Chapitre 56 : Le duel

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HORIS


Une aurore bienfaitrice se profilait par-dessus la capitale. Pas un nuage n’enlaidissait la voûte azurée à l’extrémité de laquelle chatoyait un éclat rougeâtre. Des rafales de vent issus de l’ouest modérait l’intense chaleur que le plâtre, la pierre et les faïences tempéraient tant bien que mal. Des ombres offriraient une protection supplémentaire à quiconque dans les allées et avenues d’Amberadie.

Ce matin-là, cependant, les citadins brillaient par leur absence dans les rues d’Amberadie.

Obéissance aux consignes tel un assujettissement. À défaut de fuir, la plupart des citoyens se terrent dans leurs caves, espérant que la bataille se termine vite et bien. Je leur souhaite d’être préservés quelle que soit leur position sur l’impératrice. Pour beaucoup, ne pas soutenir l’impératrice revient à la mort, voire pire.

Horis cheminait vers sa sentence. Si un air renfrogné déparait ses traits, il ne se décomposait pour autant. Il resterait raide et étroit, sans verser une larme ni un gémissement, sinon son statut de cible s’accentuerait. Une cinquantaine de miliciens s’assurait qu’il ne risquât rien d’insensé en sus de la corde en kurta lui liant les poignets. Leur sempiternelle brigandine noire et rouge se parait de renforcements en acier, et alors que des sillons creusaient leur faciès, leurs phalanges blanchissaient à force de tenir aussi fort leur arme.

Quelque chose à prouver ? Certains ont une loyauté sans équivoque, d’autres ont été récemment recrutés pour diverses raisons, parfois la contrainte. Eux non plus, je ne peux pas les juger. Mais je peux me défendre au besoin.

Balayer les alentours pinçait le cœur de Horis. Tout ce qu’il apercevait se résumait à des hordes de militaires, miliciens et inquisiteurs radicaux accourant vers les limites de la ville, outre une poignée de citoyens égarés qu’ils sermonnaient dans le meilleur des cas. Ses perspectives étaient limitées par la densité de son escorte, pourtant il percevait de détails essentiels. Les plus jeunes belligérants pour qui les assaillantes coruscations constituaient le moindre de leurs tracas. Les vétérans qui scrutaient le ciel, comme en quête d’une inspiration, inhalant un air déstabilisant. Tous n’étaient pas égaux, chacun se préparait à sa manière pour l’inévitable.

Trop focalisé sur ces inconnus, le mage avait ralenti la cadence, ce pourquoi Badeni le harponna et rapprocha sa lance de sa gorge. Des yeux injectés de rouge s’adjoignaient à ses grommèlements.

— Ne tente rien d’imprudent ! avertit-elle.

— Cette peur doit être conservée pour plus tard, déclara Horis. Quand les menaces ne suffiront plus.

— Si impavide… Nous te guidons pour ton exécution, tu t’es bien rendu compte ?

— On me disait la même chose lors de mon précédent passage dans l’arène. J’ai confiance.

Badeni pesta si fort qu’elle perturba consœurs et confrères. Elle avança à brûle-pourpoint, comme si le concis échange avec son interlocuteur avait ravivé son empressement. Plus elle parcourait l’enchevêtrement d’allées et plus elle devait contenir ses frissons. Hélas, la garde se trahissait à maintes reprises, et ne put s’empêcher de jeter de vifs coups d’œil de temps à autre.

Elle appartient à cette catégorie de miliciens trop enfoncés dans leur idéologie. Protéger Bennenike, à ses yeux, est une question de vie ou de mort. Nous sommes arrivés à de tels extrêmes depuis longtemps, mais maintenant est le moment décisif. Inclinant la tête, Horis sollicita la milicienne dont les feulements subsistaient.

— Autrefois, dit-il, je ne cherchais pas à excuser, seulement à comprendre. Je connais votre histoire, Badeni. Bennenike vous a délivrée d’une violente esclavagiste, depuis vous pourchassez les mages comme s’ils étaient tous identiques.

— Et je ne regrette rien, affirma Badeni. Vous êtes une engeance à éliminer.

— Il ne vous est jamais venu à l’esprit que Ghanima n’était pas dangereuse parce qu’elle maîtrisait la magie ?

— Foutaises ! Inutile de jouer avec les sentiments. Surtout de la part de quelqu’un qui s’est allié avec le type qui m’a crevé un œil. Et qui accessoirement a mené à la destruction de Doroniak.

— Les miliciens avaient aussi leur part de responsabilité. De plus, pour rappel, j’ai tué alors que vous avez échoué.

De la foudre jaillit des iris de Badeni, proche de se ruer vers le prisonnier. Quelques-uns de ses homologues la retinrent même s’ils dévisagèrent Horis tout aussi hostilement.

— Je n’étais même pas là ! s’écria la garde. Qu’importe. Je n’ai pas à justifier ma position, surtout à toi. Quand je parlais d’ouvrir les yeux… Les choses se déroulent sans surprise.

— Soyez plus claire, insista Horis.

— Soit Bennenike est admirée, soit elle est honnie. Aucune alternative n’est envisageable dans les circonstances actuelles. Mais les détracteurs de Bennenike t’adorent, Horis. Ils veulent te voir réussir, là où nous avons œuvré pour sceller la destinée. De nombreux parjures seront déçus.

— C’est pour eux que je lutte. C’est pour eux que, malgré vos efforts, je vis encore, défiant ainsi vos attentes.

— Plus pour longtemps, sale monstre ! Combien d’innocentes vies devras-tu prendre avant que le monde soit débarrassé de toi ? Horis Saiden… Beaucoup de noms courent sur toutes les oreilles, mais le tien transparaît en particulier ! Tu serais l’espoir d’une insurrection en perdition ?

— Je me fiche de la manière dont je suis appelé. J’aimerais juste ne plus être enchaîné, quelle que soit l’issue.

— Lorsque ça arrivera, deux dagues courbes transperceront dans ton cœur ! C’est un jour maudit, et j’ai bien peur de ne pas y survivre. Tout ce que j’espère, c’est de mourir après toi.

Victime devenue bourreau. Impossible de la haïr, mais il faudra accomplir le nécessaire. Pas que je sois encore tiré d’affaire… Badeni cessa de toiser le captif, au lieu de quoi accéléra-t-elle encore la cadence. Chacun des miliciens de l’escorte s’adaptait à cette vitesse comme ils fendaient la cité en un temps surprenant. Déjà le cœur de Horis s’alourdissait et ses tempes s’humidifiaient de transpiration, mais il se préservait bon gré mal gré pour l’inéluctable. Il ne pouvait ni se permettre de prolonger les discussions avec ses ennemis, ni de vagabonder de regard comme de pensée au gré d’une ville trop sereine pour être saine.

Avant même de le réaliser complètement, il fut immergé dans les profondeurs de l’arène.

On l’avait cornaqué au sein d’une opacité à laquelle il était déjà familier. Ensuite, au fur et à mesure, l’éclat dont on l’avait séparé ressurgit de nouveau. Dominait toujours la grille de kurta sous laquelle le sang et le flux avaient jailli d’abondance, mais les lieux chatoyaient toujours dans la quiétude journalière.

Horis faillit se pétrifier sitôt libéré de ses liens. Il écarquilla ses yeux à l’excès en découvrant son environnement. Sur les gradins s’étaient installées des rangées complètes de miliciens, qui malgré leur compacité ne s’étaient pas délestés de leur arme. La plupart d’entre eux restaient assis, mais une fraction non négligeable s’était redressée pour mieux le vilipender. Les insultes frappèrent tel un incoercible assaut. Des regards de haine braqués vers le mage, des lames dressées comme si la distance s’était réduite.

Un public de fidèles lourdement équipés… C’était inévitable. À l’abri, espérons, les citoyens n’ont pas le luxe d’assister à ce duel. Ce qui signifie aussi que chaque spectateur sera contre moi.

Déjà lanciné par le nombre, le jeune homme n’avait pas cessé de tressaillir. Pour cause s’imposait une présence chacun de ces individus, dont l’ombre se démarquait même sous le métal annihilateur. Elle progressait par pas feutrés, un fin sourire au bout des lèvres. Elle avait la posture, membres légèrement recourbés, tout comme les sens aux aguets. Le long de ses dagues scintillaient les stigmates d’une multitude d’affrontements, incluant son adversaire du jour. De surcroît, ses pointes miroitaient la nitescence à hauteur de sa taille.

Nafda plissa les paupières en jaugeant son rival. Quoiqu’elle se maintînt à une distance de plusieurs mètres, rarement s’était-elle sentie aussi proche de Horis. Parmi les exceptions heurtait le souvenir des jours précédents, lorsqu’ils avaient dialogué dans la sombreur des cellules. Peu d’indulgence transparaissait de sa mine, aussi Horis lui rendit la pareille.

Ils se fixèrent, leur cœur tambourinant contre leur poitrine. Ils se mesurèrent, exsudant malgré eux de par les offensives de chaleur. Au dénigrement de Horis succédaient les louanges adressées à Nafda de plein poumon, laquelle n’en restait pas indifférente bien qu’elle s’évertuât à se concentrer. Quand commençons-nous ?

Mais la voix de Bennenike transperçait les plus inébranlables volontés. Sur son siège favori, Badeni à ses côtés, elle obtint encore le silence de ses fidèles d’un claquement de doigts. Ses traits semblaient s’être gravés dans le marbre comme elle évaluait Horis et Nafda d’un même âpre regard.

Elle s’apparentait à une statue une fois debout.

— Inutile de formuler un long discours, déclara-t-elle. Nous savons ce que tu es, Horis. Non content de t’être enfoncé dans une voie maléfique, tu as commis de multiples crimes contre l’Empire Myrrhéen et ses habitants. Nafda va s’assurer personnellement que la sentence, si longtemps formulée, sera exécutée en bonne et due forme.

Le public s’anima de cris sous l’impulsion de leur despote. Plus illuminée que jamais, d’une grandeur incomparable, sa cape écarlate soutenant sa stature, Bennenike s’adressa de pleine voix à tout un chacun :

— Compagnons ! Ce jour va s’inscrire indubitablement dans l’histoire. En ce moment, il est ardu de prédire si nous aurons repoussé l’armée adverse d’ici la fin de la journée, ou si Amberadie deviendra un triste vestige d’un passé glorieux et tumultueux. Ce qui est certain, en revanche, c’est que les envahisseurs atteindront nos murailles d’une minute à l’autre ! Vous devrez protéger cette cité et ses âmes sans plus tarder dès ce moment. Ne considérez pas ce duel auquel vous êtes sur le point d’assister comme un divertissement. Plutôt comme une leçon. Observez attentivement la manière dont Nafda, mon meilleur élément, luttera contre cette engeance nommée Horis. Une fois qu’elle aura arraché son cœur, vous pourrez jubiler et applaudir, sans crier victoire trop vite toutefois. Car vous devrez faire de même avec les milliers de mages qui déferleront bientôt en Amberadie, et seulement ainsi la paix sera rétablie ? Je vous laisse méditer là-dessus et apprécier le combat.

Bennenike inclina la tête et détailla sa protégée.

— Voici l’opportunité dont je te parlais. Celle pour laquelle tu as littéralement tué. Accomplis ce pourquoi je t’ai formée, Nafda ! Exécution !

Les duellistes s’étaient positionnés, proches de s’extirper de leur immobilisme. Leur corps s’était incliné à l’approche du moment tant attendu. Mage et assassin au cœur d’un gouffre, entre des tribunes requérant réflexion et divertissement, à quelques mètres l’un de l’autre. Ils se sondèrent durant de longues secondes, se tournèrent autour sans se quitter du regard.

Pas d’échappatoire visible. Une hostilité indubitable à mon égard. Des conditions rassemblées pour une condamnation sans équivoque. Et assez particulières, bien différentes de nos précédentes rencontres.

Le heurt fut précédé d’une interpellation.

— Nafda, souviens-toi de notre dernière conversation. Je n’aimerais pas l’avoir formulée dans le vent. Es-tu vraiment cette assassin assoiffée de sang, transmettant la peur par soumission à la volonté impériale ? Cesse de paraître, tu dois…

— Nous avons assez palabré ! Bats-toi et meurs !

Un rugissement semblable à un tonnerre. L’acier échauffé, paré à pénétrer dans la chair, fendait déjà l’air. Au tournoiement de la paire de dagues défilaient de véloces présages contre lesquels le mage se mettait en garde. Mais l’assassin approchait, ses pas tels des bonds, et fondit sur son adversaire comme par instinct.

Horis s’était concentré. Des spirales de flux voletaient avec fluidité au niveau de ses paumes. Le bout de ses doigts se courbait à l’abrupte libération de sa magie, qui enfin circulait harmonieusement dans son corps. Instantanément il avait croisé des bras, et des particules bariolées convergèrent vers le tranchant des lames ennemies.

S’ensuivit un croisement tonitruant. Poings contre dagues, le premier impact suite auquel les miliciens retenaient leur souffle. De la collision se propagèrent des ondes déchirantes que seule la grille en kurta parvenait à endiguer. Horis et Nafda se crispèrent, résistèrent au choc, évitèrent d’être propulsés de part et d’autre de l’arène. Mais se prolonger dans cette position leur coûtait une énergie colossale. À ce rythme ils flancheraient, à cette cadence ils choieraient.

Ils gagnèrent de nouveau en distance. Optèrent pour une autre stratégie. S’élancèrent dans les étapes subséquentes de leur duel. Et se déchaînèrent à la cadence des cris du public.

Horis généra une salve d’orbes qu’il envoya à une vitesse inouïe. Lesquelles s’amplifièrent en s’approchant de sa cible. La plupart furent déviées, certaines la frôlèrent, et surtout le choc la secoua quelque peu. Une fois qu’elle fut déstabilisée, le mage s’introduisit dans ses défenses, se rua pour un coup dévastateur. Elle eut beau lever sa garde, ce fut de justesse, et la projection résultante l’éjecta plusieurs mètres en arrière.

Front plissé et dégoulinant de transpiration, respirant lourdement, Nafda riposta quelques instants plus tard. D’une roulade en l’air elle se rétablit à bonne distance de son adversaire. En tourbillonnant elle surprit Horis. Au-delà des miroitements s’érigeait une véloce figure dont les assauts accéléraient. Elle se risqua à une attaque frontale, puis elle lancina de biais. Chaque fois Horis érigeait un mur hyalin derrière lequel il se couvrait. Chaque fois Horis faiblissait à l’accumulation des impacts.

Elle ne me laisse aucun répit ! C’est le contraire qui m’aurait étonné. À force de s’opiniâtrer, Nafda finit par briser le bouclier de Horis. D’une dague elle feinta, de l’autre elle essaya de cisailler la figure de son opposant. Tout ce que le jeune homme récolta se résuma à une coupure à sa tempe gauche, mais déjà le filet de sang l’alarma. Il choisit de reculer, de déployer des rayons de lumière destinés à la déstabiliser. C’étaient des sorts directs et peu subtils, seulement temporaires, censés lui accorder un moment de réflexion. Je la dominais un peu avant ! Il me suffit de reprendre mon avantage.

Esquives et parades s’enchaînaient si Nafda était beaucoup sollicitée. Elle sautait et pivotait à une célérité si soutenue que Horis peinait à répliquer. Lui aussi s’élançait pourtant dans une mêlée où son flux tourbillonnait et voltigeait à haut rythme. S’efforçant de varier les sorts, le mage déséquilibrait une assassin dont l’instinct était mis à rude épreuve, et les éléments s’entremêlaient et diapraient au sein d’une arène devenue tumultueuse.

Ils s’arrêtèrent, pantelèrent, et se fixèrent une fois encore.

Depuis le temps, Nafda, nous nous connaissons bien. Une lame fusa dangereusement. Dans sa lancée, la jeune femme entailla l’épaule de Horis, s’efforça de lui transpercer la peau, de le mettre à genoux devant elle. Je suis devenu familier avec tes déplacements, tes attaques, tes réflexes. Des particules smaragdines voletèrent en guise de guérison, mais le mage riposta bien quand le fluide vital jaillissait encore d’abondance. Son bras exécuta une grâcieuse courbe quand il déjeta l’estocade suivante tandis que des ondes concentriques hachèrent l’air. Je sais comment tu vas agir et pourquoi. Tes techniques de combat n’ont plus aucun secret pour moi. Nafda résista en grinçant des dents, riposta en tailladant. Sur ses lames couraient les marques comme le sang de son adversaire de toujours. De nouveau elle fléchit les genoux, prompte à le briser, mais elle se heurta à une sphère incandescente qu’elle esquiva de justesse. Tu n’y réchapperas pas. Plus maintenant.

Il comprit qu’elle ne méritait aucun répit. Sitôt libéré de l’étreinte de l’acier, Horis fracassa un puissant poing sur le sol de l’arène, si bien que seule la grille en kurta préserva le public du choc massif. Nafda, de son côté, faillit basculer mais conserva son équilibre. Il rassembla ensuite ses deux paumes afin de créer un amoncellement de sable. Non seulement ses iris rougirent, mais des toussotements l’incurvèrent tant qu’elle manqua de lâcher ses armes. Horis renchérit par un vortex noirâtre qui menaça de déchiqueter les membres de l’assassin. Quoiqu’elle atténuât la plupart, trop de taillades l’avait entamée, aussi s’effondra-t-elle au sol.

Je le savais que j’en étais capable ! Un sourire conquis éclaira Horis entre les ombres du kurta. De nombreux miliciens le huèrent copieusement, ce qui ne l’entrava guère dans ses mouvements. L’environnement est sauf. Je n’ai aucune vie à prendre ici, sinon la sienne. Autour de lui gravitait encore un flux bienfaisant dont il s’engorgea. Nafda forçait pour se redresser et demeurait à sa merci, au grand dam de ses alliés.

— Tu ne me priveras pas de mon meilleur élément ! tonna Bennenike.

Horis adressa un regard de défi à l’impératrice qui se crispa en retour.

— Tels sont les règles du duel, affirma-t-il. Vous auriez dû admettre que mes chances de gagner étaient non négligeables.

— Ne crie pas victoire trop vite. Au besoin, j’interviendrai.

De la sueur perla le long de sa tempe lorsqu’il avisa. Puisque les miliciens l’injuriaient déjà, puisqu’ils ne séparaient jamais de leur arme, ils pouvaient se joindre à l’arène à tout moment. Une telle présence suffit à distraire Horis, ce dont profita Nafda. Elle échoua certes à lui effectuer un croche-pied, mais dans son mouvement elle se remit sur ses deux pieds et lancina derechef.

Horis ripa. La dague avait frôlé sa cage thoracique, avait manqué de pénétrer entre ses côtes. Au lieu de quoi son flanc et sa cuisse souffraient de taillades. À son tour il était sur le point de basculer, de calancher sous le sourire mesquin de son adversaire. Un genou à terre, il dressa une égide magique, atermoya le moment critique autant que possible.

Pendant que Nafda s’acharnait, il se mit en quête d’une échappatoire. Elle se situait indubitablement au-dessus de l’assassin et de la grille en kurta. Elle se trouvait au-delà d’une foule en appétence de son sang et d’une impératrice trop guillerette.

Émergea un symbole dont il avait si longtemps rêvé. Une batelée de condors volait en triangle dans le ciel, le fendirent à haute vitesse. Nul ne perçut le sifflement sinon celui qu’ils sauvegardaient depuis tout ce temps. Si leurs yeux ne se posèrent pas sur ledit jeune homme, leur passage précéda quelque chose de plus grand encore.

Des secousses ébranlèrent l’arène toute entière. Des dizaines de miliciens perdirent l’équilibre et auraient chuté si leurs camarades n’avaient point été là. Le tremblement de terre se prolongea jusqu’à la loge de Bennenike qui fit semblant de ne rien sentir. Pourtant, à la vue des fissures striant les estrades, à la vibration démesurée des armes de ces combattants, elle comprit de quoi il tenait.

Et il n’y avait nul besoin de déchiffrer son expression. Plutôt d’apercevoir la sueur qu’elle essuya et les tressaillements qu’elle refoula, attirant jusqu’à la sollicitude sa protégée.

— Ils sont arrivés plus tôt que prévu, dit-elle. Préparez-vous, soldats ! Quitter l’arène et battez-vous jusqu’à la mort pour protéger vos familles ! Je vous mènerai jusqu’à la victoire ! Mais d’abord…

Pour Horis, le chaos grandissant constituait un avantage.

De premiers nuages s’accumulèrent dans le ciel. D’ici il ressentait la convergence de flux issu d’une multitude de sources desquelles il devait réduire la distance. Trop occupés à préparer leur riposte, miliciens et militaires prêtaient moins attention au jeune homme. Bennenike ne l’avait pas lâché du regard, et encore moins Nafda. Il outrepassa toutefois leur dédain et leur riposte afin de sonder ses proches alentours.

Oui ! L’échappatoire était là depuis le début. Juste sous mes pieds.

Horis observa brièvement le cratère derrière lui, repoussa de justesse Nafda devant lui. Des décharges jaillirent de ses poings, atteignant leur pleine intensité, grésillant à force de rayonner. Il frappa le sol avec une énergie gargantuesque, jamais atteinte auparavant.

À l’achèvement de la soulevée de poussière se présenta le chemin le plus incongru. Horis se glissa au sein du souterrain qu’il creusa à l’aide de sa magie. Un temps durant, il échappa à la colère des serviteurs impériaux, bien qu’il craignît d’être suivi dans cette nouvelle opacité.

Je dois rejoindre la bataille. Au plus vite.

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