Fête votive
Nouvel élément indissociable de mes premiers étés, la fête votive. Chaque début juillet, le village entre en effervescence pour ses festivités annuelles. Il fut un temps où les célébrations s’étendaient sur presque toute la semaine, mais aujourd’hui, elles se concentrent plutôt sur trois à quatre jours. Parmi les invariables du folklore, le concours de boules et ses multiples catégories. En doublettes ou en triplettes, mixtes ou non, les lots à gagner étaient souvent éclipsés par la reconnaissance des initiés. N’étant pas un inconditionnel de pastis bien jaune siroté à l’ombre des platanes, ils ont dû se passer de mes services.
Exceptionnellement, un tournoi fut organisé par mon club de foot. La récompense tant convoitée n’était pas une coupe, mais des jetons à utiliser dans les manèges. Un mystérieux nouveau faisait partie des gagnants. Un roux constellé de taches de rousseur, revenu en métropole après quelques années à Mayotte. Plutôt bon, avec un style de jeu atypique, il n’en fallait pas plus pour que mon imagination s’emballe. Je m’étais mis en tête que Mayotte était une région au niveau très élevé, voire une sorte d’île pour les petits pros.
Autre épreuve à la tension palpable : l’élection de Miss Escalès. Difficile de faire plus cliché. Cela dit, je me garderai bien de critiquer outre mesure, car je n’ai jamais assisté au défilé. N’étant pas un inconditionnel des filles… non pas cette fois. Disons simplement que ce n’est pas mon truc. Chaque année en tout cas, mon père ne déroge pas à son humour de beauf parfaitement assumé : « Eh Vinny, t’as vu y’a l’élection de miss Escalès. Tu ne veux pas aller y faire un tour ? ». Ses haussements de sourcils complices ont, au moins, le mérite de m’arracher un sourire.
Heureusement, ces activités annexes ne servaient qu’à préparer le terrain aux deux joyaux de la couronne : la fête foraine et les taureaux.
Les manifestations taurines, une caractéristique de l’arc méditerranéen. Je me suis rendu compte de cette particularité seulement après avoir déménagé à La Rochelle. En évoquant nos souvenirs d’enfance, j’ai réalisé que pour mes amis du centre ouest, fêtes de villages ne rimaient pas avec tauromachie ; on passerait même pour des fous. Pourtant, quelle chance d’être en contact avec cette culture emblématique de la Camargue ! Il n’est en effet pas rare de trouver des arènes disséminées dans les villes et villages des alentours. De simples édifices circulaires, composés d’une piste centrale coiffée de gradins en bois… qui me rappellent les stades.
J’en garde plusieurs souvenirs. L’un d’eux se passe sur le carré d’herbes où s’installait régulièrement le cirque. Cette année-là, une construction peinte en rouge s’était implantée pour la semaine. Ce modèle réduit était destiné au divertissement des enfants. Nous cherchions à nous accouder au sommet des rambardes, tandis que nos pieds reposaient sur un tasseau à mi-hauteur. Dans cette position, la vue était imprenable. À l’intérieur, les protagonistes s’affairaient à rendre folle la vachette. J’ai toujours eu un grand respect pour leur courage. Il fallait être, au choix, sacrément bête ou sacrément audacieux pour aller narguer l’animal. Une provocation suivie d’une traversée de l’arène, en courant dans le sable et veillant à rester lucide pour ne pas trébucher avant de regagner un emplacement sûre. Très peu pour moi. Je trouvais idiot de prendre tant de risques gratuitement. J’étais trop rationnel, ou trop peureux. Au choix.
Étienne Bastier illustrait parfaitement cette irrationalité. J’avais été étonné de le voir au centre des débats, lui dont les performances sportives ne faisaient pas référence. Depuis toujours enveloppé et peu mobile, il était parti en quête de cet afflux d’adrénaline tant convoité. Et dans ce contexte, si le stress n’est pas paralysant, les sens en alerte permettent d’en ressortir grandi. Il jouait un peu de sa vie.
En réalité, pour ce cas précis, le concept reposait sur l’imaginaire. La vachette n’avait pas la capacité de blesser gravement. Celui qui tombait ou se faisait percuter voyait simplement l’animal passer ses nerfs à coups de tête sur lui pendant quelques secondes, le temps que d’autres viennent faire diversion pour le sauver. Il fallait se protéger et attendre. Dans de très rares cas, des dérapages malvenus pouvaient survenir. Des histoires de coups de cornes et de sabots se propageaient ici et là, évoquant la perte d’un œil ou d’un précieux testicule.
Autrement, la rue Émile Savary était le théâtre principal des hostilités. Le célèbre taureau-piscine était réservé aux petits. Que celui qui a inventé ce jeu soit décoré, c’était du divertissement à l’état pur. Les enfants avaient pour mission de faire traverser une piscine gonflable à l’inévitable vachette. Certains s’amusaient à la défier en espérant qu’elle les suivrait dans leurs courses à travers le bassin, sinon, il fallait rester au bord de l’eau, attendant qu’elle se décide à charger. Pas totalement sûrs de nous, mes sœurs et moi options pour la seconde méthode. Certes, il y avait une pointe de stress, mais elle rendait les rires d’autant plus délicieux. Une fois la mission accomplie, nous nous retrouvions à quatre pattes dans l’eau afin de récupérer les pièces de monnaie volontairement dispersées. En quête de richesse, nous convoitions surtout celles de dix francs.
Pour les plus grands, c’était l’abrivado. Il s’agissait de la représentation de la conduite des taureaux, depuis les pâturages jusqu’aux arènes, sous la surveillance des gardians. Concrètement, un camion était garé près de la poste, avec quelques bêtes à son bord. Toute l’énergie des bovins en plein bouillonnement transparaissait à travers le véhicule. Dès lors que les portes s’ouvraient, impossible de faire marche arrière. Les manadiers, sur leurs Camarguais au galop, encadraient la remontée de la rue sablée spécialement aménagée pour l’occasion. La puissance dégagée par le cortège était impressionnante. Du point de vue du spectateur, le bon déroulement des opérations relevait du miracle. Malgré tout, c’étaient des professionnels, contrairement aux jeunes volontaires chargés d’arrêter les taureaux. À cinq ou six, répartis sur les parties critiques de son corps, ces derniers tentaient de maitriser le bovin indompté. Les deux premiers s’agrippaient à son cou, les autres ceinturaient ses flancs. Ils avaient beau peser de tout leur poids, leurs pieds continuer de glisser sur le sol. Finalement, après de longues secondes, la force phénoménale de l’animal ne suffisait plus à remporter l’affrontement. Un combat interespèce fascinant à observer, même si le consentement de la bête restait tout sauf manifeste. Un divertissement créé par l’homme, pour l’homme.
Cependant, la nature vengeresse du destin, elle, ne restait pas silencieuse. J’étais une fois de plus, sur le point de relativiser la récurrence des tragédies, mais, par curiosité, je me suis renseigné sur les accidents survenus dans les environs. Entre l’hommage à un défunt, le taureau désorienté qui se jette dans le vide et l’adolescent de treize ans percuté de plein fouet, le tout en moins de cinq ans et sans même compter les nombreux quasi-drames, je vais m’abstenir.
En ce qui nous concerne, des barrières avaient été installées pour ériger une arène entre la cantine et la boulangerie. De grands panneaux de barreaux métalliques, hauts de deux mètres et espacés d’une quarantaine de centimètres, étaient attachés ensemble pour former un carré. Enfin, cela ne couvrait que trois côtés, le bâtiment de la cantine venant naturellement compléter le reste. Au milieu, se trouvait une cage permettant aux participants de se réfugier. C’était un peu l’équivalent du camp lorsqu’on jouait au loup.
La foule était au rendez-vous. Dans l’espoir de dénicher une bonne place, je me faufilais à travers la masse, saluant mes copains du foot que je croisais sur mon chemin. Certains étaient même perchés au sommet des murs, car le passage laissé entre ceux-ci et les barrières était étriqué.
Lorsque l’imposant taureau rentra dans l’arène de fortune, les jeunes commencèrent leur harcèlement habituel, sur un animal qui paraissait particulièrement nerveux. Puis, ce fut en voyant son reflet d’un noir profond dans les vitres fumées de la cantine que les problèmes débutèrent. Il décida d’exprimer sa folie en les percutant à deux reprises. Les fissures témoignant de l’impact étaient impressionnantes. Soudainement, l’ambiance changea. Nous étions stupéfaits face à cette démonstration de puissance. Immobile au centre de l’arène, malgré tous les regards convergent, c’était bien lui qui nous dévisageait. Il était incontestablement le dominant de la place. Plus personne n’osait sortir de l’abri pour le défier. Sentant le vent tourner, il fonça sur les barrières protégeant les spectateurs. Manque de chance, elles choisirent de céder. Après deux charges pleines d’abnégation, il fit sauter l’une des barrières à ma gauche. Immédiatement après les cris de détresse, un mouvement de foule se déclencha. Mon dernier coup d’œil en arrière me permit de la voir s’engouffrer dans la brèche qu’il venait de créer grâce à ses multiples ruades. Heureusement, le terrain était exigu et nous étions proches de la sortie. Ma sœur décida de traverser seule dans l’autre sens pour se réfugier à son opposé, tandis qu’avec ma mère, nous regagnions la rue principale. Aussitôt, les gardians accoururent à la rescousse pour maitriser l’animal. Après un long moment de flottement, j’essayais de capter des bribes de discussion. Les pompiers arrivaient pour prendre en charge les huit blessés, dont la femme enceinte, qui risquait de perdre son bébé.
Hors fête d’Escalès, l’anniversaire de Manon Guérin est un souvenir que je chéris profondément. Pour célébrer leurs quarante ans, elle s’était jointe à deux autres femmes et ensemble, elles avaient privatisé une manade — une idée à la fois originale et mémorable. La proximité avec les coulisses d’un tel spectacle avait quelque chose de rare et d’appréciable.
Sans grand délai, un accident s’est produit, mais peut-on vraiment parler d’événement fortuit, dans ce cas précis ? Un homme, visiblement éméché, avait décidé de tenter sa chance dans l’arène. Une prise d’initiative en totale contradiction avec les revendications alentour. Il n’avait, de surcroît, pas jugé utile de faire preuve de retenue, se hissant debout sur un tonneau. Déjà peu stable sur ses deux jambes, sa situation ne fit qu’empirer lorsque la vachette, d’un coup sec, dégomma violemment son piédestal. Il fut projeté au sol avec une brutalité remarquable, pour en ressortir avec, pour toute récompense, deux bras cassés. Nouvelles sirènes de pompiers, et fin de ses festivités. Une âme charitable dut même se dévouer pour rapatrier sa voiture.
Après cet incident, direction les immenses poêles à paella pour nous restaurer. C’est Sylvie Mercier qui m’avait servi et, après que je lui eus précisé que je n’aimais ni les moules ni les crevettes, elle me fit gentiment comprendre que j’étais pénible. Comme à mon habitude, je trainais avec Elias, et nous avions recruté deux autres petits pour improviser une bataille de pommes de pin dans la forêt. Hélas, l’un d’eux en reçut une en pleine tête. L’arcade en sang, la confrontation s’acheva aussi rapidement qu’elle avait commencé.
Nous nous étions donc rabattus sur ce que nous savions faire de mieux pour passer le temps, jouer au foot. À un détail près, le terrain était une arène. Assurément l’un de mes plus beaux souvenirs liés au football, et à la vie en général. Peu de réminiscences peuvent prétendre s’asseoir à sa table. Amoureux inconditionnel du drible, j’avais martyrisé mon faux cousin toute la soirée. Et les quelques grands qui osaient s’aventurer sous la lumière des projecteurs, amusés par le concept, repartaient avec le même tarif. J’étais exactement là où je devais être.
Vers trois heures du matin, ma mère était venue me chercher pour m’informer que nous allions partir. Une fois n’est pas coutume, c’est mon père que nous attendions. Il n’était pas pressé, car l’une de ses musiques favorites résonnait dans les airs : L’aventurier d’Indochine. Transcendé par la mélodie, et un peu par l’alcool, il avait sauté sur le premier banc à sa portée. Désormais en position de surfeur, le bras tendu devant lui, il m’avait déclaré : « Bob Morane, c’est trop bon ça ». Face à cette énergie de vivre, mon tenace sentiment de honte m’avait contraint à jouer les rabat-joie : « Arrête ! vas-y descends, on y va ».
Finalement à la maison, il était temps de me laver. Mes jambes étaient engourdies, et après avoir retiré le sable de mes baskets, je devais me débarrasser de celui qui imprégnait mes membres. L’eau rougie contrastait avec le blanc de notre bac de douche. Épuisé, mais apaisé, je regardais la lune par la fenêtre ouverte, conscient que cette soirée me marquerait pour toujours. Gracias a la vida, señorita Parra.
Comme convenu, il ne reste que le dernier maillon de la chaîne, la fête foraine. Bien que l’atmosphère entourant la fête prenne tout son sens à la nuit tombée, petits, nous commencions par des fins d’après-midi. Mon premier souvenir s’y déroule dans un manège pour enfants, ceux où l’on peut prendre place à bord d’un camion de pompier ou à dos de licorne. Moi, j’étais au volant d’une décapotable rouge deux places. Quant au forain qui dirigeait le manège, il agitait un pompon à frange au-dessus de nos têtes lorsqu’on passait à sa hauteur. Après une première tentative infructueuse, j’avais masqué mes intentions jusqu’au dernier moment, pour mieux le surprendre. Mais cette boule de tissu en mains, je n’étais pas pleinement satisfait. Il fallait que j’essaie les attractions des grands.
C’est ainsi que j’ai découvert mon stand préféré, celui du tir à la carabine. Toutes ces armes, soigneusement alignées sur le comptoir, semblaient abonder dans mon sens. Elles donnaient l’impression de n’attendre que moi. Accessoirement, mon père aussi, puisqu’il était préposé au rechargement. Le plomb en place, je prenais ma position de tir. J’essayais de maintenir une stabilité approximative, le temps de déceler si un schéma se répétait dans la trajectoire des ballons que je pointais. En fin de compte, l’inéluctable instant où je devais me résigner à suivre mon instinct prenait forme dans mon viseur, et j’appuyais sur la queue de détente. « Bam ! Et de un ! ». Une satisfaction immédiate, qui se traduisait par un échange de regards empli de fierté avec mon père. Je lui tendais à nouveau la carabine.
Au fil des ans, ce forain aux grandes moustaches coiffées d’un chapeau en cuir m’a vu dévaliser ses nouveaux arrivages de statuettes de dauphins. Drôle de choix, il est vrai, mais ces trophées en résine bleu et blanc symbolisaient ma réussite renouvelée. Mes prises de chasse. Ce n’est qu’à mon adolescence, lorsqu’un ami pénétra pour la première fois dans ma chambre, que je pris conscience que cette étagère était de mauvais goût. Pour moi, il était légitime d’avoir une collection de dauphins, surtout s’ils venaient du tir à la carabine.
Cette lubie reléguée au passé, je repris ma route jusqu’au stand suivant, celui des machines à sous. Je replongeai instantanément. Maitrisant désormais les armes, je désirai amasser un tas d’or. Inutile de préciser que ma raison s’était perdue dans les creux des monticules de pièces, en équilibre au bord du précipice. Mon seau de jetons en main, mes yeux étaient rivés sur le mouvement perpétuel des machines, qui se calait sur le ressac infini de mes pensées. J’avais tout de même dépensé près de cinquante euros pour repartir avec un walkman désuet. Conformément aux attentes, mes parents m’avaient interdit de m’en approcher les années suivantes : « Ok, tu peux aller à la fête, mais tu ne vas pas tout perdre dans les machines à sous ».
Sans argent et sans passion, il ne me restait plus qu’à m’amuser de ma situation. L’attraction qui mettait tous les membres de la famille d’accord était le Palais du Rire. En général, il s’agissait même de notre tout premier manège de l’année. L’entrée coûtait 3,50 euros après le passage des francs à la monnaie commune, ce qui ne manquait pas de faire râler le trésorier en chef. Avec trois enfants, le prix de la soirée grimpait rapidement. À l’intérieur, les obstacles s’apprivoisaient à force de pratique. Le pschitt d’air de la rampe en alu qui soulevait les jupes des filles, était anticipé, et la roue de hamster ne nous projetait plus inlassablement les uns sur les autres.
Dans le prolongement était situé un poids lourd de la fête, les jeux d’arcades. Pour accéder à cette vaste plateforme, il fallait d’abord se hisser sur les plaques métalliques déployées en guise de palier. Une fois dedans, nous pouvions sillonner entre les différents objets de divertissements. La satisfaction visuelle était la première des récompenses. Un coin était réservé aux simulateurs de courses, dans lesquels on pouvait prendre place au volant d’une sportive virtuelle ou sur une moto miniature. D’ordinaire, la raison principale de ma venue résidait plutôt dans la présence des tables d’air-hockey. J’ai toujours apprécié ce jeu, dont le doux claquement métallique du palet accompagnant les buts, berçait mes soirées.
À ses côtés, les sièges valsaient. Dès que la sirène retentissait, les rotations s’enchaînaient sur un plan incliné. Dans un sens, puis dans l’autre, les fauteuils dispersés les cris aux quatre coins de la fête. Thibaut, le nouvel ami de ma sœur fraîchement rencontré au collège, s’y essayait pour la première fois. Et après de longues minutes de supplices, tout pâle, il avait vomi derrière les caravanes.
Plus au centre, accessible de tous les côtés, demeuraient les autotamponneuses. Que ce soit pour les petits ou pour les grands, cet incontournable occupait une place de choix dans le cœur des participants. Quand le signal nous était donné, nous nous précipitions sur la piste à la poursuite de la voiture miniature que nous avions repérée au préalable. Une fois au volant, le but était de faire le plus de dégâts possible aux autres usagers des autos électriques, quitte à délaisser leurs flancs pour se porter vers l’arrière de nos concurrents, déjà immobilisés par un carambolage. Le coup était vicieux, mais particulièrement efficace. De façon inédite, il m’est arrivé de partager une voiturette avec Jeanne Guérin. Nos parents nous y avaient obligés, et gênés, nous regardions chacun de notre côté, sans dire un mot. Moi à gauche, elle à droite. Des mines trop sérieuses pour profiter du moment présent.
Je ne me suis risqué qu’à une seule reprise dans celles réservées aux grands, où les chocs étaient plus violents et les rencontres avec des fadas plus fréquentes. Avec habileté, je m’étais fait accompagner d’un adulte afin de tempérer les impacts. En revanche, quand le décérébré du village, culminant à deux mètres de haut et avoisinant le quintal te ciblait, rien ne pouvait te sauver. De plus, il se sentait obligé d’amplifier les dégâts d’un coup de reins de dernière seconde. L’un des participants s’était tapé la tête contre son volant et était ressorti le nez en sang.
Ici et là étaient éparpillées des machines à coups de poing. Un concept intéressant pour occuper quelques minutes, mais surement pas des heures, comme le faisaient certains groupes de jeunes. Assis sur leur scooter, ils accaparaient la machine qui mesurait leur force naissante. Dans le même esprit, les machines à pinces ne voyaient pas la couleur de mes euros. Les récompenses de basse facture ne me séduisaient pas, et la rumeur courait que le mécanisme était truqué.
De l’autre côté, sur le parking du stade, trônait la grande scène où se produisaient danseurs et chanteurs. C’était le coin des parents. Des tables accueillaient ceux qui souhaitaient manger, et surtout boire. Certains parmi eux finissaient même sur la piste de danse.
Le récit des réjouissances m’évoque inévitablement les soirs où l’on dînait tous chez les Mercier, qui habitaient à seulement quelques encablures de là. Ce « tous » signifiait « Le RARE », le groupe d’amis de mes parents et leurs enfants respectifs. Excités en fin de repas, nous poussions pour nous rendre à la fête sans eux, uniquement entre petits. Le plus souvent, les adultes nous rejoignaient une fois la nuit tombée.
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