Le titan originel

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Je suis perdue, perdue dans un cauchemar sans fin . . .

Et puis, soudain, je me retrouve dans une grande étendue de sable, sous un ciel étoilé brillant de mille feux ! Face à moi se trouve un grand arbre qui se divise en une multitude de branches lumineuses. C'est juste fascinant !

Je suis là, debout sur le sable, contemplant cet arbre lumineux, quand je remarque une silhouette qui en émerge. Plus elle approche, et plus je la distingue clairement. Il s'agit d'une petite fille, dont les cheveux blonds lui tombent sur les épaules. Elle est vêtue de haillons et porte un seau en bois. Son regard est dissimulé par sa frange et son expression est impassible.

Lorsqu'elle arrive devant moi, elle s'agenouille respectueusement. J'attends quelques secondes, espérant qu'elle dira quelque chose, mais rien ne vient. Je lui adresse donc la parole :

- Bonjour. 

Aucune réponse. 

- Qui es-tu ?

Aucun son ne franchit sa bouche, mais elle me tend sa main. J'hésite un instant, puis approche la mienne et la pose doucement sur sa paume tendue. À peine mes doigts frôlent-ils sa peau blanche, qu'un tourbillon d'images, de sons et de sensations s'emparent de moi !

Lorsque cette vision prend fin, je titube, déstabilisée par tout ce que je viens de découvrir. Mon coeur palpite et je dois prendre de grandes inspirations pour me calmer. Une fois que c'est fait, je repose mes yeux bleus sur la petite blonde qui se trouve devant moi et souffle :

- Alors c'est toi . . . Ymir, la grande ancêtre . . .

Elle hoche doucement sa tête de haut en bas. C'est le seul moyen qu'elle a de me répondre car elle n'a plus de langue. On la lui a coupé, comme on le faisait avec tous les autres esclaves, il y a deux mille ans . . .

Des larmes embuent mes yeux. Je suis si touchée par l'histoire de cette enfant que je ne peux les retenir !

Je m'agenouille pour la serrer dans mes bras et lui murmure à l'oreille :

- C'est fini, à présent. Tu n'es plus une vulgaire esclave et je ne suis pas ton maitre. Considère moi comme un membre de ta famille. Après tout, je ne suis autre que ta descendante.

Elle ne répond rien, mais je sens une larme couler sur sa joue. Je m'écarte d'elle pour essuyer la goutte d'eau salée de mon pouce et lui dis :

- Ensemble, nous libérerons notre peuple et rendrons à Eldia sa gloire d'antan. Cependant, nous ne perpétrons plus les mêmes erreurs qu'autrefois, je te le promets. Tu veux bien m'aider ?

Elle hoche à nouveau sa tête de haut en bas. Je lui souris et lui dis :

- Merci, Ymir.

                                                                                                   

*

En ouvrant les yeux, je suis accueillie par une nuée d'applaudissements. C'est ainsi que les experts et supérieurs de l'armée mahr closent la cérémonie de transmission. 

Je suis entourée d'une épaisse fumée blanche, provenant du corps de mon titan primaire en décomposition. Cependant, je peux tout de même voir l'endroit où était attachée Frieda quelques secondes plutôt seulement . . . Cela m'a semblé durer une éternité !

Pauvre Frieda ! Condamner le peuple eldien à l'humiliation et la mort n'était pas sa volonté propre, mais celle du cent-quarante-cinquième roi Karl Fritz. Elle n'était qu'une victime de plus du pacte de non-agression.

J'essuie du bout de mes doigts les larmes qui perlent au coin de mes yeux, puis me lève et descends du corps de mon titan primaire. Le général Calvi s'approche de moi et m'attache au bras un brassard blanc, orné d'une étoile rouge à neuf branches. C'est la première fois que je vois un brassard pareil. Mon supérieur déclare :

- Te voilà devenue la détentrice du titan le plus important qui soit : l'originel. Prends-en bien soin car ce titan assurera la suprématie et la gloire de notre patrie.

- Oui, j'en ai bien conscience. 

- Tu peux disposer.

J'effectue un énième salut militaire et quitte la pièce. 

                                                                                                 

*

Nous marchons dans les rues sombres de Revelio, avec pour seul éclairage la lumière de la lune et des étoiles qui brillent dans le ciel. 

Nous, c'est papa, maman, Sieg et moi. Ce soir, pour la première fois, nos parents nous emmènent dans le repaire des "Partisans du renouveau d'Eldia".

Nous nous arrêtons devant une maison. Papa y toque trois coups. Peu de temps après, la porte s'ouvre tout doucement. Monsieur Gleis se trouve de l'autre côté. En nous voyant, il se décale pour nous laisser le passage :

- Entrez vite, chuchote-t-il, nous vous attendions.

Nous entrons et suivons l'ami de mes parents, muni d'une lanterne, dans la petite maison qui est plongée dans l'obscurité. Nous descendons d'étroits escaliers pour accéder au sous-sol, leur lieu de réunion. 

Monsieur Gleis en ouvre la porte et déclare à la dizaine d'hommes déjà présents :

- Ils sont là !

Tous se retournent pour nous voir entrer. Nous avançons jusqu'au grand panneau en bois, sur le mur d'en face, où sont exposées des affiches et quelques autres documents. Papa se tourne vers ses camarades et pose sa main sur mon épaule en déclarant, d'un air triomphal :

- Nous avons réussi ! L'originel est entre nos mains ! Je vous présente celle qui rendra sa gloire d'antan à notre patrie et sauvera notre peuple du joug mahr : Éléonore Jäger !

Tous lèvent triomphalement leur poing en l'air en s'exclamant :

- Oui !

- Vive Eldia !

- Vive Éléonore !

- Gloire à la famille Jäger !

- Chut, du calme, mes amis, rétorque maman.

Lorsque le silence revient, elle se tourne vers moi pour me demander :

- Grâce au sang royal qui coule dans tes veines, tu as déjà éveillé les pouvoirs et la mémoire de l'axe, n'est-ce pas ?

- Oui, maman.

- Connais-tu l'histoire de notre peuple que nous a été ravie par les mahrs il y a de cela plus d'un siècle ?

- Oui.

- Raconte, réclame papa, révèle nous la vérité que les mahrs nous cachent depuis toutes ces années ! Démêle leurs mensonges !

- Ils n'ont pas menti. Nos ancêtres se sont réellement rendus coupables de terribles crimes. 

- Qu'est-ce que tu racontes ? 

- Tout comme Mahr, Eldia voulait étendre son empire sur le globe entier. En fait, nos deux pays étaient les deux plus grandes puissances de la planète et étaient donc rivales. Chacune voulait étendre sa domination sur la Terre entière. Voilà pourquoi elles se sont livrées à des guerres sanglantes où tous les moyens étaient bons pour détruire l'ennemi. Des atrocités ont été commises des deux côtés. Les mahrs n'ont donc pas tort en nous accusant d'avoir commis des crimes sanglants, mais ils n'ont rien à nous envier de ce côté là non plus. Il n'y a ni gentil, ni méchant dans cette histoire. Juste deux pays ennemis qui se battent chacun pour leurs intérêts.

- Alors comment se fait-il que nous ayons perdu cette guerre il y a cent sept-ans, malgré la domination que nous offrait le pouvoir des titans ?

- En héritant du titan originel, le roi Karl Fritz a découvert le passé de notre peuple, y compris les crimes dont il s'est rendu coupable. Pris d'un terrible sentiment de culpabilité, il a décidé d'expier les crimes de nos ancêtres en punissant notre peuple au complet : tandis que certains attendront la mort sur l'ile de Paradis, les autres serviront l'empire Mahr afin de racheter les péchés de nos ancêtres. Voilà pourquoi il s'est réfugié derrière les murs avec une partie de son peuple, laissant les autres ici, en tant qu'esclaves pour Mahr. 

Un silence pesant s'installe. Chacun digère ces révélations sans un mot. Je déclare alors, pour apaiser les esprits :

- Nos ancêtres se sont certes rendus coupables de terribles crimes, mais l'on ne peut pas rejeter la faute sur leurs descendants. Depuis quand punit-on l'enfant innocent de celui qui a commis la faute ? Nous sommes donc malgré tout victimes d'une injustice. Mais ne vous en faites pas, je vais arranger les choses. L'empire d'Eldia renaitra, mais il ne commettra pas les mêmes erreurs qu'autrefois. Nous montrerons au monde entier notre volonté de paix et de tranquillité. Vous êtes avec moi ?

- Oui ! s'exclament-ils en choeur. Vive Eldia ! Vive Éléonore !

- Merci, mes amis, mais je vous prie de faire preuve d'un peu de patience. Il y a encore beaucoup de choses à organiser afin de s'assurer que tout se passera comme il le faut.

- Tu peux compter sur nous, on est avec toi, affirme monsieur Gleis.

- Merci de votre soutien, car j'en aurai bien besoin. 

- Alors qu'attendons-nous ? demande papa. Préparons le renouveau d'Eldia dès maintenant !

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