Synesthésie
Les mots ne suffisent plus, c'est pauvre.
Parce que ce que je ressens vraiment est un équilibre entre aléatoires.
Je veux peindre avec ma langue, ingurgiter des couleurs, manger de la peinture, boire la vie.
Peindre avec des profondeurs dont vous n'imaginez pas la sensation.
Écrire ne me contient plus, il me faut plus d'espace, je veux me taire et peindre.
Les couleurs, leurs rayonnements dans ma bouche, leurs fondants.
Avaler la sensation dans le paysage des coloris, flirter avec les degrés de coloration.
Mes goûts sont baroques, inhospitaliers et mauvais pour la santé.
Je voudrais déguster les fonds de tableaux.
J'adore m'imaginer manger de la lazulite, boire une image d'absinthe, sucer du girasol, plonger ma main dans du jais liquide.
Je désire m'enivrer d'obsidiennes bleues.
Je rêve de m'abreuver de pierres de lune et de dormir contre l'océan.
De me recouvrir les dents de jade, d'argent et métaux venants de comètes et de galaxies inconnues.
Je souffre de pierre d'aphrodite et de calendriers mayas taillés dans le grès, ma place est hors du temps et loin des paupières, loin d'être.
Je suis assoiffé de journées à la plage, de couleurs sablées, du blanc pénible de manger du sable.
Le monde vit dans ma bouche, je sens la beauté des femmes sur ma langue.
Ma langue est un répertoire de saveurs légendaires, hétérodoxes.
Il faudra de nouveaux mots au français pour décrire les sons que je touche, les aller-retours dans ma bouche du verbe et de l'imagination.
Je lui ai dit qu'elle avait du whisky Cream dans les yeux, que je voulais juste la manger un peu et puis, tout ce chocolat noir dans sa méfiance.
Elle n'en revenait pas.
J'ai la bouche qui succombe aux femmes, je veux y mettre leurs mains et peindre des drames.
C'est l'érection du "je goûte donc je suis ".
Mets ta main dans ma bouche pour que je te ressente.
Je veux être la porte qui s'ouvre entre deux mondes, ma bouche et ton cœur.
Faire l'amour à ton cœur.
Je vais peindre comme Gogh, Monet ou encore Klimt.
(Klimt - Le Baiser 1908-1909)
/Musique recommandée : Ennio Morricone - Cinema Paradiso
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