Gunder

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Les mains sur ses reins endoloris, l’homme observait le lever du jour depuis le pas de son échoppe. Au loin, il distinguait les fumées de l’ennemi. Il ne les comptait plus. Un temps, il avait espéré voir leur nombre diminuer puis disparaître mais au fil des jours, cet espoir s’était tû. La ville était assiégée depuis plusieurs semaines maintenant. Les premiers jours avaient vu la population inquiète mais confiante. L’armée de la cité était composée de guerriers aguerris et nul ne doutait de leur bravoure mais les sorties étaient impossibles et vouées à l’échec face aux troupes ennemies.

Une bataille avait bien eu lieu sur la plaine qui jouxtait l’entrée ouest mais leurs forces avaient été contenues puis anéanties. Sans la retraite, tous seraient morts ce jour-là. Depuis, l’ennemi avait installé ses campements tout autour de la ville et pas même une souris ne pouvait plus entrer ou sortir sans leur consentement.

Un rationnement des ressources avait été ordonné. Les assiégés pouvaient tenir des mois encore mais cela ne serait pas sans affamer les plus démunis. En cette période trouble, Gunder, lui, prospérait. Oh certes, il n’aimait pas la guerre et détestait bien certains côtés de la situation, mais en tant que boulanger, il tenait ses concitoyens par l’estomac et cela n’avait pas de prix. Ou peut-être que si ! La farine qu’il gardait précieusement dans son échoppe ne serait pas éternelle et il comptait bien rentabiliser chaque gramme. Ainsi, il produisait en moins grande quantité et séparait sa marchandise en deux grandes catégories : celle destinée aux riches et celle consacrée aux démunis. Les seconds obtenaient une boule pâteuse, mélange de farine noire et d'une quantité infime de farine blanche tandis que les premiers se voyaient octroyer une portion correcte, au goût et à la texture préservés.

Pour cela peut-être, ces pains finissaient sur la table des nobles du château. Les privations n'étaient pas les mêmes selon le statut social. Quoi qu’il en soit, son esprit était troublé. La veille au soir, de vieux amis s’étaient attablés à ses côtés et avaient énuméré de nombreux griefs contre leurs dirigeants. Il avait acquiescé à certains, juré pour d’autres et vociféré de plus belle, encouragé qu’il était par la bouteille dégotée au marché noir par ses compères. La fin de la soirée était plus opaque mais il se rappelait vaguement avoir ourdi un meurtre ou deux avec les autres. Alors pourquoi afficha-t-il cet air étonné en découvrant, à son retour auprès du four, une petite fiole de poison sur son plan de travail ?

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