Chapitre 33 - 1

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Deux ans plus tard.




Sur la défensive, Karel faisait à Serymar. Il en était conscient, son maître ne lui ferait aucun cadeau. Depuis le temps, il était devenu plus agile, mais avait toujours autant de mal à maîtriser sa magie et manquait encore un peu de précision. Du haut de ses douze ans, son corps avait commencé à changer, ce qui lui avait conféré plus d’agilité et de fluidité dans ses mouvements. Rassuré de savoir qu’il pouvait y aller à fond, car ayant bien compris que Serymar demeurait intouchable, Karel avait fait plus d’efforts dans ses exercices.

Karel inspira, puis agit : il disparut instantanément et reparut juste derrière le dos du Mage pour tenter de lui faire perdre l’équilibre. Un bras s’enroula autour de son cou pour le repousser plus loin. Karel ne bougea plus pendant quelques secondes, les mains sur sa gorge, essayant de vite reprendre son souffle. Il devait rester concentré. Bon. Les feintes, décidément, ça ne fonctionnait pas. Fronçant le regard, Karel décida de ne pas abandonner. De toute façon, son maître ne lui laissait pas le choix.

Il se releva et lui fit face. Karel tendit les mains en avant. Une masse d’armes et d’armures en tout genre fonça dans le dos de Serymar. Celui-ci les bloqua d’un mouvement de la main comme si de rien n’était, mais Karel comptait exactement sur cette seconde pour bouger de sa position. Il se rua sur une lance qui traînait par terre et la jeta dans cet amas de métaux. Karel voulait sonner son maître, ayant appris que les êtres avec les oreilles pointues étaient généralement beaucoup plus sensibles aux ondes sonores que les humains. Il espérait immobiliser son maître l’espace d’un instant. Enfin, de plusieurs instants successifs plutôt, vu ses formidables réflexes.

La lance atteignit ses cibles retombèrent avec fracas : le Mage lâcha son influence sur les objets et disparut à temps. Karel ne s’affola pas. Il avait appris à connaître le Mage. Celui-ci ne faisait d’ailleurs que lui conseiller d’observer ses ennemis dans les moindres détails, que ça ne serait que comme ça que Karel aurait une chance de survie. Alors l’Apprenti l’avait observé.

En revanche, Karel fut incapable de ressentir où Serymar allait réapparaître pour le prendre à revers. Cette fraction de seconde à se questionner lui fut fatale : Serymar reparut juste à côté de lui pour le pousser rudement dans le tas de ferraille.

Sonné, Karel jura intérieurement : ça aussi, son maître lui avait appris. Ne jamais se déconcentrer, percevoir la moindre faille, agir juste au bon moment. Et ça, Serymar savait parfaitement faire. Détecter la moindre inattention. Savoir repérer même la plus petite microseconde pour réagir. Bon sang, mais comment faisait-il pour toujours savoir quoi faire à chaque instant, sans même avoir besoin d’y réfléchir ?

Malgré sa douleur, Karel roula vivement sur le dos pour se créer un bouclier psychique, contre lequel vint se percuter un objet tranchant. Quand il osa ouvrir les yeux, Karel perçut le regard insatisfait de son maître.

Serymar lui expliqua que Karel prenait trop de temps pour réfléchir. Il lui fit aussi remarquer qu’en situation réelle, en moins de quelques secondes, Karel se serait déjà fait tuer plusieurs fois.

Karel s’effraya quand le Mage fondit vers lui. Il posa une main sur son bouclier pour le réduire à néant. Karel ne put s’empêcher de se plaquer les paumes sur les tempes, tant la pression psychique fut forte. Il céda son bouclier, car s’il résistait, ça serait pire.

Il s’attendit à une attaque, mais plus rien ne vint. Karel risqua un regard vers son mentor. D’une main, Serymar lui ordonnait de se lever. Karel obéit en se massant un bras. Encore une défaite. Le pire, c’était qu’il savait que le Mage ne se donnait pas encore à fond. Cela signifiait donc qu’il était encore loin du compte. Toutefois, le Mage lui souligna qu’il avait apprécié sa créativité et que Karel pouvait continuer dans cette voie.

L’Apprenti afficha un léger sourire et sortit de la pièce en compagnie de son Maître. Il accéléra soudain d’un pas pour couper le chemin du Mage et se positionna face à lui. Karel exécuta quelques signes et finit par pointer un doigt vers Serymar, le regard déterminé et fier.




« Non, Karel. Ne deviens jamais comme moi. Ce n’est pas ce que je désire pour toi. » pensa Serymar, songeur, en regardant l’adolescent que Karel devenait.

D’une main, levant le pouce et l’auriculaire, il traça une ligne invisible avec.

  • « Jamais. »

Karel répondit par un regard déçu, incapable de comprendre ce qu’il avait dit de mal. Il s’entêta. Il lui rétorqua qu’il deviendrait un jour aussi fort que lui, qu’il allait travailler très dur pour que son Maître soit fier de lui.

Serymar ne sut quoi répondre. Était-ce réellement utile ? En son for intérieur, il luttait encore contre lui-même. Plus jamais il ne se laisserait piéger par tout ce qui avait attrait à l’attachement ou même plus encore. Il ne devait pas se laisser déconcentrer par les sourires de Karel. Bien que c’était atrocement tentant.

Se laisser aller à ces sentiments se payait très cher à la fin. Serymar l’avait appris à ses dépens. Surtout quand ce laisser-aller s’était acquis d’une manière honnête, simple et sans manipulation quelconque. De toutes les tortures qu’il avait pu subir dans sa vie, celle-ci avait été la plus cruelle et la plus douloureuse qu’il n’avait jamais ressentie.

Serymar congédia Karel d’un simple mouvement de la main. Le jeune concerné lui rendit son geste et disparut dans les escaliers. Serymar se téléporta.




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