Ce fut un dimanche. Le ciel de Sydney était bas, couleur d’acier. Marie-Louise n’avait pas parlé de toute la journée. Ses parents ne remarquèrent rien. Ils ne remarquaient jamais vraiment.

Elle sortit en fin d’après-midi, sans but précis. Elle marcha longtemps. Bondi Beach n’était pas loin, mais ce jour-là, elle mit deux heures à y arriver. Chaque pas pesait plus que le précédent.

Le sable était froid sous ses pieds nus. Les vagues étaient agitées, mais pas menaçantes. Elle s’assit sur le rocher où elle avait tant rêvé, tant écrit.

Dans la poche de son manteau, une lettre. Celle qu’elle avait écrite la veille au soir.

"Je n’ai pas envie de mourir.
Mais je ne sais plus comment vivre sans ce que j’espérais."

Elle la posa sur le banc près de l’escalier.

Et elle s’approcha de l’eau.

Elle ne voulait pas en finir. Pas vraiment. Elle voulait juste que quelqu’un comprenne. Que quelqu’un voie qu’elle était en train de couler. Qu’elle n’était pas folle. Juste fatiguée.

Elle entra dans l’eau jusqu’à la taille. Le froid la saisit. Son souffle devint court. Elle ferma les yeux.

— MARIE-LOUISE !

Une voix. Une vraie. Une présence.

Elle se retourna. Pauline courait sur le sable, les bras tendus, les larmes déjà sur les joues.

— Tu vas pas faire ça, d’accord ? Tu vas pas t’en aller comme ça.

Marie-Louise ne dit rien. Mais elle recula. Sortit de l’eau. Pauline la prit dans ses bras, fort. Tremblante.

— Je t’ai suivie. J’ai lu la lettre. T’as pas le droit de disparaître pour quelqu’un qui ne t’a jamais promis l’amour.

Et cette nuit-là, pour la première fois, Marie-Louise pleura vraiment.