Bondi au crépuscule

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Le soleil descendait lentement sur Bondi Beach, allongeant les ombres sur le sable et dorant la mer d’une lumière presque surnaturelle. Marie-Louise y venait tous les soirs depuis la rentrée, comme un rituel. Elle posait son sac contre les rochers, retirait ses chaussures, et marchait dans l’eau froide jusqu’aux chevilles, même en hiver. C’était là qu’elle pensait le mieux. C’était là qu’elle le voyait, même quand il n’était pas là.

Côme.

C’était un nom qui cognait doucement contre les parois de son crâne. Un nom qui avait envahi ses marges de cahiers, ses rêves, sa musique, ses silences. Elle avait dix-sept ans, et c’était peut-être idiot, peut-être naïf, mais elle l’aimait. Elle le savait depuis ce jour où il s’était retourné pour lui sourire, juste un instant, dans ce couloir bondé du lycée. C’était rien. Un détail. Mais ce détail avait retourné son monde.

Ils étaient dans la même classe de littérature. Marie-Louise, toujours au fond, cachée derrière ses livres. Côme, au centre de tout, comme une étoile dans un système solaire. Il ne faisait pas exprès d’être aimé. Il respirait, c’était déjà assez. Il riait, et les murs riaient avec lui. Il écrivait parfois, des choses courtes, brillantes, insouciantes. Elle les lisait en silence quand il oubliait ses feuilles.

Et elle, elle écrivait sur lui.

Des poèmes, des lettres, des journaux entiers. Mais jamais elle ne lui avait dit. Pas vraiment. Pas encore.

Ce soir-là, l’air était tiède, et l’odeur du sel semblait lui coller à la peau. Marie-Louise regarda l’horizon jusqu’à ce qu’il disparaisse dans le noir, puis sortit de sa poche une feuille pliée en quatre. Elle l’avait écrite la veille. Pas une lettre d’amour classique. Un fragment de vérité :

"Je sais que tu ne m’aimeras probablement jamais.
Mais j’avais besoin que le vent le sache."

Elle soupira. Elle ne l’enverrait pas, bien sûr. Elle ne le pourrait jamais. Ce serait trop. Trop risqué. Trop vrai.
Alors elle fit ce qu’elle faisait souvent : elle froissa le papier et le lança dans l’océan.

Le lendemain, au lycée, elle le vit. Assis sur le muret à côté de l’entrée, casque sur les oreilles, souriant à demi à une fille de terminale. Il tourna la tête, croisa son regard. Juste une seconde. Pas de sourire cette fois. Juste des yeux tranquilles, sans promesse.

Elle détourna les siens.

Et son cœur, déjà trop lourd, se mit à battre un peu plus vite. Pas d’espoir. Juste cette douleur douce.
Celle qu’on s’inflige quand on aime en silence.

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