l’intention de la brusquer, ou de lui tirer les vers du nez, comme l’auraient fait certains prétendants apeurés par sa situation inhabituelle. Au contraire, cela attise sa curiosité. Il a soif de la comprendre, d’appréhender la vérité de son cœur, peut-être même davantage que celle de son corps. Il est plus facile de se lier à l’enveloppe charnelle d’une personne que de se connecter à son âme. C’est ce qu’il désire désormais, c’est ce qui lui donne envie de la revoir, alors qu’il ne l’a même pas encore quittée…

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