A vos marques, prêts…
Octobre 2026
L'onde de choc de l’attentat traversa tout le pays. La brutalité de l'acte, en plein cœur de Paris, près du Panthéon, lieu symbolique de la République, marqua profondément les esprits. Encore une fois, un enseignant avait été visé, un enseignant dont le combat pour la revitalisation de la démocratie ne pouvait que déplaire aux fanatiques décidés à l’abattre. Un enseignant qui s’en était sorti miraculeusement, mais dont la compagne avait payé le prix fort. L’émotion était immense.
Ravagé de chagrin, Marc s’était réfugié chez lui, coupant tout contact avec le monde extérieur. Il revivait en permanence les derniers instants passés avec Claire, dans un mélange incessant de ruminations et d’émotions qui le conduisaient à l’épuisement mental. Une phrase revenait sans cesse : « Continue, pour nous, pour tous… Continue, pour nous, pour tous… Continue… ».
Personne ne doutait du scénario imaginé par Lagueux. Delcroix pas plus que les autres. Ce nouvel attentat augmentait encore les clivages politiques, l’unification de toutes les droites était désormais hors de portée. Il prit une décision radicale : rejoindre le RN. Oui, rejoindre le RN avec une partie de la droite, c’était la bonne solution. La bonne solution pour être dans le camp qui allait gagner la présidentielle, qui gagnerait les législatives, qui restaurerait l’autorité de l’état, qui ramènerait l’ordre, qui rétablirait la sécurité. Et qui lui offrirait une belle fin de carrière politique. A la condition de jouer finement la partition du ralliement.
Stratégie, cible, positionnement, plan média, éléments de langage… Ce vocabulaire lui sortait par les yeux. Mais c’était le point de passage obligé pour honorer la promesse muette faite à Claire lors de leur dernière étreinte. Sa promesse, et le fait qu’aucun des candidats déclarés n’ait repris à son compte une seule des propositions du mouvement de la réforme, avaient décidé Marc à rentrer dans l’arène de la campagne présidentielle.
Raphaël maîtrisait parfaitement l’art de la bataille médiatique et avait concocté un plan redoutable qu’il présentait à Marc et à toute l’équipe.
– Marc, je sais que la douleur est profonde, commença-t-il. Mais Claire nous aurait voulu debout, luttant pour ce en quoi nous croyons. Raphaël fit une pause, laissant à Marc la possibilité de prendre la parole. Celui-ci lui fit signe de continuer. – Il s’agit d’allier déclaration solennelle, énergie d'un engagement populaire et invitation à participer adressée à un large éventail de l'électorat. Pour cela, je vous propose d’orchestrer 3 événements qui mettront en valeur notre engagement démocratique profond et notre volonté de renouveler la fabrique des politiques.
– Le lancement commence par une conférence de presse rassemblant médias, membres de « Faire Nation », intellectuels, et figures publiques. Ici, Marc partage ses motivations, évoque le souvenir de Claire et l'importance de poursuivre leur combat commun pour la démocratie. Il détaille son programme, en insistant sur la réforme démocratique et le besoin d'unité nationale.
– Juste après la conférence de presse, nous nous rendons à un grand rassemblement public, dans un lieu symbolisant la liberté, l’égalité et la fraternité. Ce moment, ouvert à tous, permet à Marc de s'adresser directement à la population, et renforce notre message de proximité et d'engagement civique. L'événement est ponctué de performances d'artistes soutenant « Faire Nation », pour créer une atmosphère festive et fédératrice.
– En parallèle, nous déployons une campagne numérique innovante, qui diffuse l'annonce de Marc sur les réseaux sociaux à travers une vidéo dynamique mêlant son discours à des témoignages de citoyens et des visuels engageants. Et à travers notre plateforme interactive, nous invitons les internautes à poser des questions, proposer des idées et s'engager dans la campagne.
Sophie intervint, soucieuse. – Avant de plonger dans les détails, je tiens à souligner l'importance de l'inclusion de tous les territoires et de toutes les catégories de Français, indépendamment de leur origine ou de leur classe sociale.
– Tout à fait d’accord avec Sophie, appuya Samir.
Marc acquiesça. – Nous devons élargir notre appel. Raphaël, quel est ton plan pour cela ?
Raphaël déplia une carte de France sur la table. – C’est la deuxième phase de la campagne. Nous commencerons par une tournée dans les régions, en mettant l'accent sur les rencontres avec les citoyens. Marc, tu partageras ton histoire, ta vision, et surtout, tu écouteras.
– Et pour ceux qui ne peuvent pas ou ne veulent pas se rendre dans les meetings ? coupa Sophie.
Raphaël sourit. – Grâce à la plateforme de Samir, nous allons pouvoir engager un dialogue direct avec ces électeurs également. Nous lancerons une série de webinaires, où Marc pourra discuter des points clés de notre programme. Nous utiliserons aussi les réseaux sociaux pour partager dans des podcasts et des capsules vidéo quelques histoires de citoyens qui ont bénéficié de nos initiatives pilotes.
La réunion se poursuivit tard dans la nuit, le compte à rebours était lancé.
Ils n’étaient pas les seuls à travailler d’arrache-pied. Quelques heures avant la conférence de presse de la nouvelle alliance, Marine Le Pen, Gérard Delcroix et leurs équipes respectives se réunissaient pour valider les messages principaux et se préparer à répondre aux objections.
– La présentation de notre union est un signal fort à l’électorat, l'assurance que nous sommes déterminés à promouvoir ensemble nos convictions communes pour remédier aux crises qui secouent notre nation, commença Marine Le Pen. Mais nous devons rassurer nos militants sur le fait que cette union renforce notre programme, sans diluer nos idéaux.
– Tout à fait, Marine. L'heure est à l'action concertée. Les points qui nous unissent sont le socle de cette alliance, à détailler rapidement dans un programme commun. Lutte contre l'islamisation, contrôle de l'immigration, tolérance zéro en matière de sécurité, recours au référendum. Nous sommes déjà d’accord sur les principaux axes du programme, reste à dresser la liste des mesures phares pour chacun d’entre eux.
– Ne confondons pas vitesse et précipitation. Avant de travailler ensemble les mesures, je veux que nous clarifiions notre ligne idéologique commune sur deux points. J’ai cru comprendre que nos deux équipes n’étaient pas parvenues à aligner nos orientations ni en matière de politique économique et budgétaire, ni concernant la politique étrangère. Comment abordons-nous ces sujets ce soir ?
Delcroix était soulagé qu’elle aborde la première ce point. Sa réponse était toute prête, mais il prit le temps avant de parler. – Nous pouvons mettre en avant notre engagement commun pour la souveraineté nationale et la prospérité économique de la France, tout en reconnaissant qu’il existe des divergences mineures, qui seront traitées dans les prochaines semaines. Mais notre message central reste l'unité et la force face aux défis extérieurs.
– Ça me va, répondit Le Pen. Dernier point, avant de laisser les équipes bosser. Il va y avoir des questions sur la répartition des investitures lors des législatives faisant suite à la présidentielle, et c’est bien naturel. Or comme tu le sais, rassurer inquiète, informer rassure. Pour ce soir, nous pouvons nous contenter d’annoncer les principes généraux de la répartition des investitures. Et nous donner quelques jours pour nous mettre d’accord sur les détails du processus d’investiture.
– Entendu. Quels principes généraux as-tu en tête ?
– Du classique qui a fait ses preuves, répondit Le Pen en riant. Equité, complémentarité, reconnaissance des contributions individuelles, priorité aux régions et circonscriptions stratégiques où l'alliance a le plus de chances d'influencer le résultat électoral.
Delcroix acquiesça. Ils étaient sur la même longueur d’onde. Tout ceci augurait d’une campagne efficace, dont l’issue pourrait bien être le point de départ d'une nouvelle ère pour le pays.
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