Chapitre 6 : Première fois

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Encore fois, la petite flamme violette nous mène à travers les nombreux couloirs de l'énorme vaisseau. Après en avoir en avoir parcouru quelques longs couloirs on arrive devant une porte verte avec inscrit « Salle d'entraînement ». Lucie nous explique :

- Voici la salle d'entraînement. Elle peut modeler son contenu, selon vos besoins, en n'importe quel environnement. Mais surtout, vous n'avez pas besoins de retenir vos coups. Si l'un de vous meurt, il réapparaîtra à l'entrée. Ça vous permet de ne pas craindre la mort et d'évoluer très rapidement.

- Mais c'est hardcore, je lâche anxieux.

- On la ressent quand même la douleur ? demande Vestia.

- Oui, bien sûr. Mais souvent, lorsque vous déchaînez à pleine puissance vos pouvoirs, vous n'avez pas le temps de sentir la douleur.

- C'est super rassurant, je soupire tremblant.

- Comme ça vous allez découvrir vos formes offensives, Raptium, c'est celle qu'ont fait apparaître Griffing et Vestia tout à l'heure. Elle repousse énormément les limites de vos pouvoirs et vous rendent plus résistant aux coups. De la même manière que le vaisseau vos pouvoirs dépense une énergie magique qui se régénère. Si vous dépenser la totalité de cette énergie vous perdrez connaissance. La forme Raptium repousse grandement cet effet jusqu'au moment où vous reprenez votre forme initiale, mais elle dépense plus d'énergie. Si vous dépassez trop cette limite vous pouvez en mourir.

- C'est incroyable comment en une phrase tu me fascine et tu me terrifie, sourit Griffing.

- C'est pour ça qu'il est important de connaître ses limites pour éviter le pire, réplique Lucie. Donc allez-y ! Allez tester vos pouvoirs. N'oubliez pas qu'outre l'énergie votre seule limite n'est que l'imagination.

Vestia fixe Griffing et lui lance :

- Prêt à voir une femme gagner ?

- Parle pas trop vite ma grande !

Les deux s'élancent dans l'arène, prêt à en découdre.

Itarra ayant repris son apparence originelle, joue nerveusement avec ses couteaux. Puis après quelques secondes d'hésitation, elle suit le pas de Griffing et Vestia.

L'école m'avait appris que dans un groupe il ne faut jamais rester du côté de la minorité, si tu veux t'intégrer. Donc à contre cœur et un peu terrifié, je rentre à mon tour dans l'arène. Je sens mon cœur battre tellement fort que tout mon corps en tremble. J'appréhende, très anxieux, ce premier combat.

Vestia regarde Shinen et lui lance :

- Tu ne veux pas tester tes pouvoirs ? En plus tu ne les as jamais vu ?

- J'ai pas envie de me battre contre vous, répond-t-il.

- Prends ça comme un jeu, ajoute Griffing. On ne meurt pas. Lucie l'a dit.

- Comment tu feras si tu ne sais pas utiliser tes pouvoirs devant un ennemi, relance Vestia.

Il rentre dans l'arène et la porte se referme derrière lui. La salle est immense, il y a dans un coin une forêt, et le reste est une plaine vallonnée avec une herbe haute et douce.

On se place en rond éloigné d'une dizaine de mètre chacun. Vestia et Griffing se regardant les yeux dans les yeux font apparaître leurs apparences démoniaques. Avec un grand sourire Griffing provoque Vestia de la voix puissante de son apparences Raptium :

- Quand tu veux, ma grande !

Elle tend la main vers lui. D'un coup l'atmosphère entre lui et elle s'embrase d'une puissante flamme rouge, s'exclamant en même temps :

- Je te préviens c'est la dernière fois que tu m'appelles comme ça !

Quand le feu disparaît dans un nuage noir, un mur de pierre noirci par les flammes est apparu devant Griffing. Il se brise en deux avant que le démon de pierre ne le traverse. Et tout en courant vers Vestia, de gigantesques pics de pierres émergent violemment du sol en sa direction, faisant voler de grosses mottes de terres. Soudain Itarra hurle :

- Xander c'est par là que ça se passe !

Je me retourne vers au-moment où elle se transforme. Une cape faite de fumée et de tissus noirs apparaît, s'enroulant rapidement autour de son cou comme un serpent, puis montant sur toute la partie inférieure de son visage. La suite de la cape descend derrière ses genoux.

Ensuite une capuche se forme partant de la cape, cachant entièrement son visage de la lumière et des regards. Son haut s'élargi et descend jusqu'à la ceinture faisant disparaître les dernières parties visibles de son corps.

Sa robe blanche se noircit, et se divise en deux morceaux qui se colle sur chacune de ses jambes. Transformant la robe en un pantalon de cuir. Une ceinture se manifeste enfin à sa taille avec accroché une dizaine de kunais sombre, ainsi qu'un long poignard noir aux gravures blanches lumineuses qui apparaît dans sa main. Chaque pièce de son apparence dégage une épaisse et opaque fumée noire.

Elle est maintenant terrifiante.

De sa main libre, elle décroche un kunai et s'apprête à le lancer. Je me sens sans défense face à elle, j'ai peur de mourir sans ne pouvoir rien faire.

Comme une réponse, mon apparence s'anime. L'eau de mes vêtements se met à graviter formant deux grands anneaux en X autour de moi.

En même temps ma robe se transforme. Des écailles bleues et brillantes me recouvrent en un instant.

La peau de ma tête et mes cheveux laisse place à une sorte de casque tout lisse d'un bleu cyan.

Même si la forme Raptium, recouvre totalement ma tête et mon corps, j'ai l'impression d'être libre de mouvement et vision comme si j'étais nu.

Mais j'ai à peine le temps de m'admirer, que le kunai que j'avais déjà oublié siffle dans ma direction.

J'ai juste le temps de faire un pas de côté avant qu'il m'érafle la gorge légèrement.

Je la regarde pour protester qu'elle ait commencé avant que je ne sois prêt. Mais je n'ai pas le temps d'ouvrir la bouche qu'elle en envoie un nouveau.

« ... votre seule limite n'est que l'imagination ! », je repense. Si Lucie dit vrai, j'ai toutes mes chances ! Je forme mentalement une bulle de glace autour de moi.

En quelques instants, l'air s'assèche, des gouttelettes apparaissent tout autour de moi, elles s'assemblent et gèle pour exécuter l'ordre mental.

L'instant d'après trois kunai viennent se planter dans la glace avant de disparaître dans un sombre nuage de poussière et de réapparaître à la ceinture d'Itarra.

Sans me laisser le temps de respirer, elle disparaît avant que je ne sente sa poitrine contre mon dos.

Je n'ai pas le temps de bouger que son poignard se pose sur ma gorge. Elle me chuchote à l'oreille :

- Dommage, tu manques de rapidité.

Au dernier moment, je liquéfie mon corps et disparaît dans l'herbe.

- « Tu parles trop ! je me moque mentalement. »

- « T'inquiètes pas je ne te laisserais pas le temps de réfléchir la prochaine fois. Montre-toi, maintenant ! » réplique mentalement Itarra.

J'ai réussi ! J'ai réussi à leur parler mentalement !

Shinen s'exclame d'un ton énervé :

- Mais vous êtes horrible, c'est barbare ! Pourquoi vous battre !

- Pas moins que d'abandonner des gens à leur mort ! réplique sèchement Itarra se tournant vers lui.

- C'était différent ! Ce n'était pas de ma faute !

- Tu pouvais les aider ! Tu les as abandonnés, tu les as tués ! Tu es responsable ! insiste cruellement Itarra. Si on t'avait demandé de sauter par la fenêtre, est-ce que tu l'aurais fait ?

Abandonnant apparemment le duel, Itarra lance un kunai vers Shinen. Des lianes surgissent brutalement du sol et attrapent le kunai à quelques centimètres de sa cible.

- Comment as-tu osé ! hurle-t-il dans un accès de rage ! Tu vas le regretter !

Des feuilles de sa robe se dressent brusquement et partent à pleine vitesse dans la direction d'Itarra, sifflant et fendant l'air. Itarra disparaît, avant que les feuilles passent et se plantent profondément dans les troncs d'arbres un plus loin.

Pendant que j'étais absorbé par les feuilles volantes, Shinen s'était transformé. Sa robe de feuille disparu pour laisser place à une sorte d'écorce blanche traversée de fissures brunes, recouvrant comme moi, tout son corps. Il hurle fou de colère :

- J'arrête ce « jeu ». Maintenant !

- J'adore le challenge, lui lance espiègle Itarra ! Vas-y, je t'attends !

De grosses racines sortent de terre, mais elles saisissent à la gorge non seulement Itarra, mais aussi Vestia et Griffing encore occupés dans leur duel.

Je suis là, encore en forme de flaque, en train d'observer. Pendant ce temps-là, les trois ont les jambes pendues dans le vide, se débattant comme ils peuvent.

Itarra disparaît, mais Vestia et Griffing paraissent suffoquer.

Alors que je cherche mentalement un moyen de les libérer, Itarra réapparaît dans le dos de Shinen, et lui plante le poignard dans le dos. Les racines s'écroulent aussitôt, relâchant par la même occasion Griffing et Vestia.

Je suis figé devant la scène. Shinen tombe à genoux, et cette fois elle ne perd pas une seconde, l'achevant sans un mot en l'égorgeant.

Je suis paralysé devant la scène d'horreur, le corps de Shinen tombant sans vie dans l'herbe, se vidant d'un torrent de sang. Pour autant Griffing et Vestia reprennent leur duel comme si rien ne s'était passé et Itarra me cherche à nouveau du regard.

Pour ne pas passer pour un lâche, je repasse à l'attaque. Pendant que je glisse jusqu'à elle, toute l'eau qui l'entoure s'aglutine sur elle avant de geler.

Immobilisé, quand j'arrive à sa hauteur, je me reforme devant elle. Elle disparaît au même instant laissant sa statue de glace derrière elle.

Commençant à la connaitre, je me retourne vivement en faisant apparaître des pics de glace émergeant du sol juste derrière moi.

J'ai tout juste le temps de voir Itarra, touchée à la cuisse par un pic, disparaître dans un cri de douleur.

« Bien joué, Xander, mais tu ne fais pas le poids face à moi ! » me dit-elle mentalement.

Soudain Griffing se met à hurler de douleur. Je me tourne brusquement vers lui, pour le voir se faire carboniser vivant par une gigantesque flamme.

Quelques secondes plus tard, son cadavre carbonisé s'effondre sur le sol, laissant une odeur de brûlé même pour moi à quelques dizaines de mètres.

Absorbé par la scène, je ne vois pas un kunai, qui se plante dans mon dos. La douleur est déchirante. J'ai le souffle coupé. Mais j'ai à peine le temps d'encaisser la douleur, qu'Itarra apparaît face à moi.

Quand je la vois, je me concentre, et tente d'oublier au mieux la douleur qui noit les pensées qui pourraient me sauver.

Itarra commence son geste pour terminer le combat tout en lançant :

- Tu t'es bien battu.

Mais juste au moment où le poignard rentre en contact avec ma peau, ma gorge se liquéfie. Laissant passer la lame. Je profite de son étonnement pour agripper son bras et la plaquer par terre.

J'enfonce sa tête le plus profondément possible dans l'herbe, pour qu'elle ne puisse se téléporter.

Je suis maintenant à cheval sur son dos, les deux mains sur sa tête. Elle se débat, et d'un bond me fait basculer sur le dos à sa gauche. En s'agrippant à moi, elle suit le mouvement tout en se retournant.

Je la vois sur moi, et avant que je puisse me liquéfier, elle me poignarde la poitrine, de plusieurs coups.

Cette fois la douleur est insoutenable accompagnée d'une sensation glaciale dans tout le corps et des oreilles qui bourdonnent. Je perds quelques instants plus tard sans le vouloir mon apparence Raptium, mais aussi la robe d'eau. Je hurle de douleur les larmes coulant à flot. Je veux échapper à cette douleur, je veux quel s'arrête.

Itarra reprend son apparence initiale toujours le poignard à la main. Elle me caresse les cheveux doucement et d'une voix rassurante elle chuchote :

- Chut, c'est fini maintenant.

J'ai dû mal à respirer, et je commence à cracher du sang. D'un coup sec Itarra me plante avec précision le couteau dans la gorge. Immergé dans le torrent de douleur, je ne ressens pas grand chose. Itarra continu, pendant que je sens un liquide chaud couler sur ma gorge :

- Tu t'es bien battu.

En quelques secondes, ma vue se brouille puis c'est le néant.

Je rouvre les yeux, en apnée, sur une pièce avec tout un pan de mur vitré donnant une vue en hauteur sur la salle d'entraînement.

Je titube car les douleurs semblent être encore présente. Je me palpe tout le corps rapidement, la respiration saccadée, mais mon corps paraît intact. J'ai la tête qui tourne, et la vue se met à se brouiller une nouvelle fois. Griffing me rattrape avant que je m'écroule :

- Oh, doucement. Ça va, respire, tout va bien maintenant, c'est fini. Assieds-toi ici.

Il m'adosse contre le mur. Les douleurs s'estompent pour disparaître totalement quelques minutes plus tard. Griffing demande avec attention :

- Ça va mieux ?

- Oui. Ça fait plus mal que je ne l'avais imaginé.

- Les coups de couteaux ont dû faire mal en effet.

- Tout ça est ridicule, tant de souffrance inutile, soupire Shinen. Itarra est violente et aime faire souffrir.

- Ce n'est pas vrai, réplique Griffing. Elle l'a achevé proprement, si elle aimait vraiment la douleur, elle aurait pu le regarder agoniser pendant au moins une bonne dizaine de minutes avant que ses blessures ne le tuent.

- J'ai accepté ce duel, je rajoute fièrement. Itarra est juste douée, et puis la mort est difficilement indolore dans ces situations-là.

Après avoir totalement retrouvé mes esprits, je me tourne vers la vitre pour observer Vestia et Itarra s'affrontant.

Itarra a repris son apparence Raptium et se téléporte en permanence pour éviter les puissantes flammes de Vestia, tout en lançant ses kunais.

Vestia les esquive pour la plupart avec facilité, mais certains la coupe légèrement.

Toute la zone du combat est carbonisé par les flammes qui ne cessent d'apparaître et de disparaitre.

Curieux de leur avis, je demande :

- Pour vous, qui va gagner ?

- Je veux pas savoir, grommelle Shinen.

- C'est assez serré, analyse Griffing. Itarra a une grande mobilité, mais elle est peu efficace à distance. La distance à laquelle Vestia la maintient, rend plus difficile la visée mais augmente aussi le temps de vol de ses kunais, rendant plus facile l'esquive. Vestia en revanche n'est pas très mobile, et en utilisant son pouvoir uniquement en lançant des flammes, elle obtient le même problème qu'Itarra. Donc la première erreur sera quasi à coups sûr fatale pour l'auteure de celle-ci.

Je suis impressionné, il a analysé la situation et a réussi à en tirer les faiblesses des deux adversaires. Il conclut finalement :

- Pour autant Vestia est déjà bien amochée et commence à fatiguer. Itarra la joue fine car c'est elle qui mène le jeu. Je pense que ce n'est qu'une question de temps avant que Vestia ne cède.

Itarra se téléporte face à Vestia. Aussitôt la démone de feu les mains devant elle, lance de gigantesques flammes. Mais cette fois Itarra attend le dernier instant pour se téléporter. Quelques instants après Vestia s'écroule en arrière. Les avant-bras ensanglantés, un kunai planté profondément en pleine poitrine.

Itarra se téléporte à côté d'elle. Son poignard à la main, elle se penche au-dessus de sa victime. Je reste bouche bée devant la scène.

- Elle a très bien joué, lâche Griffing.

Mais Vestia, dans ses derniers instants agonisants, ne lâche pas l'affaire. Elle enflamme Itarra dans un dernier souffle enflammé. Transformée en torche vivante, celle-ci hurle de douleur, mais contre toute attente, se jette sur la gorge de Vestia, et la tranche d'un geste vif.

- Eh bah, ça s'est pas joué à grand-chose, soupire Griffing. Vestia est une femme surprenante.

- Une femme quoi ? s'étonne Vestia derrière nous. Je crois que tu dois des excuses à la femme qui n'a pas sa place aux commandes.

- C'était déplacé, je suis désolé. Je ne m'attendais pas à autant de talent dans un tel corps de déesse.

- C'est dommage ça commençait bien, soupire Vestia. Mais bon tu t'es bien battu aussi.

- Toi aussi, même si je pense que tu pourrais améliorer ta technique. Tu effectues toujours la même attaque, ça te rend trop prévisible.

- Je penserais à prendre des cours particuliers, réplique Vestia moqueuse.

Je suis impressionné par Vestia et Itarra qui ne semble pas avoir été affectés par les douleurs de l'entraînement. J'en suis gêné de les avoir autant exprimés. Suis-je faible ?

Vestia se tourne vers Itarra et lui dit :

- Tu as été incroyable, Itarra. Ce poignard dans mes flammes, c'était coup de génie !

- Tu m'as bien surprise aussi avec ton souffle enflammé.

Elles se tapent dans la main d'un sourire complice. Shinen s'exclame agacé :

- Mais comment vous pouvez vous taper dans la main, après ce que vous vous êtes fait endurer ? Comment vous pouvez éprouver de l'amour après ça ?

Itarra se met face à lui, et met en avant son corps en demandant :

- Tu vois une égratignure là ? Moi j'en vois pas !

Elle pointe du doigt la salle et continu tout aussi froidement :

- Tu vois c'est une aubaine, cette salle ! On est amené à mourir pour de vrai, d'ailleurs tu es déjà mort deux fois. Mais à ce que je vois tu es devant moi. Cette salle outre de tuer, te permettra de ne plus avoir peur de la douleur, ni même de la mort. Parfois une seconde d'hésitation et c'est la mort, la peur n'a pas sa place dans notre combat.

Elle fait une pause et se rapproche de lui :

- Et puis sache que tuer, c'est souvent plus facile à dire qu'à faire. Tu demanderas à Xander, sa peur a failli tout faire foirer. Quand tu seras devant un ennemi, nous menaçant de mort, tu feras quoi ? Tu le laisseras nous tuer, tout ça parce que tu es pacifiste ? Mais dis-moi ? Comment t'as fait après que Seishin t'ai Marqué, quand on est venu pour t'abattre ?

Le regardant d'un regard noir, elle attend une réponse, que Shinen intimidé ne donne pas. Elle renchérit comiquement :

- T'as hurlé « Non, ne nous battons pas, je vous donne mon corps, tuez-moi directement. Je suis pacifiste »

- Bon même si, Itarra est un peu dans l'extrême, reprend Vestia. Tu devrais t'entraîner Shinen, on ne parle pas que de nous là. On parle potentiellement de la survie des peuples des cinq mondes.

- Dans un combat si vaste, il y aura forcément des morts, la soutient Griffing.

Itarra recule agacée par la remarque de Vestia. Shinen lui, fuit le regard de Vestia, sans un mot. Lucie interrompant une nouvelle fois une ambiance lourde, elle dit :

- Vous avez tous de gros progrès à faire, mais vous vous êtes tous bien battu pour une première fois. Maintenant, finissons la présentation de ce vaisseau pour que vous soyez tranquille.

Le feu-follet s'élance dans les escaliers, et nous fait descendre du vaisseau par le grand hangar qu'on avait visité. Puis, on traverse le refuge, pour arriver devant un grand mur gris avec au sol une grande surface rouge rectangulaire. De ce mur dépasse, une tige avec une boule identique à celle des accoudoirs du poste de pilotage. Lucie nous présente l'endroit :

- Voici l'entrepôt, il vous suffit de toucher la boule pour y connaître tous son contenu et en retirer ce que vous voulez. Tout ce que vous retirerez apparaîtra dans la zone rouge. Vous pourrez y retrouver toutes vos affaires que Seishin a récupéré. Prenez-les, et on ira ensuite dans vos chambres.

Vestia se précipite sur la boule en y posant les deux mains, et ferme les yeux. Pendant qu'elle s'affaire à regarder le contenu de l'entrepôt, je demande :

- Seishin. On va être amenés à la revoir ?

- Non. Sa tâche est remplie. Pendant des centaines d'années, elle a cherché les meilleurs candidats des cinq mondes selon ses propres critères. Elle vous a aidé à réussir la première étape, étant de vous réunir. Depuis quelques générations, elle prend les affaires utiles et sentimentale pour faciliter psychologiquement la transition dans vos nouveaux rôles.

- Mais du coup, elle est où, maintenant ? demande Griffing.

- Depuis que vous êtes réuni, elle est comme moi, en chacun de vous. Seishin est un esprit qui apprend, de chaque génération, elle apprend de ses erreurs pour affiner sa sélection.

- Donc vous êtes consciente de tous nos fait et geste ? demande Itarra gênée.

- Oui, dans le refuge en temps réel et quand vous revenez, je revis en quelques instants tout ce que vous avez vécu. Je sais exactement tout ce que vous avez fait, vous ne pouvez pas me mentir.

- Et notre vie privée dans tout ça ? réplique Itarra. À quoi ça sert de tout savoir ?

- Rassure-toi, je ne retiens pas tous les détails privés. Je note juste vos erreurs, pour vous aider à ne plus les refaire ou juste à attirer votre attention dessus. Le reste m'importe peu, je n'ai aucun impact sur vous, et je ne vais pas détruire votre équipe en révélant vos secrets, donc je ne dirais rien, je te le promets Itarra.

- Tant que tu le gardes pour toi, ça me va, soupire Itarra.

Vestia avec quelques larmes sur ses joues, relève ses mains de la boule. Sur une planche lévitant à quelques centimètres du sol apparaît des boites de toutes les tailles. Les boîtes finissent seulement de s'empiler à une hauteur impressionnante. Griffing surpris lance moqueur :

- Eh bien. Vous pouvez dire tout ce que vous voulez, vous ne verrez jamais un mec, avec autant de choses...

La plateforme s'avance ensuite vers Vestia, qui saisit une des boîtes et en sort un ours en peluche noir. Elle s'exclame en larme :

- Je ne pensais pas la revoir après cent soixante ans. Merci beaucoup.

Après que Vestia se soit déplacée derrière nous pour nous attendre sans gêner, Shinen s'avance à son tour. Il ferme les yeux et un seul carton apparaît sur la plateforme volante. Il les rouvre, la mine décomposée, il dit doucement :

- Mes plantes... il n'y a pas mes plantes ! J'avais créé des hybrides uniques, et puis je les aimais tellement chacune d'entre elles.

- Je suis désolé, répond Lucie, mais fait le calcul. Cent trente ans sans eau, lumière ni oxygène, tu n'aurais que de la poussière entre les mains. Je pourrais te créer une salle de botanique totalement automatisé, pour que tu puisses te concentrer pleinement sur ta mission. Mais il faudra que tu ailles les chercher toi-même, sur Ortia.

- Ce serait génial ! Mais ça veut dire quoi « automatisé » ?

Vestia le regarde de travers et s'exclame :

- Ah oui, j'avais oublié que tu avais vécu dans un trou toute ta vie. L'automatisme permet d'assister et peu à peu de remplacer l'homme dans ses tâches pénibles du quotidien.

- Ça peut être intéressant, mais ils font quoi les gens en attendant ? Ils doivent s'ennuyer non ?

- Alors dans nos mondes, il existe plein d'autres activités disponibles que le travail. Ce leste en moins nous permet de nous concentrer à la conception d'autres technologies, ou bien juste se faire plaisir et de se reposer, pour être plus efficace dans la vie, je réponds.

- Mouais, je ne vois pas ce que trouve les gens de mieux dans les jeux que dans le travail. Au travail, on produit c'est fantastique, répond-il.

- Vraiment Shinen, tu fais peur, dit Vestia ! J'espère que les souvenirs des autres générations te donneront une vraie idée de la vie !

- Vous aurez sûrement des flash-backs, approuve Lucie, plus ou moins violent selon les personnes, et le retard de connaissances. Mais vous avez déjà dû vous en rendre compte, vous connaissez déjà pas mal de choses que vous ne connaissiez pas avant.

- Ouh tu vas prendre chère, mon pauvre Shinen, compatit moqueusement Griffing. Mais oui, c'est vrai, pour moi, même si dans ma vie, je n'avais jamais entendu parler d'automatisme, ça me paraissait évident.

- C'est souvent les personnes les plus ouvertes d'esprit, qui apprennent le plus rapidement car ils acceptent toutes leurs pensées et ce qu'ils n'ont jamais vécu.

- Eh oui, je n'ai pas que des défauts, ricane Griffing en regardant Vestia et Itarra.

- Heureusement, soupire Itarra, j'ai déjà du mal à te supporter comme ça.

- Tu finiras par m'apprécier, réplique Griffing. Bon si personne ne se décide, à mon tour !

Il s'avance vers la boule et y pose la main. Une plateforme apparait, mais comme Shinen, seulement une boîte apparaît avant qu'il ne rouvre les yeux.

Il n'a pas vécu toutes sa vie dans un trou pourtant ? Pourquoi il a si peu d'affaire.

- Un guerrier voyage léger, dit-il fièrement sous nos regard surpris.

- Je sais pas si c'est une bonne nouvelle, soupire Vestia. Tu ne dois pas beaucoup changer de vêtements.

- C'était peut-être vrai avant, mais avec ces apparences, je ne pense pas que vous allez le sentir.

Itarra ne me voyant pas décidé à y aller, s'engage et touche à son tour la boule. Encore une fois, sur une plaque lévitante, des boîtes apparaissent, et s'entassent jusqu'à un peu moins haut que celle de Vestia. Griffing moqueur lance :

- Ah, on peut dire ce qu'on veut sur les clichés des filles, qui ont toujours des tonnes d'affaires. C'est plutôt vrai en ce moment.

- « Clichés », c'est un peu moderne pour toi ? Non ? demande Vestia. Vous utilisiez ce mot là sur vos champs de bataille ?

Griffing se penche vers Vestia, ferme les yeux comme s'il se concentrait, en posant ses doigts sur ses tempes et chuchote lentement : « Synchronisation ».

- Impressionnant, lâche Itarra rouvrant les yeux. Et la « Synchronisation » elle t'apprends le respect et les bonnes manières ?

Tout le monde rigole, sauf Shinen un peu perdu.

Etant le dernier, je m'avance vers la boule. J'y pose mes deux mains et ferme les yeux. D'un coup, je vois et sais exactement ce qu'il y a dans l'entrepôt qui me concerne. Je peux très bien visualiser mentalement avec détails n'importe quel objet, mais aussi les placer sur la zone rouge.

Je repère non seulement le sac plein d'affaires que j'avais préparé mais aussi la quasi-totalité de ma chambre.

Je déplace donc tous mes habits. C'est tout ce qui m'intéresse, je n'ai pas d'attache comme Vestia pour tout objet, et puis même pour les quelques figurines, je n'ai pas envie de me souvenir de cette période sombre.

Je rouvre les yeux, pour apercevoir plusieurs boîtes grises empilé sur une plaque lévitante.

Lucie dit :

- Maintenant que tout le monde a récupéré ses affaires, je vais vous montrer vos chambres.

Le feu-follet rebrousse chemin, on rentre dans le vaisseau par le hangar à véhicule, et on traverse une nouvelle fois les couloirs.

Je suis autant excité que dans un voyage scolaire, impatient de découvrir ma chambre. À quoi allait-elle ressembler ? Serait-elle proportionnelle au vaisseau ? De la même pointe technologique ? Est-ce qu'il y aura un ordinateur ? Comment sera la salle de bain ? Commune ? Grande ?

Enfin, on arrive devant une porte noire avec inscrit en lettre d'or : « Chambres », mettant fin à mes extrapolations. La porte s'ouvre pour nous laisser entrer dans un couloir blanc éclatant.

Il y a de chaque côté du couloir des ouvertures fermées par des portes correspondantes à nos pouvoirs. La première c'est un rectangle de feu allant du sol jusqu'au plafond. Ensuite en face, il y a de la même taille un mur de lianes et de baies lumineuses comme sur la robe de Shinen. La troisième est un amas de roches noires. La quatrième un mur de fumée noire opaque et la dernière est une chute d'eau bleu clair, mais opaque. Elle paraît tomber du haut du mur et s'évanouir au niveau du plancher.

C'est juste extraordinaire. Toujours accompagnés de nos affaires on s'engouffre un à un dans le couloir, chacun s'engouffrant dans la porte de son élément.

Je rentre en dernier, ma porte étant la plus au fond du couloir. Quand je m'avance vers ma porte, l'eau s'écarte pour me laisser passer.

La chambre est juste magnifique. Face à moi un grand lit carré aux draps bleu marine. De grands écrans accrochés au plafond sont orientés vers la tête de lit. Le sol est recouvert d'un épais tapis duveteux et moelleux. L'éclairage de la chambre vient de l'entièreté du plafond blanc illuminant parfaitement toute la pièce.

A gauche du lit, une porte mène à une grande salle de bain moderne, avec, une gigantesque baignoire pouvant accueillir au moins quatre personnes, une douche avec l'eau tombant directement du plafond. Bien sûr, aucun bouton, tout par la pensée. Et enfin un lavabo de roche noire brut et un robinet en forme de cascade sont taillés dans la pierre.

A droite du lit, une autre porte mène à un bureau circulaire. On rentre par derrière et le reste du bureau est divisé par deux. Une partie avec deux écrans, un clavier et une souris et de l'autre des feuilles et un stylo. Finalement j'ai bien fait de ne pas prendre mon ordinateur. La chaise fixée au milieu permet de tourner pour changer de poste facilement.

Et enfin, encastré dans le mur de chaque côté du lit, une grande penderie. Epuisé de ma journée, je me dépêche de ranger mes affaires, pour être tranquille après. Une fois terminé, les boîtes et la plateforme disparaissent.

Je me jette dans le lit. Allongés sur le dos, je regarde le plafond. Je réalise peu à peu ce qui se passe et que le pire et le meilleur se sont quand même déroulé en une seule journée. Du cobaye de laboratoire de mes propres parents au superhéros, cette journée n'a pas vraiment de sens.

L'équipe est juste incroyable, je les aime tous, j'espère juste que malgré son retard Shinen arrivera à s'intégrer. Il s'est quand même fait incendier par Itarra, Griffing et Vestia. Je ne veux pas qu'il ressente le même isolement que j'ai vécu à l'école. Je préviendrais les autres de faire attention.

Puis j'imagine des combats épiques contre les forces du mal comme dans les films, imaginant de puissantes flammes ravager les lignes ennemies, des murs de pierres surgirent de terre nous protégeant de projectiles, des racines emportant sous terre des dizaines d'ennemis.

Rêveur, je suis impatient de faire notre première mission, ça va être génial !

- « Je suis d'accord, répond Vestia. »

Je sursaute, surpris d'entendre une réponse. Je demande aussitôt :

- « Vous m'avez entendu ? »

- « Ouais, réplique Griffing. Il va falloir faire gaffe, si on veut éviter que toutes nos pensées deviennent communes. »

Je suis pris d'un fou rire, imaginant les pires scénarios avec ce genre d'accidents. Puis la fatigue me prenant vraiment, jefais disparaître ma robe d'eau, me déshabille et me glisse sous la couette. Je suis bercé par les relents de la bataille, comme après une journée dans un parc d'attraction. En quelques secondes seulement, le sommeil m'emporte.

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