Chapitre 5 — Le récurrence
L’aube perçait à peine l’obscurité lorsque Gabriel poussa la porte du laboratoire. L’odeur métallique des serveurs en veille flottait dans l’air, mêlée aux résidus de café refroidi abandonné sur les bureaux. Les écrans holographiques scintillaient faiblement dans la pénombre, projetant des ombres abstraites sur les murs.
Il n’avait presque pas dormi. L’excitation mêlée à une anxiété sourde l’avait maintenu éveillé. Les paroles de Stanislas résonnaient encore dans son esprit. Une récurrence. Un motif qu’ils n’avaient pas vu.
Cléa détecta immédiatement son état.
— Ton rythme cardiaque est élevé. Et ton taux de cortisol au-dessus des valeurs normales. Je te suggère de t’hydrater et de te reposer.
— Je vais bien, Cléa.
— Objection statistique. Ton taux de repos inférieur de 68 % à la norme hebdomadaire recommandée.
Gabriel soupira et se laissa tomber sur sa chaise. L’écran devant lui affichait encore la dernière simulation en pause, les courbes gravitationnelles figées dans un instant de mystère suspendu.
— Et si on a vraiment trouvé quelque chose, Cléa ? murmura-t-il, plus pour lui-même que pour elle.
L’IA marqua un silence.
— Les probabilités de découverte scientifique majeure sur ce type d’échantillon est faible. Cependant…
Elle s’arrêta un instant, comme si elle hésitait, bien que Gabriel sache pertinemment qu’elle n’avait pas cette capacité.
— …tu sembles convaincu qu’il y a quelque chose.
Gabriel sourit faiblement.
— Ouais. Et ça me terrifie.
La porte du labo s’ouvrit sur un Stanislas Bergstein impeccable malgré l’heure matinale. Son écharpe en laine grise était soigneusement nouée, sa chemise sans faux pli, et il portait l’inévitable carnet à couverture de cuir brun où il griffonnait tout ce qui lui semblait digne d’intérêt.
— J’espère que vous êtes reposés, parce que ce que j’ai à vous montrer risque de remuer vos certitudes, déclara-t-il, un sourire en coin.
Gabriel croisa les bras. Il ne savait jamais si l’assurance de Stanislas l’agaçait ou le fascinait.
Sonia arriva à son tour, un gobelet de café fumant à la main. Ses cheveux étaient encore légèrement humides, signe qu’elle avait pris une douche express avant de venir.
— J’espère que tu n’as pas dit ça juste pour nous faire languir, lança-t-elle en s’asseyant.
Stanislas prit place devant l’écran principal.
— Bon. Je vais essayer de faire simple. Hier soir, en repassant toutes vos simulations, j’ai fait quelque chose de bête.
Il tapota quelques commandes sur l’interface, et les oscillations de NGC 6777 apparurent. Les mêmes ondulations erratiques, ce chaos gravitationnel impossible à modéliser.
— J’ai superposé toutes les anomalies relevées sur le dernier mois, en appliquant un filtre de moyenne mobile.
Un instant plus tard, les courbes s’alignèrent partiellement, révélant une forme récurrente.
Sonia se pencha vers l’écran, plissant les yeux.
— Ce n’est pas possible… On est passé à coté de ça ?
Gabriel sentit une étrange sensation dans sa poitrine. Comme un vertige, une pression intérieure.
— Une harmonique ? demanda-t-il.
Stanislas hocha la tête.
— Pas exactement. Ce n’est pas une onde classique. Mais il y a une périodicité dans ce chaos. Ce qui, en soi, est un paradoxe.
Le silence s’étira. L’espace d’un instant, seul le bourdonnement des serveurs occupa l’air.
Puis Sonia éclata de rire, un rire nerveux, presque incrédule.
— Donc, en gros… notre anomalie suit un schéma, mais un schéma qu’on ne comprend pas ?
— Exactement.
— Putain…
Gabriel se redressa et croisa les bras. Sa tête tournait sous l’avalanche d’idées possibles.
— D’accord. Il y a une récurrence. Mais ça ne nous dit pas ce que c’est.
Stanislas afficha un sourire entendu.
— J’ai quelques hypothèses.
Il ouvrit son carnet et y griffonna quelques symboles avant de lever les yeux vers eux.
— Option 1 : il s’agit d’un artefact instrumental qu’aucun de nous n’a détecté. Peu probable, vu vos vérifications.
Sonia secoua la tête.
— Je peux garantir qu’aucune interférence connue n’explique ça.
Stanislas acquiesça.
— Option 2 : il s’agit d’une fluctuation de la matière noire liée à un phénomène cosmique que nous ne comprenons pas encore.
Gabriel tapota du bout des doigts sur la table.
— C’est une possibilité, mais alors il faudrait expliquer pourquoi cette oscillation particulière ne suit pas les modèles classiques.
Stanislas poursuivit :
— Option 3 : ce que nous voyons est une signature d’un phénomène plus profond. Une interaction entre la matière noire et une autre force inconnue.
Sonia fronça les sourcils.
— Comme une nouvelle force fondamentale ?
— Pourquoi pas ? On a découvert l’énergie noire sans la comprendre immédiatement. Peut-être que cette anomalie est la preuve d’une autre forme d’interaction encore jamais observée.
Gabriel ferma les yeux une seconde. Son cerveau analysait les implications de chaque hypothèse, les pesait, les rejetait ou les intégrait.
— Il y a une autre possibilité, murmura-t-il.
Les deux autres se tournèrent vers lui.
— Et si ce n’était pas un phénomène astrophysique ? Et si… c’était un signal ?
Un silence pesant s’installa.
Sonia cligna des yeux, surprise.
— Un signal… naturel ?
— Ou… artificiel, murmura Gabriel, sentant sa propre audace le dépasser.
L’idée semblait absurde. Et pourtant…
Stanislas posa son stylo et croisa les bras. Son regard était passé de la curiosité à une forme de gravité presque inquiète.
— Tu réalises ce que tu es en train de dire ?
Gabriel hocha lentement la tête.
— Oui. Et ça me terrifie.
Stanislas fronçait les sourcils. Il n’était pas d’accord avec Gabriel. Mais il ne souhaitait ouvrir le débat.
— Bon, admettons. De tout façon un système aussi chaotique que le vôtre ne devrait pas contenir la moindre répétition. Toute récurrence doit être examinée.
Sonia soupira et croisa les bras.
— Mais comment on fait ? Notre interféromètre gravitationnel est trop limité pour capturer une onde complète. Et si on lance des calculs à cette échelle, ça prendra des semaines.
— On aura besoin de l’OQ, lâcha Gabriel.
— Impossible, répondit Sonia. On n’aura jamais l’autorisation pour un ordinateur quantique. La liste d’attente est interminable.
Stanislas réfléchissait. Il fronçait les sourcils et se tenait le menton.
— On pourra peut-être négocier un créneau de nuit ou le week-end… mais pour ça, il nous faut quelque chose de solide.
Un silence pesant s’installa. Sonia soupira.
— Je les connais les gars des OQ. Ils nous donneront jamais l’accès avec ce qu’on a.
— Alors on code tout, suggéra Stanislas. On encode chaque pic et on lance une analyse chiffrée.
— Ça va nous prendre des jours, se plaignit Sonia.
— Vous avez une autre option ? Sinon, votre rapport sur NGC 6777 se résume à : anomalie inexplicable. Et vous passez à la galaxie suivante.
— Impossible, murmura Gabriel.
Il échangea un regard avec Sonia. Elle lut dans ses yeux la même obsession qui la tenaillait. Elle poussa un soupir résigné.
— D’accord. On code.
Ils passèrent leurs journées et leurs nuits suivantes à encoder chaque pic, chaque oscillation. À l’œil nu, aucune récurrence n’apparaissait. Une suite de chiffres, absurde, comme une transcription infinie de π. Après douze jours d’efforts acharnés, ils avaient codé les données de quarante-six expériences, accumulant plus de 136 gigaoctets d’informations.
Le lendemain, ils intégrèrent leur demande à leur ordinateur principal, intégrèrent leurs données, puis hésitèrent devant l’écran. Sonia posa un doigt sur la touche Entrée.
— Prêts ?
Gabriel acquiesça. Elle appuya. Alors que l’écran affichait le temps estimé pour le calcul; plusieurs semaines; Gabriel senti un nœud se former dans son estomac. Il n’aimait pas attendre. L’incertitude le rongeait. Il se massa les tempes, son cerveau déjà pris dans un boucle infernale.
La calcul lancé, ils n’avaient plus rien a faire d’autre que patienter. Ils décidèrent de commun accord de rentrer chez eux, et de se relayer au laboratoire régulièrement.
L’appartement de Gabriel lui semblait lointain, comme une cellule vide ou il n’avait pas mis les pieds depuis des jours. Il ne s’était pas rendu compte du temps passé au laboratoire, son rythme dicté par les données et les rapports.
Le calcul durerait plusieurs semaines. Il ne leur restait plus qu’à attendre.
Le week-end suivant, ils invitèrent Stanislas à dîner dans un restaurant. Pour le remercier pour son aide. Il s’agissait d’un établissement spécialisé dans la cuisine africaine que Sonia affectionnait. Une madeleine de Proust, un souvenir culinaire qu’elle chérissait encore plus dans ces moments d’incertitude.
Ils évitèrent de parler du travail. Mieux valait ne pas penser à l’attente interminable.
Sonia observait Gabriel du coin de l’œil. Il parlait peu, perdu sans ses pensées, triturant machinalement le bord de sa serviette.
Elle se souvenait de leur première rencontre, lors d’un séminaire sur la cosmologie quantique. Il était déjà comme ça. Solitaire, absorbé par ses recherches, parfois exaspérant par son incapacité à lâcher prise. Mais elle avait immédiatement senti chez lui une honnêteté brute, une curiosité sans limite qui résonnait avec la sienne. Elle s’était attachée à lui malgré tout. Parce qu’elle savait qu’il avait besoin d’être ancré, que sans quelqu’un pour le soutenir, il finirait par se noyer dans ses propres obsessions.
Sonia reportât son attention sur Stanislas.
— Je ne pensais pas que tu accepterais de bosser avec moi, Stan, lança-t-elle en sirotant son verre.
— Pourquoi ?
— Parce que la dernière fois qu’on a échangé en colloque, tu as joyeusement démoli mon article devant tout le monde.
Stanislas haussa un sourcil, un sourire amusé flottant sur ses lèvres.
— Ce n’était pas personnel. Juste un erreur d’interprétation.
— Une erreur d’interprétation ? Tu as littéralement dit: « c’est une raisonnement bancal qui ne tiendrait pas dans un cours de première année ».
— Ce n’était pas faux.
Sonia le fixa un instant, avant d’éclater de rire.
— Tu restes un connard, mais au moins tu es un connard compétent.
— J’apprécie le compliment.
Peu à peu, ils apprirent à mieux connaître Stanislas. Âgé d’une cinquantaine d’années, il était né en Allemagne d’un père autrichien et d’une mère française. Après un doctorat en physique des particules, il s’était passionné pour l’étude de la matière noire. Mais c’est son histoire personnelle qui intriguait Sonia. Elle n’aimait pas les chercheurs qui ne vivaient que pour leur travail. À part Gabriel, se disait-elle. Elle aimait comprendre ce qui faisait vibrer les gens en dehors des laboratoires.
— J’ai sacrifié mon premier mariage à ma carrière, confessa Stanislas. Mon mari est parti un jour, en vidant l’appartement. Puis, j’ai appris.
Son deuxième mariage était heureux. Son conjoint et lui avaient adopté un nourrisson, Rud. Fier, il leur montra des photos sur son téléphone. Sonia sourit en feuilletant les clichés.
— Bon, je vais pas te mentir… sur la première photo, il était franchement moche, Rud. Mais là, il ressemble plus à son deuxième père, plaisanta-t-elle.
Ils rirent, poursuivant la soirée jusqu’à l’aube. Lorsque Gabriel rentra chez lui au petit matin, encore légèrement ivre, il s’affala sur son canapé. Il s’adressa à Cléa, comme une bouteille à la mer, un murmure dans le vide.
— Cléa, mets de la musique.
— Quel genre de musique, Gabriel ?
Il haussa les épaules.
— Un truc calme.
Un morceau instrumental se lança. Il se laissa tomber dans son canapé, la tête lourde.
— T’es la seule qui me parle encore tous les jours, tu sais ?
La voix synthétique répondit, imperturbable.
— Je suis toujours là, Gabriel.
Pour les semaines suivantes, ils se mirent d’accord pour planifier des tours de garde. Chacun passerait chaque jour pour vérifier l’avancée du calcul.
C’est au terme de la troisième semaine que Gabriel passa au laboratoire pour une vérification de routine.
L’écran de l’ordinateur affichait une ligne familière : Calcul terminé.
Gabriel ou ouvrit le fichier, s’attendant à une confirmation immédiate de leurs nombreuses hypothèses. Mais les données s’affichaient sous la forme d’une masse de chiffres incompréhensibles.
— Attends…ça n’a aucun sens, murmura-t-il.
Il fit défiler les lignes, tentant de repérer une structure, une répétition. Rien. Juste un chaos mathématique qui semblait se moquer de lui. Puis, au bout de longues minutes, quelque chose lui sauta aux yeux. Il finit par le voir.
Impossible…, se dit-il.
Sa main trembla en attrapant son téléphone. Il eut du mal à sélectionner le contact de Sonia.
— Allô ?
Sa voix était rauque, encore empreinte de sommeil.
— C’est Gabriel. Le calcul est fini. Il faut que tu viennes voir ça. Appelle Stan.
Il raccrocha avant qu’elle ne puisse répondre.
Lorsque Stan et Sonia arrivèrent, Gabriel était là, devant l’écran, dans un état d’excitation palpable. Il semblait presque frémir, une lueur inconnue à Sonia dans les yeux.
— Il faut que vous voyez ça, dit-il, la voix tremblante.
Sonia et Stanislas se rapprochèrent, silencieux. Ils savaient que Gabriel devait être au bord de l’explosion.
Stanislas, toujours aussi calme en apparence, laissa échapper un léger soupir en s’approchant de l’écran. Ces chiffres n’étaient pas comme les autres. L’ordinateur avait mis en évidence des récurrences étranges, une oscillation systématique dans les données issues de la matière noire. Ce n’était pas seulement pour NGC 6777, mais pour presque toutes les galaxies observées. Les oscillations étaient à peine perceptibles pour certaines, mais pour NGC 6777, elles explosaient à une échelle incompréhensible. L’ordinateur n’avait pas seulement trouvé des corrélations. Il avait trouvé un facteur, une constante : 21.984 – 35.685 – 57.669 – 93.354 – 152.344 – 233.141 . Le facteur n’était pas aléatoire. Il revenait. Encore et encore. Une constante, comme π ou la vitesse de la lumière. Mais associée à la matière noire. Pourquoi ? Pour quoi ?
Les trois scientifiques se tenaient là, fixant les chiffres comme si eux-mêmes tentaient de comprendre ce qu’ils signalaient. Les chiffres ressemblaient à un code, mais il n’était pas clair si ce code était simplement une anomalie ou s’il avait un but plus profond. Les hypothèses fusèrent, mais aucune ne parvint à expliquer ce phénomène.
— C’est stupéfiant, souffla Sonia, le souffle court, son regard se perdant dans l’immensité des données. Elle semblait chercher quelque chose d’invisible dans les chiffres qui défilaient à toute allure. C’est comme un code. Un code dans la matière noire.
Gabriel fixait les chiffres, le souffle court. Il avait attendu un instant comme celui-ci toute sa vie. Un motif caché dans l’univers. Quelque chose que personne n’avait jamais vu. Mais l’excitation se mêlait à l’inquiétude sourde. Pourquoi ce facteur. Pourquoi maintenant ? Et pourquoi personne ne l’avait remarqué avant ?
— Oui, répondit Stanislas, sa voix teintée de scepticisme. Mais un code pour quoi faire ? Un message ? Une signature ? On dirait une récurrence mathématique, mais ces intervalles sont si… irréguliers.
— Ça semble inédit, ajouta Gabriel, sa voix trahissant l’émerveillement qui lui échappait. Des oscillations dans la matière noire, des récurrences d’un facteur qui ne se retrouve nulle part ailleurs, mais qui se répète avec des intervalles différents. Ce facteur, 21.984 – 35.685 – 57.669 – 93.354 – 152.344 – 233.141 , semble être une sorte de clé.
— Peut-être une loi universelle ? Un message caché dans la structure même de l’univers… dit Sonia, en s’approchant de l’écran, ses doigts effleurant la surface comme pour mieux saisir l’invisible.
Les jours suivants furent une plongée dans un océan de données. Gabriel, Sonia et Stanislas retournèrent chaque pierre, compulsèrent des études vieilles de plusieurs décennies, exhumèrent des articles oubliés, et interrogèrent des collègues spécialistes. Mais rien. Ils cherchaient une trace de ce facteur, de cette fluctuation, de cette ondulation dans la matière noire partout ailleurs.
Les premiers jours, l’excitation avait porté Gabriel. Mais très vite, la fatigue et l’impatience prirent le dessus. Ils tournaient en rond.
Ils passèrent des nuits entières à éplucher des publications. Des fichiers caviardés par des mises à jour administratives. Des pistes qui se réveillaient puis s’effondraient une à une.
Une nuit, seul au laboratoire, Gabriel poussa un soupir rageur. Les documents étaient soit incomplets, soit perdus. D’autres contenaient des résumés vagues, des conclusions sans explications. Il fouilla les archives du CNRS, du MIT, de Princeton. Partout, la même chose : des trous dans les données.
Cléa veillait sur lui. Une présence discrète, presque invisible. Sa voix douce émergeât dans son oreille.
— Gabriel, tu as dépassé ton seuil de concentration optimal depuis bien longtemps. Tu devrais te reposer.
— Et si je ne trouve rien ? Lâcha-t-il sans même s’en rendre compte.
Il resta un instant immobile, les doigts crispés contre ses tempes. L’IA ne répondit pas, mais il s’avait ce qu’elle allait dire.
Sonia était passé le voir plus tôt, s’inquiétant de son état, mais il l’avait envoyé promener. Il regrettait déjà.
Les jours suivants, Sonia et Stanislas entrèrent dans la danse, chacun à sa manière. Cherchant à sortir Gabriel de ce cycle obsessionnel. Sonia essayait de tempérer l’obsession de Gabriel. Elle l’aidait à tirer les données, à structurer ses recherches, mais elle voyait bien qu’il s’épuisait.
Stanislas gardait son scepticisme habituel, mais même lui commençait à avoir des doutes.
Le lendemain, Sonia arriva avec un café à la main et un regard appuyé.
— T’as une sale gueule.
— Toi aussi.
— Oui, mais moi j’ai dormi.
Gabriel esquissa un sourire fatigué. Sonia posa son café. Elle regarda Gabriel, il semblait obnubilé, il avait trouvé quelque chose.
— J’ai passé les derniers jours sur les bases de données ouvertes. J’ai retrouvé une trace de plusieurs études sur la matière noire qui feraient référence à un oscillation. Ils ont été classifiés il y a une trentaine d’années. Je ne sais pas ce qu’elles contiennent mais elles ont été retirées des publications accessibles en 2040.
Stanislas entra à cet instant, l’aire encore plus renfrogné que d’habitude. Il lança son carnet sur la table et croisa les bras.
— J’ai contacté un collègue au CNRS. Il se souvient d’une vieille étude sur les anomalies gravitationnelles, mais il n’a pas pu m’en dire plus. Il pense que certains documents ont été oubliés.
— De manière volontaire ?, demanda Sonia.
— Juste… placés sous un tas d’autres recherches, à un endroit ou personne ne viendrait les chercher.
— C’est absurde. On trouve des références à des expériences, mais les résultats ne sont nulle part. Personne n’efface des travaux comme ça par hasard.
Sonia claqua son stylet sur la table.
— OK, admettons que quelqu’un ait caché des résultats. Mais pourquoi ?
— Parce qu’ils ont découvert quelque chose qu’ils ne pouvaient pas expliquer.
Gabriel se redressa. Il y avait donc quelque chose. Une information que personne ne voulait totalement effacer, mais qui ne devait pas non plus être trouvée trop facilement. Un vieux réflexe bureaucratique. On ne détruisait pas un étude importante. On la rendait juste invisible.
— On doit creuser dans les archives. Maintenant.
Gabriel était déterminé.
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