Chapitre 21 - Chasse à l'Homme
* MARTIN *
Le fameux soir du coup de filet arrive rapidement, et Martin suit les opérations de loin, comme le lui a suggéré l’officier de police. Garé le long de la route, il évite soigneusement le faisceau lumineux des lampes torches en plongeant rapidement sous son volant à chaque fois que les flics passent près de sa Polo, leur laissant croire que le véhicule est vide.
Il est inquiet. Pourvu que sa belle Catwoman l’aie cru, et qu’elle ne se retrouve pas mal prise en tombant dans ce traquenard. Car si elle ne tient pas compte de son avertissement, il n’aura aucun moyen de lui venir en aide face à cette horde de policiers qui n’attendent que de lui mettre la main dessus.
A la radio, Maurice donne le top départ de l’opération « Chat sauvage ».
Dans la bijouterie, trois flics grimés en voleurs des quartiers, vêtus de jogging, baskets trouées et cagoules noires, déclenchent l’alarme du magasin, puis sortent précipitamment du bâtiment, des sacs de velours remplis de faux bijoux à la main. Pour paraître plus crédibles, ils se retournent régulièrement, espérant se faire repérer par la justicière de la nuit.
Sur les toits, Martin aperçoit les ombres des forces de l’ordre qui se déploient rapidement en haut des immeubles avoisinants. Ils sont très nombreux, et il les soupçonne même d’être armés.
Mon Dieu… Pourvu qu’elle ne se pointe pas…
Les trois hommes courent dans la rue en scrutant tantôt derrière eux, tantôt le ciel, attendant leur châtiment, mais personne ne vient. Dans le doute, ils se faufilent dans toutes les petites ruelles sombres qui serpentent dans la ville, murmurant les noms des rues par laquelle ils passent dans leur micro caché sous leur veste, afin que les équipes en faction les surveillent bien. Mais toujours rien.
Au bout d’une bonne vingtaine de minute à parcourir la ville de long en large, les faux cambrioleurs finissent par s’arrêter dans une impasse, à bout de souffle. Les mains sur les genoux, haletants, ils se regardent alternativement, se demandant que faire de plus pour attirer l’attention. Quelques mètres plus loin, les véhicules banalisés qui les ont discrètement suivis se stationnent autour de la zone, phares éteints et prêts à intervenir. Suivi de près par Martin, qui a réussi à se fondre dans la masse avec sa vieille Polo noire ressemblant à celles qu’utilisent la police.
Martin reste inquiet. Elle n’a toujours pas montré signe de vie, mais sait-on jamais. Il réfléchit donc à un plan d’attaque pour lui sauver la mise en cas de besoin. Toujours branché sur le canal des flics, il entend Maurice s’impatienter à la radio, le ton dépité de sa voix reflétant son agacement.
« - Shhhrr Fait chier… Qu’est-ce qu’elle fout ? Pourquoi elle vient pas, c’te saleté ?
- Patron ? Pfff… Shrrr… On fait quoi maintenant ?
- Allez les gars… On lâche rien. Shhrrr On y retourne. Je suis sûr qu’elle va finir par se pointer…
- Ha pfff, ha pfff… Mais patron… On n’en peut plus nous !
- Shhhr Raaah ! C’est pas l’moment d’flancher, là ! Allez, merde ! On reste concentré, et je veux tout le monde sur le qui-vive, et qu’ça sau… »
Avant même que Maurice ne termine sa phrase, les lampadaires s’éteignent subitement, plongeant le quartier complet dans la pénombre la plus totale.
« - Shhhrr Putain c’est quoi s’bordel ?? vocifère Maurice.
- Chef… shrrrr Il s’passe quoi là ? On n’y voit plus rien ! ronchonne l’un des flics dans l’impasse.
- Shhhrr Merde, j’crois qu’y’a quelqu’un ! s’exclame un autre.
- Hein ?!
- Aïe ! Shhhrr Hey !! Faites attention les mecs ! s’agace l’un d’eux.
- C’est pas moi ! rétorque un second.
- Mais… shrrr, Mais qu’est-ce qu… AAAH !
- Attention !!! Shrrr…
- P’tain d’merde !! Hmf ! Houtch ! Shrrrrrrr… »
Des bruits de bagarre se font entendre l’espace d’un instant. Puis, plus rien.
« - Les gars ?! s’inquiète Maurice à l’autre bout du fil. Hou hou ? Shrrrr… Qu’est-ce qu’y s’passe bon sang ?? Mais répondez, merde ! Shhrrr… Putain, c’est elle ! On s’déploie les gars ! Go, go, go !! »
Martin observe, incrédule, une floppée impressionnante de policiers se ruer dans l’impasse en catastrophe, équipés de torches. Dans la lueur de leurs lumières qui éclairent désormais la ruelle, Martin reconnait Maurice, à l’arrière du peloton. Il s’arrête au coin du bâtiment, pose ses mains sur les hanches, puis pousse un juron en balançant son chapeau à terre avant de se passer la main dans les cheveux, visiblement très énervé. Puis il vocifère à nouveau des ordres en pointant du doigt la grande route, et les agents se déploient aussitôt dans tout le quartier.
Martin sort à son tour de son véhicule et se faufile jusqu’à l’inspecteur, qui continue de pester en replaçant sa coiffe de détective sur la tête.
« - Qu’est-ce qu’y s’passe ? chuchote-t-il derrière le dos du policier.
- Ah. T’es là, toi… bougonne celui-ci après s’être retourné pour identifier son interlocuteur. Y s’passe qu’elle nous a encore eu, voilà c’qui s’passe ! »
Martin ne comprend toujours pas pourquoi toute cette cohue, mais il dissimule un soupir de soulagement.
« - Putain, ça fait chier, sérieux !! glapit le flic, hors de lui. Non mais, r’gardes moi ça ! La salope !! »
A ces mots, Martin sort lui aussi sa lampe torche et s’engouffre dans l’impasse pour aller constater par lui-même.
Et quelle n’est pas sa surprise en découvrant la scène insolite que sa Catwoman préférée a laissé derrière elle !
Au milieu de la ruelle, les trois policiers grimés en cambrioleurs sont ligotés fermement, assis sur le sol dos à dos et leur cagoule dans la bouche en guise de bâillon. Martin s’approche encore et constate un écriteau autour du cou de l’un d’eux, sur lequel il déchiffre à la lueur de son éclairage de fortune « FLICS », suivi de la marque distinctive de la justicière nocturne : le triangle inversé rouge.
Martin jubile intérieurement et esquisse malgré lui un sourire satisfait : Elle l’a écouté !
Tandis qu’il retourne à son véhicule, ravi du résultat de cette opération déjouée, une silhouette fluette accourt vers lui.
Annotations
Versions