1- Insomnie

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Comme la nuit semble plus longue sans rêves. Où sont passées les créatures de l’enfance, les premiers baisés volés, les folles aventures de chevaliers chevauchant leurs destriers pour venir délivrer la belle de sa tour d’ivoire ?

Quatre heures trente en chiffres rouges illuminent la nuit, l’odeur des draps usés me rappelle qu’un changement aussi futile soit-il ne peut qu’être bénéfique à cette heure de la nuit. Je me tourne, passablement agacée de retrouver un côté froid dans mon dos qui ne l’était pas dix minutes plus tôt.

Cinq heures. Les premiers signes de vie de l’immeuble se font entendre et je reste éveillée, comme impatiente de découvrir le déroulé quotidien qui m’attend pour ces prochaines années. L’ascenseur au bout du couloir semble s’éveiller vers cinq heures quinze. Un pas las et lourd pour premier conquérant ouvre la marche, un autre à peine perceptible et des talons hauts plutôt arrogant et sans gêne en troisième position. J’ouvre les yeux en grand à la mise en route d’un ballon d’eau chaude et je devine le ruissellement d’une douche à l’étage du dessus. Un homme tousse dans le couloir, un enfant dévale les escaliers un peu rapidement à mon goût, je me retourne comme happée par une impression de mauvais augure.

Six heures trente, je suis en retard.

La lumière du jour point derrière les rideaux d’une autre époque, abandonnés par l’ancien propriétaire. J’ouvre d’une traite et regrette aussitôt mon geste. Le nuage de poussière enfermé jusqu’à lors dans les plis de l’épais tissu rouge sang s’échappe pour venir se loger sur les recoins de mon visage fatigué. J’éternue à plusieurs reprises les yeux aussi secs que les sablés trop cuits de ma mère. Ma vision d’abord floue finit par me crier la triste vérité en balayant la pièce de gauche à droite. Mon arrivée tardive dans ce logement a atténué la charge de travail qui m’attend pour rendre cet endroit vivable. Les cartons jonchant le sol ne sont pas un problème, je dirais même qu’ils cachent le parquet misérablement entretenu ces derniers temps. Les murs jaunis me hurlent qu’un coup de peinture ne serait pas du luxe et les meubles déjà en place méritent un petit coup de frais et d’amour.

Je commence à regretter de ne pas avoir pris ce camion de déménagement ne serait-ce qu’une semaine plus tôt. Accablée, les mains sur les hanches, je redresse les épaules, inspire péniblement les effluves vieillotte qui flottent et souris devant le défi. Ne pas s’apitoyer et foncer, c’est ça aussi le changement.

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