Chapitre 22

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Ces moments où le monde semble s'écrouler, comment fait-on pour les surmonter ? Comment ai-je fait pour aller de l'avant ?

La vie continue, la vie de maman ne s'arrête jamais et il faut rapidement reprendre son rythme. Comme si de rien était. Accompagner sa petite tribu sur une compétition, être là pour l'échauffement, soutenir lors des défaites, attendre un autre match, un autre adversaire. Là au milieu de tout le monde petit à petit, je mettais de côté ce dernier échange dévastateur. Je discutais avec d'autres parents de tout et de rien et de sport surtout. Mais dès le soir venu, de nouveau, quand le calme réapparaissait, mes angoisses et les pleurs refaisaient surface.

Ma souffrance était d'autant plus grande que je ne pouvais la partager avec personne. Pas d'épaule solide pour me soutenir, pas d'oreille attentive pour écouter mes malheurs.

Mais parfois le besoin d'extérioriser ses peines est plus fort que tout. Alors, comme je l'avais déjà fait, je pris mon téléphone pour écrire les mots que j'aurais voulu dire à Paul. Et j'en profitais pour y ouvrir un journal intime. Pour commencer, j'y regroupais consciencieusement tous mes précédents messages. Être méthodique me permettait de reprendre le contrôle. Il me fallut comprendre et traduire mes émotions et les retranscrire le plus fidèlement possible.

Tu sais je ne suis pas un monstre. C'est qu'avec toi, je me sens plus jolie, plus intelligente, tu fais de moi une meilleure personne. Je suis juste plus heureuse quand je suis avec toi. Tu es mon oxygène, ton absence me fait suffoquer. Peut-être, quand tu partiras, je vais mourir à petit feu, mais je voulais garder au fond de mon cœur un souvenir, une petite flamme, qui me garderait en vie. Une preuve qu'un jour, j'ai aimé passionnément, que je t'ai aimé passionnément.

J'aurais tellement voulu sentir tes lèvres se poser sur les miennes, tes mains caressant ma peau, et puis nos corps l'un contre l'autre, l'un dans l'autre...

J'étais incapable de lui en vouloir vraiment, je gardais l'espoir qu'il n'avait fait cela que pour me protéger. Même si ma préférence se tournerait toujours vers l'honnêteté et la franchise.

Le week-end passé, en retournant au travail, je pris avec moi mon masque tout sourire. Il lui fallait tenir bon quand je ne serais pas seule. J'avais aussi envie, plus que jamais, d'être « sublime ». Choisir consciencieusement mes vêtements et mon maquillage, pour prouver à Paul, mais surtout à moi, que personne jamais ne me terrasserait. Pas même Lui. Je savais au fond que j'avais cette force, gagner par quelques expériences lourdes.

Ma relation professionnelle avec lui semblait préservée, au moins en présence de mes collègues. Mais quand je le croisais dans le couloir, j'évitais son regard.

Quand arrivait le soir, les pensées noires refaisaient surface. Je pensais aussi à mon couple. Je doutais de plus en plus de l'amour que je portais à Florian. Pourtant, je n'avais pas vraiment à me plaindre. Il avait pris du poids certes, par rapport à notre rencontre, mais beaucoup moins que la plupart des hommes de son âge. Et moi-même, les années ne m'avaient pas épargné. Il faisait plus le ménage que moi, il était bricoleur et surtout, il était ma raison, moi qui avait toujours été un peu sur une autre planète. Mais certains de ces traits de caractère devenaient de plus en plus insupportables. Il avait toujours été râleur, un brin dépressif et manquait de spontanéité. Il avait aussi beaucoup de mal à comprendre, que parfois, je ne veuille pas faire l'amour. Je trouvais désagréable qu'il soit fâché après moi, alors que je n'avais juste pas envie.

Comme parfois nous avions pris l'habitude d'aller marcher, je proposais à Florian une petite promenade en rentrant du travail. J'avais l'intention de lui parler de mes doutes et peut-être aussi de Paul. Ce besoin, je l'avais ressenti, depuis que Paul m'avait demandé si j'avais déjà parlé de mes envies à Florian.

Il serait difficile de trouver les mots justes et connaissant Florian, il y avait de fortes chances qu'il ne parle que très peu.

Il était déjà tard, et le ciel commençait doucement à prendre des couleurs rosées. Je n'avais que peu de temps avant que la nuit ne tombe. Je devais prendre mon courage à deux mains.

— Florian, j'ai besoin de te parler.

— Oui, répondit-il simplement.

— Je ne sais pas vraiment par où commencer. Je pense que tu t'es rendu compte qu'il y avait eu quelques modifications dans mon comportement.

Il acquiesça simplement de la tête.

— Et bien depuis quelques mois, je discute beaucoup avec un de mes collègues. Je m'entends très bien avec lui et j'avoue que sa présence me fait beaucoup de bien. Au début, nous étions simplement amis, mais petit à petit, j'ai éprouvé pour lui d'autres genres de sentiments.

Florian regardait dans le vide, écoutant sans faire le moindre commentaire.

— Depuis que je l'ai rencontré, j'ai perdu beaucoup de poids, j'ai arrêté de jouer des heures sur mon téléphone. Au contraire, je prends plaisir à dessiner, ce que je n'avais pas fait depuis longtemps.

Le soleil flirtait avec l'horizon, alors que quelques larmes perlaient dans le regard de Florian.

— Pour l'instant, entre lui et moi il ne sait rien passé, et peut-être... sûrement, qu'il ne se passera jamais rien. Mais j'avoue que j'éprouve du désir pour lui.

— Et lui.

— Peut-être, mais... je n'en sais rien en fait. Il est beaucoup plus jeune que moi et ne veut pas briser un couple. Mais nos échanges, parfois, dérapent un peu.

— Tu sais Elisa, je me doutais qu'il se passait quelque chose, et je pensais qu'en te laissant libre de sortir, tu finirais par revenir vers moi.

— Mais ce n'est pas toi qui est en cause. Tu n'as rien fait de mal. Ce sont mes sentiments qui sont en pleins chamboulement.

— Et tu m'aimes encore ? demanda-t-il.

— Je n'en sais rien, lui répondis-je.

Avais-je eu raison de lui parler. Je pense que oui, même si je lui avais fait de la peine.

En arrivant à la maison, alors que les dernières lueurs du jour disparaissaient, il fallut masquer nos émotions, faire le repas, manger et aller nous coucher. Florian me prit dans ses bras, pour me faire un câlin. Il pleurait et moi aussi. Même si j'éprouvais de moins en moins de désir pour lui, il restait mon meilleur ami.

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