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En revenant vers l’hôtel, ils parlèrent protections. Codou préférait faire le sexe sans protection. C’est ainsi qu’il avait découvert ce plaisir. Il avait treize ans alors et c’était son meilleur ami qui l’avait pénétré par jeux. Il lui raconta cette première fois, soumis à jamais à ce garçon. C’était la tradition, même s’il ne le voyait plus. L’autre pouvait venir le réclamer et il partirait alors pour toujours avec lui. Sauf s’il était répudié. La deuxième fois, ils avaient été trois à le maintenir pour le forcer. Il ne s’était pas débattu pour ne pas avoir plus mal. Gilles sentit que cela avait été un moment important, un mélange d’horreur et de satisfaction. Il se demanda si ce viol n’était pas à l’origine de la mise à disposition de son corps, car les dates étaient proches.

Il avait commencé ainsi, avant que le médecin lui apprenne les dangers. Il continuait à accepter de monter à cru, en demandant le double, car il aimait vraiment. Christian l’avait très bien payé. Il lui faisait mal, et il l’avait attaché pour qu’il ne se débatte pas, et lui avait mis quelque chose dans la bouche pour qu’il ne crie pas.

Tant pis pour les maladies ! affirma-t-il. Il avait déjà attrapé des sales trucs. Les médecins du dispensaire savaient guérir ces choses, car plein de jeunes filles en avaient ici. Le plus embêtant était qu’il fallait arrêter de travailler et acheter les médicaments, tout en continuant de payer le cousin. C’est pour ça qu’il n’avait pas mis beaucoup d’argent de côté. À peine de quoi vivre deux ans, lui et sa famille, à condition d’arrêter aussi les études de Khadija.

Cela allait changer, se dit Gilles. Et le sida ? Codou lui dit qu’il prenait toujours le médicament pour se protéger. C’était trop grave. Il sentit le scepticisme de son compagnon, car il s’arrêta pour sortir une boîte. Le fond de son sac était réservé aux protections et aux soins. Codou était un garçon sérieux.

Après un moment de silence, presque inaudible à cause des vagues, Codou avoua que, cette nuit, il se s’était senti complètement sa femme. Gilles entendit le plaisir de cet aveu. Il lui raconta sa sensation du matin, identique, ajoutant qu’il désirait aussi être entièrement sa femme. Dès leur arrivée, Gilles se livra, heureux de ce déchirement partagé. C’était encore un nouveau serment d’amour entre eux.

Leur dernière semaine fut magnifique, Codou acceptant avec naturel la générosité de son ami, limitant son activité pour s’offrir à lui et lui prodiguer le maximum de plaisirs. Le dernier jour, Gilles fit seul l’aller-retour pour aller saluer sa famille d’adoption. Samsidine lui montra une affection touchante, la mère, une confiance absolue. Seule Khadija restait distante. Il revint par la route, se mêlant à cette population, se trompant presque volontairement pour rester plongé dans cette humanité qui était devenue la sienne.

Leurs adieux furent brefs. Dans la cohue du chargement, ils s’embrassèrent sur la bouche, longuement, dans l’indifférence générale, leurs mains flattant ces parties qui allaient se séparer pour plusieurs semaines.

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