Lettre de suicide

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Mon amour,

Cette période n'est pas facile, je sais combien tu t’inquiètes, mais je me dois de t’écrire cette lettre, je te dois d’être la plus sincère possible. Tu auras été mon pilier, pendant deux magnifiques années de relation. Tu auras été ma raison de vivre, ma joie la plus immense. Je te dois d’être honnête.

Je t’ai parlé, dimanche dernier, d’une voix qui me hante depuis trois mois. Cette voix m’emprisonne dans un état d’angoisse infernale, elle veut me pousser à bout... Et y arrive. Cette voix qui est la mienne m’ordonne sans cesse des atrocités, me menace de cancer et de tout un tas de maladies graves, elle me menace de te voir me quitter. Cette voix n’est pas moi, elle se fait passer pour moi ! Elle utilise ma propre voix pour me berner. Elle me fait penser à Benoît, cette entitée qui utilisait aussi ma voix. C'était il y a une dizaine d'années, déjà, il se faisait passé pour mon ange le plus protecteur, il disait m'aimer d'un amour sincère. Malgré cela, il en est venu à m'ordonner de me suicider. Il voulait que je me pende dans la forêt à côté de mon ancien logement, où lui-même s'est donné la mort par pendaison. Il voulait que je le rejoigne, là-haut. J'ai fini par céder, par prendre ma corde comme il me le demandait, j'ai fini par aller dans la forêt. Je le cherchais, je l'appelais, je criais son prénom, seule au milieu des arbres, puis j'ai fait demi-tour. Une force m'a poussé à me ressaisir, j'ai ensuite été shootée à la camisole chimique et Benoît à disparu.

Hier, je lui ai demandé, à cette voix, ce qu’elle attend de moi, je lui ai demandé pourquoi elle est là, pourquoi elle s'acharne, elle m’a répondu le plus sincèrement possible qu’elle veut me voir mourir ! Si tu n’étais pas là, mon amour, crois moi que je lui aurais obéi il y a bien longtemps ! Cette après-midi je suis seule dans l’appartement, tu es parti en réunion depuis des heures pour ton travail. Le temps s’est arrêté et la voix a pris le dessus. Elle m’ordonne d’avaler mes médicaments du mois, tous mes médicaments. Je n’arrive plus à garder le contrôle, elle est insidieuse, prête à tout pour que je la rejoigne là-haut. Elle ressemble tellement à Benoît. Oui, je pense que cette voix est celle d’une entité, d’un être défunt qui se serait suicidé aussi. Je pense qu'elle veut que je me suicide comme elle la fait. Elle me dit que je manque de courage, que je suis lâche. Mon amour, j’ai tellement peur ! J’ai peur de t'abandonner, de franchir le cap et pourtant, je sais au plus profond de moi que c’est maintenant... Et que j’en suis capable. Cette voix qui n’a pas de prénom tourne en boucle. Elle ne veut pas que je t’écrive, elle est possessive et insultante. Elle m’ordonne de fermer mon logiciel d’écriture et de passer enfin à l’acte ! J’ai de plus en plus de peine à lui résister, cette voix s’enfonce dans mon crâne ! Je n’en peux plus de l’entendre, les médicaments ne me font plus effet. Si j’arrivais à prendre de la distance avec elle, je pourrais prendre mon téléphone et t’appeler ou appeler les pompiers directement, mais cela n’en finirait pas. Elle serait toujours là, malgré une hospitalisation forcée, malgré la camisole chimique, elle m’inviterait toujours à la mort. Et lâchement, j’aurais fini par céder tôt ou tard. Je suis persuadée que le plus tôt est le mieux.

Mon amour, c’est le moment pour moi de te quitter. D’avaler mes neuroleptiques et mes anxiolytiques. Ne m’en veut pas s’il te plaît, j’ai tout fait pour retarder ce moment au plus tard possible. Mon chéri, tu resteras à jamais gravé dans mon cœur. Tu auras été mon ange le plus merveilleux ! Je t’aime comme jamais je n’ai aimé.

Ta chérie qui, à l'heure où tu liras ces quelques lignes, t'aime depuis le ciel.

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