Chapitre 1 : Le jour ou elle a cessé d'être invisible

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Ce matin-là, j’étais en retard. Pas genre "j’ai pris mon temps" — genre "j’ai lutté contre l’univers entier pour sortir de mon lit". Mon réveil n’avait pas sonné (encore), mes écouteurs étaient morts, et j’avais pris une chaussette grise et une noire sans m’en rendre compte. Bref, un lundi.

Mais ce n’est pas ça que je retiens.

Ce que je retiens, c’est le moment où je suis entré dans la salle 207 et que je l’ai vue.

Maya Lee.

Elle était assise à sa place habituelle, près de la fenêtre, un roman épais sur les genoux — couverture rigide, pages cornées, dos brisé par trop de lectures. Elle lisait comme si le monde n’existait pas. Comme si elle n’avait besoin de rien d’autre que ces pages.

Et moi, pour une raison que je ne comprenais pas encore, j’ai ralenti.

Tu vois, je suis le genre de gars qu’on remarque. C’est pas de la frime. C’est juste… comme ça. Je fais des blagues, je parle fort, je tape dans le dos des gens, je suis "cool". Mais avec elle, j’avais l’impression d’être transparent. Et ça, c’était nouveau.

Et puis, il y a eu Mme Rowan.
Elle est entrée dans la classe avec un air mystérieux qui ne présageait jamais rien de bon.

« Bonjour à tous. J’ai une annonce. Cette année, notre collège participera au Concours de Lecture Inter-Collèges. Un vrai, avec d'autres établissements, un jury externe, un trophée, et même une bourse pour le lycée. »

Bourse = parents contents. Parents contents = paix à la maison.
J’ai levé un sourcil. Intéressant.

Mais ce qui a suivi m’a glacé.

« Les deux élèves choisis pour représenter Jefferson sont… Maya Lee. »

Tout le monde a tourné la tête vers elle. Elle est restée droite, calme, impassible. Comme si c’était normal qu’on la sélectionne. Ce qui, à vrai dire, l’était.

Et puis, le couperet :

« …et Leo Carter. »

Un petit rire s’est échappé au fond de la classe. J’ai senti les regards se tourner vers moi, moqueurs. Genre : lui ? sérieux ?

Maya a levé les yeux, lentement.
Et me les a plantés dans le cœur comme deux épingles glacées.

Elle était furieuse.

Pas bruyante. Pas explosive.

Silencieusement furieuse.

Et moi, j’ai fait ce que je fais toujours quand je suis mal à l’aise : j’ai plaisanté.

« Wow, combo gagnant. Belle et l’imbécile. »

Quelques rires. Mais pas le sien.
Elle m’a juste tourné le dos.

Après le cours, je suis resté dans le couloir, adossé à un casier. Neyla, sa meilleure amie, m’a lancé un regard noir.

« Ne t’avise même pas de la faire échouer. »

J’ai levé les mains. « Je suis innocent jusqu’à preuve du contraire. »

Elle m’a fusillé du regard.
Et c’est là que j’ai compris : si je voulais qu’elle me voie autrement, il allait falloir que je le mérite.

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