Lettre : A ma cousine Véro et tellement plus encore !

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Tu es la seule cousine du côté de maman que je connaisse. Nous avons douze ans d'écart. Nos mères étant fâchées depuis de longues années, nous ne nous connaissions pas. Tu es venue un jour chez mes parents et nous avons gardé contact toutes ces années. Au décès de maman, nous nous sommes rapprochées, même si tu n'es plus venue nous voir ensuite. Très souvent, je suis allée chez toi, pendant les vacances, où je me sentais si bien. C’étaient des moments d'évasion qui me permettaient de ne plus être « mère », mais d'être une jeune fille sans obligation familiale.

Quand mon père m'a mise dehors, c'est toi qui m'as accueillie. J’ajouterais que c'est toi qui es venue me chercher. Souviens-toi, nous sommes même allées dire « au revoir » à maman, au cimetière. Je pense que tu savais que je ne reviendrais pas avant longtemps. Je te remercie de ce geste, qui, aujourd'hui encore, m'émeut.

Sachant que je devais partir de la maison fin juin, comme mon père me l’avait exigé après les épreuves du bac, tu m'avais proposé de trouver un travail pendant les deux mois d'été. Ainsi, j'ai été vacataire pendant ces deux mois, avec une possibilité d’être embauchée. Sachant que je ne reviendrais pas chez moi, il fallait que je trouve un emploi fixe et un appartement.

Comme à ton habitude, en venant me chercher à la maison, le dernier week-end de juin, puisque j’embauchais le trois juillet 1990, tu m'as ouvert les bras, m'offrant ton cœur, ton amour, ton affection et une place de fille que je ne connaissais pas. Une mère douce, attentive, toujours prête à me soutenir et m'encourager à construire ma nouvelle vie. Nous allions souvent nous promener avec tes enfants, nous faisions des sorties entre filles au cinéma. Pendant ces quelques semaines, j'ai vécu des moments inoubliables, ayant le sentiment enfin d'être à ma place dans une famille. Je n'avais plus les responsabilités d'une mère, mais vraiment le sentiment d'être entouré d'amour donné à une fille et à une sœur.

Malheureusement, ce bonheur fut de courte durée. À peine, un mois et demi que je m’étais installée chez toi, que Lucien, ne comprenant pas cette relation et l'a rejetant, nous a séparées en me forçant à prendre son appartement à Paris, qu’il quittait, pour emménager avec son compagnon. Nous avons pleuré toutes les deux. Moi, me sentant abandonnée encore une fois, et toi n'arrivant pas à tenir tête à mon frère. Il te répétait que tu n'avais pas à t'occuper de moi, que c'était son rôle.

Nous étions toutes les deux sous son emprise, incapables de l'affronter, et ainsi nous l'avons laissé nous éloigner l'une de l'autre. Il me rappelait sans cesse que je n'étais pas ta fille, que j'avais une mère et même si elle n'était plus là aujourd'hui, je ne devais pas rechercher une autre relation « mère/fille » avec toi. Il m’affirmait que les difficultés de communication que j'avais avec ma mère venaient de moi : si je n'étais pas tout le temps avec mon père, à le suivre partout, jamais je n'aurais souffert de son manque d'affection. J'ai accepté cette accusation m’affirmant que tout venait de moi, que j'étais la seule responsable de mon malheur.

Mais toi, tu savais comment pouvait-être ma mère. Parfois, il lui était arrivé de mal te parler par jalousie. Elle comparait vos couples, et elle t'en voulait d'être heureuse. Souvent, tu l'avais entendu mal me parler, me reprendre pour des broutilles et me rabaisser.

Puis j'ai eu le courage de défier mon frère, en déménageant à Cergy. Nous avons pu retrouver une nouvelle relation, mais pas aussi belle que la première. Comme si, l'ombre de mon frère était toujours là, me rappelant que je ne pouvais être heureuse avec toi.

Quelques années plus tard, il y a eu ma dépression, puis j'ai déménagé, je me suis mariée. Tu es venue à mon mariage, toute seule. J'ai vraiment apprécié ce geste, car, quelque part, tu m'as permis d'avoir la présence d'une mère à mes côtés.

Au fil de mon travail psychologique, de ma descente en enfer, j'ai coupé avec ma vie d'avant, me plongeant dans ma thérapie et mon couple. Je me suis murée ne voulant plus penser, ni repenser que ce soit à ma famille ou à mes amies. Je considérais que seul le présent était nécessaire à ma vie. Le passé, je le vivais dans mes cauchemars et je voulais qu'il reste derrière moi, même si chaque jour il me détruisait petit à petit. Chaque rendez-vous chez le psychologue était à la fois une torture, mais aussi un pas libératoire. Malheureusement insuffisant pour renouer avec les personnes qui m'était chères malgré tout.

Au fil des années, nous nous sommes éloignées. Ou plutôt, j’ai laissé mon passé de côté, voulant uniquement regarder vers l’avenir : mon mari, la famille de mon mari, et les nouvelles amitiés.

Je reconnais aujourd'hui que j’aurais pu faire autrement. Mais, à ce moment-là, ce n’était pas possible pour moi. J’étais plongé dans ma guérison et ma nouvelle vie. C’est pour cela qu’aujourd’hui, je te présente mes excuses sincères ma Véro.

Depuis quelques années nous avons quelques discussions et je m'en réjouis, ma cousine de cœur. Je te remercie d'avoir toujours été là pour moi et de m'avoir suivi toutes ces années même si c'était de loin. Je t'aime et je n'oublierais jamais ce que tu as fait pour moi ni que tu resteras toujours ma petite maman de cœur.


À très bientôt,

Ta cousine qui t'aime toujours...

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