05. Le job est fait

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Ysée

Je me réveille ce matin et constate que j’ai encore un peu de temps avant de devoir vraiment me lever. Je suis bien au chaud sous ma couette et je n’ai vraiment pas envie de bouger. Ces instants que je passe avant de rejoindre le bruit et les ennuis du quotidien sont les meilleurs de mon existence. Personne ne me sollicite, personne ne m’embête, j’ai un peu l’impression d’être une reine qui attend ses serviteurs, surtout quand on voit le luxe de cette chambre mise à disposition au sein du Ministère. Enfin, je me dis tout ça mais, en réalité, la Reine préfèrerait être en train de se taper un beau mâle plutôt que se réveiller en douceur. Je suis en manque, c’est fou et ça en devient dangereux. Hier soir, le soldat qui m’a déposée ici, j’ai failli l’inviter à monter avec moi. S’il n’avait pas rougi comme un minot quand je lui ai dit qu’il devrait se laisser pousser la barbe et que ça le rendrait irrésistible avec son uniforme, je crois que je me serais jetée sur lui. J’aurais dû le faire d’ailleurs, et je suis sûre que le réveil aurait été plus sportif.

Là, je vais devoir me contenter de Job. Job, parce qu’il fait toujours le travail, tant qu’il a des piles qui fonctionnent. Et je les ai changées récemment alors je le récupère et l’allume avant de le positionner directement entre mes jambes. Le plaisir ne tarde pas à m’emporter et je suis sûre que si quelqu’un m’entendait, vu mon manque de discrétion, j’aurais le droit à des remarques salaces ! Mais ça a le mérite de me mettre en forme et de bonne humeur avant ma journée de rendez-vous et de conférences diverses et variées.

Je prends une douche rapide vu le temps que j’ai perdu sous ma couette et descends à l’étage inférieur pour retrouver mon équipe et me coltiner les obligations liées à ma fonction. Franchement, heureusement que je n’ai pas de mec, finalement, car je n’ai pour ainsi dire pas de vie personnelle. Dormir sur mon lieu de travail a pas mal d’avantages, notamment le fait de côtoyer plein de beaux mecs en tenue militaire, mais c’est quand même plus un repoussoir à relations que le bon plan pour entretenir une histoire durable.

Je soupire en constatant que mon premier rendez-vous du jour est déjà présent. Il est en pleine discussion avec ma secrétaire et je constate avec un peu de désarroi qu’elle n’est pas insensible au charme du beau barbu qui lui parle comme si elle était la première merveille du Monde. Dire qu’elle m’a avoué préférer les filles dans son entretien d’embauche !

— Bonjour Arthur, je ne suis pas en retard, si ? l’accosté-je alors qu’il est adossé sur la porte qui mène à mon bureau.

— Bonjour, Ysée. Non, tu n’es pas du tout en retard, c’est moi qui suis en avance. Le plaisir de ne pas avoir à emmener les filles à l’école ! Tu vas bien ?

Oh la la. Quel charme, il a avec son sourire un peu en coin et ses yeux bleus clairs magnifiques. Il n’a pas d’uniforme mais il n’en a pas besoin et j’envie un petit peu Julia de pouvoir profiter de ce joli barbu tous les jours alors que moi, je dois me contenter de Job. Si ce n’était pas mon cousin et s’il était libre, j’en ferais bien mon doudou personnel. Enfin, ça fait beaucoup de si, mais il devrait se lancer dans la pub, il aurait un succès fou.

— Je vais bien et je suis ravi de voir que tu sais t’occuper agréablement quand tu attends, le taquiné-je. C’est toi qui as sollicité cet entretien, non ? Je ne me souviens pas l’avoir inscrit sur mon agenda officiel.

— Eh bien, je voulais discuter un peu avec ma cousine, mais pour pouvoir te voir, il faut réussir à accaparer une case dans ton emploi du temps de Ministre, alors… Et puis, j’avoue que j’aimerais bien discuter d’un ou deux trucs avec toi, oui.

Je me demande ce qu’il a à me dire et le laisse me précéder dans mon bureau afin de pouvoir admirer son joli fessier bien moulé dans son pantalon. Putain, si Julia apprend que je fantasme sur son beau brun, je peux dire adieu à la vie et me préparer à aller au moins au Purgatoire.

— Un ou deux trucs ? demandé-je directement après avoir refermé la porte.

— Oui, un ou deux. Peut-être un seul, en fait. Un truc qui fait stresser Julia et qui ne me rassure pas des masses. C’est quoi cette idée de concert, sérieux ? Même moi, je trouve ça dingue, pour te dire !

— Toi aussi, tu vas t’y mettre ? Toi aussi, tu vas dire que si j’ai décidé que ça se passe comme ça, c’est parce que je n’ai que le cerveau d’une femme ? Tu es sûr que tu veux t’engager dans cette direction ?

— Oulah, surtout pas, s’esclaffe-t-il. Dois-je te rappeler à qui je suis marié ? Si j’ai encore des roubignoles, c’est parce que j’ai abandonné ce genre de discours misogynes, que je n’ai sans doute jamais eus, d’ailleurs ! Qui est-ce qui t’a dit ça ?

— L’assistant de ta mère. Il m’a pris pour une greluche, et franchement, ça m’a foutu dans une rage folle. Je crois que je l’ai traumatisé, le petit. Alors, pourquoi tu veux me parler du concert ? Tu ne crois pas qu’il faut au moins une vraie salle de concert pour accueillir les Grâces Celtiques ? Et que ça permettrait de relancer la Silvanie dans la liste des pays normaux où l’on peut revenir à la vie d’avant ?

— Dans l’optique où rien ne serait tenté pour atteindre ma mère, oui. Mais si jamais il se passe quelque chose, personne n’est près de revenir, je te le garantis !

— Et donc, pour toi, ça ne sert à rien de tenter quoi que ce soit ? On abandonne tout et on déclare la révolution nulle et non avenue ?

— Non, bien sûr que non, évidemment ! Je me demande juste si vous ne pourriez pas repousser le concert, faire des travaux au Palais pour rendre l’acoustique meilleure, tout ça, tout ça, quoi.

— Pourquoi dépenser tout cet argent alors qu’on a tout ce qu’il faut dans la salle de spectacle de la capitale ? Et c’est ta mère qui ne veut pas attendre. La tournée des Grâces, c’est en ce moment, pas dans dix ans. Tu trouves vraiment que c’est une si mauvaise idée que ça ? lui demandé-je sérieusement. Les menaces contre ta mère ne sont pas sérieuses, si ?

— Tu crois vraiment que des menaces envers la Gitane peuvent ne pas être sérieuses ? Quant à l’argent, j’entends, évidemment, mais Julia dit que la salle de concert est un gruyère… Enfin bon, de toute façon, c’est déjà trop tard, n’est-ce pas ? Je te remercie pour mes soirées mouvementées maintenant ou j’attends que le concert soit passé ?

— Tes soirées mouvementées, m’étonné-je dans un premier temps avant de comprendre que Julia doit être sur les dents avec tout ça.

Je me doute qu’elle doit être un peu stressée mais pas plus que d’habitude, si ? Enfin, si elle l’est, c’est que ce que je propose est vraiment une folie… Je devrais peut-être renoncer et reporter le concert à une date ultérieure, comme le dit Arthur. Il est toujours de bon conseil, même si là, je pense qu’il est un peu trop au cœur de la situation pour être objectif.

— Tu sais que ta femme est sur le coup ? Moi, je n’ai pas d’inquiétude avec elle qui supervise les opérations de protection.

— Uep, je sais bien, d’ailleurs elle a enfin réussi à convaincre d’anciens collègues de débarquer pour lui filer un coup de main. Comme s’il n’y avait pas assez de militaires dans ce Palais, soupire-t-il. Heureusement qu’ils sont sympas.

— Des Français vont débarquer en plus des gardes du Palais ? On n’a pas assez de bons éléments en Silvanie qu’elle appelle des étrangers ? m’agacé-je. Et ils vont amener quoi, tu crois ? Ils ont plus de muscles que les Silvaniens ?

— Au moins l’un d’eux, assurément, ricane Arthur. Enfin… Disons qu’elle veut s’entourer de personnes de confiance. Elle ne me dit pas grand-chose, mais je crois qu’elle imagine qu’il puisse y avoir des traîtres dans nos rangs; éventuellement.

— Et ces mercenaires sans cervelle, ce sera mieux… Franchement, je ne comprends pas, là. Tu devrais dire à ta mère qu’elle prend encore plus de risques à faire venir des gens qui s’en foutent de la Silvanie et d’elle… Je ne veux pas critiquer ta femme, mais là, je suis perdue sur ce qu’elle veut faire.

— Ysée, est-ce que tu sais pourquoi ma mère tient Julia en haute estime, même si elles passent leur temps à se chamailler ?

— Parce qu’elle a participé à la libération du pays, non ? Moi aussi, j’estimerais quelqu’un qui m’a aidée à arriver à la Présidence. Et puis, Julia, c’est un peu Lara Croft aussi, non ? dis-je en essayant de faire baisser un peu ma colère.

— Mince, arrête, elle va me tuer si je lui propose de jouer Lara Croft, me mets pas ce genre d’idées en tête, rit-il. Bref, pour la faire courte, elle n’était pas seule dans l’affaire, et de ce que j’ai compris, les deux mercenaires sans cervelle qui vont débarquer étaient là aussi. Et puis, elle a sauvé ses gosses, tu sais ? Ça me fait un peu mal aux fesses de le dire, mais sans elle et les militaires français, je ne suis pas sûr que ma sœur et moi nous serions là.

— Ouais, eh bien on verra bien si ces gars qui ont plus fait gonfler leurs biceps que leurs cervelles vont nous sauver, soupiré-je. Mais, pour revenir au concert, avec eux, ça devrait aller, non ? On est en sécurité avec des gardes du corps français.

— Tu essaies de me convaincre, moi, ou toi ? Tu commences à flipper ? Honnêtement… Je pense qu’on n’a pas toutes les infos que ma mère ou son service de sécurité peuvent avoir, mais je crois avoir compris que Julia n’avait pas non plus été trop vindicative, donc, j’imagine que c’est faisable sans trop de risque.

— Moi, tout ce que je veux, c’est que la Silvanie retrouve sa place dans le monde, et la Culture en fait partie. Ce concert, c’est une première étape pour ça et je ne changerai pas d’avis là-dessus. Même si je comprends que tu puisses être inquiet pour ta mère et que tu viennes m’en faire part, elle ne sera pas plus en danger devant les Grâces Celtiques que quand elle va voir nos concitoyens sur les marchés. Essaie plutôt de me soutenir et si on travaille ensemble, avec la sécurité, on va continuer la reconstruction de notre pays, tu ne crois pas ?

— Hum… On va dire ça, oui. Mais la prochaine fois, prenez les décisions en anticipant davantage. Là, le timing est serré quand même.

— Ouais, eh bien, dis-ça à ta mère. Moi, le concert, je le prépare depuis des mois, c’est elle qui a annoncé ça la semaine dernière !

— Hey, range les crocs, Ysée, sourit-il en levant les mains en signe d’apaisement. Je comprends pourquoi vous passez votre temps à vous prendre le chou avec Julia. On dirait bien que Lara Croft a de la concurrence !

Je souris à sa remarque et c’est comme si c’était le signal de l’arrêt des hostilités. Arthur est vraiment un type exceptionnel. Je ne sais pas s’il est venu de sa propre initiative ou s’il a été envoyé par sa mère ou sa femme, en tous cas, il a fait passer son message, je suis maintenant un peu plus inquiète pour l’organisation du concert, mais il l’a fait en souriant et sans me braquer. C’est lui qui aurait dû faire de la politique et pas sa mère, je suis sûre que ce concert serait plus facile à organiser si c’était le cas. Mais bon, comme c’est Marina, il va falloir que je fasse avec et que je m’adapte aux exigences de Julia et ses amis français. Ça promet…

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