École Saint-Urbain

40 minutes de lecture

Ce qui compose cette partie est heureusement plus léger. Cependant, je ne suis pas sûr d’arriver à retransmettre cela de façon intéressante. J’ai tendance à n’aimer lire ou traiter que des sujets profonds, alors que paradoxalement, je cherche toujours le calme et la tranquillité. Néanmoins, je me dois d’essayer, parce qu’objectivement, ma vie fut magnifique.
Forcément, l’endroit où l’on se construit et où l’on vit le plus de choses à cet âge est l’école. Je garde un millier de bons souvenirs, et très peu de mauvais. C’était, selon moi, un cadre incroyable pour grandir. Un ordre chronologique s’impose, afin de ne pas trop me perdre dans l’approfondissement de certains sujets.

Mes premières réminiscences remontent à la moyenne section. J’apprenais à écrire PAPA, MAMAN, ainsi que mon prénom, en lettres capitales. Un peu plus tard, nous avions joué à l’intérieur de la classe, disposés en colonne. Pressé que ce soit à mon tour, je poussais gentiment mon camarade, placé juste devant moi. Ce moment s’est ancré dans ma mémoire à cause de la forte odeur de lessive qu’il dégageait. Notre maitresse s’appelait Véronique Ledroit, et ses cheveux lisses étaient impeccablement coiffés… au carré. Ça ne s’invente pas.

La grande section fut le théâtre de plusieurs souvenirs. Le plus marquant, et de loin, fut l’arrivée d’Oscar, en provenance d’Érythrée. On nous avait expliqué, au préalable, qu’il fallait être gentils et l’intégrer convenablement, car il venait d’un orphelinat d’Afrique, d’un pays en guerre et ne parlait pas la langue. À l’époque, c’était le seul noir de l’école. Pour ma part, cela n’a jamais suscité la moindre question. Je n’identifiais pas la couleur de peau comme une caractéristique essentielle. D’ailleurs, il n’était même pas noir pour moi. Allongés sur nos serviettes au bord de la piscine du centre aéré, nous en rions. Oscar lui-même ne comprenait pas pourquoi l’intérieur de ses mains et ses dessous de pieds étaient blancs. Et ça s’arrêtait là. J’ai vraiment réfléchi à la question qu’après ma vingtaine, lorsque mon ami Jonathan passait son temps à plaisanter en disant : « C’est parce que je suis noir que tu me dis ça ? », mais même lui n’était pas noir. Ou du moins, ce trait-là arrivait bien bas dans la liste de ce qui le définissait. Lui, en revanche, y voyait son identité. Il s’y reconnaissait à travers son éducation, et surtout à travers le regard des autres. J’ai fini par mieux comprendre pourquoi ma grand-mère paternelle me demandait : « Alors l’école, ça va ? Et ton pote le noiraud y va bien ? » Cela semblait plus exceptionnel pour elle.
Pour en revenir à l’arrivée d’Oscar, qui deviendra l’un de mes meilleurs amis, nous étions tous sortis pour l’accueillir. Nous attendions dans la cour que sa voiture daigne se présenter. Quand ce fut enfin le cas, le suspense était à son comble. Nous trépignions d’impatience. Accompagné de ses parents adoptifs, il marcha vers nous. Puis, après deux courtes phrases de rigueurs prononcées par la maitresse, l’action la plus incompréhensible possible, il démarra à vive allure. Notre réponse fut du même acabit, car instinctivement, nous nous mîmes à sa poursuite ! Nous étions une vingtaine à ses trousses, courant en rond dans la cour de récréation. Il avait réussi son entrée. Comme quoi, il n’en faut pas beaucoup quand on est enfant.
Sinon, cette année-là, nous symbolisions la météo sur un tableau à scratch. Assis au fond de classe, je regardais nonchalamment par la fenêtre pour confirmer les propositions de mes camarades. Nous étudions « LE » et « LA », et des sorties étaient organisées sur la colline et dans les vignes.
Un jour, nous avions appris à nous brosser les dents. Une intervenante extérieure s’était installée sur les petits bancs dans la cour, un dentier de démonstration posé sur ses genoux. Lentement, elle nous expliquait qu’il fallait bien passer sur toutes les faces et insister sur le fond.

Au tour du CP, et de Colette, qui est toujours très contente de me revoir. Elle était simple, souriante et pleine de vie. Je ne peux que le supposer, mais elle me paraissait être la maitresse idéale pour cet âge-là. Elle éveillait les esprits en mettant davantage l’accent sur l’humain et la nature que la norme. Je me souviens parfaitement du premier jour, car j’avais eu du mal à repositionner mon sac sur le dos avant de rentrer en classe. En effet le rebord de fenêtre était trop haut, le sac trop lourd et moi trop petit. Heureusement, la porte s’était refermée depuis seulement quelques secondes derrière le dernier élève.
Peu de temps après, nous avons continué l’apprentissage de la lecture. À tour de rôle, nous devions déchiffrer un mot ou une phrase de Ratus, sur des affiches accrochées autour du tableau. Quand vint le sien, Victor Girard se mit à tout lire d’un seul coup, sans interruption. Colette était stupéfaite : « Mais, tu sais déjà lire Victor ? ». Sa mère le lui avait appris pendant les vacances. Du coup, dès l’après-midi, il faisait son entrée en CE1.
À cette époque, mon esprit de compétition était déjà présent. Lorsque je terminais un exercice, je le déclarais haut et fort : « J’ai fini ! Premier ». Il n’en fallait pas plus pour que mes collègues emboitent le pas : « Fini, moi aussi. Fini ». Colette, agacée, s’était résolue à nous recadrer : « Eh oh ! Non, mais vous allez vous arrêter oui ! ».
Dans la cour, ma sœur Alice me défendait encore. Devant deux enfants qui se moquaient de mes cartes Pokémon, appartenant à l’ancienne génération, elle répliqua : « Nous, on s’en fout de pas avoir les toutes dernières cartes », tandis qu’elle me prenait par l’épaule pour me conduire en lieu sûr. Elle avait du caractère.
La semaine du goût était un moment plaisant. Nous avions pour mission d’amener chacun un aliment afin de partager un petit déjeuner en classe. La diversité des produits permettait de se familiariser avec les goûts et de découvrir de nouvelles saveurs. C’est ainsi que j’ai compris ce qu’était un goût amer, qui vraisemblablement, n’avait rien en commun, ni avec ma mère, ni avec la mer. C’était le genre d’initiatives originales qui participaient à rendre l’école agréable. Pareillement, nous avions fabriqué notre propre pain dans la boulangerie du centre du village. Après une préparation plus ou moins réussie, en fonction des talents de chacun, nous enfournions les pâtes. Puis, nous attendions sur la Place du Pressoir le temps de la cuisson. Dans mon souvenir, il était délicieux.
Dans la même lignée, les classes vertes. Avec le recul, je peux dire que j’ai eu la chance de vivre de tels moments, c’étaient de belles initiations. En classe de CP et en CE1, nous sommes partis à Barcelonnette et Orcières-Merlette, pour découvrir la nature et changer de cadre, la montagne et ses forêts. Nos cahiers servaient à recenser les différentes feuilles d’arbres que l’on ramassait lors des balades. Nous faisions des pique-niques, des activités ludiques et de l’éducatif pur, légèrement ennuyant, mais bon, il fallait bien tenter plusieurs styles d’approches pour que ça connecte dans nos petites têtes. Beaucoup d’animations concernaient les animaux. Les marmottes, stars de nos jumelles, les chamois, les oiseaux, les aigles, ainsi que le gypaète barbu et son envergure de 2 mètres 80. Tout y passait. Le nom de classe verte n’était pas galvaudé.
Pour conclure en beauté, je pouvais compter sur les souvenirs créés avec mes collègues, notamment en chambres, endroit propice aux bêtises. Néanmoins, l’un d’entre eux fut fâcheux. La scène s’était déroulée sur une aire de jeux, sous d’imposants arbres, en compagnie des CE1, la classe de ma sœur. Au débotté, je croisai Alexis, mon voisin qui deviendra au fil des années, un véritable grand frère. Je le trouvai tout rouge, en train de pleurer et de se tenir le pantalon. Manifestement, il souffrait grandement. Vu la situation, j’alertai ma mère qui nous accompagnait, en lui signalant que quelque chose n’allait pas. J’appris finalement que son ami Gabriel et lui s’étaient tenus debout de chaque côté d’un tuyau servant de structure de jeu, dans le but de bloquer un camarade à l’intérieur. Ingénieusement ou non, la seule façon qu’il avait trouvé de se dégager, était de lui mordre le sexe. Cela méritait bien quelques pleurs. D’ailleurs, Alexis avait aussi provoqué des larmes, mais les miennes cette fois-ci. Nous débattions très tôt un matin, de la façon idoine d’asséner une béquille. Je m’exécutais en disant : « Regarde, comment on fait une béquille » et lui rétorquait en guise d’avertissement : « Mais non ce n’est pas comme ça, je vais t’en mettre une tu vas voir ». Confiant, j’enchaînais : « Bah vas-y ! ». Sa dernière tentative de dissuasion n’a pas eu raison de mes ambitions, et il m’infligea une sanction incontestable, qui me fit pleurer sur place, jusqu’à ce que l’on rentre en classe. L’apprentissage.

Le CE1, à part l’un des jours les plus terribles de ma vie pour sûr, fut une année agréable. Pour changer, le premier souvenir que je vais raconter n’en ait pas un. Les attentats du 11 septembre 2001. Notre salle de cours était collée à la garderie, ce qui explique pourquoi nous étions les premiers à être assis devant la petite télévision carrée qui s’y trouvait. Les informations diffusaient les images des attentats et des secours en direct. Les matins qui ont suivi, nous disions une intention de prière pour les victimes. Nous comprenions qu’il se passait quelque chose de grave, un événement qui interpellait la majorité des adultes, mais il était difficile d’en prendre la pleine mesure.
Dans cette classe, je n’ai pas fait mes devoirs pour la première fois. Nous devions apprendre des mots de vocabulaires, et ce matin-là, nous étions interrogés simultanément sur nos ardoises. Comme je n’avais pas étudié ma leçon et que j’écrivais n’importe quoi, je ne mis pas longtemps à me faire remarquer. Une confrontation humiliante.
Sans transition, au fond de cette pièce, une mezzanine faisait office d’atelier de peinture. Une activité animée par une femme dont je me souviens plus le nom. C’est elle qui a réalisé le cœur avec le poème, encore présent sur la tombe de ma sœur.

Vole vole petite aile,
Ma douce mon hirondelle,
Va-t’en loin va-t’en sereine,
Qu’ici rien ne te retienne,
Va rejoindre l’autre rive,
Celle des fleurs et des rires,
Celles que tu voulais tant,
Ta vie d’enfant.

À l’occasion d’une récréation, Romain Manoukian et moi nous sommes rendus compte, que des cartes Pokémon de notre classeur commun avaient été dérobées. Parmi elles, Farfadet, l’une de mes préférées. Nous étions choqués par l’ampleur du larcin, posés sur un rebord de fenêtre : « Putin, c’est Paulin et Étienne Bastier ». De toute évidence, nous étions en compétition avec eux, puisque nous étions certains de leur culpabilité. De retour en classe, d’un pas déterminé, nous les trouvâmes encore assis là, tout bizarres, pas comme d’habitude. Sans tourner autour du pot, après avoir émis nos accusations, ils sortirent les cartes de leurs blousons et de leurs poches. Incident clos.
La cour était réservée pour le foot. Des remontées chaloupées me permettaient de marquer sur le petit bout de mur qui servait de cage entre la porte des CM2 et la fenêtre des CM1. Cependant, notre favorite était à l’entrée, peint afin de ressembler à un vrai but, dont l’effet 3D faisait ressortir les poteaux arrière. Des reprises plus ou moins bien placées, que je voyais lentement se diriger vers la lucarne ou non, suscitant ces moments suspendus où je ne savais pas encore ce que mon geste allait devenir. Quant à Oscar, lui préférait tricher quand il effectuait ses touches. Son stratagème était bien rodé. Il prenait le ballon à la main, faisait mine de nous parler, puis soudainement, il se mettait à courir en le jetant à ses pieds.
Dans ce contexte, j’ai fait preuve d’une cruelle méchanceté envers Mathis Moreno. Hélas, il avait la maladie des os de verre, et même si ce n’était pas le plus grand de mes collègues, c’est quelqu’un que j’ai côtoyé cordialement. Tandis que je passais devant lui en plein drible, il me demanda : « Est-ce que je peux jouer ? » Au cours des deux secondes nécessaire à son évitement, je lui balançai : « Non, t’es trop petit ». Un pute de fils, je suis. Surtout sachant que j’étais moi-même déjà petit, et que j’allais l’être encore bien plus proportionnellement aux autres, durant les années qui allaient suivre. Cette réponse n’était motivée que par la paresse, d’arrêter le jeu et de reconstituer les équipes. J’étais en pleine action et je me suis débarrassé du problème de la manière la plus rapide, selon moi. Résultat, cela n’a pas été une grande réussite, puisque quelques secondes plus tard, je me faisais convoquer par une maitresse pour prendre une leçon de morale. Un rappel à l’ordre bien mérité. Je n’avais pas fait honneur à mon statut de chef d’équipe.
Mes premiers souvenirs de kermesse datent de cette année-là. Tous réunis dans la cour, les stands de jeux faisaient gagner des points en papier, que l’on échangeait contre des jouets ou de quoi boire. Le ballon plein de mousse à raser, le chamboule-tout avec les boites de conserve grises, le stand aux claques-doigts et la planche à savon formaient un ensemble appréciable.
Nolan Roche était déjà perturbé et en marge. Tout seul entre les arbres, assis dans la terre, il arrachait ses points. Quand tout le monde rêvait d’en posséder, lui se détruisait. Pour ma part, je me tenais debout devant lui, et de manière inexplicable, je lui offrais les miens. J’étais intrigué, un peu fasciné, voire hypnotisé. Au milieu de la haie, je l’observais faire une action qui allait à l’encontre du sentiment général. C’est ma sœur Louise qui est venue me récupérer par le bras, m’intimant : « Non, mais ne lui donne pas tes points, il fait n’importe quoi ». Elle veillait sur moi.
Cet enfant que je ne connaissais pas davantage, et son ami du même prénom, s’étaient battus contre le grand Bonin. L’une des premières bagarres auxquelles j’ai assisté. Après quelques provocations, le second Nolan lui sauta sur le dos, tandis que Nolan Roche lui assénait un coup de pied en ciseau dans le ventre. J’étais relativement éloigné, mais la tête de ce pauvre Bonin m’a marqué. Certes, il était plus costaud, mais son refus de combattre était flagrant. Il ne méritait pas ça, et je crois que ça m’a un peu choqué.
Pour ma part, je n’ai jamais été un bagarreur ni un idiot qui frappe les gens sans raison. Un soir illustre parfaitement mes propos. Alors que j’attendais calmement ma mère, nous jouions avec une balle rebondissante, entourés de camarades plus âgés de deux ans. Soudain, j’aperçus au loin notre 106 verte se garer devant le portail de l’école. Naturellement, je me pressai : « Vite, je dois y aller. Je reprends ma balle ». Étrangement, Nicolas Garnier ne trouva rien de mieux à faire que de poser son pied sur la balle : « Non ! Tu la reprends pas ». Sans réfléchir, malgré sa grande taille, je lui donnai un violent crochet dans le ventre, l’obligeant à se plier en laissant échapper un bruit mêlant douleur et surprise. Vainqueur par la force, j’ai ensuite ramassé ce qui m’appartenait avant de partir. Ma mère, apparemment spectatrice de la scène, me dit éberluée : « Tu viens de lui mettre un coup de poing là ? ». Ma justification ne la convainquit pas, et je fus contraint de lui présenter des excuses. En revenant vers Nicolas, qui se tenait toujours le ventre, Raphaël Forestier qui faisait deux fois ma taille, tant en hauteur qu’en largueur, m’attendait le torse bombé. Me saisissant par le bras, il attaqua : « C’est toi qui as frappé Nicolas ? ». J’ai répondu, instinctivement confiant de la protection divine dont je jouissais : « Oui, mais je viens m’excuser, et toute façon y’a ma mère là-bas ! Vas-y fais quelque chose si tu veux ». C’est la seule fois où j’ai administré un coup de poing. Mon unique coup de pied surviendra quelques années plus tard, sur le malheureux Étienne Bastier, pendant un match de foot. Il s’était retrouvé avec une grosse marque sur le tibia, et la maitresse m’avait puni en lançant : « Non, mais Vincent, tu n’y es pas allé de main morte, il est tout rouge ».

Le CE2, l’entrée dans la cour des grands. Nous nous languissions de franchir cette étape, malgré la fin de l’autorisation des ballons en cuir cette même année. Tant pis, nous resterons aux ballons en mousse, qui ne roulaient plus droit après être tombés dans l’eau.
C’était la période de la maitresse Florence, une belle femme particulièrement stricte. Une grande fresque, compilant les principales dates historiques, ornait le tableau, facilitant l’apprentissage par cœur de celles-ci.
En ce qui me concerne, j’avais des facilités qui m’évitaient de me tuer à la tâche. Puis, être bon en math me suffisait. J’aimais cette matière grâce à son côté compétitif. Il fallait mener une réflexion pour parvenir à un résultat précis. Et si je trouvais la solution rapidement, alors j’étais, indéniablement, le plus fort. Plutôt simple comme équation. Cette science répondant à ses propres règles, ce nouveau langage, m’intriguait. Curieux, je m’immisçais discrètement dans les cours que mon père prodiguait à ma sœur sur l’ordinateur, à l’aide d’Adibou. Un peu par hasard, j’avais fini par comprendre les bases. Un avantage supplémentaire dans ma course à la performance. Que ce soit au foot, à l’école ou autre, tous les jours servaient à devenir le meilleur, et à le montrer.
Notre professeur remplaçant, un chauve, m’a fait pleurer les heures qui suivirent son arrivée. Un conflit peu clair, né d’une incompréhension, m’a amené à fondre en larmes sur mon bureau. Je présume qu’il n’avait pas aimé mon excès de confiance. En fin de journée, il avait rendu les derniers contrôles de mathématiques et j’étais le seul à avoir obtenu un 20 sur 20. L’ultime exercice, qui consistait à déterminer le trajet le plus court, m’avait semblait ridiculement facile. J’aurais pu me vanter, mais j’avais le succès modeste. Je préférais faire preuve de compassion envers mes amis et leurs mauvaises notes, en évitant de trop parler de la mienne.
La professeur d’anglais, quant à elle, nous avait appris la chanson, « head, shoulder, knees and toes », qui dans ma tête ressemblait plutôt à : « Head, shoulder, nizeltop, nizeltop ». Après tout, « top » était bien un mot anglais. Elle nous avait ensuite distribué des images signées par son fils, qui jouait à l’OM, Johny Ecker. Personne ne le connaissait, car nous étions trop jeunes pour retenir au-delà des quatre ou cinq joueurs les plus réputés d’une équipe. Détails notables, ses cheveux étaient rasés et son bras était dans le plâtre. J’ai gardé cette photo dans mes affaires souvenirs, et peut-être que je lui ressortirai un jour, maintenant qu’il est l’entraineur du fils de mon ami Jonathan.
Sinon, trêve de futilités, c’est à cette période que j’ai aimé une fille pour la première fois. J’y pensais souvent, trop souvent. Je le disais peu, trop peu. Et je m’efforçais de la séduire en me faisant bien voir. C’était Pauline Roussel, et nous étions huit à l’aimer cette année-là. Je me souviens d’une soirée particulièrement délicieuse, juste après la fête de l’école. Nos parents restaient ensemble jusqu’à tard, alors nous aussi, nous trainions toute la nuit. Malencontreusement, je m’étais cassé la gueule en montant sur une pile de chaises. J’avais atterri sur le banc, et gagné un gros bleu au niveau de hanche le lendemain. Pas grave, c’était l’intérêt que je lui portais qui m’avait poussé dans cette aventure audacieuse, et elle en valait largement le coup.
Courir gentiment après Pauline aura duré presque un an. On s’échinait à remporter des billes ou des feuilles de papier Diddl, les odorantes, que l’on s’empressait d’aller offrir aux filles pour leur bon plaisir. Tout ce cirque a pris fin un après-midi, en plein match de foot. Un palpitant CE2 contre CM1. François et Paul étaient adossés au mur, sous les arbres au milieu de la cour. Pendant que je jouais, je les guettais du coin de l’œil, occupés à discuter avec les filles. Au cours d’un magnifique débordement, je passai devant eux, et c’est là qu’ils me lâchèrent : « Pauline, elle a choisi. Elle a dit qu’elle aimait François ! ». À cet instant, j’ai frappé d’où j’étais. Encore excentré, jamais je n’aurais tiré d’aussi loin en temps normal, avec ma frappe de moineau. La cage était symbolisée par la première marelle, et le gardien qui leva les bras, ne l’arrêta pas. Après une brève discussion sur la validité de la hauteur du tir, tout le monde s’accorda sur le fait qu’il était bien à sa portée. L’un de mes plus beaux buts en réponse à cette mauvaise nouvelle. J’étais surement dégouté, mais j’ai vite tourné la page ; surtout occupé comme je l’étais avec le foot.
Le bonheur prenait souvent la forme de matchs contre les CM1. Le hasard voulut que leur génération compte plus de joueurs, et qu’ils soient globalement meilleurs. Nous perdions quasiment chaque fois. L’une de nos rares victoires, eut lieu l’année suivante, un cinglant 3-0. J’inscrivais un triplé. Pied droit, pied gauche, et tête. Le coup du chapeau parfait.
Le premier survint du côté du portail à barreaux. Mon ami Maxime était parti à la lutte avec le gardien, plaqué contre le mur. Par chance, le ballon les a lobés tous les deux, m’offrant la possibilité de conclure d’une demi-volée pied droit, en bas du but, vide de tout rempart. 1-0.
Ce jour-là, nous étions touchés par la grâce. 2-0 de l’autre côté du terrain, sur le portail vert de Mr Moule. Cette fois, d’une reprise pied gauche à mi-hauteur. Et comme si ce n’était pas assez beau, un cafouillage finalisé par une tête. Pas de joie exagérée, il fallait encore terminer le travail. C’était trop tôt pour exulter. Vingt ans plus tard, cette récré demeure encore ancrée dans ma mémoire, malgré les plus de mille matchs disputés à cette époque. Que ce soit entre nous, en interclasses, le matin avant les cours, à la pause de midi, en match suisse, ou même à deux contre le reste du monde, la meilleure occasion c’était quand il n’y avait pas d’occasions. Si un ami venait dormir chez moi, alors je le prenais dans mon équipe. Sinon, c’était souvent Paulin ou Oscar. Ces configurations étaient incroyables pour progresser. La gestion du surnombre et de la défense sans relâche, sont clairement des exercices qui ont façonné mon niveau.
Dans le même esprit, l’un de mes plus beaux buts naît d’une passe tendue à ras de terre, réalisée par le coup de pied de Paulin. Seul, dos au but, je me doutais que le gardien du jour, Étienne Bastier, allait me coller. Au dernier moment, je me suis effacé, ouvrant les jambes pour laisser filer la balle. Stupéfiait par ce petit pont, il n’a pas esquissé le moindre geste, et une nouvelle fois, j’ai marqué dans un portail vide de toute contestation. Des instants de grâce dont le football a le secret. Tout avait été prévu, tout s’était aligné. Le sentiment d’être dans le vrai, au bon moment, au bon endroit était délicieux.
En d’autres circonstances, Étienne a eu le mérite de nous offrir une célébration inoubliable, tandis qu’on s’adonnait à ce concept incroyable qu’étaient « les qualifs ». Il s’agissait de désigner un goal, devant lequel tous les joueurs s’affrontaient dans une mêlée générale. Celui qui marquait, était qualifié pour le tour suivant et le dernier était éliminé, jusqu’à ce qu’il n’en reste plus qu’un. Ce jour-là, Étienne, loin d’être le meilleur, avait seulement inscrit un but intermédiaire, mais il se mit à célébrer en faisant l’avion à travers toute l’aire de jeux. C’était sa victoire. Le football.
Mr Moule que j’ai mentionné plus haut, était le malheureux voisin qui avait son jardin juxtaposant l’école et dont le portail servait de cage. Évidemment, des ballons mal négociés arrivaient chez lui au long des jours, même si l’on s’empêchait. Alors, on se plaçait à la grille, et l’on criait de bon cœur : « Monsieur Moule, monsieur Moule, monsieur Moule, monsieur Moule ». La chorale pouvait s’éterniser, mais très souvent, quand son dogue allemand apparaissait, c’était le signe avant-coureur de sa venue. Il avait beaucoup de patience. Bien plus que le brûleur de ballons, de l’autre côté. Le gros tonneau rouillé, dressé dans son jardin, servait à détruire nos précieux. On ne voyait personne et personne ne nous les renvoyaient, jamais. Ce n’est pas pour autant que quelqu’un l’a observé en train de commettre les méfaits dont il était accusé, mais c’était la légende.
Si ce n’était ni l’un ni l’autre, c’était dans la rue qu’ils finissaient. Une maitresse nous accompagnait jusqu’au portail et nous donnait l’autorisation d’aller les chercher.
Encore fallait-il qu’elles se lèvent de leur banc, cet immuable repose-fesse duquel elles surveillaient toute la récréation. Bien avisé celui qui connaissait l’emplacement du jour, négligence dont j’ai fait les frais à mes dépens. Mon attention toujours accaparée par mes dribles, je m’étais faufilé à leurs pieds, me fendant d’un poétique : « Fais chier, ce putain de mistral », qui, soit dit en passant, soufflait aux alentours des 100 km/h et gênait la progression de nos ballons en mousse. Ébahies, les maitresses m’avaient fait revenir : « Vincent, c’est toi qui as dit ça ? ». Je me souvenais de la situation, mais pas d’avoir prononcé ces mots. Je ne comprenais pas, mais il était fort plausible que j’en sois fautif, car c’étaient exactement ceux de mon père !
De courte durée, nous avons eu l’époque des toupies Beyblade. Mon père était rentré du travail, l’air enjoué, et souhaitait me montrer ce qu’il venait d’acheter. De sa sacoche en cuir, il sortit la boite d’une toupie. Timidement, j’osai demander : « Waoh, c’est pour moi ? », mais il balaya cette supposition : « Non, c’est pour moi et Philippe, mon patron, pour qu’on s’amuse au travail ». Pendant deux interminables secondes, je fus déçu, avant de comprendre la supercherie et d’être le plus heureux du monde. Par la suite, il truqua ma toupie en enfonçant un clou à la place de la pointe en plastique sur laquelle elle effectuait ses rotations. Et dès le lendemain, je pris le meilleur sur le champion Sébastien Dufon, dans une rigole en béton à côté de la classe des CE2. Par souci d’honnêteté, j’avais avoué l’amélioration légalement douteuse.
La cantine se trouvait au centre d’Escalès, dans la salle Marcel Pagnol. Nous y allions à pied, en formant des rangs, deux par deux. Vers la place, un plus vieux m’expliqua que pour entrer dans son gang, il fallait lécher le chewing-gum collé sous ses chaussures. C’était des Air Max 360, modèle de l’époque des Total 90. Elles étaient très convoitées. Si ça en valait le coup, j’aurais considéré l’option.
En chemin, Mehdi, un autre grand, imitait le pigeon sur commande. Et à la cantine, l’âge inscrit dans le fond de nos verres définissait notre statut. En entrée, une immonde salade était servie, la macédoine de légumes. Un jour, alors qu’on s’apprêtait à manger du couscous, quelqu’un autour de la table, fit savoir que les grains de semoule étaient en réalité les crottes de nez de Corinne. La vision de cette aide-cuisinière, de surcroît pas très sexy, qui remplissait les plats en se vidant l’organe olfactif, m’a instantanément dégouté. Je n’ai plus touché à mon assiette. Dans le même registre, lors d’un petit déjeuner, mon père qui m’apprenait à beurrer mes tartines me confia que les craquements émanant du pain venaient des excréments de pigeons récoltés avec le blé. Là encore, je n’ai pas pu les finir.
Le plus souvent, le midi, je mangeais avec ma mère à la maison. Des œufs au plat systématiquement accompagnés de tartines de beurre, que je savourais, cette fois. Nous regardions les téléfilms qu’elle avait enregistrés, et je me demandais comment elle parvenait à identifier le tueur dès l’entame des épisodes de Columbo. La plupart des pauses se passaient chez moi, avant de repartir tranquillement, jouer quelques minutes au foot avant les cours de l’après-midi. Mon bonheur à moi.

Le CE2 marquait le début de l’autonomie. J’avais obtenu le droit de faire le trajet me séparant de l’école à pied, tout seul. J’habitais à environ un kilomètre, parfait pour commencer. Le sentiment de liberté procuré par cette nouvelle mesure était bien réel, et nécessitait uniquement de ne pas faire de bêtises. Ce qui consistait principalement à bien rester sur le côté de la chaussée. L’ancien pigeonnier, en face de l’établissement, figurait l’entame du chemin.
Les années suivantes, j’ai en partie partagé ces moments avec Étienne et Julien Sorin. Rahimahu Allah. Nous nous séparions à mi-chemin. Heureusement que nous n’étions pas associés, car ces imbéciles avaient trouvé le moyen de marquer les voitures garées dans la rue, d’un ou plusieurs traits de feutre. La sanction n’avait pas tardé. Une voiture blanche portait désormais un large trait rouge sur ses portières, et ma sœur de son empathie incréée, m’avait fait part de son ressenti : « C’est horrible de faire ça à de pauvres gens qui travaillent et qui n’ont rien demandé ». Elle pourrait prononçait exactement la même phrase vingt ans plus tard. Certains jours, dès le premier virage, ils coupaient à travers le jardin d’un voisin. Cette décision me contrariait, parce qu’ils préféraient rentrer au plus vite plutôt que de m’accompagner. Toutefois, je les comprenais.
En poursuivant, j’arrivais à l’abrupte descente qui faisait face à la vigne. Alors je tournais à gauche, longeant pour quelques dizaines de mètres les murets en pierres jusqu’au prochain croisement ; je continuais tout droit.
Légèrement avant le pont, derrière une haie, se dissimulait un champ de cerisiers. Une trouvaille partagée par mon voisin, comme beaucoup de choses à cette époque. Un soir, après m’être vanté d’avoir plein de cerises à disposition lorsque je rentrais de l’école, les deux apprentis Picasso m’avaient discrètement suivi pour en découvrir l’emplacement. Je m’en étais terriblement voulu. Premièrement, j’avais trahi ma promesse de garder le secret, puis, ceux que je pensais mes amis, m’avaient espionné sans que je m’en rende compte. C’était peut-être ça le pire tout compte fait.
Il fallait aller de l’avant et dépasser le petit pont aux piles latérales massives. Pendant longtemps, j’ai eu du mal à déterminer quelle route passait au-dessus. Cela m’était égal, ce pont était la porte de chez moi. Quand je l’apercevais, il devenait le symbole d’une arrivée proche.
Je poursuivais mon cheminement, passant devant la maison de Jean-Louis, qui surplombait l’un des virages. Rebaptisé amicalement Juan-Luis par mes parents, je le comparais volontiers à un golem de pierre. Il possédait un physique si naturellement avantageux que cela en devenait presque invraisemblable. Tous les hommes de sa famille étaient grands et larges comme deux. Son fils, racontait n’avoir reçu qu’une seule claque de son père et qu’il s’en souviendrait toute sa vie. Quelqu’un avait même surenchéri, en ajoutant qu’il avait dû faire deux tours dans son slip, sans toucher les élastiques. Depuis la rue, sa maison avait un charme fou. Les nombreux murets en pierre qu’il avait bâtis sur différents niveaux participaient grandement à son cachet. Une personne authentique et respectable.
Dans ce même virage, Julien Sorin s’était retrouvé sous les roues de la 106 de ma mère. L’incident s’était produit alors qu’il dévalait la pente un peu trop vite à vélo. Cette descente était dangereuse, d’autant plus dans cette partie sans visibilité. Nombreuses sont les fois où j’ai assisté à des presque accidents. Ma mère qui montait, heureusement prudemment, a pilé en le voyant. Lui, également surpris par cette rencontre, freina brusquement, ce qui le fit déraper. Sa course sur le bitume s’arrêta, au moment où son bras passa sous la roue avant de la voiture, stoppée net. Plus de peur que de mal.
La montée se durcissait dans le virage suivant. C’est ici que j’ai avalé une bille de plomb en rentrant de l’école. Tandis que je m’occupais, en la faisant bouger avec ma langue avant de la recracher dans ma main, j’ai fini par l’avaler. Sur le coup, je me suis demandais : « Merde, c’est grave ou pas ? ». Un peu inquiet, j’ai quand même essayé de me faire vomir dès mon arrivée. Sans succès. En revanche, cet imprévu ne m’avait pas spécialement fait mal au ventre, contrairement à la fois où j’ai ingéré une pièce de deux euros. Je ne sais pas combien de personnes peuvent se targuer d’un tel palmarès digestif, mais, qu’est-ce que je faisais à placer toutes ces choses dans ma bouche ? La pièce relevait du défi : « T’es pas cap de la mettre à l’intérieur », suivi de : « T’es pas cap de l’avaler », jusqu’à : « Ha merde, je l’ai avalé ».
À part ça, cet enchaînement de virages me remémore mes premières confrontations à vélo. Pas le choix, il fallait passer par là pour rentrer. Petit, j’ai commencé par marcher, puis, poussé par mon voisin qui lui arrivait à grimper, j’ai fini par réussir à gravir la montée à mon tour. L’esprit de compétition. On se sentait en plein tour de France, faisant quasiment du surplace, en danseuse dans les épingles à 15 %.
Les boites aux lettres du coin de la rue marquaient le début de l’impasse de l’Étape. Peu nombreuses au commencement, elles ont surgi au fur et à mesure des constructions.
La maison des Dubois faisait l’angle. Notamment Clara, qui était dans la classe de ma sœur. Dans mon souvenir, elle était belle, avec un style haïtien accentué par sa longue natte. À son propos, mon voisin toujours lui, m’avait dit qu’elle était la copine d’Amir Cherif, un arabe du Clos. Sa réputation le précédait, car on le qualifiait de monstre en bagarre. Le meilleur du collège. Sans le connaître, ni même l’avoir vu, j’aurais pu citer son nom. Ce genre de mythe de l’enfance.
La demeure des riches horlogers se dissimulait derrière un beau portail. Pareillement, on ne les connaissait pas vraiment, bien que mes parents aient mangé une fois à leur table. Au fil du temps, les propriétaires se sont succédé, et parfois, la maison n’était plus qu’une résidence secondaire. Dernièrement, une terrible histoire m’a marqué. Une nouvelle famille venait d’acquérir la propriété, et pendant les préparatifs liés au déménagement, la femme a fait un infarctus, un soir, en rentrant du travail à vélo. Le veuf a dû revoir ses projets de vie et la revendre. La brutalité à l’état pur.
Paradoxalement, les horlogers faisaient face à des naufragés, les Roland. C’est mon père qui les appelait ainsi, car selon lui, ils trainaient pour finir leur extérieur. Une cabane abandonnée dans les broussailles qui le défrisait. Par le passé, j’ai essayé de jouer quelques fois avec les enfants après nous être rencontré dans la rue, mais nous n’étions pas vraiment compatibles. Au primaire, Tristan ramassait les chewing-gums collés par terre dans la cour pour les manger. Depuis, on se fait signe cordialement lorsqu’on se croise.
Dans la continuité, il y avait les Villard et leur terrible chien. Tyson, un magnifique rottweiler, dont les aboiements accompagnaient notre passage. Il calait ses deux pattes avant par-dessus le portillon et nous toisait du regard, comme si la rue lui appartenait. En même temps, vu sa taille et son poids, cela ne m’aurait pas étonné que ce fût le cas. Lorsque je rentrais de l’école en tirant mon sac à roulette DDP, je veillais à me mettre de l’autre côté, le plus loin possible, et surtout, j’essayais de ne pas trop le regarder.
Au bout de l’impasse en forme de T, deux possibilités. Le chemin de droite, je ne l’ai pris qu’une seule fois. C’était pour voir Pascal, le prof de sport — et ce n’était pas sans raisons. En effet, cet homme titulaire d’une ceinture noire de judo m’a un jour, mis une balayette avant de procéder à un étranglement. C’était pendant un cours de sport, alors que nous pratiquions une activité qui ressemblait à du hockey sur gazon. Nous avions des crosses équipées d’une petite cage permettant d’attraper une balle de tennis afin de se l’envoyer. Les buts de foot étaient, eux aussi, réquisitionnés pour l’occasion. Un mélange étonnant venu d’Australie si je ne m’abuse. Gaspard Bellamy était contre moi. Habituellement, à l’école, il faisait l’arbitre. Ce n’était pas vraiment sportif, plutôt un intello musicien, mais surtout, désolé jeune Gaspard, très casse-couille. Une caractéristique qui le définissait à l’unanimité. Et donc, dans ce cas de figure, nous nous battions pour la possession de la balle. Il n’avait rien trouvé de mieux que de me coller des coups de crosse dans les chevilles, en réponse à mon opposition corporelle héritée de mon sport. Après une multitude d’échanges aux limites vint celui qui fit déborder le vase. Alors, pour signifier mon mécontentement, j’ai mis un coup de pied dans la balle. Rien de très grave en apparence. Pourtant, Pascal qui ne semblait pas de cet avis, traversait le terrain à grandes enjambées en criant. Je ne comprenais pas bien, les bras ouverts, attendant qu’il vienne régler ce conflit. Dans ma tête, il n’y avait pas de débat, j’étais la victime. Quelle ne fut pas ma surprise de le voir s’avancer vers moi, non pas pour discuter, mais pour me mettre au sol ! Une projection de judoka, suivie d’un étranglement : « Mais tu vas t’arrêter oui ! ». Au milieu des autres enfants, la scène est difficilement imaginable. Dans le flou, on s’était retrouvés sur le city stade adjacent. Moi, en train de pleurer nerveusement, entouré de mes collègues. Lui, en face, avec notre maitresse Gisèle, qui tentait de saisir la gravité de la situation. Le pire, c’est qu’il continuait de vociférer, me pointant de son gros doigt : « Moi je mens ? J’ai quarante-quatre ans et moi je mens ? ». Apparemment, il avait quarante-quatre ans.
Le midi, j’expliquais les tenants et les aboutissants de cette histoire à ma mère, et logiquement, elle a voulu entendre ses clarifications. On trouva à son portail, un gentil Pascal qui nous servit une belle histoire, bien lissée, minimisant les faits. Encore impressionné, je n’ai pas cherché à envenimer l’affaire. Sincèrement, il aurait pu prendre une lourde sanction, mais objectivement, ça ne le méritait pas. Les années suivantes, quand je le croisais et qu’il me saluait comme si de rien n’était, je pensais : « Ha, c’est ce fils de pute de Pascal ». J’étais au début de ma vingtaine et je construisais ma propre identité, alors je croyais bon de me promettre que : « Jamais je ne lui pardonnerais à ce bâtard. Il m’a frappé quand j’étais petit. Maintenant que je suis un homme, c’est plus pareil ». C’est le genre de pensée que je souhaitais incarner, pour faire le mec fort. En fin de compte, il ne m’a ni blessé ni choqué durablement. Il a dérapé un jour. Une fois. Ça arrive.
Pour rentrer chez moi, c’était donc à gauche que je tournais. La maison des parents Payet faisait l’angle. Installés en même temps que nous, le mur séparant nos deux maisons n’était pas encore fini. Ainsi, un soir d’été, nous nous étions retrouvés à discuter autour du chantier. Ils savaient que j’aimais le foot, mais ils ne pensaient certainement pas que j’étais prêt à remettre mes protège-tibias par-dessus mon pyjama. Il ne fallait pas me provoquer, même à six ans. À moi, on ne me parlait pas d’âge.
Un après-midi de retour de l’école, je marchais d’un pas plus décontracté qu’à l’accoutumée. Dans ma bulle, je balançais nonchalamment des petits cailloux pour m’occuper les mains. En passant, j’ai aperçu Mickaël, le chef de famille, à travers la barrière qui aspirait sa piscine. Rien d’anormal, je continuais mon chemin. Mais c’était sans compter sur mon inexplicable maladresse. Contre toute attente, mon bras s’est bloqué, et le caillou, qui devait finir à mes pieds, passa par-dessus la palissade et atterri directement dans leur bassin. Qui plus est, juste devant ses yeux. Cette idée ne m’avait même pas effleuré l’esprit, néanmoins, c’était bien ce que je venais de faire. Aussitôt, il est apparu à son muret : « Oh, c’est toi qui t’amuses à jeter des cailloux dans la piscine ? ». À vrai dire, on n’était que tous les deux. Je me suis contenté d’un timide : « Euh non, c’est pas moi pourquoi ? ». Je sentais bien qu’il avait la haine, mais heureusement pour moi, il a jugé bon de se contenir.
Enfin, j’arrivais devant mon portail, périple terminé. La boucle était bouclée. La plupart du temps, tout se passait bien, mais ce ne serait pas drôle si c’était toujours le cas. En l’occurrence, c’est une petite boule noire accrochée à la poignée du portail qui attira mon attention. J’étais un enfant censé, et j’avais remarqué que la rue venait d’être fraîchement goudronnée. Le rapprochement semblait évident. Mais non. Dans un sursaut additionnel de bêtise, j’ai considéré que goûter ce qui ressemblait à une pépite de chocolat prenant l’air était une bonne idée. Quand je me suis rendu compte de mon erreur, j’ai couru me brosser les dents. Qui, mieux que moi, peut certifier par l’essai que le goudron encore chaud est très difficile à enlever de sa dentition ?
Au fond de l’impasse, quelques maisons complétaient le voisinage. Tout d’abord, les Lefebvre nous faisaient face. La famille comptait une fille et de deux garçons, Thomas et Gauthier, de faux jumeaux qui se répartissaient les compétences. L’un plus petit et intellectuel, l’autre plus massif et bourrin. Notre association amicale n’avait pas duré, à cause d’une regrettable expérience. À première vue, tout semblait normal. Nous jouions aux chevaliers équipés d’épées en bois et de boucliers en plastique. Thomas et moi étions chassés par le méchant Gauthier, ce qui était une raison suffisante pour trouver refuge au dos d’un arbre. Tenant bien son rôle, ce dernier décida de nous balancer des bûches. On savait s’amuser. Au bout d’un moment, las de subir, j’ai convenu d’avancer pour mener une attaque. Peu importe le morceau de bois qui allait arriver, je comptais m’abriter derrière mon beau bouclier. Pas de chance, les calculs n’étaient pas bons. Je l’ai vu rebondir à plusieurs reprises avant de me percuter en plein nez. Comme d’habitude, j’ai saigné, et nous avons pris la route direction les urgences. Une cicatrice de plus ; la routine.
Dans le renfoncement se trouvait la maison d’Alexis, dont je vais bientôt parler longuement, et aussi celle des Bazin. C’était la seule famille à être arrivée après nous. Auparavant, leur terrain était un vulgaire champ de genêt que nous arpentions des heures durant. Nous y construisions des cabanes ou jouions à cache-cache parmi les crottes de lapin. Un beau matin, mon père ouvrit le volet de ma chambre pour nous faire constater l’ampleur des changements. Notre aire de jeux était complètement rasée, prête à accueillir une maison. Il m’est arrivé de partager quelques après-midis avec Rémy Bazin, mais à l’instar de Tristan, nous n’étions pas vraiment compatibles. Sa répartie se résumait à : « C’est plutôt toi la fille. T’as les cheveux plus longs que moi ». Certes.
Au départ, je comptais survoler le trajet iconique de mon enfance, mais les souvenirs se sont bousculés. Après tout, il est concevable de raconter une route à travers ceux qui en constituent le décor. Quand j’en venais finalement à bout, je m’empressais de goûter et de faire mes devoirs. Avec un peu de chance, je pouvais même voir le dénouement de Détective Conan sur France 3. Une fois ce rituel terminé, je rejoignais mon voisin pour commencer un apprentissage d’un autre genre.

Prémices des chroniques journalières en échos dispersés, empreintes d’une irrégularité qui fait sens :

Nouvel épisode d’écriture après la première semaine qui m’a amené jusqu’ici. J’ai encore vécu une épreuve terrible, je ne m’en suis toujours pas remis. Un mois de souffrance profonde, j’ai cru que c’était la fin. Je vais attaquer cette deuxième session, inch’Allah, ça ira bien et pour longtemps. Je suis si fatigué et si perturbé. Que Dieu m’accorde la sérénité et la possibilité d’écrire.

Le CM1 de madame Dupont. Durant cette année-là, un petit en provenance de Nouvelle-Calédonie avait fait une apparition fugace. Malgré son âge identique au nôtre, il ne parlait pas correctement le français. Le choc avait été d’autant plus grand, car j’avais pris conscience qu’il existait des étrangers francophones blancs. Pour compenser, il se tapait fort la tête sur la table pour nous faire rire. Rapidement, les maitresses le changèrent de classe, avant qu’on ne le voie disparaître totalement.
Je me rends compte que je n’ai quasiment aucun souvenir à l’intérieur de la salle, de ce qu’on étudiait ou de la disposition de nos bureaux. Ils se concentrent plutôt dans la cour, et évoquent des situations embarrassantes.
Assurément, je n’oublierai pas le jour où j’ai racketté Virginie Perreau. En compagnie de mon ami Paul Delmas, nous nous abandonnions à l’une de nos élucubrations, celle de former un groupe de musique. Aucun de nous ne savait jouer d’un instrument, mais tant pis, nous commencerions par acheter un micro. À chaque problème sa solution, nous trouverions de l’argent en gagnant des paris contre les autres élèves. Le hasard a voulu que Virginie passait par là. Je l’interpellais : « Si mon dessin est le deuxième de la pile de tous ceux qu’on vient de faire, alors tu me dois un euro ». Bien sûr que c’était le cas, il fallait bien truquer les résultats pour faire fortune. « Bam, j’ai gagné ! Tu dois m’amener un euro demain, tu dois le faire c’est un pari ». Le lendemain matin, comme à mon habitude, je déposais mon sac à l’intérieur de la salle avant de ressortir pour les dernières minutes précédant le début de l’école. En remontant les escaliers, je me retrouve nez à nez avec le père de Virginie, qui me menace sans attendre : « C’est toi qui veux racketter ma fille ? Ça ne va pas se passer comme ça ! Si tu ne la laisses pas tranquille, je vais prévenir la maitresse ». J’avais carrément oublié cette histoire de paris de la veille. Mais apparemment, ce n’était pas son cas, puisqu’elle avait réclamé de l’argent pour s’acquitter de sa dette.
Autre événement, mon début d’affrontement avec Romain, car les plus grands insinuaient que je ne savais pas boxer. Ce même Romain, m’appela après l’école pour me demander si c’était bien moi qui avais déchiré sa chemise Quicksilver bleue à carreaux. Si j’acquiesçais, il convenait de lui rembourser quarante euros. Alors hésitant, je lui avais conseillé de se tourner vers Paulin. Le pauvre Popol, je l’avais balancé sans scrupule pour me dédouaner. En même temps, il faut dire qu’ils avaient un passif tous les deux. Paulin se permettait de revendre les jeux de Play prêtés par Romain à Micromania.
Un après-midi, Benoit Mallier, Paul Delmas, François et moi jouions dans le couloir des toilettes à nous arroser. Rien d’affolant. Cependant, les trois maitresses assises sur leur banc n’étaient pas du même avis. Madame Dupont m’avait dit : « Vincent, je connais tes parents, tu crois que ta maman va être contente quand elle verra l’avertissement dans la boite aux lettres ». Nous ne comprenions pas pourquoi le ton était si sévère. Elles nous accusaient de jouer à l’eau. Benoit Mallier, qui répondait aux profs sans grande pression, exprima son incompréhension : « On jouait à quoi ? On jouait à l’eau ? AlohoMora ». Il ne voyait pas de problème à se payer ouvertement leur tête en mentionnant des sorts d’Harry Potter. Forcément, nous avons explosé de rire, ce qui n’a pas arrangé notre cas. Benoit était un ovni. Si l’on imaginait la caricature d’un cancre, on obtiendrait Benoit. Il était très sympathique, mais tellement déconnecté. Pour dire, il écrivait ses dictées en langage SMS et récoltait fièrement des 3 sur 20. Les disparités étaient importantes.
J’associe un incident marquant de cette période à l’école, alors qu’il s’est déroulé dans le cadre du foot. Probablement parce qu’il impliquait Gabriel Pujol. Depuis toujours, Gabriel était le meilleur ami de mon voisin, un enfant relativement calme et profondément gentil. Malheureusement, cette nuit-là, il subit un coup du sort.
Nous participions au loto de fin d’année organisé par notre club. Comme souvent, pendant que les parents jouaient, nous occupions notre temps avec le but de handball en bout de salle. Inévitablement arrivait le moment où l’on se faisait virer à cause du bruit, et, exceptionnellement, le city s’était transformé en solution de repli. Habituellement, les responsables nous interdisaient d’y aller, préférant prévenir une dispersion générale. Cette fois, nous étions sérieux, tout allait bien se passer. L’image de l’action est encore si nette, que je peux la revivre aujourd’hui. Je me trouvais sur le reculoir, orienté de profil, prêt à surgir à la moindre erreur, tandis que Gabriel s’avançait balle au pied. Puis il y a eu cette sensation, cet instant où je me suis senti capable d’intervenir. Il conduisait le ballon avec relâchement, alors j’ai tendu la jambe comme je l’avais déjà fait des centaines de fois auparavant. À ce moment-là, il le repoussa une dernière fois. En une fraction de seconde, nous sommes passés d’une intervention réussie à un croc-en-jambe. Il tomba lourdement. Ça aurait pu en rester là, je me serais excusé et l’on aurait oublié, mais non, il avait très mal et commença à pleurer. Après une légère hésitation, nous nous sommes vus obligés de prévenir les parents. Rapidement, on comprit que je lui avais cassé le poignet. Je me suis assis, la tête enfouie à l’intérieur de mes deux mains, seul, à regarder les graviers teintés du bleu émis par le gyrophare des pompiers. Ma mère me réconfortait : « Mais non, ce n’est rien, tu n’as pas fait exprès ». Bien avisée, elle leur avait conseillé de faire une radio des deux côtés, et finalement, ils ont découvert que ses deux poignets étaient cassés. Presque sept ans plus tard, une nuit où l’on fumait sur le rebord de la fenêtre de mon voisin, Gabriel me confia : « Vinny, je ne te l’ai jamais dit, mais je te détestais à cette époque. J’ai passé l’été du passage en 6ème, les deux bras dans le plâtre, à mourir de chaud, à ne pas pouvoir me baigner, ou seulement avec les bras en l’air. Ça me grattait en plus, c’était terrible ». J’avais senti toute sa sincérité. Il était adorable, Gabriel.

Mon premier souvenir à caractère sexuel date de cette période. La sexualité des enfants existe. Évidemment, on ne parle pas de relation sexuelle, mais de découverte via l’imaginaire et les envies. J’ai ressenti le désir de me retrouver aux toilettes avec Sandy Araujo, animé par la volonté de soulever sa jupe. Perplexe, je ne comprenais pas d’où provenait cette tentation. Je ne l’aimais pas sentimentalement, alors qu’est-ce que cela pouvait bien signifier ? Par ailleurs, elle semblait davantage au courant, car, associés à son cousin Johan Couteau, ils racontaient qu’ils avaient déjà fait l’amour et qu’ils s’étaient cachés sous le lit pour ne pas être surpris. À huit ans, cela paraissait un peu gros. Pour le reste, je ne me tracassais pas plus que de raison. J’ai conclu que d’autres garçons étaient dans mon cas, quand j’ai aperçu la petite Nadia en larmes devant la classe de CP, parce que ses camarades lui avaient soulevé sa jupe. Des schémas qui se dessinent très tôt.
Pour clore cette partie, il ne manque plus que le CM2, l’année des grands. Désormais, la cour nous appartenait. Un règne impliquant le choix de l’emplacement pour nos matchs de foot. Nos seuls adversaires potentiels étaient les CM1 d’Anthony Vandervoort. Ils avaient beau être motivés, nous étions meilleurs. Une domination outrageuse.
Gisèle était une maitresse bienveillante, qui fumait énormément. En fin d’année, elle avait averti ma mère qu’il était impératif que je ne me déconcentre pas au collège, car ma moyenne était descendue à 16 au dernier trimestre. Cela paraissait exagéré, mais il faut dire que la notation était assez clémente. En atteste le jour où je le lui ai rendu mon contrôle de math en premier. Après un rapide coup d’œil, elle m’avait conseillé de vérifier la réponse qu’elle pointait de son stylo. Logiquement, après avoir apporté la correction nécessaire, j’avais eu un 20 sur 20.
Mon collègue Maxime Piquet était perdu dans sa tête. À neuf ans, il était incapable de faire preuve de cohérence. Un matin vers dix heures, il était assis seul à son bureau, derrière Paulin et moi. Nous l’apercevions se pencher discrètement à plusieurs reprises. Forcément, il nous intriguait, et Gisèle aussi l’avait remarqué. Elle décida de s’enquérir de la situation : « Mais tu fais quoi Maxime ? » Dépassé, il bégayait : « Non, non, je ne fais rien ». Sans tarder, elle comprit qu’il machait une barre de céréales. Horrifiée, elle enchaîna : « Mais tu manges en classe ? », puis après avoir jeté un coup d’œil dans son cartable, elle poussa un cri : « Haaannn ! Mais c’est quoi ça ? Mais t’es un animal ! ». Elle retourna le sac et le secoua devant tout le monde. Des miettes en cascade, des stylos éparpillés, des papiers d’emballage, des barres de céréales à moitié entamées, et des feuilles en boule pleuvaient à ses pieds. Un vrai carnage. Loin d’en rester là, Gisèle en fit un exemple en accrochant ses feuilles froissées au tableau comme on laissait les cadavres pendus au vu et sus de tous. Ce n’était pas un cas isolé puisqu’il avait récidivé au foot. Son sac de sport contenait au moins trente barres de céréales en vrac. Il était légèrement hyperactif et ses parents devaient penser que ces besoins énergétiques étaient hors-norme. Sur le terrain, il sortait tout seul en touche avec le ballon. Quand il courait, il n’arrivait pas à s’arrêter. Le pire c’est qu’il ne faisait pas exprès. Ça l’embêtait, mais invariablement, il fonçait tout droit. L’entraineur était dépité de le voir manœuvrer ainsi. C’était Maxime. Ses jambes avançaient trop vite pour lui et son cerveau. En contrepartie, il détenait le titre de l’enfant le plus rapide de notre classe. J’avais organisé un affrontement avec mon voisin Alexis, lui-même le plus performant de la sienne. Un duel de champion. À ma grande surprise, Alexis l’avait battu tranquillement. En particulier grâce à un meilleur démarrage. Je me demande si nous utilisions encore le célèbre « Prêt, Feu, Go » ou un simple « 3, 2, 1, Partez ! ».
Il me reste quelques souvenirs épars de récréations. Par exemple, celle où j’ai aspiré 2 fourmis à l’aide d’une paille pour prouver ma bravoure, ou celle voyant François se moquer du pull en laine tricotée par ma grand-mère. Je m’étais juré que ce serait le dernier, bien que la surveillante m’ait défendu : « Non, mais il est très beau son pull ». De toute façon, j’avais déjà entendu la grande Lison Mercier critiquait un élève de sa classe de 4ème pour la même raison.
Parfois, je m’improvisais entraineur de gardiens. Ce fut le cas avec Louis Vernoux. On souhaitait qu’il devienne meilleur, pour remporter plus de matchs à l’école. Sur notre lancée, il m’avait invité à passer deux jours chez lui pendant les vacances. Un endroit très agréable, disposant de plusieurs coins tranquilles pour se poser. Sa mère Anne, qui travaillait avec la mienne à la collectivité territoriale, nous avait fait du popcorn. Un merveilleux souvenir. Je pense que c’était la première fois que je mangeais du popcorn maison, et non au cinéma. Conformément aux attentes, nous avions joué au foot au stade de son village avec son frère Liam. Un jour, Louis m’avait fait une confidence : « Plus tard, je reprendrais le garage BMW de mon grand-père et je te ferais des voitures pas chères ». Aux dernières nouvelles, il travaillait dans l’hôtellerie en Angleterre.

Annotations

Vous aimez lire Vincent RUBAS ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0