Mémoires : septième fragment

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Par instinct, je me réfugiais dans le coin de la pièce. Réaction stupide, car nichée ici, je ne disposais plus d'aucun moyen de m’échapper. Il avançait vers moi froid, de ce regard que je reconnaissais maintenant et qui me terrifiais. Ce regard un peu fou annonçait ma punition. Pourtant, je m'efforçais toujours d'être exemplaire, d'être attentive aux moindres détails. Ce soir encore rien ne justifiait sa colère.

« Tu m’as fait honte ce soir devant mes amis.

J’avais beau réfléchir, je ne voyais pas ce qui avait pu l’embarrasser à ce point.

« Il te plaît Loic ?

C’était donc ça, j’étais restée assisse à côté d’un certain Loïc avec qui j’avais discuté une bonne partie de la soirée alors que lui échangeait avec l’un de ses fournisseurs. Je ne pensais pas à mal. En même temps, qu’aurais-je dû faire ? Rester muette dans mon coin ? Parfois, sa jalousie me plaisait, n’était-ce pas une preuve d’amour ? Mais le plus souvent, elle m’effrayait. Elle se révélait si exagérée. Il connaissait ma fidélité puisqu'il s'arrangeait pour me garder prisonnière dans sa cage dorée. J’osais de moins en moins avoir des contacts avec la gent masculine et parfois même avec des personnes de mon sexe. Ses réactions me terrifiaient. Ses escalades émotionnelles débordaient imprévisibles, incompréhensibles.

Je m’enfonçais autant que je le pouvais contre le mur, priant pour me fondre dans le plâtre. Je guettais la sentence. Je ne savais jamais à quoi m’attendre. Parfois, il se contentait de me regarder méprisant comme un bout de viande avariée qui le dégoûtait, parfois il m’attrapait par la gorge, menaçant, utilisant sa force pour me plier par la peur ou, il me soumettait sexuellement, me rappelant que lui seul possédait des droits sur moi. Cette fois, il me frappa d’un revers de la main. La chevalière qu’il portait à l’index m’entailla la lèvre faisant couler un filet de sang au goût métallique dans ma bouche. Un mélange de douleur, de tristesse et de colère me monta les larmes aux yeux. Je ne pus empêcher le tremblement qui agita mon corps, en attente de ce qui allait suivre. Quand il était dans cet état, j’évitais toutes répliques ou tentatives de défense pour m'abstenir de déraper et d’attiser la rage qui le rongeait. Il se colla à moi, sans bouger, me prit les cheveux dans ses poings, les tirant fort pour me blesser.

« Tu es à moi bébé. Tu le sais.

Cette possessivité tant appréciée au départ de notre relation, je l'exécrais. Elle éprouvait ma confiance en moi, me donnait le goût amer de n'être qu'un simple objet. Pourtant, la culpabilité m'habitait. Lui déplaire me paraissait une trahison honteuse. N’avait-il pas tout entrepris pour me sortir de ma misère ? Cette culpabilité, quand elle remontait à la surface, devenait plus puissante que ma peur, suffocante, oppressante et pour m’en débarrasser, lui complaire paraissait un remède efficace. Alors sans un mot, j'endurais sa langue dans ma bouche et la morsure bestiale sur ma lèvre blessée. Je le laissais s’insérer, brutal, entre mes jambes, me culbuter avec violence contre le mur. À chaque coup de rein, je perdais le peu d'estime de moi qu'il me restait encore.

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