C10.4 De feu et de sang

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C’était le signal.

Lumière et nuage rouge.

La flotte rebelle, qui restait à une distance raisonnable de la capitale, se mit en marche. Les moteurs des engins flottants s’activèrent et brisèrent le silence des cieux pour foncer à vive allure vers Zhelès.

La présence du Bahamut suffit à semer la peur et le désespoir dans les rangs rebelles. Le vaisseau militaire complètement noir de l’Empire arborait des rangées parallèles d’une multitude de canons, tous tournés vers eux.

Le signal lancé, la reine s’empara d’un cristal, celui de l’aube, et le tendit en direction du vaisseau militaire. Seule cette monstruosité les empêcherait de reprendre la cité. Était-ce donc un crime de le détruire avec la nouvelle puissance dont elle disposait? Plus elle se persuadait que le cristal primordial était la seule solution, plus elle percevait une petite voix qui s’échappait de la pierre, la suppliant de faire appel à elle.

— Majesté ! s’exclama Bahn désespérément.

Ainhoa quitta des yeux l’objet scintillant et le rangea aussitôt dans sa sacoche.

— Qu'alliez-vous faire, Majesté? l’interrogea son capitaine d’un air accusateur.

— Il faut détruire le Bahamut ou notre flotte n’a aucune chance ! se justifia la souveraine, la voix tremblante.

— En utilisant les méthodes de notre ennemi ? Vous ne savez pas ce qui va résulter de l’utilisation du cristal. Ils ne sèment que la destruction et vous libèreriez un Vexen. Est-ce vraiment la voie que vous voulez suivre ?

Ainhoa ne sut quoi répondre. Était-ce ce qu’elle désirait vraiment ? Ou était-ce ce que lui suppliait le cristal ? Alors que la Reine du Daflad était perdue dans ses pensées et hésitait encore sur la méthode qu’elle souhaitait employer, le capitaine Bahn Caelistis la saisit une nouvelle fois pour la guider en lieu sûr. Même s’il n’était pas persuadé qu’un tel lieu existe.

De leur côté, Erel, Red-an et Duskara avaient guidé les Impériaux dans les jardins imposants et tropicaux du Palais. C’est à travers une jungle de lianes et de grands arbres au feuillage dégarni qu’ils s’amusaient à les tourmenter. Red-an était un excellent acrobate et s’amusait donc à tirer sur les soldats Astéens depuis la cime des arbres. Duskara usait de magie et de son arc pour piéger ses ennemis et les achever. Erel les prenait d’assaut et les attirait dans les pièges de ses compagnons. Leur trio fonctionnait bien.

Lorsque la reine lança la fusée haut dans le ciel, ils comprirent que l’assaut de la flotte était lancé. Rester dans les jardins était risqué car ils étaient trop à découvert pour une attaque aérienne, alors ils firent demi-tour et entreprirent de rejoindre Ainhoa et Bahn.

Les rebelles finirent par se retrouver, à l’extérieur les canons à impulsion sonique du Bahamut tiraient sur les vaisseaux rebelles. Le sol tremblait alors que la bête crachait des rayons lumineux en direction de son ennemi, elle se mouvait avec paresse, sa grosse carcasse était moins rapide que celles des rebelles. La puissance de feu était du côté Astéen mais les Rebelles n’allaient pas se laisser faire si facilement. Le Comte Thasec avait adopté une stratégie bien à lui et avec les atouts dont il bénéficiait, l’appui des plus puissants mages de tous les royaumes.

Le Bahamut faisait pleuvoir une nuée de tirs sur les petits appareils du Comte, mais aucun d’eux ne décimait sa cible. Les mages avaient dessiné sur tous les convois métalliques avec une encre magique, de manière à ce qu’elle ne s’effaçât pas, des runes. Cet alphabet magique permettait d’attribuer des caractéristiques particulières à un objet. Les vaisseaux étaient donc protégés par une barrière magique très puissante. Pas infranchissable, elles ne pouvaient encaisser qu’un certain nombre d’attaques mais cela leur permit tout de même de percer les défenses de la forteresse aérienne et de lui causer à leur tour des dommages. Les véloces engins rebelles visaient les canons Impériaux, le Bahamut privé de sa force de frappe ne représentait plus la même menace.

La vraie menace n’était plus dans le Bahamut depuis un moment déjà en réalité. Vaik était descendu de son vaisseau-mère accompagné de ses juges et de Cidolfus. Alors que la ville de Zhelès était à l’agonie et que les sirènes d’urgence retentissaient dans toute la ville, le groupe Impérial franchit les portes du palais, dans sa main gauche une pierre en forme de prisme de couleur orangée scintillant d’une douce lumière.

*

Bahn guida son groupe à travers le palais et espérait repartir par là où ils étaient arrivés. Ils ne pourraient pas tenir le château à eux seuls et les troupes rebelles étaient retardées par la fureur du Bahamut. La fuite était la solution la plus sûre pour la reine du Daflad qui ne devait pas perdre la vie ou tomber entre les mains de l’Empire. Sur leur route, ils croisèrent quelques groupes isolés de soldat qu’ils défirent sans difficulté.

C’est alors qu’ils arrivaient près des cuisines, qu’ils rencontrèrent un juge. Erel sentit son cœur bondir dans sa poitrine, elle n’avait jamais été aussi heureuse de voir une armure noire face à elle mais son euphorie s’estompa rapidement alors qu’elle se rendit compte que ce n’était pas Gaven mais Blasius.

Épée au poing, la posture menaçante de l’homme de loi stoppa le groupe. Bahn savait que les généraux Impériaux étaient de puissants guerriers et qu’ils se retrouvaient dans une position extrêmement délicate. La fuite était la seule option viable. Mais en essayant de faire demi-tour, le juge lança un sort embrasant alors une partie du couloir qui leur servait d’échappatoire.

— Allons, nous n’allons pas nous quitter si précipitamment. Je m’attendais à un peu plus de résistance de la part du capitaine Bahn Caelistis, le traître qui a réhabilité son nom ! Ricana le magistrat sous son heaume. N’allez-vous donc pas tenter un mouvement désespéré contre les méchants afin de vous extirper de cette situation au péril de votre vie?

— Toujours aussi détestable, cracha Erel entre ses dents.

— Oh, mais ne serait-ce pas la petite copine du juge master, il sera tellement soulagé de te revoir. Tu sais, il en a vécu des choses le bougre ! Disons que je lui ai mis une bonne grosse fessée ! Mais finalement, c’est peut-être toi qui lui a fait le plus de mal, tu sais... lorsque tu es partie sans le prévenir, s’amusa Blasius d’un ton abject et menaçant.

Erel se jeta sur lui, bouclier haut et épée en l’air, elle comptait bien lui montrer qu’elle n’était pas sans défense. Puis elle le détestait, depuis la première fois qu’elle l’avait vu et qu'il avait tenté de l’étrangler. Les autres rebelles entrèrent aussitôt dans le conflit pour accompagner leur camarade. Ils n’avaient, de toute évidence, pas d’autre choix que de se battre pour pouvoir quitter les lieux.

Duskara lança deux flèches en direction du juge, Erel exécuta une glissade laissant passer les objets sifflant au-dessus d’elle. Blasius esquiva.

Red-an tira à trois reprises, le juge para avec la large lame de son imposante épée. Bahn s’élança à son tour, ils prirent le magistrat à revers avec Erel. Il stoppa la lame du capitaine avec la sienne et celle d’Erel avec une des nombreuses plaques en métal qui recouvrent son armure. Blasius souffla d’exaspération.

— Moi qui m’attendais à un vrai combat, je me retrouve encore avec des faiblards en face de moi. Quand trouverais-je un ennemi à ma taille ? Vous n’en avez pas marre d’être faible et médiocre ?

Il repoussa les deux guerriers avec force, chacun d’un côté, sans faire le moindre effort. Sa carrure imposante s’avançait lentement mais sûrement vers la reine. Malgré les tirs de Red-an et Duskara, rien ne semblait le ralentir, il se contentait de parer les attaques qui lui étaient adressées.

Erel et Bahn tentèrent une attaque par derrière mais ils furent de nouveau interceptés. Leurs épées s’entrechoquèrent mais cette fois une flèche se planta entre deux plaques métalliques de l’armure, au niveau de l’articulation de l’épaule. Le juge gémit. Il se mit à insulter la planète entière, des flammes jaillirent de son propre corps, soufflant tous ses ennemis au sol.

Blasius saisit le capitaine Dafladien par la gorge, le souleva à quelques centimètres du sol d’une main.

— Chère majesté Dafladienne, si vous souhaitez épargner la vie de votre capitaine, je vous suggère de tous baisser vos armes et de me suivre bien gentiment. C’est clair ?

Tous les regards se tournèrent vers Ainhoa pour qui la décision était évidente.

Elle jeta la première son épée au sol en direction de l’armure noire suivie de ses compagnons rebelles. La reine ne le faisait pas de bon cœur mais elle n’avait pas le choix, ils n’étaient pas assez forts pour l’affronter et perdre son capitaine maintenant serait un coup dur pour la rébellion. Tout ce qu’elle devait faire, c’était gagner du temps pour permettre aux rebelles de prendre Zhelès à l’Empire.

Blasius lâcha Bahn et le laissa retomber lourdement sur le sol.

— Sage décision, Majesté. Je vous prie de bien vouloir me suivre, acheva-t-il d’un air narquois, le juge.

Les rebelles suivaient la marche de l’Impérial.

Pendant ce temps, les sirènes mugissaient encore et le ciel s’embrasait, une nuée d’objets métalliques inondait la capitale du Daflad, détruisant une partie de la ville alors que la population était encore en train d’évacuer. Le Bahamut tenait bon et utilisait ses armes secondaires, il avait lâché les chasseurs Impériaux, des vaisseaux de petite taille, rapides, contenant un seul pilote destiné à détruire les ennemis un à un.

Le Comte Thasec en avait fait de même avec ses propres chasseurs améliorés à la magie. Des appareils invisibles à l'œil nu, les rayons lumineux étaient absorbés par ces engins et donc étaient invisibles. Cependant, cela avait un coût, la machine surchauffait rapidement et devait donc se retirer de la bataille. Trois de ces vaisseaux seulement constituaient la flotte rebelle car c'était difficile de contrôler la magie qui les animait mais en plus leur défaut pouvait être un handicap dans la bataille.

La ville de Zhelès était spectatrice d’une nouvelle bataille qui se jouait cette fois dans les cieux. Une pluie de cendres et de métal tombait en flocons sur la capitale, couvrant les décombres d’une épaisse couche de poudreuse grise. Une odeur de brûlé et de sidérurgie embaumait tous les recoins de la cité. La fin était proche.

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