Juin 2010 (2/2)

6 minutes de lecture

Lorsque nous arrivons chez Ingrid, je manque de me décrocher la mâchoire, la maison doit bien faire deux cent mètres carrés, le jardin arboré et fleuri est immense, la piscine gigantesque.

Je suis loin de faire partie de ce que certains appellent la frange populaire de la population, mes parents ont une bonne situation professionnelle, experts comptables tous les deux, possédant leur propre cabinet et un portefeuille de clients assez conséquent. Mais ils venaient tous les deux d’un milieu modeste, avaient gardé à l’esprit que l’argent ne poussait pas au fond du jardin et jamais ils ne m’avaient fait de cadeaux dans la vie. Nous habitions une petite maison de village sans prétention, à quelques kilomètres de là, pas de voitures de luxe, ni de vacances sur les bateaux de croisière, pas de garde robe ou de chaussures hors de prix.

Souvent j’entendais les réflexions de nos proches “Vous n’avez jamais songé à déménager pour plus grand?”,“ Avec ce que vous gagnez, vous pourriez faire construire votre propre villa avec une piscine, du terrain…” ce à quoi, la plupart du temps, mes parent répondaient d’un haussement d’épaule accompagné d’un “Pourquoi faire? On est bien comme ça…”, en toute modestie. La seule chose qu’ils m’avaient accordé, ou offert je dirais, c’est de me laisser occuper tout seul le second étage de la maison, j’avais donc accès, en plus de ma chambre, à une salle de jeu, ma propre salle de bain, mes toilettes et une minuscule terrasse où ne tenaient qu’une petite table et deux chaises métalliques, avec pour seule obligation de m'occuper du ménage et de l'entretien.

Nous faisons partie des premiers arrivés et personne ne pose de questions sur notre apparition main dans la main, seule Ingrid me gratifie d’un clin d’œil compréhensif et d’un sourire radieux.

La chaleur de ce dernier weekend du mois de juin est déjà accablante, et sitôt arrivé, j’enfile mon maillot de bain et plonge dans l’eau tiède, suivi de près par Caro, éblouissante dans son maillot deux pièces rouge vif. Nous enchaînons quelques longueurs et je m’aperçois vite que c’est une excellente nageuse, rapide et agile pour échapper à mes taquineries. Même si je suis un sportif accompli, la natation n’a jamais été mon fort, ni une grande passion et elle arrive assez facilement à me distancer.

Rapidement lassé, et suffisamment rafraichi, je préfère sortir de l’eau et m'installer sur un transat, à l’ombre, admirant la sirène qui ondule dans l’eau, alors qu’Ingrid se rapproche de moi.

- Alors avec Caro ?

- Je crois que j’ai pas grand-chose à t’apprendre pour l’instant, t’en sait autant que moi, on verra bien comment ça va se passer.

- Enfin elle t’a eu, putain, depuis des mois j’entends parler que de toi, Justin par-ci, Justin par-là, et regarde-le, encore avec une grognasse, et il voudra jamais de moi, et je le kiffe, et il est trop mignon, et il m’a souri, et il m’a dit bonjour… J’ai même eu droit au récit en détails de chacun de vos entraînements. T’as été long à la détente…

- Faut dire aussi qu’elle est pas très démonstrative à ce sujet, et puis j’avais autre chose dans la tête… Et bon, j’ai décidé d’arrêter ces conneries, et depuis qu’on s’est rapproché elle et moi, j’ai compris certains trucs… Mais j’avais besoin de temps…

- Fait gaffe quand même, elle est fragile ma petite Caro, c’est pas une de tes poufs…

- Je viens de te dire que j’avais changé… Qu’elle m’a donné envie de changer…

- Ingrid, lâche-le un peu !!! T’as ton Juju toi!!!!

Nous éclatons de rire tous les trois alors que d’autres mecs m’appellent pour une petite partie de ballon dans un coin du jardin, mais ce sera sans moi, ma cheville gauche commence juste à se remettre d’une seconde entorse en moins de trois mois et j’ai pas envie de me blesser une nouvelle fois.

Caro sort de l’eau, ruisselante, sa peau légèrement halée s’accorde brillamment avec le rouge de sa tenue, sous les rayons du soleil qui l'illuminent. J’en profite pour détailler son corps parfait, ses mollets et ses cuisses superbement galbés, son ventre musclé, laissent deviner que nos séances hebdomadaires n’ont pas seulement eu d’effets bénéfiques sur moi, ses épaules un peu larges, ses hanches creusées s’accordent parfaitement avec le reste de son corps si harmonieux, sa poitrine est avantageusement mise en valeur par le haut de son maillot de bain.

Je suis sous le charme et je ne me gêne pas pour le lui dire, ce qui a pour effet de la faire rougir immédiatement.

- Ne rougis pas, je te promets que je me fous pas de ta gueule.

- Quatre heures de natation par semaine jusqu'à l'année dernière et une bonne séance d'athlétisme tous les mercredis avec un coach efficace et mignon depuis la rentrée…

- Quelle chance il a…

Elle s’installe en riant à côté de moi, prenant la place d’Ingrid partie accueillir d’autres invités, et c’est bientôt une quinzaine d’ados qui squattent transats, chaises et autres canapés, installés à l’ombre d’une immense tonnelle comme moi ou au soleil pour les plus courageux comme Caro.

Je la laisse parfaire son bronzage, et rejoins Julien, le copain d’Ingrid, nous nous occupons de faire cuire grillades et pizzas, pendant que les autres discutent bruyamment.

- Alors avec Caro, c’est comment ?

- Mais vous avez fini, on dirait deux flics…

Je réponds dans un éclat de rire qui lui fait comprendre que je ne suis pas gêné par sa question…

- Je savais que t’allais réagir comme ça… En fait je m’en fous, je l’ai jamais vu sourire comme ça, donc je comprends bien…

- Pas de soucis, en fait on est sur notre petit nuage, et puis ça fait juste deux heures que…

- Pardon, juste deux heures ? Ça fait des mois que vous êtes tout le temps fourrés ensemble…

- Deux heures mec, deux petites heures… C’était juste une copine à la base…

- Tu parles… Caro !!! Combien de temps ???

- Deux heures pourquoi ?

- Putain, bande de mythos va !!!!

Le repas terminé, nous avons profité de l’après-midi pour faire connaissance avec les autres, jouer au tennis de table, aux cartes et bien sûr faire les imbéciles dans la piscine. Mais toutes les bonnes choses ont une fin. Je raccompagne donc ma chère et tendre chez elle, puis appelle ma mère pour qu’elle vienne me chercher. Le temps qu’elle arrive, nous avons profité de quelques minutes d’intimité pour nous installer dans le canapé dans la même position que ce matin.

- Merci de m’avoir accompagné, t’es un amour…

- Tout le plaisir est pour moi, et puis merci pour le spectacle…

- Tu parles…

- Caro… T’as vu comment t’es habillée au lycée… J’imaginais bien que ça devait cacher quelque chose… Mais là… T’es une fille magnifique, combien de fois il va falloir que je te le dise ?

- Merci Juss… Toi au moins t’es cash, tu sais trouver les mots… 

Nous échangeons de longs baisers passionnés jusqu'à ce que la sonnerie de mon téléphone nous rappelle à la réalité… Ouf, j’étais à deux doigts de la déshabiller, mes mains avaient déjà glissé sous son t-shirt pour apprécier la douceur exquise de sa peau tiède et caresser son dos musclé, les siennes avaient pris le même chemin pour se poser sur mon torse et diffuser leur douce chaleur…

- Je t’appelle demain, je vais surement passer pas loin en vélo, je m’arrêterais te voir…

- Oui, oui, oui… Très bonne idée… Bisous mon Juju.

Nous nous embrassons une dernière fois rapidement et je file retrouver ma mère qui commence à s’impatienter…

Installé dans la voiture je m’oblige à descendre de mon petit nuage alors que ma mère me demande comment s’est passée ma journée.

- C’était sympa de se retrouver une dernière fois avant l’été, deux mois sans les voir ça va être le bagne…

- Merci pour nous…

- C’est pas ça, mais tu sais ce qu’ils représentent pour moi…

- Je sais, Caroline, Clémence, tes potes, tes copines, ta troupe quoi… Toujours ensemble, inséparables…

- Pas grave, on s’appellera de temps en temps…

Je replonge dans mes pensées le temps du trajet. J’ai enfin avancé avec Caro et on file dans la bonne direction… Ou du moins dans la même…

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