Chapitre 27 : Chasse au Mastrylith

6 minutes de lecture

 Gothzul avait déjà recruté un maître des animaux pour avoir des infos sur le mastrylith et celui-ci devait nous retrouver au Bac de Drelyn trois jours plus tard.

 Les maîtres des animaux sont des adeptes assez particuliers qui préfèrent travailler avec des animaux et apprendre d’eux plutôt que le faire avec d’autres donneurs-de-noms. Ils recherchent la force de volonté et l’indépendance qui fait souvent défaut aux citadins. Ils détestent les villes grouillantes et sales où les habitants considèrent que tout ce qu’ils touchent leur appartient. Je partageais certaines de leurs convictions mais je conservais une certaine foi dans les donneurs-de-noms.

 Le jour dit, nous arrivâmes dans le village où nous retrouvâmes l’adepte en question, ainsi que bon nombre de villageois de notre connaissance. Nous en profitâmes pour organiser notre traditionnelle fiesta de début de mission au Vieux Pont. L’auberge avait survécu au passage de la horde ork, même si de grosses réparations avaient été nécessaires. Une fois encore, la bière coula à flots et les habitués se joignirent à nous dans une ambiance des plus festives, comme pour exorciser les moments sombres qui avaient menacés ces lieux.


*  *


 Le lendemain, à l’aurore, la fine équipe était prête, bien que l’impatience de la chasse ne fût pas partagée par tous. À peine avions quitté l’agglomération que nous fûmes rattrapés par un petit groupe de miliciens et de villageois équipés à la hâte qui souhaitaient se joindre à nous pour débarrasser la région du mastrylith. Ils hésitaient à y aller seuls mais quand ils avaient entendu dire que les « héros » de Brindol étaient là, ils s’étaient dit que la chose devenait tout de suite plus faisable.

 Mais qu’est-ce qu’ils font quand nous ne sommes pas là ? Ils voulaient partager notre gloire mais ils risquaient surtout de partager nos blessures. D’un autre côté, j’aurais été mal placé de les critiquer puisque j’avais fait de même il y avait quelques années en mettant mes pas dans la piste des Téméraires d’Urupa.

 La piste du mastodonte était facile à suivre et je n’avais pas besoin de faire usage de mes talents d’éclaireur. Le pachyderme de plusieurs tonnes laissait des traces évidentes de son passage. Cela me changeait d’un tonduy. C’était même trop facile car il semblait tracer tout droit d’un point à un autre, méprisant et piétinant tout ce qui se trouvait entre, sans aucun respect pour son environnement. Le comportement était intriguant pour un animal.

 Quelques heures plus tard d’une marche sans incident, nous arrivâmes sur les lieux d’une attaque assez récente : une ferme ravagée où nous découvrîmes plusieurs de ses occupants décédés, la plupart par piétinement. Une fois encore, l’attitude m’étonna et j’en fis part au maître des animaux, un vieil ork dénommé Calim. Ce dernier était aussi perplexe que moi. Un mastrylith, comme beaucoup d’animaux, pouvait se montrer dangereux s’il était chassé ou dérangé sur son territoire, toutefois il était rare de voir une attaque aussi sauvage, sans raison apparente.

 Bien que les corps aient commencé à se décomposer et avaient déjà attiré différents animaux et insectes pour le macabre festin, je remarquai que l’un d’entre eux portait des blessures étranges : il avait été grignoté jusqu’à l’os et des trous y étaient pratiqués pour y sucer la moelle. Je signalai ma découverte aux autres membres du groupe.

 So’tek se montra particulièrement intrigué par ce fait et il ne tarda pas à identifier la présence probable d’un rat-parasite. Le nécromancien, volontiers pédagogue, nous expliqua que cette créature, semblable à un rat, disposait d’une glande qui secrétait une substance dont l’odeur étourdissait ceux qui la respiraient. Le rat pouvait ensuite prendre le contrôle de sa victime en se connectant à son système nerveux grâce à une excroissance. Et cette charmante saloperie adorait sucer la moelle des os.

 Bref, il semblait que le mastrylith n’était sans doute pas notre vrai problème.


*  *


 Après un campement nocturne sans fait notable, nous repartîmes sur ses traces au petit matin. Je repris mon rôle d’éclaireur alors que la piste se faisait de plus en plus fraîche et évidente. Comme toujours, la créature semblait tracer sa route sans trop se préoccuper des obstacles naturels. Les arbustes couchés et les bosquets aplatis balisaient son passage.

 Finalement, nous parvînmes dans une clairière où se trouvait. Le bestiau était vraiment massif mais ne semblait pas en excellente condition. Sa fourrure était sale et emmêlée, de multiples brindilles et feuilles s’y étaient prises au fil de ses déplacements et la créature n’avait visiblement fait aucun effort d’hygiène depuis bien longtemps. Ce qui nous confortait dans l’hypothèse de la présence d’un rat-parasite.

 L’animal paissait tranquillement au pied d’un bosquet. Enfin, tranquillement jusqu’à ce qu’il nous aperçoive car il se tourna brusquement dans notre direction et chargea immédiatement le groupe, sans que nous ayons le temps d’organiser le moindre plan d’attaque.

 La charge nous pris au dépourvu et traversa nos lignes qui s’écartèrent avec empressement, mais So’tek et un milicien furent touchés. Le groupe se reforma rapidement autour de bestiole et la harcela de toutes parts pour éviter qu’elle ne prépare une autre charge.

 Thregaz parvint à s’agripper à ses longs poils et à l’escalader. Toutefois, à peine arrivé sur son dos, il retomba au sol, rendu inconscient par la substance étourdissante émise par la créature cachée dans les longs poils du mastrylith.

 Gothzul, le plus courageux et le mieux protégé, énerva la bestiole pour attirer son attention et éviter qu’elle ne piétine notre ami troll sans défense. Les autres l’assistèrent de leur mieux. Il ne fallait pas non plus perdre de vue que la mission était la capture - et pas la mort - du mastrylith.

 De mon côté, j’essayai d’escalader un arbre pour prendre de la hauteur afin d’apercevoir le rat-parasite et le déloger à l’aide de mon arbalète. Toutefois, les arbres du coin étaient peu adaptés face à mes projets et mes tentatives se soldèrent par des échecs répétés. J’abandonnai bientôt mon projet pour me tourner à mon tour vers le mastrylith. Je pris de l’élan et chargea la créature puis sautai pour m’accrocher à quelque chose et l’escalader. La première tentative fut un échec et je me serai fait piétiner sans un roulé-boulé désespéré. Je me remis sur pieds et fis immédiatement un second essai et qui fut payant.

 Je parvins sur le dos de la créature par le côté sous le vent et j’aperçus le rat-parasite, à moitié dissimulé dans les poils à la base du cou. Je sortis rapidement mon épée courte et frappai. Cependant, le coup, porté trop faiblement à cause de ma position scabreuse, ne fit que le blesser. Ensuite, je perçu une étrange odeur puis mon corps décida de ne plus m’obéir et je chus à mon tour, vaguement conscient du combat autour de moi, mais sans l’incapacité totale de faire le moindre geste.

 Je vécu quelques instants de pure frayeur en percevant le mouvement des monstrueuses pattes de l’animal autour de moi, tout en étant parfaitement incapable du moindre mouvement. Ma brève carrière aurait pu s’arrêter brutalement ce jour-là.

 Finalement, Jeb utilisa un sortilège pour s’élever et tua le parasite grâce à un sort bien ajusté. On aurait pu commencer par là…

 Nous étions victorieux une fois de plus et nous n’avions que quelques blessés dans le groupe. Le maître des animaux put facilement calmer le mastrylith dès lors que ce dernier n’était plus sous l’influence du parasite. Il diagnostiqua qu’il faudrait tout de même une semaine au mastodonte pour guérir des multiples blessures qu’il avait reçu. Le groupe n’y était pas allé avec le dos de la cuillère et n’était pas passé loin de le tuer. Et nous de foirer la mission !

 So’Tek était revenu à lui et semblait se remettre assez bien de ses blessures. Thregaz et moi-même n’étions que légèrement commotionnés par la chute et il n’y paraîtrait plus après une bonne nuit de sommeil.


*  *


 Le lendemain, en prenant notre petit-déjeuner, nous fîmes de nouveaux projets. Comme nous nous voyions mal rester une semaine assis sur notre cul à attendre que le gros truc veuille bien guérir, et que Fort Vräss n’était pas très loin, nous décidâmes de commencer l’exploration des abords du fort en ruines par la région située à l’est, jusqu’au clan des Cornes Tordues.

 Nous allâmes échanger avec Calim et les miliciens, ravis du succès de la mission. Ces derniers assureraient la sécurité de l’endroit pendant que le mastrylith reprendrait des forces, veillé par le maitre des animaux.

 Peu après, nous reprenions notre aventure. Cette fois, c’était du repérage de zone et une visite de courtoisie à nos voisins trolls.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Silverjack ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0