Chapitre 30 - Futur Gendre ?

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* EMILIE *

A peine a-t-elle passé les grandes portes vitrées de l’hôpital que sa mère lui tombe dessus sans ménagement.

« - C’était qui ? lui assène aussitôt Diane en suivant des yeux à travers le carreau le jeune homme qui s’éloigne dans la rue.

- Qui ça ?

- Bah, le jeune homme plutôt beau gosse avec qui tu parlais, tiens ! Quelle question !

- Oh ! Lui ? Personne…

- Comment ça, « personne » ?? Tu te fous de moi ? Ça fait dix minutes que je vous vois discuter tous les deux, et que j’attends bêtement à l’intérieur pour ne pas déranger !

- Tu aurais pu nous rejoindre, ce n’est personne d’important…

- Arrêtes, je te connais par cœur, ma fille ! Alors ?? C’était qui ?

- Pffouuu… ronchonne Emilie. T’es chiante… C’était juste une connaissance je te dis, c’est tout…

- Une connaissance ? Vraiment ? Eh bien, si c’est vrai, il avait l’air de te faire pas mal d’effet ! ricane sa mère avec un sourire narquois.

- Hein ?! Mais n’importe quoi !

- Bien sûr que si ! Je n’suis pas dupe, tu sais ! Je t’ai vu rougir en lui parlant !

Ah merde… C’est malin… Elle va me charrier avec ça maintenant…

- C’était un collègue de travail ! Voilà ! Ça te va ?? s’agace Emilie.

- Un collègue plutôt mignon !

- Et alors ?

- Il te plait ? T’as une touche ?? s’enquiert sa mère, un large sourire aux lèvres.

- Maman !! s’offusque Emilie.

- Bah quoi ?! Après tout, tu es en âge de te marier, ma fille ! Je n’attends que ça, d’ailleurs ! C’est que je n’suis plus toute jeune, et que j’aimerai bien pouvoir voir mes p’tits enfants avant de claquer !

- Pfff, n’importe quoi… souffle Emilie en levant les yeux au ciel avec un petit rictus amusé. Tu n’es pas à l’article de la mort non plus, n’exagères rien !

- Mais je n’suis pas éternelle pour autant ! Et toi non plus, d’ailleurs. Il serait peut-être temps que tu te cases, Emy.

- Ne recommence pas, s’il-te-plait, grince-t-elle en se renfrognant. Je fais c’que j’veux de ma vie, maman. On en a déjà parlé, il me semble. De toute manière, je n’ai pas l’temps pour leurs amours fugaces…

- Ce ne sont pas les prétendants qui manquent pourtant ! Qu’est-ce que tu leur reproches aux hommes, exactement ?? Je ne te comprends pas…

- Rien ! Je ne leur reproche rien, je préfère simplement être toute seule ! Franchement, ça n’vaut pas la peine de tomber amoureuse. Des dragueurs y’en a par dizaine, et on sait où ça nous mène. Ce sont tous de vrais goujats…

- Oh ! Mais ils ne sont pas tous comme ça, heureusement ! Regarde ton père. C’était un homme adorable…

- Mais il n’est plus de ce monde, maman, la coupe-t-elle aussitôt. Et aucun autre homme ne lui arriverait à la cheville, de toute manière…

Pourquoi faut-il toujours qu’elle fasse en sorte de me rappeler l’absence de papa ?!

- Je suis sûre qu’il existe quelque part un homme digne de toi, soupire Diane. Tiens ! Ce fameux collègue par exemple ! Il avait l’air plutôt charmant et agréable !

Si elle savait…

- Mauvais exemple, maman ! C’est l’archétype du mec qui se tape tout ce qui bouge, au contraire !

- Je suis certaine que tu exagères encore la situation !

- Absolument pas ! J’en ai pour preuve la petite stagiaire du commissariat, qui a fait les frais de sa désinvolture. Tu n’as qu’à le lui demander, si tu veux. Elle se fera une joie de te raconter comment il s’est bien foutu d’elle, dans le seul et unique but de la sauter ! »

Diane lève les yeux au ciel d’un air blasé, avant de se décider enfin à sortir du bâtiment, suivi de près par Emilie.

« - Il travaille pour quelle rubrique de ton journal exactement ? continue-t-elle son interrogatoire sans plus de considération pour les propos mesquins de sa fille.

- En fait, il travaille pour un journal concurrent, du genre revue à scandale.

- Bah… Tu m’as dit que vous étiez collègues ?!

Oups…

- Oui, euh… collègues dans le sens qu’on a le même métier, quoi…

- Ah… Et vous vous êtes connu comment, du coup ?

- A une soirée de gala, dans laquelle il s’est infiltré incognito alors qu’aucun journaliste n’était autorisé…

- Tu veux dire… La soirée au Grand Palais ??

- Exact.

- Ah bah comme ça, vous étiez deux alors ! C’est drôle, non ? Vous avez eu la même idée ! Vous vous ressemblez, finalement !

Quoi ?! J’y crois pas… Le pire, c’est qu’elle a raison !

- Oui, bon… Non mais moi, c’est pas pareil, tu le sais bien !

- Evidemment ! glousse Diane, d’un air malicieux.

- Je bossais, je te rappelle ! s’indigne Emilie.

- Lui aussi, je suppose.

Zut… Deuxième point pour elle…

- Oui… Bon… Nan mais qu’est-ce que ça peut te faire de toute manière ?! Hein ? Là, on dirait plutôt que c’est toi qui es intéressée par Martin !

- Ah, donc il s’appelle Martin ?!

Et merde…

- Oui, souffle-t-elle, dépitée par sa propre bêtise. Mais s’il te plait tant, tu n’as qu’à sortir avec lui toi-même !

- Je ne suis pas sûre que ce soit moi qui l’intéresse, je suis bien trop vieille pour lui. Et puis, vu comment il te dévorait des yeux… glisse Diane d’un air triomphant, en feintant l’ignorance.

- Pfff, j’crois pas non… Et je n’crois pas non plus que l’âge soit un critère important pour ce qu’il fait avec les femmes…

- Vous vous êtes déjà embrassés ?

- Hein ?! C’est quoi cette question ?? Eeeet pis en quoi ça t’regarde d’abord ?? s’embrouille Emilie, prise au dépourvu.

- Donc oui.

QUOI ?!

- Mais nan !!!

- Bien sûr que si.

- Mais… Qu’est-ce qui te fait croire ça ??

- Tu rougis ! s’enquiert Diane, un sourire victorieux aux lèvres.

Oh purée !! Zut de flûte !

- Euh, je… Heum… Raaah !!! Tu m’énerves ! Toute façon, ça change quoi ? Ce n’est pas de moi dont il est amoureux…

- Ah bon ? Comment tu sais ça ? Tu lui as demandé ??

- Non… J’ai pas besoin, je le sais, c’est tout… se rembrunit Emilie. BON ! On n’va pas parler de lui toute la journée, hein ! Alors ? Ça été ta garde cette nuit ?

- N’empêche… insiste-t-elle tout de même, l’air pensif. C’est dommage, car il avait vraiment l’air sympathique, ce Martin ! Tu me le présenteras ?

- Pis quoi encore ?

- Je le verrais bien comme gendre, tiens ! Vous feriez un très joli couple.

Hein ?! Nan mais ça va pas ?!

- C’est ça… s’exaspère Emilie. SINON ! Et ta garde ? »

Et toutes deux repartent dans des discussions bien plus banales.


#

Lorsqu’elles arrivent au café Bernard, Martin est déjà accoudé au comptoir.

Merde ! Quelle imbécile, j’aurais dû m’en douter ! Pourquoi je suis venue ici d’abord ? Pourvu que maman ne l’aperçoive pas…

Croisant les doigts pour que Diane ne croise pas le visage de Martin, elle s’empresse de l’emmener à l’autre bout de la pièce, et prend bien soin de la placer dos au bar avant de s’installer face à elle. Elle commande deux thés, et toutes deux continuent leurs bavardages comme si de rien n’était.

Cependant, Emilie perçoit les yeux de Martin qui glissent sur elle à intervalles réguliers, comme la première fois qu’ils se sont rencontrés en ce lieu même. Seulement aujourd’hui, ils ne sont pas inquisiteurs. Ils sont mêmes plutôt tendres et délicats. Et lorsque leurs regards se croisent, il lui sourit simple d’un air presque affectueux, attentionné… Avec une forme de complicité, elle dirait même.

Ses yeux… Je n’avais jamais prêté attention à leur couleur si intense…

Bizarrement, il ne cherche pas à s’incruster cette fois. Il semble vouloir les laisser tranquillement entre mère et fille, sans s’imposer ni lui créer d’embarras. Alors Emilie fait bonne figure, et tente d’ignorer le plus possible celui qui pose sur elle un regard nouveau et sans ambiguïté à présent.

Peut-être n’est-il pas un si horrible personnage que ça, finalement…

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