Iris chapy

L’atelier était en pleine effervescence. Des spécialistes travaillaient d’arrache-pied sur tout ce que mon père avait laissé. Pendant ce temps, Daniel et Séraphina avançaient sur le second projet BULTIA, qu’ils allaient bientôt devoir déplacer hors de l’atelier pour réaliser enfin les tests en extérieur.

La porte de l’atelier s’ouvrit doucement. C’était Elowen, accompagnée de sa mère. Elowen, vêtue d’un pantalon noir et d’un haut blanc surmonté d’une magnifique veste marron, avançait lentement, s’appuyant sur une béquille. Sa mère, à ses côtés, posait sur elle un regard protecteur. Elle était simplement habillée d’un jean, d’une chemise blanche et d’un long manteau chaud marron.

« Bonjour… est-ce que je peux entrer ? » demanda-t-elle timidement en jetant un regard autour d’elle.

« Tu es déjà entrée, Elowen, » répondis-je à travers les haut-parleurs de l’atelier avec une pointe d’humour, ce qui la fit tourner la tête, intriguée, cherchant d’où venait ma voix.

J’activai mon écran principal sur l’unité centrale pour lui faire signe que j’étais là, tandis que je prévenais le personnel, ainsi que Daniel et Séraphina, que je resterais disponible uniquement en cas de nécessité — même s’ils géraient parfaitement sans moi.

Profitant de l’occasion, je changeai de tenue virtuelle et fis apparaître une longue robe ornée de fleurs de cerisier sur un fond rose nacré. Mes cheveux améthystes furent réunis en une longue tresse élégante.

Elowen s’approcha de l’unité centrale avec sa mère, qui me salua et me remercia une nouvelle fois pour ce que nous avions fait pour sa fille. Je l’interrompis aussitôt :

« Vous n’avez aucune dette envers moi. Vous avez aussi participé à son rétablissement. Nous avons tous œuvré ensemble. »

Elowen posa sa main contre la paroi lisse de l’écran, dans un geste affectueux.

« Je voulais prendre de tes nouvelles… et aussi de Jérémy. Vous ne m’en donnez pas beaucoup. D’ailleurs, où est-il ? Il n’est toujours pas venu me voir ? »

« Pour ma part, tout avance correctement, surtout avec les projets en cours. »

Je marquai une légère pause.

« En ce qui concerne mon père… il a refait une de ses crises. »

Elowen, qui nous avait aidés lors du développement du sérum, connaissait parfaitement les risques encourus. Son visage pâlit à l’annonce. Sa main, appuyée sur sa béquille, trembla légèrement.

« Comment va-t-il ? » demanda-t-elle d’une voix inquiète.

« Son état est stable. Mais il est toujours plongé dans un sommeil profond. »

Je lui montrai alors, à travers les capteurs de mon corps physique présent à l’infirmerie, une projection de Jérémy endormi.

Elowen resta silencieuse, fixant l’image.

« C’est difficile pour toi, hein ? »

Je marquai une seconde de silence.

« Je crois que je ne m’habituerai jamais à le voir dans cet état. Mais… je ne peux rien y faire. Il est têtu comme une mule. »

Elle sourit doucement et tapota la console.

« On est nombreux à vouloir qu’il revienne vite. »

« Je le sais. »

Nous restâmes quelques instants dans ce silence partagé, avant que je n’ajoute :

« Justement… Natali et moi allons organiser une annonce publique. Il est temps que la population sache qu’il est vivant et que Riveria avance malgré tout. »

Elowen haussa les sourcils, surprise mais soulagée.

« C’est une bonne idée. Tu comptes faire comme la première fois, avec ton live ? »

« Oui. Mais cette fois, le message sera différent. »

Je fixai un instant la projection de mon père.

« Je dois faire ce qu’il ferait : maintenir la confiance. Et préparer son retour. »

Elowen posa sa main contre la surface du noyau central et murmura simplement :

« On est avec toi, Iris. Tous. »

« Je le sais bien, et je t’en remercie. Mais sinon… comment toi tu vas ? Tu te remets bien du sérum ? » lui demandai-je, même si son état s’était visiblement amélioré puisqu’elle arrivait à marcher.

« C’est dur, pour être honnête avec toi. Entre ne rien ressentir et tout ressentir, c’est un monde qui s’ouvre devant moi, » répondit-elle en regardant ses jambes et sa béquille.

« Chaque jour, j’arrive à marcher un peu plus longtemps pour remuscler mes jambes, même si certains gestes restent encore maladroits. »

« Ne te précipite pas. Même si le sérum t’a soignée, il faut laisser le temps à ton corps de se muscler et de reprendre pleinement conscience de sa condition. »

« C’est ce que je n’arrête pas de lui dire, mais rien à faire, elle est devenue une vraie pile électrique depuis qu’elle arrive à bouger », ajouta sa mère avec humour.

Iris gonfla les joues de mécontentement face aux propos de sa mère.

« Je ferai en sorte que mon père pense à passer te voir quand il le pourra. »

« Ne t’inquiète pas pour ça, Iris. J’irais le voir moi-même. »

Notre conversation dériva ensuite sur plusieurs sujets anodins, sur tout ce qu’elle arrivait à faire désormais, et sur son envie de pouvoir apporter son soutien à ce monde.

Je pouvais voir dans ses yeux cette lueur briller intensément. Je lui demandai alors de s’approcher de la caméra, et je remarquai un discret anneau doré autour de son iris, presque imperceptible si l’on n’y prêtait pas attention.

Il faudrait que je fasse remonter cette observation à mon père. Iris me confirma qu’elle surveillerait aussi cela de son côté.

Après nous être souhaité au revoir, Elowen et sa mère reprirent la route.

Je repris aussitôt contact avec Daniel et Séraphina qui m’informèrent qu’ils remontaient le BULTIA à l’extérieur, dans l’entrepôt des anneaux célestes Titan.

De mon côté, il me fallait désormais préparer mon discours.

Je décidai alors d’envoyer un message à Natali pour lui demander si elle accepterait de m’aider.