Chapitre 5 – Un monde de tarés
Bonjour tout le monde !
Motivés pour une nouvelle séance de mon insupportable bavardage ? Oui ? Non ? Ça tombe bien, je ne vous demande pas votre avis.
Alors… Cynthia, éventrement, sang-mêlé, tout ça, c’est clair pour vous ? Eh ben pour moi, absolument pas.
Imaginez : on vous balance, du jour au lendemain, que toutes les mythologies anciennes sont vraies, que vous êtes le fils d’un dieu gréco-latin, et que vous risquez de vous faire boulotter par un monstre à chaque coin de rue.
Bienvenue dans ma vie.
De quoi devenir fou. Surtout quand tout ça vous est balancé par une fille aussi belle qu’effrayante, flanquée d’un groupe de guerrières armées jusqu’aux dents, façon milice divine.
Petit aperçu de notre discussion :
- Cynthia : Tu connais la mythologie grecque ?
- Moi : Euh… Zeus, les éclairs… Pégase ?
- Cynthia : Ouaip. Plus ou moins. Eh bah c’est vrai.
Voilà. Pas plus d’intro, pas de moment pour respirer. Cynthia, c’est pas le genre à s’embarrasser de diplomatie. L’empathie ? Elle l’a laissée au vestiaire.
Moi, j’étais encore assis par terre. Les joues pleines de sillons brillants, les yeux gonflés, et je reniflais pitoyablement.
- Je dois rêver. C’est une blague. Un prank. C’est pas drôle.
Elle m’a attrapé par le col.
- Crois-moi, c’est réel.
J’ai dégluti avec difficulté.
- Supposons que ce que tu dis soit vrai… Quel rapport avec moi ?
Elle a ri. Un rire amer. Un truc qui vous glace les os.
- Tu fais partie de ce monde, petit. Que tu le veuilles ou non.
- Euh… non ? J’peux pas juste… rentrer chez moi ? J’dirai rien, promis.
- Ça marche pas comme ça, gamin.
T’as survécu par miracle, mais avec un peu de chance (ou pas), un monstre t’aura dévoré d’ici trois semaines. Et je suis gentille.
J’ai failli m’étrangler. Gentille ??? Cette fille était la créature la plus terrifiante que j’avais jamais croisée.
Enfin… Jusqu’à ce que je voie une Gorgone ricaner comme une possédée. Là, j’ai réévalué ma définition de la peur.
Quelque chose a fait clic dans ma tête.
- Tu m’as appelé comment, tout à l’heure ? Quelque chose-mêlé ? C’est une insulte mythologique ?
Ouais, je sais. Je suis con. Pas la peine de me le rappeler. On n’a pas tous grandi avec Percy Jackson, okay ? Et j’avais quatorze ans, vu ?
Elle a levé les yeux au ciel. L’archétype du soupir désespéré. Puis elle m’a fixé, comme si elle contemplait un cafard en pleine crise existentielle.
- Sang-mêlé. Rejeton d’un dieu et d’un humain.
- Un dieu ? Genre… un vrai ?
- Oui, idiot. Un dieu ou une déesse.
- Donc… je suis quoi ? Le prochain Jésus ?
Là, elle a éclaté de rire. Un vrai. Un rire sincère. Le premier que je voyais sur ce visage de glace.
- Non. Mais ça veut dire que t’as des aptitudes spéciales. Et que tu attires les monstres. Comme un steak saignant attire les loups.
- Je suis en danger ?!
J’ai failli pisser dans mon calçon. C’est là que j’ai réalisé, d’ailleurs, que j’étais… en calçon. Vous pouvez rire. Allez-y.
En matière de honte, je suis champion olympique. Camille dit que si le ridicule était un sport, je serais médaillé d’or.
Je t’expliquerai plus tard, a dit Cynthia, en se mordant la lèvre.
À ce moment-là, Léa est revenue avec un brancard. Marthe est arrivée quelques secondes après, suivie de Sam, la guérisseuse.
Petite, blonde, formes généreuses, des taches de rousseur plein le visage… Elle ressemblait plus à une boulangère sympa qu’à un membre d’une armée mythologique.
- Mettez-le sur le brancard et amenez-le à l’infirmerie, a-t-elle ordonné avec douceur.
Elle m’a lancé un sourire rayonnant.
- On va te remettre sur pied, bonhomme.
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