LE RETOUR DE NOE
Cinq ans s’étaient écoulés.
Merveille avait désormais 23 ans. Elle vivait à Yaoundé avec son fils, Emmanuel, un petit garçon de 4 ans au sourire lumineux, curieux comme pas deux. Elle travaillait comme assistante sociale dans une association de défense des droits des femmes. Elle aidait, écoutait, conseillait… exactement ce qu’elle aurait voulu avoir à 18 ans.
Clarisse, toujours présente, s'était reconstruite elle aussi. Plus soudées que jamais, elles partageaient tout. Merveille avait grandi dans l’épreuve, mais elle s’était relevée, plus forte, plus femme.
Et Noé ?
Il était parti trois mois après la naissance d’Emmanuel. Un projet d’étude en Europe, une bourse inespérée, un rêve qu’il poursuivait depuis longtemps. Il lui avait promis de rester en contact. Au début, ils s’écrivaient, s’appelaient. Puis les messages se firent plus rares. Jusqu’au silence total.
Merveille l’attendit. Puis elle comprit. Peut-être qu’il ne voulait pas d’une femme déjà marquée. Peut-être qu’il n’avait pas supporté le poids de cette histoire. Elle ne lui en voulait pas. Elle ne l’attendait plus.
Mais elle ne l’avait jamais oublié.
Un soir de juin, alors qu’elle fermait le portail de l’association après une journée chargée, elle le vit. Là. Sur le trottoir d’en face. Noé.
Il avait changé. Plus grand, plus assuré. Merveille sentit son cœur s’emballer, mais elle garda son calme. Il s’approcha, un bouquet de lys blancs à la main.
— Salut, Merveille.
— Noé...
Le silence dura quelques secondes. Puis il parla, d’un souffle :
— Je n’ai pas d’excuse valable. J’ai eu peur de te freiner, peur de ne pas être à la hauteur. J’ai fuis. Je suis un idiot. Mais pas un lâche. Pas cette fois.
Elle ne répondit pas. Trop d’émotions, trop de souvenirs.
Le lendemain, il vint chez elle. Emmanuel jouait au salon. Noé s’agenouilla doucement devant lui.
— Bonjour, petit homme. Je m'appelle Noé.
— Moi, c’est Emmanuel. Tu connais maman ?
Merveille détourna les yeux. Les larmes menaçaient.
Noé passa plusieurs semaines au pays. Il s’investit dans la vie d’Emmanuel, apprit à connaître Merveille à nouveau, sans précipiter les choses.
Puis, un soir, il l’invita dans le jardin qu’ils fréquentaient autrefois, là où il l’avait embrassée la première fois. Sous la lumière tamisée des lampes solaires, il s’agenouilla.
— Je suis revenu pour toi. Je ne sais pas si je mérite une deuxième chance. Mais je sais que je veux passer ma vie à te prouver que tu peux me refaire confiance. Merveille, veux-tu m’épouser ?
Le cœur de Merveille battait comme aux premiers jours. Elle pensa à tout ce qu’elle avait traversé. Puis elle regarda Noé dans les yeux.
— J’ai appris à vivre sans toi. Mais aujourd’hui, je veux apprendre à vivre avec toi.
Elle tendit la main. Il glissa la bague. Clarisse, qui les observait de loin avec Emmanuel, souriait.
Le passé avait laissé des cicatrices, mais l’amour, lui, n’avait jamais vraiment disparu.
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