26. Soldat ou rebelle ?

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Les rues de la basse ville étaient animées de diverses façons : les marchés aux multiples couleurs, les voisins discutant entre eux, les rires des enfants, le soleil qui réchauffait la place. Onyx n’avait jamais vu un tel spectacle, il resta de nombreuses fois immobiles à observer ce qui l’entourait, sous le regard affectueux d’Aggalaki.

Certains mets présents sur les étals de marchands lui rappelèrent le souk de Tenerice et ce qu’il avait l’habitude d’acheter pour les repas de famille, avec sa mère. Elle devait s’inquiéter de son départ, lui qui était parti comme un voleur. Il le regrettait. La tête baissée et le visage grave, il se perdit dans ses pensées une nouvelle fois. Il en fut sorti par son compagnon de route qui poussa son dos de son museau.

— As-tu pris une décision, daghir ?

— Pas encore…

L’équidé examina les étales et secoua la tête.

— Je commence à avoir faim, pourquoi ne pas trouver quelque chose à grignoter.

— Bonne idée.

Ils poursuivirent leurs routes à travers les rues en quête de friandises. Sarshall restait couché sur le train arrière d’Aggalaki, qui s’était très rapidement habitué à la présence du félin sur son postérieur.

— Si tu as gardé le sac de mon ancien cavalier, tu y trouveras une bourse. Utilise-la à ta guise.

Onyx ne répondit rien et piocha ladite bourse en question.

— Tu as eu plusieurs propriétaires avant moi ? Ou était-ce… hm…

— Nombreux sont ceux trop prétentieux qui ont essayé de me dompter, peu y sont parvenus. Et les vainqueurs utilisaient la magie pour y arriver.

— La magie ?

— Certains m’ont contraint par la force et m’ont séparé de tout ce que je connaissais.

— Je suis désolé…

— Ne le sois pas, daghir. Tu m’as sauvé et je t’en serais éternellement reconnaissant.

Le garçon jeta un coup d’œil à un marchand de fruits et sourit.

— Qu’aimerais-tu manger ?

— Hm… Des graines de Malana, ce sont mes préférés.

Son visage se crispa. Il regarda sa monture, les dents serrées, les yeux figer, une vague de souvenir surgissant de nulle part. Cette simple phrase remémorait les merveilleux moments passés avec sa grand-mère. Une once de tristesse tenta de s’emparer de lui, mais il l’a chassa bien vite en discutant avec le commerçant.

— Et voilà, de grosse graine de Malana !

— Merci daghir.

Le meocs piocha dans le sac avec appétit, faisant sourire son cavalier. Ils poursuivirent leurs routes à travers la ville-basse et se faufilèrent jusqu’au second rempart.


*


— Comment s’appelle ton ami déjà ?

— Tybalt. Tybalt Sutim, le grand frère de mon meilleur ami. Il a quitté Tenerice il y a quelques années pour entrer dans la garde de la capitale.

Le jeune homme réajusta son chèche sur le haut de sa tête tandis qu’ils s’avançaient vers l’entrée de la haute-ville.

— Je sais qu’il envoie souvent de ses nouvelles à Tenerice, mais je n’ai aucune idée de son poste au sein de la garde ni où le trouver.

— La haute ville est déjà une bonne piste, puisque la plupart des gardes si trouvent.

Ils s’arrêtèrent devant un groupe armé, faisant hésiter Onyx. Aggalaki poussa légèrement son dos de son museau pour l’encourager.

— … Excusez-moi.

Deux soldats se tournèrent vers lui. Ce n’était pas la première fois qu’il se retrouvait devant des soldats ; les remparts de Tenerice étaient gardés par des archers, mais ils étaient beaucoup moins équipés que ceux de la capitale. Les armures argentées qui recouvraient le haut de leur corps brillaient face aux rayons du jour, et les tissus flamboyants qui recouvraient le reste de leurs peaux les rendaient imposants.

— Que veux-tu petit ?

— Je… je cherche quelqu’un. Un soldat de Tenerice, Tybalt Sutim.

Les coéquipiers s’échangèrent un regard intrigué avant de répondre.

— Tybalt n’est plus soldat. Il a été radié de la garde il y a un an.

— Quoi ?!

La stupéfaction pouvait s’entendre dans la voix d’Onyx, les yeux écarquillés et la bouche grande ouverte. Tybalt, radié de la garde ! Impossible ! Il y a un mois encore, il envoyait des messages à Sona en décrivant sa vie de soldat. D’innombrables questions se chamboulèrent dans sa tête tandis qu’un des gardes l’interpella.

— Tu peux le trouver à l’extrémité est de la basse-ville. Mais ce n’est pas un endroit très fréquentable, tu ferais mieux de faire attention à toi.

Incertain et légèrement perdu, le garçon les remercia et fit demi-tour.

— Direction la basse-ville alors.

Alors qu’il poursuivit sa route, deux ombres se dessinèrent dans une rue voisine. Leurs regards ne quittèrent pas le cavalier jusqu’à sa sortie de la ville haute. Ils le suivirent silencieusement, serpentant entre les passants, dissimulant leurs présences tels des fantômes.

Il n’était cependant pas dupe ; les oreilles de l’équidé étaient dirigées dans leur direction, peu importe où ils se situaient autour du garçon. Les Meocs avaient la réputation de protéger leur cavalier du moindre danger, et celui-ci semblait prendre cette réputation à la lettre. L’inconnu disparu définitivement au détour d’une rue, alertant Aggalaki. Onyx finit par prendre conscience de la situation et en chercha une échappatoire. Demander à de parfait inconnu des renseignements sur Tybalt n’était peut-être pas une si bonne idée.

— Que fait-on, daghir ? murmura sa monture, la tête baisser.

— Je réfléchis.

Il scanna les alentours, quelques idées lui vinrent à l’esprit, mais il devait abandonner l’équidé pour ce faire. Il s’arrêta devant l’étale d’une marchande d’épices et approcha son visage du meocs.

— Je vais faire diversion et m’enfuir vers les toits. Par de l’autre côté et ne te soucie pas de moi, j’enverrais Sarshall te retrouver une fois à l’abri.

— Tu es sûr de toi, daghir ?

— Ne t’en fais pas, je l’ai déjà fait.

La monture n’ajouta rien et se prépara pour leurs parades. Onyx n’était pas fier de ce qu’il comptait faire, mais c’était le seul moyen qu’il avait de fuir ses poursuivants. Il enroula son chèche autour de son visage, ne laissant entrevoir que ses yeux, et poussa un hurlement en frappant dans l’un des pieds de l’étale, faisant chuter les sceaux d’épices et créa un brouillard coloré.

L’équidé partit au galop tandis que son cavalier déguerpit au plus vite sous les cris de colère de la commerçantes et les aboiements des soldats, spectateurs de son action. Il ne perdit pas de temps et escalada un muret, puis le rebord d’une toiture et décampa. Il sauta de toit en toit, son félin à ses trousses. Il redescendit dans une ruelle et serpenta entre des habitations avant de s’arrêter au coin d’un mur.

La respiration courte, il entendit les cris des soldats à sa recherche et aperçu l’ombre de deux d’entre eux courir dans la rue principale. Les passants curieux se regroupaient, ce qui lui permis de changer de cachette et de parcourir une certaine distance pour semer les gardes. Il se cacha dans un recoin, inspectant les alentours, incertain de sa sécurité.

Des éclats de voix le figèrent. Dissimuler dans la pénombre, il scruta les deux hommes qui venaient d’apparaitre au bout de la ruelle. Ce n’était ni des soldats ni des habitants de la capitale. Leurs tenues ne portaient aucun signe distinctif des quatre royaumes et l’air menaçant qui s’émanait de leurs visages glaça le sang du garçon. Ils ressemblaient plus à des fantômes qu’à des êtres vivants.

— Tu es certain que c’est ce gamin qui a le grimoire ?

— Mallius assure qu’il l’a croisé à Rakugaki, et ce gosse ressemblait à sa description.

— Anatga ! Ce serpent va nous faire tourner en rond dans ce trou à rat ! Il nous suffit juste d’aller prendre cette satané pierre et de déguerpir !

— Du calme Seiirin, nous allons le trouver. Mais sans le grimoire, il nous est impossible de prendre la pierre. Et une fois entre nos mains, nous pourrons en faire ce que nous voudrons.

La voix malicieuse de l’inconnu effraya le jeune homme. Sa respiration s’était coupée et ses yeux restèrent figés sur les deux silhouettes qui s’éloignait de lui. Ces personnes en avaient après quelqu’un, et il se pourrait bien qu’il s’agisse de lui. Il essaya de reculer le plus lentement possible pour fuir cet endroit, mais il marcha malencontreusement sur la queue de son chat, qui ne pu retenir un miaulement de douleur, attirant l’attention des deux étrangers.

— T’a entendu ?

— Hm.

Les inconnus rebroussèrent chemins et se rapprochèrent de la provenance de ce bruit. Onyx paniqua, il se redressa et tenta de fuir dans une ruelle adjacente au plus vite. Mais une main s’agrippa à son bras, le tirant en arrière avec force. Une seconde main se posa sur sa bouche alors que quelqu’un le maintenait silencieusement dans l’ombre.

— Chut. Ne crains rien.

D’abord avec l’idée de se débattre, le jeune homme s’arrêta en reconnaissant ce timbre de voix.

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