Chapitre 2 : Premier pas

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Tout est derrière moi : Ma maison, ma voiture, la plupart de mes affaires. Seuls quelques vêtements et accessoires ont pris place dans ma valise.

Midi. Nous voilà en vol pour la Sardaigne. L’odeur des plateaux‑repas flotte ; la climatisation me donne un léger frisson, ou peut‑être est‑ce la fatigue. Le trajet se déroule dans une atmosphère gênée.

Assise côté hublot, je regarde les nuages défiler mais une multitude de questions vagabondent dans mon esprit. Le siège à ma gauche est libre. Le couloir nous sépare ; Bucky est posté deux sièges plus loin, en face, comme si la distance devait être choisie.

Il semble penser que nous partageons une vision commune de ce que la vie devrait être. Les ambitions professionnelles étroitement mêlées avec une vie de couple, le tout justement dosé. Suffisamment loin pour se manquer, suffisamment près pour ne pas se lasser.

Après un silence, il traverse le couloir et vient s’asseoir à côté de moi.

- Tu peux m’appeler Bucky, murmure‑t‑il, la voix nouée. Un courant d’air me porte son parfum boisé ; son hésitation me traverse. Je sais que c’est le personnage qui t’attire, ajoute‑t‑il, mais il me ressemble aussi, d’une certaine façon. Si tu préfères, appelle‑moi comme lui.

Je reste pantoise face à cette déclaration. Néanmoins, je lui demande :

- Souhaite-tu que j’incarne quelqu’un d’autre moi aussi ? Veux-tu... me donner un autre nom ?

Je trouvais ces questions légitimes. Après tout, si j’espère vivre une histoire d’amour avec un personnage fictif peut-être que lui aussi. Bien que j’ignore qui j’aurai pu incarner.

Il me sourit. Bienveillant.

- Non, en aucun cas. C’est bien de toi que je me suis passionné. En tout cas, de celle qui chante sur scène.

Un léger frisson me parcourt à ces mots. Je ne suis pas du tout la même lorsque je suis sur scène. C’est à son instar, une extension de ma personnalité. J’angoisse à l’idée d’être trop différente de ce qu’il espère.

Le rêve va-t-il virer au cauchemar si vite ?

Nous arrivons à destination une heure trente plus tard sans avoir échangé davantage. Rien de gênant. C’est comme une simple attente avant que l’histoire ne commence. Un générique muet. Si nous sommes sur la même longueur d’onde, il en va de même pour lui.

Une voiture privée nous attend. Le chauffeur se charge des bagages. Je respire à pleins poumons : l’odeur salée de la mer et la résine des pins imprègnent mes narines. Détente immédiate. Après de longues minutes de route, fenêtres ouvertes, nous longeons une chaussée taillée dans la montagne, sinueuse entre roches et buissons de myrte. Le soleil est à son zénith. À chaque virage, le voile scintillant de la mer se dévoile un peu plus. Nous voilà enfin face à une immense villa dressée au sommet d’une falaise.

Le luxe se lit dans l’architecture sarde. Le paysage pittoresque me ravit. L’embrun fouette mon visage et me revigore. Les oiseaux nous enchantent de leur voix joyeuse. Le dépaysement est total : je suis émerveillée. Jar... Bucky me regarde, charmé de me voir admiré le décor, mes yeux pétillants de bonheur.

- J’ai les moyens pour ce luxe, si on n’est pas trop gourmand, et du personnel pour les tâches quotidiennes.

Il me montre d’un mouvement de tête le chauffeur, qui semble être un majordome de surcroît, emporter nos effets à l’intérieur du bâtiment. Je sens la chaleur qui se dégage des pierres de l’édifice en approchant mes doigts de celles-ci.

Le soleil révèle l’éclat du bleu de ses yeux, provocant en moi un arrêt sur image. La détermination préside sa voix.

- Rien ne nous détournera de notre rêve.

Sa phrase résonne comme un écho : Notre rêve... L’air s’évade de mes poumons.

***

Le milieu d’après-midi signe la fin de mon installation. Des fleurs fraîches inondent ma chambre de leurs parfums. Les rideaux voilés blancs filtrent la lumière, les stridulations des cigales font office de fond sonore. Exténuée, je n’ai pas fermé l’œil depuis la veille. Bucky, remarquant ma fatigue, m’invite à aller me reposer avant le dîner. Il est attentionné et bienveillant. Je ne me fais pas prier, et m’écroule sur le lit aux draps de coton frais.

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