Chapitre 33 - Blessure de Guerre

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* MARTIN *

Tout juste sorti de l’hôpital, après un séjour de quelques jours qui lui ont parus une éternité, l’épaule bandée sous son t-shirt, Martin est attablé dans un coin du café Bernard. Il savoure son café noir barista fraichement moulu – bien meilleur que le café soluble dégueulasse de la machine à café de l’hosto ! – tout en feuilletant un nouvel ouvrage sur les symboles chinois. Il espère encore découvrir la signification du tatouage de sa Catwoman, afin de faire éventuellement le rapprochement avec ses soupçons.

Plongé dans sa lecture, il ne prête d’abord pas attention à Emilie, qui vient de passer la porte pour aller s’installer à son tour à sa table habituelle. Mais lorsqu’elle passe commande auprès du barman, leurs regards se croisent.

Martin lui sourit gentiment et lui fait signe. Elle lui sourit timidement en retour, et Martin prend ça pour une autorisation. Alors il ferme son bouquin, attrape sa tasse et s’avance vers elle pour la rejoindre à sa table.

« - Bonjour Emilie. Je peux ?

- Oh ! Euh… Bonjour… Je vous en prie. C’est bien la première fois que vous me demandez avant de vous installer, monsieur MacCulling !

- Par pitié, Emilie ! feinte-t-il de s’offusquer. Appelez-moi Martin !

- Bon, euh… D’accord… Comme vous voudrez, Martin » répond-elle un peu hésitante.

Elle semble troublée, comme en proie à un dilemme, fuyant délibérément les yeux de Martin et rougissant légèrement. Et bizarrement, il se sent subitement lui aussi mal à l’aise.

Mais lorsqu’elle pose ses yeux sur le livre qu’il a posé à côté de lui, le visage de la jeune femme s’illumine de nouveau.

« - Ah tiens ! Vous apprenez le mandarin, vous ? plaisante-t-elle.

- Pas vraiment, non.

- Vous vous intéressez à la culture chinoise, alors ?

- En vérité, je cherche quelque chose. Un symbole bien spécifique, pour être plus précis, lui indique-t-il finalement.

- Ah ?

- Vous vous y connaissez, vous, en symboles chinois ?

- Hmmm… Un peu. J’en connais quelques-uns, les plus connus je suppose, mais sans plus.

- Et celui-ci ? Vous le connaissez ? » lui demande-t-il en sortant du bouquin un petit croquis dessiné à la main du symbole tatoué sur sa Catwoman.

Aussitôt qu’il retourne le papier pour le lui présenter dans le bon sens, elle se crispe. C’est presque imperceptible, mais Martin commence à bien connaitre chacune de ses réactions, et il perçoit ce détail juste avant qu’elle ne se reprenne rapidement en faisant mine d’inspecter le dessin.

« - Hmmmm… feinte-t-elle de réfléchir. Non. Ça ne me dit rien.

- Vous êtes sûre ?? insiste-t-il.

- Désolé, mais ce symbole ne me dit rien du tout. Vous avez vu ça où exactement ?

- Oh ! Euh… Sur le flocage d’un t-shirt, dans une vitrine. Je comptais me l’acheter, mais avant je préfère savoir ce que ça veut dire. Je n’voudrais pas froisser la communauté asiatique s’il s’agit d’une insulte, par exemple. Vous voyez c’que j’veux dire ?

- Ah… Oui, bien sûr. Malheureusement, je ne peux pas vous aider, j’en suis navrée. Cela dit, je ne suis pas non plus une experte en écriture chinoise, de toute manière ! ricane-t-elle comme pour cacher son angoisse.

- Hmm. Bon… Tant pis…

- Au fait ! s’exclame-t-elle soudain. J’ai entendu parler de la dernière intervention musclée de la justicière de la nuit. Apparemment, les mecs étaient armés. Ils ont tiré sur un homme, il parait même !! Vous êtes au courant ?

- Oui, oui, je suis au courant, oui ! » glousse-t-il, légèrement amusé.

Mais lorsque les yeux d’Emilie se posent sur son épaule, elle blêmit brusquement et écarquille les yeux.

« - Mon Dieu ! s’exclame-t-elle, horrifiée. Martin, mais… Vous saignez !?

- Quoi ?! »

Il tourne aussitôt la tête vers son épaule, et s’aperçoit avec effroi qu’une tâche rouge sang est en train de s’agrandir petit à petit sur le tissu blanc de son t-shirt.

« - Meeeeerde ! jure-t-il en relevant sa manchette pour constater les dégâts.

- Tenez ! s’empresse de lui indiquer Emilie en attrapant rapidement une pile de serviettes en papier dans le dévidoir posé sur la table avant de la lui tendre.

- Merci… souffle Martin en la pressant sur la plaie qui s’est visiblement rouverte. Putain, fait chier…

- Vous êtes blessé ??

- Oui, enfin… Je sors de l’hôpital justement. Je comprends pas, le médecin avait pourtant vérifier l’état des sutures avant que je sorte…

- Ça arrive, parfois, lui répond Emilie, sûre d’elle, en reprenant une nouvelle pile de serviettes. Un point a dû lâcher. Vous avez forcé dessus depuis votre sortie ?

- Bah non ! Je n’ai rien fait d’autre que de venir au café ! Fait chier, merde !! s’agace Martin tout en continuant d’éponger son épaule.

- Ah… Dans l’idéal, il faudrait retourner à l’hôpital pour qu’ils refassent le point manquant. Et refaire votre pansement aussi.

- D’la merde, j’y retourne pas ! En plus, je vais devoir faire la queue et attendre des plombs, juste pour ça ! Ils font chier, sérieux !! » grommelle-t-il.

Sur ce, il se lève, toujours en compressant la plaie.

« - Veuillez m’excuser, mais je crois qu’il vaut que j’y aille…

- Attendez ! » s’exclame Emilie en se levant d’un bond à son tour.

Martin se fige aussitôt et la regarde, interloqué.

« - Je… Euh… balbutie-t-elle, soudain mal à l’aise. J’ai quelques notions en soins médicaux. Si je peux vous être utile…

- Oh ! Euh… Eh bien… Je ne savais pas que vous étiez aussi infirmière !

- Moi non, mais ma mère oui. Alors forcément… Elle m’a appris quelques petits trucs…

- Ah… OK. Bah… Pourquoi pas alors ! Ça sera toujours mieux que d’attendre des heures aux urgences ! »


* EMILIE *

Emilie a pris soin de faire un petit stock de serviettes en papier avant de partir, et tend régulièrement un paquet à Martin lorsque son pansement de fortune commence à ne plus rien absorber du tout.

Tous deux se rendent donc au domicile de Martin en hâte. Arrivés en haut des escaliers, il cafouille avec ses clefs, et Emilie finit par les lui prendre des mains pour ouvrir la serrure à sa place. En entrant, Martin retire son vêtement, pendant qu’Emilie s’attèle à dénicher de quoi le soigner dans le capharnaüm de sa salle de bain.

Lorsqu’elle revient dans la pièce, Martin est assis sur le rebord de son lit, torse nu, et tient toujours son épaule qui saigne. A cette vision, Emilie a soudainement une bouffée de chaleur, mais se reprendre très vite. Elle se dirige donc vers lui en ouvrant rapidement un sachet de compresses, qu’elle s’active à imbiber d’alcool avant de venir poser le tout sur la blessure de Martin. A peine les fibres effleurent-t-elles son épaule, qu’il retient un petit cri étouffé de douleur. Elle constate cependant qu’il tente de rester digne et serre les dents.

« - Ça fait mal ? lui demande-t-elle, légèrement moqueuse.

- Non… Ça va… crache-t-il entre ses dents.

- Ne jouez pas les héros avec moi, c’est normal que ça pique un peu, rétorque-t-elle en nettoyant les contours de la plaie.

- Houtch… lâche-t-il malgré lui, avec un léger tressaillement, alors qu’elle passe plus près des sutures.

- A ce propos… Comment vous êtes-vous fait ça ?

- Je… Heum…

- Ça ressemble à… une plaie par balle… indique-t-elle en fronçant les sourcils.

- Aïe ! Oui… C’en est une…

- Vraiment ?! feinte-t-elle de s’inquiéter subitement. Vous avez joué les caïds, c’est ça ? Ou bien, est-ce une nouvelle façon pour vous de vous faire mousser auprès de la gent féminine ?

- Ha ha ! glousse-t-il nerveusement. Je mets rarement ma vie en danger simplement pour une partie de jambes en l’air, vous savez !

- Dans ce cas, que vous est-il arrivé ?

- J’ai pris une balle perdue, finit-il par avouer. Lors de l’intervention musclée de ma Cat-de la justicière nocturne. Celle dont vous me parliez tout à l’heure.

- Ah oui ?! Sans déconner ! C’était vous, le mec qui a pris une balle ??

- En effet…

- Comment est-ce arrivé ??

- Je la suivais, comme d’habitude. Et puis, d’un coup, y’a eu tout un tas de journalistes qui est sorti de nulle part. Ils voulaient tous une photo, je suppose. Ça crépitait de partout… Bref ! Ils se sont tous foutu devant moi, j’voyais plus rien ! Alors je me suis rapproché moi aussi, et… J’ai pas vu que le mec avait récupéré son arme. Et bam… J’étais au mauvais endroit au mauvais moment, faut croire… »

Emilie ne l’écoute que d’une oreille. Son histoire, elle la connait déjà. Elle sait très bien qu’il ne s’est pas avancé uniquement pour avoir sa place dans le tumulte des journalistes. Mais ça, il ne le sait pas.

A défaut de prêter attention à sa version erronée des évènements, et tout à ses soins, elle en profite pour laisser fureter son regard sur lui. Sous ses doigts fins, son épiderme est doux. Son buste semble si puissant… Et ses muscles saillants lui donnent soudainement des idées subjectives.

Wow… Il est si… beau…

Alors qu’elle appuie sur le sparadrap pour le coller autour de la compresse, ses mains dérivent sur son thorax et son épaule malgré elle, dans une caresse sensuelle qu’elle ne contrôle pas.

Martin stoppe la discussion, mais elle ne s’en aperçoit pas tout de suite. Son esprit imagine déjà des gestes défendus. Elle a envie de venir goûter sa peau, de découvrir chaque centimètre carré de son corps sous ses phalanges. N’entendant plus Emilie, Martin s’inquiète.

« - Emilie ? Tout va bien ? » lui demande-t-il en tournant légèrement la tête vers elle, la sortant de sa torpeur.

Les yeux écarquillés, elle ne lui répond pas, totalement subjuguée par son corps si athlétique et attirant. Lorsqu’elle relève les yeux, leurs regards se croisent, et elle constate qu’il semble aussi désireux que le sien. Pourtant, il reste immobile, à la contempler, pendant qu’elle continue de faire glisser ses mains sur sa peau, lui donnant des frissons. Il ne la repousse pas, mais ne lui saute pas dessus non plus, contrairement à ce qu’elle aurait imaginé de lui.

Pourquoi ? Qu’est-ce qui le retient ? Mes nombreux refus ? Ou plutôt, mes nombreuses esquives lâches et imbéciles ? Ou sa Catwoman ?

Puis, délicatement, il attrape simplement une de ses mains sur son épaule et y dépose un baise-main doux et raffiné. Elle est complètement envoutée, incapable de bouger, attendant seulement un signe. Son pouls s’accélère et la chaleur l’envahit à mesure qu’il la regarde avec avidité. Enfin, il lui sourit tendrement, et Emilie craque, le cœur battant à tout rompre.

Elle se rapproche et vient rejoindre ses lèvres avec ardeur. Martin lui répond cette fois au quart de tour. Un courant électrique les traverse alors, et l’envie prend subitement le dessus sur leurs convictions. Emilie enlace frénétiquement son cou et il enroule immédiatement un bras autour de sa taille pour venir serrer sa poitrine contre lui, pressant encore plus sa bouche sur la sienne.

Et après quelques baisers langoureux, il finit par la faire basculer doucement sur ses draps, leur bouche se dévorant toujours avec une passion grandissante.

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