09h31
Shana mouille son visage dans une petite mare le long de la route en direction de l’autel pour essayer de se réveiller. Soudain Karl se met à hurler.
« Allez, on continue ! Il reste environ deux heures de marche. »
« Sérieusement ! Je ne vais pas tenir. On ne peut pas faire une pause plus longue, Karl ? »
Shana observe Alain tendre une gourde d’eau à Émi qui est assise sur une souche, puis Karl qui scrute l’horizon avec impatience, depuis une zone empourprée dans les herbes.
« Non, Émi ! On avance ! Il y a une rivière plus loin, on s’arrêtera là-bas ! »
« Attends, Émi, je vais prendre tes affaires. »
« Cool ! Merci, Alain ! Je me sens plus légère, enfin une vraie balade. »
Les changements de sens soudains sont parfois confus, difficile de prendre le temps de tout analyser correctement. Cependant, cela ne gêne sûrement pas le Chishiki qui m’a créé.
« Émi ! Garde au moins ton bâton ! Tu ne peux pas lancer de sort sans lui. »
Les sorts que Shana mentionne impliquent une forme de technologie basée sur la génétique du corps humain. Il me semble que Mirina effectuait aussi des recherches à ce sujet. L’ERA, est une source que les Chishiki maîtrisent bien, mais les humains moins. Tout être vivant en possède depuis une ancienne guerre, la troisième je crois. Tout a commencer par une invasion en Europe.
« T’inquiète pas, Shana ! Alain me le rendra en cas de problème. »
(Il y a tellement de bruits d’animaux différents à travers la forêt, ce n’est pas rassurant.)
« Karl, il y a peu de chance que les bandits aient emprunté ce chemin. Je ne vois aucune empreinte. »
« Et moi, je suis certain d’être sur la bonne route, Shana ! La guilde a fourni les informations. »
« Tu sais, Karl, la guilde peut aussi se tromper. Personne n’est infaillible. »
« C’est ridicule ! La guilde est toujours fiable, alors inutile d’en discuter, Shana ! »
(Ses iris bleus sont profonds, presque noirs, c’est rare. Elle a aussi de très beaux cheveux longs de couleur caramel.)
« Dis, Shana, est-ce que c’est vrai ? »
Alain se rapproche de Shana et semble curieux.
« La guilde regroupe les informations, mais elles sont parfois erronées, factices ou mal transmises. »
« Personne ne vérifie ? »
« Des personnes sont affectées à cette tâche, mais aucune information n’est jamais certaine. »
Shana observe attentivement le périmètre, tandis que Karl marche rapidement sans se retourner.
« De plus, entre le temps de transmission et celui d’arrivée, les choses évoluent. »
« Je comprends ! Les personnes qu’on cherche ont eu le champ libre pour se déplacer. »
« Dans ce cas, on ne devrait pas prendre le temps de chercher un autre chemin ? »
« Exact, Émi ! Mais la règle des aventuriers pour éviter les discordes est de suivre le chef de groupe. »
Une règle ! Cela m’évoque un souvenir assez ancien d’un homme qui m’a dit un jour :
Ne partage jamais le savoir avec les ignorants, car c’est un pouvoir dangereux.
(Shana est vraiment cool ! Au fond de moi, je voudrais tellement lui ressembler.)
Impossible de me rappeler son nom, mais c’était un Chishiki, tout comme moi.
(La façon de marcher de Shana est assez gracieuse, mais je vois bien qu’elle est fatiguée.)
Alors que la pensée d’Alain passe dans mon esprit, mes perceptions passent sur les sens de Mizuki.
*** *** ***
Elle se tient devant la porte d’entrée du salon de coiffure, face à Annie qui lui tape sur l’épaule.
« Ne t’en fais pas pour l’argent, Mizuki ! J’enverrai la facture à Kenji. »
« Merci ! J’ai encore complètement oublié d’en prendre. »
(Je dois y penser la prochaine fois.)
Annie retourne à ses activités, tandis que Mizuki quitte le salon de coiffure d’un pas léger.
« Mizuki ! »
(Sa voix est toujours aussi fluette.)
« Elle ne va pas t’entendre si tu ne cries pas plus fort, Alice ! »
Mizuki fait un signe en direction d’Alice qui est près de la boulangerie avec Tom et Chloé.
« Tu vois bien qu’elle m’a entendu, Chloé, alors ne traîne pas ! »
Tout le monde se rejoint avec calme vers la fontaine, puis Alice saisit les mains de Mizuki.
(Ses cheveux sont tellement lisses et soyeux.)
« J’adore ta coupe pixie, Mizuki ! »
« Merci Alice, mais tes cheveux blonds et bouclés sont également très jolis. »
(Elle a une sacrée ouïe.)
« Depuis quand aimes-tu les cheveux longs, Mizuki ? »
« Je ne les déteste pas, Chloé, mais j’aime garder les miens courts. »
(Sa silhouette est tellement fine et gracieuse.)
« Dans ce cas, que penses-tu des miens ? »
« Leur longueur te correspond bien ! Ils sont lisses avec une couleur noire agréable à l’œil. »
« Maintenant, dis-moi. Que penses-tu de ceux de mon petit frère ? »
« Tom a de beaux cheveux bruns ! Le fait qu’ils soient courts lui va bien. »
« Me… Merci… Mizuki… »
(Trop cool, elle m’a complimentée !)
Chloé murmure à l’oreille de Tom d’une voix discrète.
« Dis à Mizuki qu’elle est belle, petit frère. »
« Ça… Ça te va… euh… Ça te va bien, Mizuki, tu… Tu es très belle. »
« Pourquoi tu bégaies autant, Tom, ça ne t’arrive pas avec les autres ? Tu peux tout me dire, tu sais. »
« Ha, ha, ha ! Ne t’en fais pas pour ça Mizuki, ce n’est rien ! »
« Si tu le dis, Chloé, mais en tout cas, merci du compliment, Tom ! Toi aussi, tu es mignon. »
« Merci, Mizuki… »
(Elle est trop parfaite, je n’oserais jamais lui dire que je l’aime.)
(Tom fixe un peu trop Mizuki, mais je vois qu’elle en profite pour regarder ses iris noisette.)
Le regard de Tom ne quitte jamais Mizuki et passe régulièrement de son visage à sa poitrine. Alice laisse une pensée lui échapper, tandis qu’au loin, Michel reste en observateur de la scène.
(J’aime bien les iris caramel de Chloé, mais la couleur émeraude de Mizuki est bien plus jolie.)
(Sa nouvelle tenue lui va bien, mais je vais la laisser discuter et réfléchir à un pari captivant.)
Tout en laissant cette pensée me parvenir, Michel s’éloigne d’un pas assuré en souriant. Mizuki reporte rapidement son attention sur Alice qui fouille dans son sac à dos pendant que Chloé sort un calepin du sien.
« Au fait Mizuki, j’ai fabriqué quelques accessoires que je voudrais te faire essayer ! »
« Moi, j’ai fabriqué une robe sexy sous la directive d’Etsuko. Tu pourrais l’essayer aussi ! »
Un souvenir me revient encore. Mirina avait parié qu’elle arriverait à me convaincre de l’aider. Alice sort de son sac un bracelet en balsa et un collier en chêne poli, puis fixe le regard de Mizuki. Chloé montre le dessin d’une longue robe élégante.
« C’est gentil les filles, mais je n’aime pas ce genre de choses. »
(Surtout les robes.)
« Mizuki est parfaite comme ça ! Elle n’a pas besoin de bijoux ou de robes pour être belle. »
C’est vrai, Tom, même si c’est dommage qu’elle ne soit pas plus féminine. »
« Je suis d’accord, Chloé. J’aimerais te voir porter mes créations un jour, Mizuki. »
« Merci ! Vous êtes aussi parfaits comme vous êtes ! Le naturel, c’est toujours le mieux. »
Selon les informations présentes dans le registre de Linda, Chloé est âgée de dix-sept ans, Alice en a quinze et Tom quatorze, avec la mention qu’il a un côté féminin. Ce qui correspond à la vision perceptible de son corps, mais ça n’a l’air de déranger personne. Mizuki laisse une pensée m’effleurer.
(Tom ne bégayait pas avec moi avant et je vois bien qu’il regarde souvent ma poitrine.)
Les sens de Mizuki laissent place à ceux de Michel.
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