Chapitre 18 - Tout s'effondre...

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Elizabeth

A la fin de notre cours de mathématique, Cassidy et moi nous nous installons sur un banc près du bâtiment de Sciences. Depuis quelques jours, les températures se rafraichissent et je n’hésite pas à porter mon manteau en laine.

Il ne nous reste plus qu’un cours à passer pour terminer la semaine. Toutefois, je n’ai pas prévu de sortir autant que le week-end dernier. Je pense plutôt me reposer, enfermée dans mon studio ou lire un roman dans un parc.

- Lise ! s’écrit mon amie en sortant un sandwich de son sac. J’ai oublié sur mon bureau le devoir maison à rendre.

Elle me regarde avec des yeux paniqués et repose toute la nourriture dans son sac Louis Vuitton. Cassidy jette un coup à sa montre puis se lève d’un bond.

- Il me reste encore du temps pour aller le chercher. Prendre le bus à cette heure-ci n’est pas l’idéal mais je peux revenir à temps pour le cours.

Je n’ai pas la possibilité d’ajouter quoi que ce soit car elle est déjà partie. Je termine mon déjeuner seule puis je me rends à la bibliothèque pour avancer dans mon programme de travail.

Quelques minutes avant le début du cours je me dirige devant la salle de classe pour attendre mon amie. Les élèves arrivent par petits groupes mais je ne vois toujours pas Cassidy. Le professeur d’informatique nous a permis d’entrer afin de lui remettre le devoir maison.

Je sors la feuille de mon sac que je pose sur le bureau de l’enseignant puis je m’assois au centre de la pièce pour ne pas attirer l’attention. Cassidy devrait déjà être revenue et je commence à m’inquiéter. Je lui envoie un message puis je range mon téléphone dans ma poche.

Je me concentre ensuite sur le nouveau cours que le professeur vient de distribuer. J’ai bien entendu pris un exemplaire pour mon amie mais son silence m’agite de plus en plus.

J’ai l’impression que les minutes s’écoulent lentement et je commence à transpirer. Je suis nerveuse et je regarde mon téléphone toutes les trente secondes. J’attends de voir s’afficher le prénom de mon amie mais seul mon fond d’écran fleuri me fait face.

- Mademoiselle, veuillez me donner votre téléphone, ordonne le professeur en se plantant devant moi. J’accepte que les élèves l’utilisent pour lire l’heure mais là vous n’arrêter pas le regarder au lieu de suivre le cours.

Je rougis face au regard des autres mais je m’exécute d’une main tremblante.

- Vous viendrez le chercher à la fin de l’heure, termine-t-il avant de se retourner vers sa démonstration.

Impossible pour moi de me concentrer sur les paroles de l’enseignant. Mon cerveau fonctionne à mille à l’heure et je cherche une raison à ce silence. Même si elle avait pris le bus et qu’il avait un problème, elle m’aurait envoyé un message. Ou bien elle ne trouve plus son devoir et a honte de venir en classe. Non, ça ne lui ressemble pas.

Lorsque j’entends les élèves remuer et les chaises claquer, je me lève à mon tour. Mon cerveau est en ébullition et ma tête me fait mal. En passant devant le bureau, le professeur me tend mon téléphone d’un regard sévère. Je ne fais pas attention à ça et trace mon chemin en direction du bureau de Grayson.

Si ça se trouve, je m’inquiète pour pas grand-chose. Ce n’est pas la première fois qu’elle met une éternité à répondre. Je soupire bruyamment puis je passe en revue le travail qu’il me reste à faire ce soir. Je dois terminer les calculs que j’aurais dû faire hier. Une fois la chose achevée, j’aurais terminé le chapitre. Il ne restera plus qu’à attendre les opérations du prochain chapitre.

Quand j’arrive à quelques pas du bureau, mon téléphone déchire le silence présent dans le couloir. Je précipite ma main dans la poche de mon manteau pour répondre. Le numéro n’est pas enregistré mais il m’a déjà appelé deux fois lorsque j’étais en cours quand mon smartphone était encore en silencieux. Je décroche sans réfléchir en me disant que c’est surement important.

- Allô ?

- Elizabeth ? demande une voix que je ne reconnais pas.

- Qui êtes-vous ? je la coupe.

- Je suis madame Hope la mère de Cassidy, explique-t-elle en sanglotant.

Je la rencontre régulièrement quand je viens chez mon amie. C’est une femme calme et sympathique mais très soucieuse quand il s’agit de sa fille.

- Que se passe-t-il ? Pourquoi vous pleurez ? je la presse en sentant les battements de mon cœur s’accélérer.

J’ai vraiment peur de la réponse et l’appel de sa mère me confirme qu’il est arrivé quelque chose à Cassidy.

- Cassidy s’est fait renverser par une voiture en traversant la rue pour rentrer chez nous, réponds-t-elle la voix hachée entre deux sanglots. Elle est à l’hôpital et très gravement blessée. Tu es son amie la plus proche, je me devais de te prévenir.

Le téléphone me glisse des mains puis s’écrase sur le sol dans un bruit sourd. Je tombe à genoux en posant mes mains sur mes yeux. J’ai l’impression que le monde tourne au ralenti et que je vais bientôt me réveiller de ce cauchemar. Je ne peux retenir mes pleurs face à une nouvelle aussi triste qu’inattendue.

Un claquement de porte me parvient mais je suis incapable de bouger. A travers mes yeux embués, je vois ce qui ressemble à des chaussures masculines. La personne se baisse et me force à relever la tête. Je reconnais immédiatement monsieur Grayson qui se tient à quelques centimètres de moi. Mais pour le moment, la seule chose qui compte c’est Cassidy.

- Que se passe-t-il mademoiselle Davinson ? demande-t-il d’une voix douce et inquiète que je ne lui connais pas.

- Je ne veux pas qu’elle meure, je sanglote en le regardant. C’est… c’est la seule amie que j’ai et je tiens à elle.

- Calmez-vous, nous allons dans mon bureau, tranche-t-il en me soulevant par les épaules.

Je ne m’étais pas rendue compte que je criais au risque d’alerter d’autres professeurs. Mes jambes sont en coton et le professeur me porte plus qu’il ne me soutient.

Je m’effondre dans le canapé en continuant de pleurer. Grayson s’assied près de moi et patiente quelques minutes en attendant que je me calme. Sauf que je n’y arrive pas car mon cerveau s’imagine les pires horreurs.

Sans que je m’y attende, le professeur prend mes mains dans les siennes. A cause de la surprise, mes sanglots s’arrêtent immédiatement. Je regarde le professeur avec étonnement mais celui-ci ne cille pas et me dévisage avec des yeux inquiets.

- Il était temps, vous étiez au bord de l’évanouissement, reprends-t-il d’une voix sévère. Je ne pensais pas que c’était possible d’être plus rouge qu’une tomate.

Le professeur fronce les sourcils car je dois sûrement redoubler de rougeur à cause de sa remarque directe.

- Maintenant, allez-vous me dire ce qui vous met dans un état pareil ? questionne-t-il avec prudence.

Je baisse les yeux pour me concentrer sur les pieds de l’enseignant. Lorsqu’il prend conscience que ces larges mains sont encore dans les miennes, il les retire en toussotant. J’enlève mon manteau en laine pour être plus à l’aise.

- Cassidy a eu un accident de voiture, je gémis.

Je suis à nouveau secouée de quelques sanglots mais je parviens à terminer mes explications :

- Elle avait oublié son devoir sur son bureau et elle s’est dépêchée pour ne pas être en retard à notre cours. Elle est à l’hôpital mais personne ne sait si elle va…

Je n’arrive pas à terminer ma phrase et je pose ma main sur ma bouche. Je ne peux pas imaginer quelque chose d’aussi horrible. Mes cheveux sont ébouriffés, mon collant est filé et ma robe colle de transpiration mais toutes mes pensées sont tournées vers Cassidy.

- Je suis sure qu’elle va s’en sortir, dit le professeur d’une voix rassurante. Elle est forte et n’abandonnera pas la partie.

Il pose une main apaisante sur mon épaule et je lève la tête vers lui. Il me couve d’un regard protecteur et compatissant.

- Cassidy est tout pour moi, je me confie en séchant mes larmes. Nous sommes amies depuis la première année et c’est la seule personne avec qui je suis proche. Je me sentirais perdue sans elle.

La main du professeur se pose sur mon visage puis il passe un doigt sur ma joue pour sécher une dernière larme. Mon cœur qui venait juste de décélérer connait une nouvelle accélération face à ce geste intime. Je me rends compte à quel point le visage de l’enseignant est proche de moi. Sa main est toujours posée sur ma joue tandis que nos épaules se frôlent. Ses lèvres sont rosées et je ferme les yeux pour me les imaginer.

La bouche du professeur se pose sur la mienne en me prenant de court. Je garde les yeux fermés pour profiter de l’instant et je pose mes mains sur sa nuque. L’enseignant bouge ses lèvres et je l’accompagne dans cette valse de langue. Etrangement, cela ne me dégoute pas comme je me le suis imaginé pendant longtemps. Je commence à avoir chaud lorsque monsieur Grayson me tire vers lui pour que nos corps soient plus proches.

Alors que je commençais à m’épanouir dans ce baiser et cet étreintes exquise, le professeur s’écarte brusquement. Je l’observe sans comprendre et il cligne des yeux plusieurs fois comme s’il avait été victime d’un enchantement. Il se lève d’un bond et se poste derrière son bureau.

- Vous devriez partir vous reposer mademoiselle Davinson, dit-il d’une voix brusque sans me regarder. Les derniers événements vous ont chamboulés et vous devriez profiter de ce week-end pour vous détendre.

Je reste quelques secondes interdite avant de comprendre que je suis en train de me faire congédier du bureau. Non seulement il est froid mais en plus il se permet de me dire quoi faire. Je me lève de plus en plus irritée par ce revirement de situation. Je récupère mes affaires puis je quitte la pièce sans un mot. Je n’aurais pas pu être plus troublée par la situation.

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