04. Comment refuser ?

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Mathias

[ Mat, ce serait bien aimable de me répondre… Je vais finir par m’inquiéter !]

[Est-ce que tu vas bien ? Y a un souci ?]

[Snow, arrête de faire le fantôme, tu me donnes des envies de meurtre !]

[Mathias Snow, je jure que si tu ne m’appelles pas dans la journée, je contacte l’armée… ET TA MERE !]

Je glousse en lisant son dernier message et me passe une main dans les cheveux en levant les yeux au ciel. Elle en est capable, c’est ça, le pire. Autant, l’armée, je fais avec, mais si c’est ma mère… J’en frissonnerais presque. J’adore ma mère, mais franchement, s’il y a bien une femme qui me fait plus peur que Julia et la Gitane réunies, c’est elle !

Pourquoi est-ce que je pense à la Gitane, moi ?

Je soupire et jette un œil au quartier où je me trouve. Putain, j’avais prévu une bonne partie de jambes en l’air tranquille, et il faut qu’elle me pète mon plan. Je fais demi-tour et m’engouffre dans le petit parc, histoire d’avoir un peu de calme. Un banc libre, une grande inspiration, et j’appelle Ju en visio.

— Salut Lieutenant Sexy !

— Tiens, le Lieutenant Canon est finalement en vie ! Tu m’as fait peur, Mat, est-ce que ça va ?

— Bien sûr que ça va, Ju’ ! Ça va toujours, mais j’ai beaucoup de boulot.

— Et beaucoup de nanas à combler, j’imagine ?

— Aussi, souris-je. Et chez vous, tout roule ? Comment va la mini-Ju’ ? Et Lila ? Et ton pauvre mari ?

— Mon “pauvre mari” ? Depuis quand tu te permets de le plaindre alors qu’il vit avec la plus merveilleuse des femmes ? Celle qui n’arrête pas de te relancer depuis quelques jours ! Franchement, tu crois que j’ai que ça à faire de savoir quand est-ce que tu vas ramener tes fesses pour me donner un coup de main ?

— Je n’ai jamais dit que j’allais venir, je te signale. J’ai un taf de malade, Julia, pas le temps de voyager, même pour ton joli p’tit cul !

— Et moi qui croyais que tu étais un ami sur qui je pouvais compter ! J’ai besoin de toi, Mat, sinon, la mère d’Arthur est en grand danger et j’aurais beau multiplier les hommes sur le coup, si je n’en ai pas un qui a tes compétences, c’est foutu, surtout vu la dernière folie qu’elle nous impose à tous. Mais bon, vu que tu n’as pas le temps, je ne vais pas t’embêter avec les détails, continue-t-elle en sachant perfidement bien que je n’aime pas quand elle prend ce ton désespéré.

— Putain, le mariage t’as vraiment rendu manipulatrice. Je ne suis pas Arthur, tu sais ? Je déteste quand tu joues sur les sentiments… Pourquoi tu as besoin de moi, au juste ? Parce que ton premier message était quand même très vague…

— Secret défense, tu connais ? se moque-t-elle alors que je crois déceler un petit accent de satisfaction dans sa voix. Tu crois que je peux tout dire sur une ligne non protégée ? J’ai besoin de toi parce que tu es le meilleur et que sans mon habituel Snow, je suis perdue, moi.

— Tu joues encore sur les sentiments, Vidal ! Heu… Vidal-Zrinkak, pardon. T’as besoin de moi tout seul ? Et tu sais que là où je suis le plus doué, c’est au pieu. Zrinkak est devenu impuissant ?

— Je peux te dire qu’au pieu, tu as une belle concurrence ! Rien ne me manque de ce côté-là. J’ai besoin d’une équipe et pas de bras cassés. La Gitane, elle veut se rendre dans un endroit impossible à sécuriser. Affaire d’état, importance capitale et tout le toutim. Tu vois, le genre ? Tu arrives quand, que je prévienne Lila ? Elle a trop hâte de retrouver son tonton Snow !

Je bougonne en l’entendant encore essayer de jouer sur le côté sentimental. Franchement, une partie de moi crève d’envie d’y aller, de retrouver les Zrinkak… Et depuis quand est-ce que je me bride comme ça, moi ?

— Pas avant quelques jours, je dois recruter des extras pour assurer les contrats qui étaient prévus avant que tu fasses ta reine et ne réquisitionnes mes meilleurs hommes. Flo sera du voyage, et je vais voir pour prendre deux gars de plus. Nourris, logés, blanchis et armés, j’espère ?

— Oui, bien sûr, tu es un amour, Mat. Je savais que je pouvais compter sur toi. Je te promets de te faire un gros bisou quand tu seras là !

— Juste un ? Merde alors… Sors les bouteilles, on pourra se souvenir du bon vieux temps en picolant comme avant aussi !

— Je te rappelle que je suis maman et que j’ai des obligations. Je ne suis pas un vieux célibataire endurci comme toi qui peut faire plein de folies, moi !

— T’es devenue sacrément coincée du cul, Lieutenant, ricané-je. Tes gosses ont un père qui pourra s’occuper d’elles pendant que tu te torches la tronche avec ton plus vieux pote, quand même ! Et si Zrinkak ronchonne, rappelle-lui que sans moi, il ne serait pas marié à la plus merveilleuse des femmes !

— Ecoute, si tu viens, promis, on se fait une soirée à deux ! Ou même, on invite Flo et Arthur à se joindre à nous et on boira en souvenir du bon vieux temps !

— J’imaginais un temps plus vieux que Zrinkak pour qu’il n’y ait aucune chance que soit posée sur le tapis celle-dont-on-ne-prononce-pas-le-nom, soupiré-je. Je suis prêt à parler de ma balle dans le cul toute la nuit si ça permet d’éviter ça…

Je me retiens de me masser la fesse comme j’ai le tic de le faire à chaque fois que le sujet est abordé, et détourne le regard devant le visage compatissant de Julia. Heureusement, elle se reprend vite, pensant sans doute que je risquerais de changer d’avis quant à ma venue en Silvanie si le sujet m’agace.

— On se fera une fête rien qu’à deux, mon chou. Et si tu dérapes ou n’es pas sage, tu verras que ton cul se souviendra de notre soirée !

— Cool, j’ai hâte. Tu sais que je rêve que tu me fesses encore et encore, ris-je. Bon, je te tiens au courant de quand j’arrive. Si tu veux m’envoyer des infos sur le sujet qui semble te turlupiner, n’hésite pas. Juste pour info, j’étais en route pour tirer mon coup, je vais être frustré par ta faute.

— Il faut aussi que je te trouve une petite silvanienne pour combler ta frustration ?

— T’inquiète, t’as vu ma belle gueule ? J’ai pas besoin de toi pour trouver des nanas. J’espère qu’il y en a des canons au Palais !

Elle lève les yeux au ciel en joignant les mains.

— Mon Dieu, tu me manques trop, Mat. Viens vite et tu jugeras toi-même ! Si tu trouves le temps de draguer, c’est que mon souci sera vite réglé et j’en serai trop heureuse !

— Ok, bon, je te laisse, je vais organiser mon départ au plus vite, je te tiens au jus, Lieutenant Sexy. Tu me manques aussi, mais le dis pas à Arthur, j’ai pas envie de le fâcher avant même d’arriver.

— Merci Mat. Merci pour tout. A très vite.

— Embrasse les petites pour moi ! A bientôt, Ju.

Je raccroche et soupire lourdement en me laissant glisser sur le banc. La Silvanie… Un an là-bas, des emmerdes par-dessus la tête, des amitiés nouvelles ou renforcées, et un cœur en miettes. On peut dire que ce pays m’a fait connaître le meilleur comme le pire, mais il va falloir que je me concentre sur le meilleur.

J’envoie un message à Flo et Adam pour qu’ils me retrouvent au plus vite au bureau, et me mets en route avec la boule au ventre. J’ai l’impression d’être un gamin qui va vivre son premier jour d’école dans une nouvelle ville, c’est stupide. Le pire, c’est que Justine n’est pas en Silvanie, mais dans la même ville que moi. Alors pourquoi est-ce que ça m’emmerde de retourner là-bas ? C’est ridicule, vraiment.

Je prends le temps de détailler les locaux en arrivant. Je suis déjà nostalgique, avant même de partir. Cette boîte est un accomplissement, j’en suis fier et j’adore venir m’emmerder à faire de la paperasse ici. La Silvanie… Ce Palais me file la gerbe, trop de luxe, trop de tape à l’œil. Et puis, la Gitane, bon dieu ! Cette folle ne me manque pas du tout et je me demande comment fait Julia pour la supporter… Bon, elle n’a pas trop le choix, mais entre les repas de famille et ses folies de Présidente…

— Flo ! Toujours prêt à partir en Silvanie ? Je me suis fait avoir par Julia, soupiré-je en me laissant tomber sur un fauteuil de la salle de repos.

— Tu es sérieux ? On va vraiment pouvoir retourner là-bas ? Je suis prêt, oui ! Enfin… Il faut que je parle avec ma femme, mais ça devrait le faire.

— Bien… Adam, je te laisse mon bébé, t’as intérêt à gérer. On va faire appel aux gars qu’on a embauchés pour la soirée de cet acteur, le mois dernier. Ils étaient pas mal. Histoire de combler nos absences. Je pense prendre deux autres gars.

— Tu crois qu’ils sauront nous remplacer ? On met en danger ta boite, là, quand même… Si tu veux, je me sacrifie et je reste, énonce fermement Flo, même si je devine que ça serait une énorme déception pour lui de ne pas se joindre à moi.

— La boîte tourne bien, je ne me fais pas de souci. Et puis, on s’appellera régulièrement avec Adam. Julia a besoin d’aide, c’est la priorité, au même titre que la boîte.

Ou en top position. Mais j’aimerais quand même ne pas faire faillite pendant mon séjour en Silvanie. J’ai trop bossé pour ça.

— Des questions, les gars ?

— Vous partez combien de temps ? Je sens que mes prochains congés sont annulés, Boss. Je me trompe ?

— On part… Dans deux jours, si les gars de la dernière fois sont dispos. Et pour tes congés, soupiré-je, je te jure que dès que je rentre, t’as carte blanche, Adam. Désolé, une affaire d’état, ça ne se refuse pas.

— Tu as négocié la prime que nous aurons, au moins ? continue ce pauvre Adam qui va devoir assurer pendant que nous nous rendons en Silvanie.

— On m’a dit que le pays payait bien, j’ai hâte de voir ça, ris-je. Mais c’est la famille qu’on va aider, donc…

Adam ne peut pas comprendre, il n’a jamais fait l’armée. Pour Florent et moi, c’est juste une évidence. Même sans être payés, nous irions. Je pourrais mettre la clé sous la porte si l’un de mes anciens camarades avait besoin, c’est d’autant plus valable pour Julia. On n’oublie pas les années de missions en tous genres, toujours là l’un pour l’autre, c’est comme ça. Même Justine ne gâchera pas ça.

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