Chapitre 8 - Le Scoop du Siècle

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* MARTIN *

La soirée du Grand Palais fut finalement bien moins ennuyeuse qu’il ne le pensait, et ce malgré la mésaventure de la fillette et la populace guindée qu’il méprise habituellement au plus haut point. La présence d’une certaine « Emilie » y est probablement pour beaucoup d’ailleurs !

Maurice avait raison : Elle a du caractère, la coquine ! Sous ses airs un peu coincés, elle a du répondant, et une pointe d’arrogance qui n’est pas pour lui déplaire. D’autant que les femmes qui lui résistent, ça l’excite encore plus. Sans parler de son cul ! Ce putain de cul, bon sang !

Quand ses yeux se sont posés sur cet arrière-train aux lignes parfaitement arrondies, il a senti la chaleur et le sang afflué dans son entre-jambe. Il tenterait bien sa chance avec elle, en fin de compte… En insistant un peu, il est quasi certain qu’il réussira à la dérider assez pour se la taper. Après tout, elle est quand même rudement bandante, cette nana ! Pourquoi se priver d’un p’tit coup en one-shot ?

Mais pour le moment, il a d’autre chat à fouetter.

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Quelques jours après la cérémonie, Martin entend (enfin !) de nouveau parler de l’intervention du « justicier de la nuit », selon sa source des bas-fonds qui se plaint de cet énergumène qui empêche le travail des brigands du quartier. Reboosté, il obtient des renseignements supplémentaires grâce à son flegme et à son charme naturel. Il faut dire que soutirer des informations à la jeune stagiaire de l’accueil au commissariat a été chose plutôt aisée. La petite vierge effarouchée était déjà tout émoustillée rien qu’en le regardant ! S’il avait eu un peu de temps, il lui aurait probablement pris sa virginité… Bref. La fameuse marque rouge en triangle inversé est bel et bien réapparue dans une autre affaire.

Depuis, Martin suit l’enquête de près, escortant discrètement tous les déplacements de son officier favori, en planque dans sa Volkswagen Polo II noire. Pas très glamour pour choper des meufs, cette voiture est une véritable poubelle, qui plus est ! Mais il n’a nullement les moyens de s’en payer une autre, et il s’en contente, accentuant parfois son côté « dépotoir » durant ces périodes de pistage secret. Du moment qu’il a la place pour baiser dedans de temps en temps !

Après quelques filatures, en regroupant et analysant les résultats d’enquête de Maurice et les infos qu’il récolte avec l’aide de la petite prude de l’accueil, Martin s’aperçoit que son vengeur mystérieux semble agir essentiellement lors des nuits à faible luminosité, dans l’obscurité noire et inquiétante des soirs sans lune le plus souvent.

Maintenant qu’il sait quand planquer pour tenter de démasquer l’énigmatique inconnu redresseur de torts, Martin décide d’investir dans un petit récepteur radio portatif, et se branche sur le canal de la police locale les soirs de nouvelle lune, suivant scrupuleusement le calendrier lunaire que son pote forain lui a dégoté dans la roulote de sa Madame Irma.

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Ce soir-là, Martin est à l’affût. Son récepteur allumé sur son tableau de bord, écoutant attentivement les appels radio du commissariat, planqué sur le parking d’un célèbre fastfood, il s’empiffre comme un cochon en attendant un quelconque indice. L’attente laisse libre court à ses pensées. Il repense à sa mère, qui n’a jamais compris comment il peut encore avoir un corps de rêve comme le sien avec toute cette malbouffe. Mais Martin s’entretient tout de même, l’air de rien ! Et ce qu’elle ignore, c’est que son activité physique favorite n'est autre que le « sport de chambre », qu’il pratique depuis l’âge de seize ans.

Dépucelé par la voisine du dessous, femme de joie de métier, un soir d’hiver où sa mère travaillait tard, il s’exerce désormais à faire des pompes et muscler son bassin lors de séances d’allées et venues intenses dans l’intimité de ces femmes qu’il fait grimper aux rideaux. Il aime voir ces corps envoutants de ces dames soi-disant prudes s’abandonner à ce désir charnel, ces diablesses insolentes qui l’implorent de continuer à chaque à-coup en gémissant de plaisir, jusqu’à ce qu’elles hurlent leur goût immodéré et éhonté pour ce péché originel.

Tout en se remémorant sa dernière partenaire sportive, l’épouse d’un des éminents hommes d’affaires de la cérémonie qu’il a culbuté sans vergogne dans les toilettes du Grand Palais (Une sacrée chaudasse, la chienne !), il croque dans son hamburger, dont la sauce grasse vient inévitablement s’écraser sur son t-shirt large. Soudain, une alerte retentie.

« - Shhhrr Appel à toutes les unités ! Appel à toutes les unités ! Shhrr Vol à l’arraché à l’angle de la rue Est et de Centrale Boulevard. Je répète : Vol à l’arraché à l’angle de la rue Est et de Centrale Boulevard. Shhrr Suspect en fuite, type caucasien, survêt’ et bonnet noir, à priori armé. »

Oh purée !!! Mais c’est à deux rues d’ici, ça !!

Ni une, ni deux, Martin balance les restes de son repas peu diététique dans le sac en papier kraft à côté de lui, s’essuie nonchalamment les doigts pleins de gras sur son haut déjà tâché et démarre en trombe.

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Bingo !

Martin se gare à l’angle pile au bon moment, alors que son justicier nocturne est en pleine séance de travail, ligotant le suspect désormais désarmé et recouvert jusqu’au nez de son bonnet promptement enfoncé sur son crâne, sous la lueur branlante et clignotante du seul réverbère de la ruelle adjacente.

Non… ?! Impossible !!!

Martin n’en revient pas : La silhouette qui s’active sous ses yeux n’est autre que celle d’une femme, aux formes voluptueuses, délicieusement moulée dans une combinaison entièrement noire, les cheveux d’un noir de jais attachés en une longue tresse basse qui court sur son corps parfaitement sculpté, du rouge à lèvres noir et un masque sombre sur les yeux, du genre « Catwoman ».

D’abord figé de stupeur, Martin se décide finalement à serrer son frein à main avec vigueur, et descend précipitamment du véhicule pour tenter de rentrer en contact avec la déesse qu’il vient de prendre en flagrant délit. Mais lorsqu’elle s’aperçoit de sa présence, elle relève la tête et le fixe. Il remarque alors ses yeux sombres et profonds, dont la pupille semble avoir entièrement absorber l’iris sous un voile noir comme les ténèbres. Ils se toisent alors quelques secondes, qui lui paraissent interminables. Puis, brusquement, elle se redresse d’un bond et s’enfuit en courant vers la pénombre au bout de la ruelle, avant de disparaitre dans la nuit noire.

Incroyable ! Martin tient son scoop !!

Dommage qu’il n’eût pas sur lui son vieil appareil photographique pour immortaliser cette rencontre incongrue… Mais cela ne l’empêchera pas de publier son article, ça, c’est une certitude ! Car ses lecteurs l’attendent avec impatience.


* EMILIE *

Tranquillement installée à sa table de prédilection dans le café Bernard, près de la baie vitrée laissant filtrer un léger rayon de soleil qui l’enveloppe d’une douce chaleur matinale, Emilie sirote son traditionnel thé du matin, les jambes croisées et le regard encore embué de sa courte nuit.

Alors qu’elle avale une nouvelle gorgée de son breuvage chaud, elle manque de s’étrangler lorsqu’elle aperçoit, sur la table voisine, le dernier Quotidien du Peuple. Celui-ci affiche en Une un titre évocateur qui attire aussitôt son attention :

« Le justicier de la nuit n’est autre qu’une justicière ! »

Eh MEEERDE !!! Elle a donc bien été vu dans cette ruelle… La poisse !

« - Tout va bien, Emy ? lui lance le barman en la voyant tousser frénétiquement.

- Hum, hum ! Euh… Oui oui, merci Jean-Hugues ! J’ai juste avalé de travers… Je peux ? lui demande-t-elle en désignant la revue.

- Bien sûr ! »

Soudainement prise de panique, elle s’empare précipitamment du journal pour en lire le contenu au plus vite. Ses yeux parcourent rapidement les lignes, et d’après ce qu’elle peut y déchiffrer, l’article reste vague quant à l’identité de ce justicier qu’il révèle être en vérité une femme.

Il n’a donc pas reconnu la protagoniste… Ouf !

Plus détendue désormais, Emilie prend le temps tout de même de se pencher sur la teneur de ce billet :

« Quelle ne fut pas ma surprise l’autre soir dans cette ruelle sombre, que de prendre en flagrant délit notre fameux justicier nocturne, qui m’est apparu alors sous les traits d’une demoiselle, somme toute délicieuse ! Mes amis, vous seriez comme moi, ébahit face à cette merveille de la nature qui veille sur nos nuits actuellement : Une véritable Catwoman !

Toute de noir vêtue et finement sculptée dans une combinaison moulante qui fait incontestablement et divinement ressortir ses formes féminines et avantageuses, cette gonzesse a de quoi faire chavirer les cœurs ! Jambes de gazelle fines mais sportives, chute de reins ferme et bien galbée, hanches et taille de guêpe sensuelles, seins arrondis et délicatement dessinés que je devine tenir parfaitement dans mes mains malgré leur gabarit humble…

Messieurs les bons pensants, attachez vos lorgnons, cette beauté fatale au regard aussi impénétrable qu’un trou noir risque de vous faire subitement changer d’orientation professionnelle ! Personnellement, je deviendrai un criminel sans aucune hésitation, si cela me permet de me retrouver entre ses mains expertes.

Qui es-tu, belle et sexy femme de l’ombre ? Toi qui protèges notre ville dans le plus grand secret, te montreras-tu un jour sous ton vrai visage, afin que nous puissions te remercier comme il se doit ? Ou peut-être préfères-tu rester discrète, et ne te dévoiler qu’à un seul reporter, tel Spider-Man ? Dans ce cas, je suis ton homme ! Et je t’attendrai chaque nuit jusqu’à ce que tu daignes bien m’accorder quelques instants (que j’imagine déjà magiques) de ton précieux temps. »


Emilie est perplexe. L’auteur décrit cette femme avec beaucoup de sensualité, et même une pointe d’envie et d’excitation lui semble-t-il. Les détails sur ses courbes sont presque indécents, à la limite de l’érotisme, tout en restant polis et respectueux toutefois, comme admiratif. Qui est ce journaliste aux envies non dissimulés qui souhaite rencontrer son héroïne masquée ?

Son regard dévie alors instinctivement vers la fin du dernier paragraphe, et se pose enfin sur les initiales signant la chronique : « M. McCulling ». Son cœur manque un battement.

« McCulling » ?! Comme… Martin MacCulling ??? Impossible…

Mais bien sûr ! C’était évident, voyons ! Ce type était bien trop curieux pour être honnête ! Elle n’était donc pas la seule journaliste incognito à cette soirée du Grand Palais. Et elle avait raison de se méfier de lui.

Maintenant, il va falloir calmer le jeu, et ses ardeurs surtout. Il ne doit pas découvrir l’identité de cette femme mystérieuse. Et il faut qu’Emilie garde l’avance qu’elle a sur ce sale petit fouineur.

Non ! C’est hors de question de tout gâcher maintenant ! Elle doit préserver son secret à tout prix, sans quoi tout ce qu’elles auront fait jusqu’ici n’aura servi à rien. Il ne faut pas qu’il sache. Ni pour elle, ni pour…

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