Chapitre 6 : Le carnet ouvert
Je lui ai tendu mon carnet noir.
Un vendredi. Fin de séance. Elle rangeait ses affaires sans un mot, comme toujours ces derniers temps. Et moi, j’ai sorti ce vieux cahier froissé de mon sac et je l’ai posé devant elle.
« Tu veux savoir ce que je ressens ? Ce que je n’arrive pas à dire quand on lit, quand on se regarde à peine ? Tiens. C’est là-dedans. »
Elle ne l’a pas pris tout de suite.
Elle l’a juste regardé.
Et moi, je me suis senti ridicule.
Mais elle a fini par tendre la main. Lentement. Comme si elle craignait de briser quelque chose rien qu’en le touchant.
Elle a tourné les premières pages.
Et puis une autre.
Et encore une.
Sans un mot.
Au bout de quelques minutes, elle a refermé le carnet.
L’a posé doucement sur la table.
Et a murmuré :
« Tu écris mieux que tu ne parles. »
J’ai souri. Un vrai, cette fois.
« Tu veux que je t’écrive plus souvent ? »
Elle a hésité. Et puis elle a hoché la tête.
Et j’ai su qu’on venait d’ouvrir une autre page.
Pas un chapitre d’école.
Pas une scène à deux voix.
Mais notre histoire.
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