Chapitre 12 : Origines
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Je suis une étoile filante traversant l'espace sombre et infini à toute vitesse. Je ne suis pas seule, mais accompagnée de cinq autres trainées blanches.
Au détour d'une étoile, l'une des entités du groupe s'arrête et se transforme en une fillette d'une dizaine d'année. Elle s'exclame, sa voix faisant trembler toute la galaxie :
- Les filles, j'en ai marre ! C'est la dixième galaxie qu'on fait, et il n'y a toujours personne ! On ne peut pas faire une pause ?
Comme les autres sphères lumineuses, je fais demi-tour et devant ma sœur, Fanylia, je reprends mon apparence humaine. C'est Cladior, la sœur ainée, qui s'exclame agacée :
- Si on s'arrête tout le temps, on ne retrouvera jamais la civilisation.
Je m'exclame avec la voix ferme et affirmée d'une femme :
- Mais détends-toi ! On finira bien par la retrouver. Depuis le temps qu'on parcourt l'univers, on est plus à la minute.
Une autre sœur, Nélia, s'approche de l'étoile et s'émerveille :
- Oh les filles, regardez ! Ça faisait si longtemps qu'on n'avait pas ressenti un peu de chaleur. C'est tellement agréable !
- Et dire que la nôtre était des milliers de fois plus grosse que celle-ci, soupire Cladior.
- Tu crois qu'on pourrait créer une version miniature de notre planète, Nélia ? demande Fanylia.
- Mais on avait dit juste une petite pause, maugrée sa sœur ainée.
- Mais tu vas te détendre ! je réplique. Ça va faire cinq années qu'on passe de galaxie en galaxie sans rien trouver ! Tu veux vraiment passer ta vie à traverser l'Univers ? Autant profiter un peu. En plus ce serait incroyable de créer une planète !
- Ce n'est pas parce que c'est long qu'il faut perdre du temps, soupire Cladior. Mais si ça vous fait tant plaisir allez-y... Mais rapidement !
Un grand sourire s'affiche sur le visage de Fanylia. Katalyna, une autre de mes sœurs, réfléchit :
- Si je me souviens bien notre planète s'est formé grâce à l'amas de poussière qui nous entoure.
Devant le regard de ses sœurs, elle s'empare d'astéroïdes et les colle un à un avec délicatesse et précision, jusqu'à former une sorte de sphère cabossée.
La plus jeune des sœurs s'exclame surexcitée :
- Moi aussi je veux faire ! Comment tu as fait ?
Alors pour sa sœur, la créatrice réitère ses gestes avec la jeune fille pour créer une deuxième sphère.
Mais alors que la benjamine pose un énième astéroïde sur sa planète, elle appuie trop fort sans la retenir et la planète est propulsé sur la première création.
Je me jette pour la rattraper mais trop tard, les deux planètes s'entrechoquent dans une magistrale explosion, me propulsant violemment en arrière.
Quelques secondes plus tard, Fanylia s'écrit en larme :
- Mais non ! On avait réussi ! Mais pourquoi elle est partie comme ça ?
- Mais tu es stupide aussi, Fany ! Tu as vu comment tu as appuyé fort ? réplique sèchement Cladior. C'est normal qu'elle soit partie comme ça !
- Ça va. Pas besoin de s'énerver, réplique Tinia. Elle n'a pas fait exprès. En plus je croyais que ça ne t'intéressait pas, donc je ne vois pas de quoi tu te mêles.
Alors que Cladior se met à bouder dans son coin, l'attention retombe sur les planètes. Je suis fasciné par ce que je vois. La collision n'a pas totalement détruit les deux chefs d'œuvres. Au contraire, les deux ont fusionnées. Devant moi ce dresse une première planète accompagnée d'une plus petite qui gravite autour de cette dernière.
L'énorme sphère est bien plus lisse que ces prédécesseuses, mais elle constitué de roche en fusion qui émet une forte chaleur.
- La planète est trop chaude pour faire quoi que ce soit, s'exclame Katalyna penché sur la planète. En attendant on devrait trouver de l'eau.
- Eh les génies ! hèle Cladior. On est dans le vide. Vous voulez en trouver où de l'eau ?
Je la foudroie du regard pendant que Fanylia se recroqueville sur elle-même et se met à sangloter :
- Moi j'en ai marre de vivre dans le vide. Je veux rentrer à la maison. Là-bas, on avait de l'eau comme on voulait et on n'était pas toutes seules !
Pendant que Tinia et Katalyna tente de la réconforter, j'aperçois les larmes s'échappant dans l'espace et se cristallisant dans le froid du néant. Attirées par la gravité de la planète, elles s'écrasent sur les roches fumantes.
Plus le chagrin continue, plus la planète se recouvre d'eau. Je suis émerveillée. Quelques instants plus tard, j'ai le regard perdu sur la sphère à la surface agité, quand Fanylia me demande calmée :
- Tu regardes quoi, Cléo ?
- Regarde tes larmes ! L'eau elle est là ! je m'écris.
Toutes sauf Cladior, observons la planète totalement fascinée, hypnotisée. Soudain Fanylia brise le silence :
- On va l'appeler comment notre planète ?
- On ne se souvient même pas du nom, de notre planète, soupire Nélia. Je ne sais pas comment on appelle une planète ?
- Au pire on s'en fiche, on est seule. Qui va nous empêcher de l'appeler Terre ?
Fanylia et les autres éclatent de rire pendant que Nélia me regarde surprise et s'esclaffe :
- Pourquoi Terre ?
- Bah je ne sais pas, comme ça.
- Pourquoi pas, rétorque Tinia. De toute façon on n'a pas d'autres idées.
Après de longues heures à avoir imaginé la vie sur Terre. Et l'avoir scruté de part en part, on décide de céder aux demandes toujours plus insistantes de Cladior qui trépigne sur place depuis notre arrivée. De plus la planète, reste tristement sans vie et est devenue ennuyante.
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Ma vision se voile d'un écran noir. Il s'efface plusieurs fois me laissant voir la création de quatre autres planètes que je connais comme la Terre : Ortia, Colfia, Sombra et Sternifica.
A chaque fois, je ressens la tristesse de Cléo, quand la vie ne se manifeste pas et qu'elle doit abandonner la planète pour suivre les autres.
Puis lorsqu'une énième fois le voile disparaît, les sœurs viennent d'entrer une nouvelle fois dans mon système solaire.
Je remarque qu'elles ont toutes bien grandi depuis le dernier extrait de vie que j'ai vécu. Elles ont pris une dizaine d'année et paraissent toutes bien plus matures. Les six sœurs ont maintenant toutes un peu plus de la vingtaine.
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Quand j'aperçois la planète, je m'écris, enragé :
- On vient vraiment de faire un tour ? Ça fait quinze ans qu'on tourne en rond ?
- Ce n'est pas grave, ce n'est pas grave, répète anxieusement Cladior. Il doit bien y avoir une solution. On a peut-être tourné autour.
Soudain Nélia, penché sur la Terre s'écrit :
- Venez voir les filles ! Ça bouge ! Il y a de la vie !
- Mais vous ne pouvez pas vous concentrer deux secondes ? s'écrit en colère Cladior. On a un problème et vous regardez une planète ridicule qui ne sert strictement à rien. Il faut qu'on rentre !
- Mais c'est dingue, que tu sois comme ça tout le temps ! Tu ne peux pas être aimable de temps en temps, réplique Nélia. Ça fait des années qu'on te suit que tu nous rabâches qu'il faut qu'on rentre dans un endroit qu'on ne se souvient même pas ! Tu ne penses qu'à toi et ton obsession de retrouver notre chez nous est maintenant devenu aussi stupide que cette planète.
- Parce que tu crois que tu es aimable là ? continue Cladior.
- Je suis d'accord avec Nélia, je la défends. Je m'arrête là. J'arrête de courir dans le vide. On a la preuve devant nous qu'on peut créer la vie. Je trouve ça fantastique alors je vais arrêter de perdre mon temps à chercher quelque chose qui n'existe peut-être même pas.
- Vous êtes vraiment qu'une bande d'égoïstes, s'énerve Cladior en s'éloignant. Et moi dans tout ça ? Vous pensez à moi ?
- On ne fait que ça depuis quinze ans ! je réplique. Maintenant c'est à notre tour.
- Ok, lâche-t-elle furieuse. Continuez. Je m'en vais.
Je penche sur la planète bleue pour apercevoir avec émerveillement la vie qui l'a recouvert. Je vois à côté des océans devenus calme, les étendus vertes recouvertes de forêts. D'immenses oiseaux les survolent, pendant qu'au sol d'immenses dinosaures les traversent.
La vie est magnifique. Je ressens le pouvoir que nous avons toutes réunis. Nous pouvons recréer l'univers que nous avons perdu !
Soudain une météorite passe à toute vitesse à ma gauche et percute de plein fouet la planète. Choquée, je me retourne brutalement pour voir d'où il vient.
Cladior se tient encore en position de lancer, la main noire. Alors je hurle de rage :
- Mais qu'est-ce qui te prends ?
- Vous avez toutes perdu la tête ! Vous ne respectez même plus votre propre sœur. Vous ne récoltez que ce que vous avez semé. Maintenant que vous aussi, vous n'avez plus rien. Vous allez faire quoi ?
- Dégage ! je hurle de toute mes forces.
Cladior ne se fait pas attendre et disparait dans le néant de l'espace.
Quand je me retourne, la Terre est recouverte d'un épais nuage de fumée. Fanylia est en pleurs alors que Katalyna, Nélia et Tinia s'affairent à réparer les dégâts.
Mais quand la poussière retombe enfin. Katalyna pousse un cri de terreur. Des créatures difformes parcourent la Terre, détruisent et tuent tout ce qui est vivant. Elles se transforment sans cesse pour s'adapter à chaque obstacle en quelques instants seulement. Ils sont rapides et intelligents, rien ne leurs échappent.
Alors que le voile noir commence à se refermer sur ma vision je m'exclame :
- Il faut absolument retirer le Mal de la Terre.
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Je sens de nouveau mon corps. Mais cette fois le voile noir ne s'estompe pas. Je suis trempé à genoux sur un sol visqueux dégageant une odeur nauséabonde. Je suis épuisé, vidé au bord de l'évanouissement.
Mais où suis-je ? Qui suis-je ?
Je commence à entendre des voix au loin qui se rapprochent. Je reste immobile, tremblant la peur et le froid commençant à me saisir. Suis-je encore dans une vision ou est-ce la réalité ?
Un homme demande en me posant la main sur l'épaule :
- Monsieur, vous allez bien ?
- Où suis-je ?
Soudain une femme s'écrit :
- C'est l'alien !
Une autre femme s'exclame :
- Un peu de respect ! Il vient de tous nous sauver la vie.
- Xander ! s'écrit Griffing.
Un homme s'exclame :
- Il faut l'emmener à l'infirmerie.
- Il faut le porter ! ajoute Griffing. Il doit être à bout de force après ce qu'il a fait.
Sans que je ne puisse dire un mot ou même comprendre ce qu'il se passe, plusieurs personnes me portent par les épaules et m'emmène. Sur le chemin, je sens mes forces m'abandonner, jusqu'à ce que toujours plongé dans le noir, je sombre dans l'inconscience. Mais qu'est-ce qu'il s'est passé ?
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Je rouvre les yeux, assise sur les genoux d'Otarin avachi sur son énorme trône, au milieu d'une énorme pièce circulaire.
Mon corps est parcouru de dégoût au passage de ses mains sur mon corps quasiment nu. Il ne se retient pas de toucher mon intimité. Je suis immobile, incapable de faire autre chose que de le laisser faire, que de lui obéir.
Je sursaute quand soudain, les doubles portes de la salle s'ouvrent brutalement. Une dizaine de gardes armées rentrent et s'exclame :
- Seigneur, il faut y aller ! Votre prostituée personnelle est en train de faire un massacre sur les deux étages inférieurs !
- Comment ça un massacre ? C'est une pute ! s'exclame le roi. Vous avez des fusils automatiques ! Elle n'a même pas la poitrine pour vous étouffer !
- Elle semble avoir des pouvoirs, seigneur, explique un soldat.
Le roi se tourne vers moi furieux :
- Vestia ? Cette pute a-t-elle vraiment des pouvoirs ?
Chaque fois qu'il prononce ce mot pour la définir, me mets un peu plus hors de moi. Mais je ne peux rien dire ou faire d'autre que de répondre sans même pouvoir mentir. La réponse s'échappe de ma bouche :
- Oui.
- Qui d'autres de votre stupide bande ?
- Tous.
- Même toi ?
- Oui.
- Quels sont ses pouvoirs ?
Encore une fois, je sens mon corps essayer de maintenir ma bouche fermée de toutes mes forces, mais impuissante je réponds :
- Elle peut être invisible, se téléporter et...
- Prendre l'apparence de n'importe qui, termine un soldat.
Celui-ci est recouvert de fumée, en même temps que les autres hurle, s'écroule et que le sang coule sur le tapis de soie menant au trône.
Itarra se tient droite devant nous au milieu des cadavres ! Sa terrible apparence Raptium est recouverte de sang. Dans un cri de rage, elle s'écrit :
- Que lui as-tu faites ?
- Elle est devenue ma reine, répond odieux le roi. Elle ne fait que son devoir d'épouse de m'obéir et de me dire la vérité.
Je hurle de rage intérieurement. J'ai peur qu'Itarra le croit, qu'elle pense que je l'ai trahi. Mais je suis comme enfermée à l'intérieur de moi-même.
Le roi, m'ordonne en me tendant un collier qu'il sort d'un compartiment de son trône :
- Enfile-lui. Je vais en faire un exemple pour ses petits copains.
Mon cœur s'affole. Non. Je ne peux pas faire ça. Je ne peux pas la condamner encore une fois par ma faute. Mais mon corps se lève. Itarra s'exclame :
- Vestia, n'y pense même pas.
Sans répondre, mon corps continue d'avancer. Je me débats intérieurement, pour reculer, mais la lutte mentale semble perdue d'avance.
- Pas besoin d'être devin, pour savoir que ce n'est pas elle, lâche Itarra.
- Pas besoin d'être devin, pour savoir que ta fin approche, réplique moqueur le roi.
Alors qu'Itarra lance un kunai, sur le roi, je m'empresse de me mettre sur son passage, pour le protéger. Je me déteste tellement. J'aurais tellement aimé le laisser atteindre sa cible.
Toujours l'ordre en tête, je ne peux m'empêcher de l'exécuter. Sachant que je n'ai pas l'avantage sur Itarra, je m'écroule à terre et feint la mort. La douleur me foudroie mais mon corps l'ignore n'ayant que pour seul objectif exécuter l'ordre du roi.
Le roi s'exclame :
- J'espère pour toi qu'elle est récupérable.
Itarra s'avance une dague à la main et lance cruellement :
- Tu ne sais pas à quel point je vais savourer ta mort. Tu as tellement fait souffrir mes amis. Tu m'as brisé. J'attends ce moment depuis le moment où tu m'as fait dénuder.
Silencieusement, je me relève en transformant mes jambes en flammes pour ne faire aucun bruit. Derrière Itarra, j'ai la gorge serrée. Je regrette déjà ce que je vais faire. Mais je peux ne pas l'éviter. Je ne peux pas lutter. Ce n'est pas un choix, c'est une obligation.
D'un geste vif, j'enfile le bijou au cou d'Itarra.
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Je me redresse en sursaut plongé dans le noir toujours empli des remords de Vestia, de sa colère et de son impuissance. Son cœur déchiré d'avoir condamner une deuxième fois Itarra pour l'enfer.
Axel me demande :
- Tout va bien ? Une douleur quelque part ?
Je suis toujours perturbé. Les sentiments de Vestia me pèsent encore sur le cœur. Pour ne rien arranger, la vision d'Itarra me revient en tête. Je revois Otarin nu, je ressens une nouvelle fois ses mains remonter le long de mes jambes.
Je suis tétanisé. Je n'arrive plus à penser. La douleur des deux femmes me remplit la tête.
- Xander, Xander, s'écrit Axel. Qu'est-ce qui se passe ? Concentre-toi sur ma voix.
Il pose une main sur mon épaule. Il continue :
- Xander, dis-moi quelque chose. Est-ce que tu vois ma main ?
Le contact de sa main comme me ramène à la réalité, puis je reprends conscience d'où je suis. Je refais mentalement le fil des derniers évènements, et me rappelle que j'ai perdu l'usage de mes yeux. Je les liquéfie et je vois Axel, me prendre la tension, j'entends le bruit assourdissant de la pluie sur le toit du bâtiment. Puis après quelques secondes à reprendre ma respiration, j'arrive à lui répondre :
- Oui, je la vois.
- Tu m'as fait peur. Qu'est-ce qui se passe ?
Je craque. Je revois les deux filles. Je ressens de nouveau leurs douleurs :
- J'ai vu... J'ai vu mes amies souffrir. Otarin les manipule comme des pantins.
- C'est fini maintenant. Tu es là dans le monde réel.
Je respire, oublie l'horreur pour me reconcentrer sur le corps extraordinaire d'Axel. Malgré tout j'ai besoin de prendre l'air, je me sens asphyxié, dans la clinique. Je lui lance :
- Merci beaucoup Axel, mais j'ai besoin de prendre l'air.
J'enlève la tenue jetable en même temps que je fais apparaître ma robe d'eau et me précipite dehors.
Mais à l'extérieur, je reste quelques secondes stupéfait sur le pas de porte. Déjà l'odeur est pestilentielle, ensuite le spectacle est semblable à celui que Shinen avait rêvé. Seulement ici, il restait des survivants pour ramasser les restes des cadavres déchiquetés.
Il est tard, la nuit est tombée mais le personnel du campement continue de nettoyer le massacre. Pendant que des tracteurs réunissent les cadavres des monstres en d'énormes amoncellements, des camions comme celui que j'avais emprunté, range les cadavres dans les cercueils de bois noir.
Axel me rejoint et lâche :
- Tu ne m'as pas laissé le temps de te prévenir que ce n'était pas vraiment carrossable dehors.
- Comment ça s'est arrêté ?
- Tu rigoles là ? réplique-t-il en rigolant.
Sous mon air surpris, il lâche un ricanement :
- Je vais arrêter de chercher à te comprendre.
Il sort une cigarette, l'allume en s'adossant au montant de la porte et continue :
- Si je suis en vie c'est grâce à toi Xander, ça vaut pour chaque personne que tu vas croiser dans le campement.
- Mais Griffing m'a aidé, sans ses dômes, plus de gens serait mort.
- Oui, mais ce n'était qu'une question de temps avant que les dômes ne soient détruits par ces bestioles.
- Qu'est-ce que j'ai fait du coup ?
- Tes clones étaient impuissants face à la masse. Puis d'un coup, le ciel s'est assombri. La température à chuté d'un coup. Tellement que sur le coup tout a givré.
Il fait une pause, fume un coup avant de reprendre.
- T'es apparu dans le ciel, et aussitôt tout a convergé vers toi. C'était impressionnant. L'essaim t'as tourné autour quelques secondes avant que les monstruosités commencent à chuter une à une comme des mouches. L'abdomen totalement explosé.
Il tire une nouvelle fois sur sa cigarette avant de continuer :
- Mais quand ça s'est arrêté, il en restait encore une bonne partie en l'air. D'ailleurs tu veux savoir pourquoi ils avaient le ventre qui avait explosé ?
J'acquiesce.
- On les a comparés avec ceux que t'as tué après. En fait, c'était toutes les bestioles qui avaient mangé. T'as dû leur faire exploser les restes humains, je ne sais pas comment.
- Et ensuite ? je le relance impatient de connaître la suite.
- La température s'est encore rabaissée. Et tout ce qui te tournait autour a blanchi. Et d'un coup ils se sont retourné sur leurs potes qui descendaient de la faille. En même temps qu'ils s'entretuaient tu as continué d'en convertir. A la fin tu avais une énorme armada de bestioles de ton côté. Et à l'instant où elles ont commencé à rentrer dans la faille, le ciel s'est refermé dans un grand craquement. Toutes les vitres gelées ont explosé ! Et toi tu as réduit toutes les bestioles blanches encore de notre côté en bouilli.
Je reste silencieux face au récit surréaliste. Sans Cléo, je n'aurais jamais réussi, elle a décuplé mes pouvoirs bien au-delà de mes limites. Comme l'a dit Lucie, il faut que je la retrouve. Je lui demande :
- C'est la première fois, que ses « choses » vous attaquent ?
- Oui. J'en viens à croire que seul Hadès ne nous a pas abandonné.
Je me tourne vers lui, surpris :
- Hadès ? Vous le connaissez ?
- Oui. Le dieu des enfers. Mais plus personne n'y croit sur Colfia. Plein de religions tierces sont apparues pour les remplacer mais elles n'ont jamais eu la puissance qu'insufflait l'Olympe. Dans tous les cas, il semble que les forces supérieures nous aient abandonnées. Si elles veillaient, Otarin ne serait pas là.
- Je suis d'accord, ça fait bien longtemps que sur Terre, on est laissé à nous même. Sauf que nous des Otarin on en a eu plus d'un.
- Et des déluges d'horreurs ?
- Pas encore, ou en tout cas officiellement.
- Et si ce n'était que le premier d'une longue liste ? Qu'est-ce qu'on fera quand tu partiras ?
- Je ne sais pas. Après avec toutes les innovations que vous avez, je suis sûr que vous trouverez une solution.
- Oui, en plus Otarin à l'air d'avoir de bons ingénieurs, ricane-t-il.
Soudain, une sorte de jeep volant de la même manière que les camions, s'arrête en trombe devant. Axel lâche avant de partir :
- Tiens, voilà les autres. Je te laisse j'ai encore pas mal de boulot.
Griffing et Manon descendent avec un grand sourire. Manon s'exclame :
- Ça va mieux que tout à l'heure, à ce que je vois.
- Oui, je souffle.
- On t'a récupéré dans un sale état tout à l'heure, lâche Griffing. Tu m'as vraiment fait peur.
- C'était pas le plus dur à vrai dire, dis-je avant que la vision de Vestia ne me revienne. Mais j'ai vu Vestia et Itarra...
- Venez en parler à l'intérieur, nous pousse Manon.
Je les suis à l'intérieur de l'infirmerie, et on s'assoit dans un cabinet vide. Je leur raconte ce que j'ai vu. Griffing est fou de rage. Manon lâche :
- Ils ont donc réussi à faire évoluer leur technologie.
- Comment on désactive ces colliers ? demande Griffing. Et puis si Vestia n'avait pas de collier, elle devait avoir une puce comme celle que vous m'avez retiré à l'arrivé au campement.
- S'ils sont basés sur la technologie des anciens. Ils fonctionnent totalement indépendamment du réseau donc ils ne sont pas piratable ni ne peuvent être brouillé. La seule solution est de les briser ou de les retirer.
- Les colliers sont bien trop faciles à retirer, grogne Griffing. Itarra et Shinen en auront forcément une, d'ici qu'on arrive. Je ne pourrais pas les retirer si je ne les vois pas.
Je soupire en pensant à la complexité de la situation :
- Si on n'arrive pas à les neutraliser, Otarin aura les trois de son côté.
- Orclanne m'a dit qu'on commencerait à établir une stratégie d'attaque à partir de demain, soupire Griffing. Mais avec l'attaque, je pense que la réunion va être reportée.
- Sûrement, l'appuie Manon. Mais après il vaut mieux prendre le temps de se préparer.
- Je ne veux pas les faire attendre plus longtemps, réplique Griffing. Plus on attends, plus Otarin semble préparer à nous recevoir et plus les autres souffrent !
- Et si vous tombiez à nouveau dans un piège d'Otarin ? Votre aide n'arrivera jamais.
- Tu as raison, grommelle-t-il. Mais j'ai tellement horreur d'attendre en les sachant là-bas.
- Moi aussi, je tente de le rassurer. On va faire au plus vite.
- Pour l'instant, il vaudrait mieux vous reposer pour être prêt à partir, et avoir le plein d'énergie.
- Tu as raison, répond Griffing en sortant de la pièce. Bonne nuit.
Je regarde Manon et lui souris :
- Je ne sais pas s'il va tenir longtemps.
- Moi non plus. Je vais essayer de faire avancer les choses, mais avec l'attaque et toutes les pertes qu'on a subi ça va être compliqué.
- On avisera demain, dis-je en me levant la fatigue commençant à me tirer sur les yeux.
- Oui, bonne nuit, Xander. Tu l'as bien mérité.
Je rejoins ma chambre, prend rapidement une douche avant de me jeter dans mon lit. Même si l'adrénaline de la vision m'avait sur le coup empli d'énergie, maintenant disparue, la fatigue se ressent sur chacune des parties de mon corps. Je ne tarde pas à m'endormir.
Cette fois pas de rêve. C'est la lumière de la chambre qui me réveille durement, peu avant que Manon rentre en trombe, avant de s'exclamer :
- Ah tu dors toujours ?
- Plus maintenant, je soupire encore à moitié endormis. Il est quelle heure ?
- Presque treize heures.
Je me relève et surpris de voir Griffing je demande :
- Qu'est ce qui se passe ? J'ai loupé quelque chose ?
- Otarin a annoncé une parade surprise, pour justement treize heures, explique Manon. Ce n'est pourtant pas dans ses habitudes d'organiser des évènements à la dernière minute.
Comme recevant une notification. Elle s'arrête subitement fixant le vide avant de s'exclamer :
- Tiens ça commence.
Elle fixe un mur, il s'allume et projette les images d'une immense parade.
De chaque côté de l'exhibition, les gens sont nombreux et se presse sur les grilles qui isole la route. Au départ les premiers chars, présentent les nouvelles innovations militaires fraîchement sorties des usines d'Otarin.
Tout semble banale pour un dictateur comme Otarin, mais le bouquet final de la parade me donne un coup de chaud. La caméra fait un zoom sur Otarin.
Il est assis à l'arrière d'une décapotable, le bras par-dessus l'épaule d'une femme. Son visage souriant est fortement maquillé, ses cheveux roux sont coiffés d'un gros chignon. Elle est habillée d'une multitude de voiles fin et rouge, cachant à peine son corps.
Malheureusement, je ne suis pas surpris de reconnaître la pierre rouge sur son front ne laissant pas de doute. Elle paraît heureuse et salue le public avec joie.
Quelques minutes plus tard, Otarin prend la main de Vestia comme si c'était son épouse, et la mène sur une estrade où une énorme caisse est disposée. Il se place face au public et d'une voix artificiellement amplifiée par un dispositif invisible, il s'exclame :
- Bonjour à tous, merci d'être venu aussi nombreux à cette parade. De nombreuses rumeurs ont commencé à circuler et je me devais de vous répondre et d'établir la vérité.
Il fait une pause attendant l'attention totale du public avant de reprendre de plus belle :
- Hier le palais a été attaqué et deux de mes plus fidèles gardes ont été sauvagement abattu. Après le vol d'un de mes nouveaux vaisseaux mettant en danger chacun de vous, la rébellion s'est attaquée à un de nos camps d'entraînement. Je suis désolé pour les pères qui ne verront pas leurs fils rentrer, mais le camp entier a été sauvagement massacré. Il n'y a pas eu un seul survivant...
- On est d'accord qu'il parle de la carrière d'hier ?
Manon acquiesce au moment où Otarin explique :
- La rébellion semble prendre confiance pour autant s'attaquer à moi. Mais j'aimerais aujourd'hui leur montrer ma puissance et à quel point il devrait s'en arrêter là.
Il passe une main autour de l'épaule de Vestia et s'exclame :
- Vous l'avez peut-être déjà reconnu mais voici la grande et célèbre Vestia. C'est désormais ma reine, elle est à moi et à personne d'autre. Aujourd'hui je suis votre Dieu ne m'est plus impossible, j'ai vaincu la vieillesse depuis des décennies, et ramené Vestia à la vie.
Il fait alors une pause. La caméra se tourne vers le public ébahi par l'annonce. Puis quelques secondes plus tard la caméra rebascule sur Otarin l'air grave, avant qu'il ne reprenne :
- Et maintenant voici ce qui attend tous ceux qui tenteront de m'atteindre ou quiconque m'appartenant.
La boîte au milieu de l'estrade s'ouvre dévoilant Itarra attachée, à un poteau, totalement nue. Son corps pâle est recouvert d'ecchymoses, ses lèvres sont éclatées, ses cheveux noirs en pagailles.
Le public est silencieux, surpris, et terrifié de la suite. Otarin lui toujours droit et fière continue :
- Voici une chienne qui a essayé de m'attenter. Elle va le payer de sa vie, et permettre une démonstration visuelle pour ceux qui aurait l'idée folle de l'imiter.
Au moment où il fait un signe à Vestia, je sais très bien ce qu'il va se passer. Le temps semble ralentir. Mon cœur s'accélère espérant que je me trompe.
Le visage impassible de toute émotion, Vestia tend ses mains vers les jambes d'Itarra. Aussitôt des flammes en sortent et enflamme son fin corps nue.
Ses cris de douleurs résonnent dans toute la chambre. Je suis choqué. De plus Otarin a dû s'arranger pour lui faire subir une mort lente. Car contrairement à la désintégration de Griffing pendant l'entraînement, plusieurs minutes s'écoulent avant que ses cris cessent enfin.
Je suis tremblant, les larmes aux yeux. Même si elle endure la douleur, elle reste humaine, brûlée vive... personne ne mérite ça.
Otarin un grand sourire aux lèvres sous les yeux terrorisés du public s'exclame :
- J'en profite pour vous annoncer que j'ai décidé de m'unir avec Vestia. Notre mariage aura lieu la semaine prochaine !
Vestia le saisit par la taille et l'embrasse langoureusement. Soudain le mur projetant l'image explose.
Je sursaute surpris et me tourne vers Griffing en forme Raptium. Il s'exclame d'une voix rauque et emplis de haine :
- C'est fini. Je ne peux pas rester là pendant qu'ils jouent avec eux comme de vulgaires jouets.
- C'était en direct là ? je demande.
- Oui, souffle Manon encore surprise par l'explosion.
- Xander, t'es prêt ? On part maintenant !
Je me lève, enfile rapidement des habits pendant que Manon tente de le ressaisir :
- Mais on ne peut pas maintenant, les seuls soldats du camp viennent de mourir de l'attaque.
- Vous avez déjà fait bien assez, répond Griffing sèchement. Maintenant c'est entre nous et lui.
- La précipitation n'est pas une bonne chose, Griffing.
- On va attendre quoi ? Qu'il jette Shinen du haut du palais, s'exclame-t-il en faisant disparaître son apparence de combat.
- Alors au moins emmenez-moi. Même si je vous laisse une voiture, vous ne connaissez pas la route jusqu'au palais.
- Elle marque un point, je dis en regardant Griffing.
- Bon d'accord jusqu'au palais, cède Griffing, on avisera après.
On sort de la chambre et se dirige vers le parking. Griffing est pensif, et Manon semble discuter avec d'autres gens via ses implants de communication.
Puis elle s'arrête devant la jeep qu'elle avait utilisé hier soir. Griffing monte à l'avant, pendant que je grimpe sur la banquette arrière, Manon au volant.
Sur la route vers le palais, Griffing me demande encore le ton froid et enragé par ce qu'on vient d'assister :
- Comment t'as fait pour l'attaque ? La température, le vol, l'implosion des centaines de monstres et le contrôle par la glace de milliers d'autres. C'est bien plus que les quelques clones de la carrière.
- Ce n'était pas vraiment moi. Depuis que je suis arrivé chez les rebelles, je déchaine des tempêtes sans avoir aucune de mes apparences. En fait, je ne sais pas comment. J'ai réussi à créer un lien avec Cléo. Et c'est elle qui contrôlait mon corps pendant le combat.
- Cléo ?
- Tu te rappelles des êtres de lumières dont nous avait parlé Lucie ? Elle en fait partie !
- Elle t'a dit tout ça ? demande Griffing.
- Non je l'ai vu, comme j'ai vu Itarra dans la chambre rose.
- Et t'as appris autre chose ?
- En fait ce sont six sœurs. Elles cherchaient à rentrer chez elle. C'est l'une d'elle, Cladior qui a créé le Mal avant de le lancer sous la forme d'un astéroïde sur la Terre.
- Et il ressemblait à quoi le Mal ? Tu as pu le voir ? demande Griffing.
- Bah comme l'avait expliqué Lucie, je réponds. Mais ils étaient des milliers, ils ne cessaient de se transformer en tuant tout sur leur passage.
- Donc ça signifie que les créatures qui nous ont attaqué n'en faisait pas partie, résume Griffing.
Il fait une pause se caressant la barbe avant de continuer :
- Bon, partons du principe que le Mal a réussi à être sur les cinq mondes comme Lucie nous avait dit. Ça nous fait un ennemi. Ensuite il y a les bestioles qui sont autre chose.
- Et Otarin là-dedans ? je demande.
- Juste un humain avec un peu trop de pouvoir, répond Griffing. On n'aurait jamais dû perdre autant de temps avec lui. Chacun de nous aurait pu le vaporiser, si on avait été un peu moins naïf et mieux entraîné.
Je suis pensif, remuant tout ça dans ma tête avant d'avoir une lumière :
- Et si tout était lié ?
- Comment ce serait possible ? réplique Griffing.
- Nos pouvoirs permettent d'éviter un danger sur un ou plusieurs mondes.
- Ça on est d'accord, acquiesce Griffing.
- Et si Otarin n'était qu'un pantin du Mal. Tu as un peu suivi, ce qu'il a fait. Il a détruit toute la prospérité de Colfia. J'ai survolé Lorquia, c'est la misère, les gens souffrent. Colfia n'est qu'une bulle qui vie sur un amas de souffrance.
- C'est malheureusement vrai, soupire Manon.
- C'est bon j'ai compris, s'exclame Griffing. Si cette Cléo ne nous avait pas aidé, nous serions probablement morts...
- Et pas dans cette voiture en route pour le palais, je termine.
- Ok... ok, encaisse Griffing. Mais du coup ça signifie aussi qu'on est à l'origine du massacre du camp.
Je n'avais pas pensé à ça. Mon cœur se serre. Si j'avais raison, sans moi, cette femme que j'ai vu mourir devant mes yeux serait toujours vivante.
Le silence s'installe dans la voiture. Je me sens obligé de l'interrompre pour m'excuser :
- Je suis vraiment désolé.
- Ce n'est pas la peine, m'interrompt Manon. Ce n'était pas volontaire. Ce Mal est le seul responsable du massacre.
Quelques minutes s'écoulent avant que perdu dans mes pensées à repasser les évènements passés je réalise :
- L'arme ! L'arme d'Itarra, il faut vraiment qu'on la retrouve au plus vite avant qu'elle ne soit perdu.
- Vestia en saura peut-être plus une fois qu'on l'aura libérée.
Si on la libère vivante, je songe...
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