Grandes sourates du temps et de la décomposition

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À minuit, le vide siège au fond des hommes et gronde de noirceur. 

L'appétit pour l'autre est le plus intense et les seules lumières allumées sont au loin, versées dans le ciel. 

Le temps agite lascivement les heures dans son verre de whisky. 

Il est minuit. 

Il boit d'un coup sec et attends, indifférent, de nouvelles heures. 

Le vent souffle fort dans le cœur du poète assis au balcon, qui regarde ce que l'intérieur de la nuit raconte. 

Les arbres s'y noient, le tout rugit dans une absurdité sensible, jaculatoire. 

Espérant se fuir lui-même, l'être indicible, rejeté, que la vie a choisi pour s'exprimer quelque part loin des hommes.

Vivre est difficile, alors le poète traîne ses pas et marche profondément. 

Maintenant est son règne, lui que la multitude écrase. 

Lui, symptôme de la galaxie, de contrées intérieures efféminées. 

Lui, le goût qu'à la voie lactée, refuge de songes sans normes, de nuages sans formes, le pendu.

Au loin, pourtant, la mer de l'horizon est paisible, il n'y a pas de soleil, juste la nuit. 

Nuit qui éclaire le rêve que l'on vit tous. 

Nuit qui vient des profondeurs de ce qui dépasse l'entendement, océan abstrait.

Mer d'étranges espaces vides et de gigantesques déserts lumineux, gouffre lovecraftien. 

Elle bat fort sur des distances incoercibles. 

C'est le cœur de l'univers.

Il n'y a rien de plus vivant que la nuit, rien de plus sapide.

Dans sa bouche, le goût de l'obscurité vibre infiniment de petites étoiles pétillantes, arômes éternelles de saveurs liquides, livides, virides, grotesques et crues.

L'épaisseur lactée d'un amas de vide éternel, lent, appétissant et mirobolant. 

L'édulcoré des étoiles, la tendre chair emprisonnée de l'espace. 

Le croissant de lune, la succulente danse des rotations, des trajectoires silencieuses. 

L'étrange articulation des spasmes qui l'élancent sans cesse vers l'au-delà.

Vous ne pourriez comprendre, j'en appelle à des événements croustillants, suprêmes éclairs de chocolats, délicieux fondants d'instants d'une gelée royale éternelle. 

Laissez-le dans le monde de sa bouche, là où les mots sortent de la langue et poussent dans l'encre, jusqu'au cœur de ceux qui lisent. 

Sensations intimidantes, brasier de sens incompréhensibles. 

Il boit la vie, le flambé inexplicable des abysses dans le noir. 

Pour la vie, il est un délice. Elle la consume de toutes ses forces. 

Armées de lettres, versants de hanches de femmes, liquides solides, mille poèmes, éclats de rire de folie, paysages en sensations. 

Ne le regardez pas dans les yeux, vous risquez de vous brûler.

Trous noirs, supernovas, vin, légendes, comètes, singularités. 

Espaces, dimensions, mort, aurores boréales, pain.

Qu'arrivera-t-il après le temps ?  Où ira Dieu ? Qui se souviendra de moi ?

Et si l'infini se termine, que le temps meurt et se décompose ? 

Où habiteront nos souvenirs ? Et si l'Ouroboros finissait par s'avaler la queue ? 

Quel goût y a-t-il au-delà de rien ?

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