La sortie

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Au diable les attestations de déplacements. Odieux flicage des libertés. Vive l'audace des déesses !

  • Aurélie, on sort ensemble ce soir. Il faut que je te fasse découvrir mon endroit préféré. On peut fumer, il y a un peu d'alcool et il faut que je te présente mon mec. Mais il y a un dress code à respecter. J'ai trouvé des fringues pour toi.

Natacha a déguisé Aurélie en mec. Comme elle a déjà les cheveux courts, ça lui va très bien. Pantalon, chemise et cravate.

  • Tu vas voir, mon mec, c'est tout le contraire.

Soirée clandestine dans le maquis des résistants de la fête, nom de code « bas les masques ». De toute façon, on en trouve nulle part, si c'est le cas, c'est pratiquement un crime d'en porter car ça prive un soignant essentiel d'en avoir un. Le monde est ainsi clivé entre les soignés et les soignants. Et comme on en porte depuis toujours en Asie moderne civilisée où les malades ont le devoir de ne pas propager leur mal, dans le monde libre occidental on a décidé que ce sera aux bien-portants de les porter, ce sera même obligatoire. Du coup, tout le monde a réussi à en trouver ou à en fabriquer mais personne ne les porte ce soir. Natacha désigne une jolie brune aux yeux clairs et aux cheveux longs, lisses et d'un noir profond, elle est accoudée au comptoir en train de siroter un cocktail assorti à sa robe bleu gris.

  • C'est lui ! T'as vu comme il est beau !

Natacha exulte de présenter sa copine en garçon à son copain en fille. Un smartphone relié à une énorme enceinte diffuse une playlist « Le Mouv' » de Radio France. Fred a une voix androgyne. Elle est calme, posée et douce. Natacha est tout contre elle à attendre le bon moment pour l'embrasser pendant qu'il fait connaissance avec Aurélie. Et les voilà tous les trois à danser et rire sur la piste. Tout d'un coup la musique s'arrête et les lumières s'éteignent. C'est une alerte, les forces de l'ordre sont dans les parages pour faire respecter le couvre-feu du confinement. Il est temps de partir, d'échapper à la rafle, de fuir l'ennemi d'état, de leur monde de coupables criminels où les méchants sont les gentils, où pour ne pas risquer de mourir il a été décidé pour vous de ne plus vivre.

80 ans après l'occupation, l'histoire se répète à nouveau. Sauf qu'à l'époque, les commerces non essentiels étaient ouverts. Et l'ennemi était visible et identifié. On ne te traitait pas d'assassin parce que tu sortais de la boulangerie avec un baba au rhum non essentiel.

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