Chapitre 28 - Rencontre Détonnante

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* MARTIN *

Il a beau chercher, Martin ne trouve toujours pas la signification de ce symbole à priori d’origine asiatique dans le vaste choix de bouquins de la bibliothèque municipale. Il a fait tous les rayons pourtant !

Agacé, il déambule une nouvelle fois dans la grande salle, attrapant à la volée de nouveaux exemplaires à consulter, espérant y trouver ne serait-ce qu’un indice. Mais la culture chinoise et japonaise est vaste, et les dialectes nombreux. C’est comme chercher une aiguille dans une botte de foin !

Lorsqu’il retourne s’installer à l’une des grandes tables postées au milieu de la pièce pour reprendre ses recherches, il laisse tomber rageusement la pile de livres sur le bois massif et sombre, déclenchant un bruit sourd qui résonne dans tout le hall, et augmentant un peu plus encore la colère de la vieille bibliothécaire aigrie qui revient aussitôt au pas de course lui demander le silence pour la dixième fois.

« - C’est une bibliothèque ici, monsieur, pas une salle de sport gratuite ! »

Pffff… Elle m’énerve la vieille peau… D’la merde, j’me casse ! Je serais mieux ailleurs de toute façon.


Après avoir inscrit sur le registre son nom et le titre des ouvrages qu’il emprunte, Martin ressort les bras chargés de trois autres livres, dépité et sans grand espoir de résoudre son énigme aujourd’hui pour autant.

En marchant dans la rue, il tourne frénétiquement les pages d’un des bouquins, scrutant scrupuleusement chaque symbole avec attention, le reste de la pile sous le bras. Trop obnubilé par sa lecture, il percute violemment un piéton en tournant au coin de la rue, lâchant tous les livres qui s’envolent alors dans les airs.

« - MEEEERDE !!! Non mais vous n’pouviez pas faire attention, sérieux ?! vocifère Martin en tentant vainement de les rattraper au vol avant qu’ils n’atterrissent à terre lamentablement.

- Oups ! Oh pardon ! Milles excuses ! Je suis vraiment désolée, je n’vous avais pas vu… bredouille la voix féminine qui vient de lui rentrer dedans et qui se penche aussitôt pour ramasser les ouvrages étalés au sol.

- Non mais j’vous jure ! Faut r’garder d’vant vous quand vous… »

Martin stoppe net son discourt accusateur lorsqu’il croise enfin le regard de la jeune femme qui vient de se redresser pour lui faire face, interloquée elle aussi.

« - …Emilie ?! »

Tous deux se toisent quelques secondes, le temps pour Martin de dévisager Emilie de la tête aux pieds. Vêtue d’un survêtement de sport moulant, elle semble avoir été interrompue en plein jogging.

« - Ah… C’est vous… lui répond-elle alors, l’air contrarié. Décidément… Vous êtes un trop souvent dans mes pattes, vous… D’ailleurs, vous êtes gonflé de m’aboyer dessus comme ça alors que c’est vous qui m’êtes rentré dedans ! »

Mais Martin ne l’écoute déjà plus. Ses yeux suivent les formes alléchantes et parfaitement galbées d’Emilie d’un air vorace, et cela lui rappelle des souvenirs. Il repense à ses ébats avec sa sublime Catwoman, et se fait soudain la réflexion qu’Emilie semble à peu près du même gabarit que sa bien-aimée.

Elle est même presque aussi sexy dans cette tenue, maintenant que j’y pense ! Un cul bien arrondi, des seins pas très gros mais fermes, une taille fine…

« - Hey ! Vous m’écoutez ou vous préférez me mater comme ça pendant des heures ?! s’insurge Emilie lorsqu’elle aperçoit son regard gourmand qui glisse sur elle comme un mort de faim.

- Hein ? souffle Martin qui continue de la déshabiller du regard sans scrupule, encore dans ses pensées.

- Non mais je rêve !! s’offusque-t-elle face à son manque évident de bienséance et de retenue. Quel goujat vous êtes, vraiment !! C’est pathétique ! »

Et elle lui flanque la pile de bouquins en plein dans le ventre d’un geste violent, emplit de colère et d’amertume.

« - Tous les mêmes ! grogne-t-elle avant de tourner les talons.

- ATTENDEZ ! s’exclame Martin en la rattrapant par le bras, après avoir été brusquement ramené sur terre par le choc des livres sur ses entrailles. Attendez… Excusez-moi, vraiment. Vous avez raison, je suis pitoyable. C’est un vieux réflexe, j’en suis navré. Laissez-moi me faire pardonner pour mon comportement de macho déplacé.

- Pffff… souffle-t-elle en levant les yeux au ciel.

- Puis-je vous offrir un verre ?

- Un verre… Et plus si affiné je suppose ?

- Non non, juste un verre. »

Après un bref instant d’hésitation, scrutant le visage de Martin pour tenter d’y déceler la supercherie sournoise qui se cache assurément derrière sa proposition, Emilie se pince les lèvres.

« - Je vous remercie pour votre invitation, lui répond-elle finalement. Mais comme vous pouvez le constater, je suis en pleine séance de sport.

- Justement ! Vous devez avoir soif.

- Je viens seulement de commencer ! Vous m’avez coupé dans mon élan justement. Et c’est important de pratiquer un sport quotidiennement pour…

- Avec un corps pareil, vous n’en avez pas besoin » la coupe-t-il vivement, un léger sourire se dessinant sur son visage.

Prise de court par sa réflexion, elle reste bouche bée et rougit légèrement, ne sachant visiblement pas quoi lui répondre.

« - Hum, hum ! reprend-elle en retrouvant de sa contenance. Oui, bon… Enfin, je vous rappelle aussi que pour obtenir ce résultat, il faut l’entretenir ! Vous devriez savoir de quoi je parle, avec une carrure comme la vôtre, non ?

- En effet, rétorque-t-il, son sourire s’élargissant de plus bel. Je m’entretiens moi aussi, c’est vrai. Mais moi, je pratique plutôt le « sport de chambre » pour garder la ligne !

- Et c’est repartie… murmure-t-elle d’un air blasé.

- Bah quoi ?

- Je vous vois venir, MacCulling ! Vous allez me dire que c’est grâce à vos MAAAA-gnifiques performances sexuelles que vous musclez votre corps si parfait qui plait tant à ces dames, n’est-ce pas ?

- Je n’allais pas le dire comme ça, mais je crois que je n’aurais pas mieux dit moi-même finalement ! ricane-t-il, amusé.

- Pfff… Quel prétentieux, c’est horripilant…

- Vous rigolez, mais c’est pourtant très sportif comme activité !!

- Je n’en doute pas… crache-t-elle entre ses dents, peu convaincue.

- Vous ne trouvez pas ?

- Je suppose que si.

- Vous ne pratiquez peut-être pas assez pour le savoir, la charrie-t-il alors.

- Oh, mais ne vous inquiétez pas pour moi, MacCulling ! Je suis parfaitement satisfaite de ce côté-là !

- Vraiment ?! Parce qu’à l’évidence, vous n’avez pas eu les bons partenaires !

- Qu’est-ce qui vous fait penser ça ?

- Ils ne devaient pas être assez endurants pour que vous pensiez que c’n’est pas du sport !

- Seriez-vous… jaloux ? lui lance-t-elle subitement, rentrant clairement dans son petit jeu de séduction.

- Vous aimeriez ? renchérit-il, le visage aguicheur.

- Vous pensez pouvoir tenir la distance ?

- Je peux essayer, si vous le désirez.

- Vous n’avez déjà pas réussi à m’embrasser l’autre jour, alors…

- Laissez-moi une autre chance. »

* EMILIE *

Il est si proche d’elle, sa main la retenant toujours par le bras… Elle sent son souffle sur son visage, à quelques centimètres l’un de l’autre. Son cœur s’emballe, sa respiration s’accélère à mesure que son regard intense se plonge dans le sien.

Et, soudain, sans crier gare, sans même qu’elle ne sache réellement ni comment ni pourquoi d’ailleurs, elle se laisse emporter par l’impulsion du désir, et vient poser ses lèvres sur les siennes, dans un baiser tendre et chaste. Leur contact est plaisant, grisant même, et un frisson la parcourt.

D’abord surpris, Martin ne lui répond pas. Il ne cherche pas non plus à la ramener contre lui, ne bouge même pas ses mains. Puis, après un bref instant, pris lui aussi dans l’engrenage et la chaleur de cet échange, il attrape délicatement sa nuque de sa seconde main et accentue petit à petit la pression en embrassant chaque parcelle de peau de sa bouche, avec étonnamment beaucoup de courtoisie et de sensualité. Emilie l’accompagne dans son geste, laisse glisser ses lèvres contre les siennes avec délectation, savourant ce moment qu’elle redoutait mais qu’elle attendait finalement tant.

Puis, inopinément, des images subliminales de parties de jambes en l’air avec Martin s’immiscent sur ses paupières closes. Emilie sursaute et se détache aussitôt du jeune homme, les yeux écarquillés. Martin la regarde, interloqué, attendant une explication à ce soudain revirement de situation. Le souffle court, elle se pourlèche les lèvres, comme pour retenir un peu le goût de son baiser, mais ne sait trop quoi lui dire pour se justifier.

« - Je… Heum… Pardonnez-moi… » balbutie-t-elle en reculant lentement sans le quitter des yeux.

Et elle s’enfuit en courant.


#

Une fois hors du champ de vision de Martin, Emilie s’arrête dans une ruelle et s’adosse au mur, haletante et complètement déboussolée.

Quelle lâche tu fais, ma pauvre… C’est lamentable…

Mais qu’est-ce qui m’arrive ? Pour une fois que je peux en profiter, je ne trouve rien de mieux à faire que de m’enfuir comme une voleuse… Encore… J’étais pourtant sensé détourner ses ardeurs, il me semble ! Il va finir par ne plus rien tenter, si je le laisse en plan comme ça à chaque fois ! Et en plein baiser en plus ! Un baiser si agréable, si tendre…

Son cœur bat la chamade en se remémorant la sensation de sa bouche contre la sienne. Une bouche si délicieuse…

NON ! Ce n’est pas bien ! C’est même du grand n’importe quoi ! Finalement, je n’y arriverai pas… Je ne peux pas coucher par intérêt… C’est impossible.

Elle se pose sa tête contre la brique froide derrière elle, sa main sur sa poitrine, pour tenter de reprendre ses esprits et de calmer son palpitant qui semble courir un marathon sans elle.

Pourtant…

Elle en a tellement envie… Pourquoi n’aurait-elle pas le droit, elle aussi, de goûter au plaisir du sexe avec lui ? Pourquoi ne pourrait-elle pas, elle aussi, profiter de son corps musclé et puissant ? Pourrait-elle, elle aussi, apprécier son entre-jambe viril et bien bâti, qu’elle a pu voir furtivement lors de sa visite chez lui ?

Elle sait qu’il est encore là, quelques mètres plus loin, à attendre bêtement sur le trottoir, probablement décontenancé lui aussi. Elle a senti son regard qui la suivait. Si elle s’écoutait, elle pourrait revenir, faire marche arrière, le retrouver pour se laisser aller enfin dans ses bras. Ne plus se soumettre à sa raison pour laisser libre court à la passion. Elle est persuadée qu’il en avait autant envie qu’elle, elle l’a bien ressentie durant leur baiser. Il lui pardonnerait sûrement son coup de sang pour retrouver ses lèvres à nouveau. Peut-être même qu’il l’emmènerait chez lui après ça, et qu’ils pourraient s’envoyer en l’air, qui sait ?

Non mais qu’est-ce que j’raconte, moi !!

C’est pas de moi qu’il a envie, je le sais bien ! Ce n’est pas moi qui baise régulièrement avec lui durant des soirées sexuellement intenses. C’est sa Catwoman… La belle justicière mystérieuse et fougueuse, celle qui le met à ses pieds, et à qui il obéit sans rechigner. Celle qui a fait de lui un soumis, lui qui est pourtant un mâle dominant par excellence…. Cette femme masquée mais totalement débridée dont il ne connait même pas l’identité, mais à qui il ne peut rien refuser… C’est avec elle qu’il a même fait l’amour dernièrement, avec pour la première fois un semblant de douceur et de passion, indiquant un respect nouveau pour sa partenaire. C’est elle qui fait chavirer son cœur…

Non, elle doit se rendre à l’évidence, son histoire avec lui n’a aucun sens. Elle ne peut pas prendre la place de sa complice. C’est avec elle qu’il veut être, pas avec moi… S’il savait pourtant…


* MARTIN *

Ses lèvres étaient si douces et délicates… Légèrement parfumées même ! Mais encore une fois, elle s’est défilée…

Martin n’y comprend plus rien. Il lui semblait pourtant qu’elle appréciait son baiser. Elle l’a même fortement encouragée à ce qu’il a pu ressentir ! Quand elle s’est éloignée de lui, il l’a bien vu passer sa langue sur ses lèvres avec gourmandise, comme pour retenir le goût de leur baiser. Son regard était si intense…

Et puis elle s’est enfuit de nouveau. Et il n’a rien fait pour la retenir… Encore…

Pourquoi ne l’a-t-il pas rattrapé et plaqué contre le mur pour l’embrasser encore avec passion, comme il le fait si bien habituellement avec ses conquêtes pour leur donner des envies plus subjectives ? Elle aurait fini par craquer elle aussi, sans aucun doute. Et peut-être aurait-il carrément réussi à l’emmener chez lui pour finir le travail une bonne fois pour toute. Pourtant, il n’en est rien.

Qu’est-ce qui le retient à ce point ? Où est donc passé Martin le séducteur, le Don Juan, le tombeur de ces dames, celui qui les fait toutes fondre en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, et qui les fait toutes grimper aux rideaux ensuite ? Pourquoi n’est-il plus aussi sûr de lui face à elle ?

Quelque chose cloche avec cette nana, mais il n’arrive pas à cerner de quoi il s’agit exactement. Comment fait-elle pour le troubler autant ? Car il n’a bizarrement pas envie de procéder comme avec les autres femmes lorsqu’il est avec elle. C’est comme s’il ne voulait pas gâcher sa chance, comme s’il prenait des pincettes pour ne pas la laisser lui échapper. Comme s’il voulait aller plus loin, la garder plus longtemps auprès de lui… Comme s’il ne voulait pas juste la mettre dans son lit… Pas juste un vulgaire plan cul en fait…

Il a même parfois des gargouillis dans le ventre quand il est près d’elle… Aurait-il… des sentiments, finalement ?!

Ma daronne aurait-elle raison ? Est-ce que c’est ça, être… amoureux ?? De Emilie, vraiment ???


Le voilà désormais le cul entre deux chaises : D’un côté sa Catwoman sexy et ses expériences sexuelles intenses et excitantes qui le rendent complètement accro, et de l’autre les potentiels sentiments qu’il semble éprouver pour la belle Emilie.

Il pourrait se satisfaire des deux en même temps, mais bizarrement, il ne veut pas jouer double jeu avec Emilie. Habituellement, cela ne le dérangerait absolument pas, il l’a d’ailleurs déjà fait avec d’anciennes conquêtes. Comme il n’a jamais eu l’intention de se poser ni de s’embrigader dans des histoires de couple à proprement parlé, il n’a jamais eu le moindre scrupule à jouer sur deux tableaux simultanément. Au grand damne de ma mère !

Mais là… C’est différent. Étonnamment, il n’a pas envie de la décevoir, et veut même être totalement honnête avec elle. Le truc, c’est qu’il n’est pas sûr d’être entièrement et pleinement satisfait au lit en renonçant à ses ébats avec sa justicière féline et dominatrice… Il espère qu’Emilie est moins prude qu’elle n’y parait, du reste, et que son côté mystérieux cache en vérité une femme un peu plus dévergondée. Saurait-elle le combler pour le retenir d’aller voir ailleurs, comme il a pourtant coutume de faire ? Arriverait-il à se passer de ces moments torrides avec sa Catwoman au profit d’une femme plus posée mais dont il connait l’identité comme Emilie ? Une femme qu’il pourrait même envisager d’épouser, qui sait. Ma mère serait contente ! Elle me lâcherait enfin la grappe avec ça, au moins !

Mais cela impliquera donc de faire un choix. Cornélien !


Quelque chose le chiffonne cependant : Il est persuadé qu’Emilie en sait bien plus sur la justicière nocturne qu’elle ne le prétend. Espérant en découvrir un peu plus sur l’énigmatique jeune femme, et intérieurement avoir une nouvelle opportunité avec elle en plus de ça, il décide de la filer discrètement.

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