10. Alea jacta est

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Alken

Les lueurs du matin apparaissent à travers la baie vitrée et je suis réveillé par les premiers rayons du soleil qui viennent se poser sur nos corps nus. Nous avons oublié de refermer les grands rideaux de velours hier soir après avoir fait l’amour avec une passion et une intensité que je ne pensais pas pouvoir atteindre. Joy est lovée contre mon torse et je caresse doucement ses longs cheveux bruns. Elle dort du sommeil du juste, dans un calme et une sérénité qui font plaisir à observer. Sa poitrine se soulève régulièrement et j’admire le galbe de ses seins que je ne peux m’empêcher de caresser. Sa peau est douce et soyeuse, et mes mains se font câlines, mais elle ne se réveille pas et se serre juste un peu plus contre moi. J’adore ces petits moments où l’aube arrive, pleine de promesses. Je pense qu’elle devrait retourner dans le canapé car l’heure du réveil ne va pas tarder, mais je n’arrive pas à mettre fin à cet instant de félicité. La lueur matinale est vraiment magique sur les courbes voluptueuses de la femme qui partage mon lit.

— Joy, ma chérie, réveille-toi, chuchoté-je doucement en déposant de petits baisers sur son front.

Elle s’étire, féline dans mes bras et j’en profite pour passer mes mains le long de ses jambes et sur ses hanches si envoutantes. Je l’aime et je crois que je suis tellement accro que je ne pourrai plus jamais me passer de telles étreintes.

— Tu me chatouilles, Alken, rit-elle en nichant son nez dans mon cou. Bonjour Chaton.

— Bonjour mon Amour. Je veux que tous les matins soient aussi agréables que celui-ci. Tu sais que tu es belle au réveil ?

Je l’embrasse à nouveau, l’empêchant de me répondre tout de suite, alors que mon corps se réveille et se manifeste contre sa cuisse bien galbée.

— Je veux des réveils comme ça tous les jours, soupire Joy, le sourire aux lèvres, en se serrant contre moi. Et tu n’es pas mal non plus au réveil, pour un Papy.

— Oh Joy, tu l’aimes bien, ton petit vieux qui te fait jouir, non ? souris-je, un brin agacé par sa mention de mon âge que j’essaie d’oublier coûte que coûte.

— Je l’aime tout court, en fait. Les orgasmes ne sont qu’un plus. Non négligeable, certes, mais pas l’essentiel.

— Tu devrais retourner dans le salon, ce serait bête de se faire surprendre par Théo ou Kenzo. Mais n’oublie pas de remettre un petit quelque chose, je ne voudrais pas que l’un d’eux te saute dessus !

— Je devrais oui… Il faut juste que je trouve la motivation quelque part, et ce n’est pas ça qui m’aide, murmure-t-elle en empaumant mon sexe avec un sourire en coin.

— Et si j’utilisais cet outil de motivation pour te réveiller et te mettre en forme ? demandé-je en m’installant sur elle pour la surplomber de toute ma taille.

— Ce ne serait pas très sérieux, ça. Tu te rappelles de ce que tu viens de me dire ? Le risque que Théo ou Kenzo nous surprenne ? Ou tu as la mémoire défaillante ? sourit Joy en caressant tendrement ma joue tout en nouant ses jambes autour de moi.

— Tant que ce n’est que la mémoire qui défaille, ça va. Et s’ils se réveillent tôt, il faudra te montrer imaginative pour trouver une bonne excuse à ton absence du canapé, mais je te fais confiance ! ris-je en m’insérant en elle vigoureusement.

Quel meilleur moyen de commencer sa journée qu’avec une partenaire aussi imaginative et une excitation aussi peu défaillante ? Je n’en connais pas de plus satisfaisant, en tous cas. C’est tendre et sensuel, fort et passionné, c’est un court moment d’échanges mais qui nous amène tous les deux rapidement à un nouvel orgasme. Une fois remis de nos émotions, Joy se désengage de mes bras et se lève. Je ne résiste pas à la tentation et lui mets une petite claque sur son joli fessier alors qu’elle s’éloigne en riant et m’envoie un baiser de la main.

Lorsque je la retrouve pour le petit déjeuner, elle est en grande discussion avec Théo qui semble vouloir faire du shopping avec elle.

— Vous avez envie d’aller faire un tour sans moi ? demandé-je innocemment. Juste entre jeunes ?

— Entre colocs, en fait, sourit Théo avant de jeter un regard appuyé à mon fils. Kenzo veut paresser à la piscine et vous pourriez en profiter entre père et fils ?

— Ça te dit, Kenzo ? l’interrogé-je, curieux de voir si c’est vraiment ce qu’il souhaite.

— Oui, pourquoi pas P’pa. Le shopping, ça ne me tente pas, en tous cas. Encore moins que Joy, je crois.

— Parfait, je te propose d’aller faire un petit tour sur la plage plutôt qu’à la piscine. Et qui sait, nous y rencontrerons peut-être chacun la femme de nos rêves ? ajouté-je en appuyant mon regard sur celle qui a déjà pris cette place.

— Si tu veux, mais tout ce que je veux, moi, c’est nager en fait, rit Kenzo avant de terminer son jus de fruits.

— Vendu alors !

Je suis content de cette opportunité de passer un peu de temps avec lui. Depuis notre arrivée, j’ai l’impression qu’il passe tout son temps avec Théo. Je ne m’en plains pas car ça m’offre beaucoup d’occasions de tête-à-tête avec Joy, mais c’est vrai aussi que c’est agréable de passer des moments avec lui. Théo et Joy se préparent rapidement et sortent de notre suite alors que Kenzo se dirige vers la douche. La porte de la salle de bain se referme à peine que celle de l’entrée s’ouvre et Joy me bondit dessus pour m’embrasser en m’enlaçant. Surpris de cet assaut, je ne me défends pas du tout et profite de l’instant.

— Désolée, Beau Danseur, mais j’avais trop envie d’un baiser ! Je file ou Théo va avoir du mal à croire qu’il me faut autant de temps pour trouver une pince à cheveux !

— Tu es folle, Joy, mais je t’aime ! déclaré-je alors que déjà elle referme la porte derrière elle.

Cette femme est un vrai tourbillon d’émotions et de plaisirs. Comment ne pas en devenir complètement barjot ? En tous cas, je ferme les yeux et lèche doucement mes lèvres pour revivre encore un peu cette rapide étreinte. Quand Kenzo sort de la douche, il me trouve ainsi, un peu avachi sur le canapé, la tête perdue dans les étoiles qui illuminent mon monde depuis qu’il est habité par Joy.

— On y va Papa ou tu restes ici à comater ?

— Allons-y, soupiré-je en me relevant. Vamos a la playa, c’est comme ça qu’on dit, non ?

— Il paraît oui, mais on peut se contenter du Français, tu as un accent vraiment dégueulasse, se moque-t-il.

— Toujours aussi agréable avec ton père, à ce que je vois. C’est à cause de mon accent que tu me fuis comme ça depuis qu’on est arrivé à la Havane ?

— Je ne te fuis pas, je profite du voyage, c’est tout…

— Tu as bien raison, va. Je profite aussi beaucoup, c’est un voyage qui restera dans mes souvenirs !

Il me regarde un peu étrangement mais ne répond pas, et nous allons ensemble sur la plage près de l’hôtel. On passe une bonne heure à nager tous les deux, à faire de petites compétitions sur qui nagera le plus vite, à barboter dans l’eau avant de revenir nous poser un peu sur le sable fin, à l’ombre d’un palmier. J’en profite pour observer un peu mon fils qui est vraiment en train de devenir un bel homme. Le soleil lui donne un teint hâlé qui lui va très bien et je suis ravi de voir que non seulement il est gentil et attentionné, excellent danseur, mais qu'en plus, c’est un beau gosse. Après nous être enduits de crème solaire, nous nous allongeons côté à côté, chacun sur sa serviette. Je ferme les yeux sous mes lunettes de soleil afin de me reposer un peu, mais Kenzo semble avoir envie de parler.

— Papa, je peux te poser une question ? Enfin, c’est un peu personnel, tu vois ?

Je ne bouge pas mais ma respiration se bloque un instant alors que lui aussi est immobile à mes côtés.

— Tu peux poser toutes les questions que tu veux, Kenzo. Tu sais bien qu’il n’y a pas de tabous à avoir avec moi. J’ai dit ou j’ai fait quelque chose qui te dérange ?

— Non, c’est pas ça… Enfin, je me pose pas mal de questions sur les relations amoureuses, en fait. J’ai eu des copines au lycée et tout, mais… En fait, des fois je me demande comment on sait qu’on est vraiment amoureux, tu vois ? Et tu crois qu’on peut tomber amoureux d’une personne qui nous ferait entrer dans une relation que la société n’accepterait pas ?

Je me demande où il veut en venir avec ses questions. C’est à la fois très peu précis, pas très clair mais en même temps, je ne peux réprimer un frisson en me disant qu’il essaie de savoir ce qui se trame entre Joy et moi.

— Tu veux dire une relation du type où un mec comme moi tombe amoureux d’une jeune femme qui pourrait être sa fille ?

— Hein ? dit-il en se redressant. Je… Quoi ? Qu’est-ce que tu racontes ?

Mince, j’en ai sûrement trop dit. Ou pas assez. Si j’essaie de noyer le poisson, ça va se voir. Peut-être qu’il est temps de me montrer honnête avec lui ? Mais comment va-t-il prendre cette annonce ?

— Je dis juste que des fois, on ne choisit pas de qui on tombe amoureux, Kenzo. Tu es là, tu te promènes, et boum, tu tombes sur une personne qui attire ton regard. Ton cœur cesse un instant de battre et boum, c’est le coup de foudre, tu vois ? On a beau essayer de lutter, mais rien n’y fait, tout nous ramène toujours à cette personne. Et quand ça arrive, ni l’âge, ni les différences n’existent. Plus rien n’a d’importance. C’est ça que tu dois ressentir chez moi, Kenzo, si tu te poses ces questions.

— Attends… Tu veux dire que… Tu es amoureux ? Et pas d’une vieille comme toi ? Ta milf n’est pas une milf, en fait ?

Alors, clairement, ce n’est pas une vieille comme moi. Mais ça risque de lui faire bizarre de savoir que c’est sa meilleure amie qui me fait craquer.

— Non, Kenzo, il n’y a jamais eu de milf, à part peut-être Marie, mais ce n’est pas d’elle dont je suis amoureux. La femme que j’aime est merveilleuse, belle, drôle, sensuelle, et ce n’est pas grave si elle est deux fois moins âgée que moi, si ?

— Je sais pas, soupire-t-il en se laissant à nouveau tomber sur sa serviette. J’imagine que non, mais c’est bizarre, quand même. Enfin, tu te rends compte que tu seras à la retraite vingt ans avant elle ? Que… Merde, deux fois moins, quand même ! Je pourrais avoir un frère ou une sœur qui a plus de vingt ans de moins que moi, ce serait trop bizarre.

Ouch. Ça fait mal, ça. Il n’a pas tort, mais quand il y a des sentiments, tout ça, ce ne sont que des détails. L’amour est plus fort que tout, non ? Par contre, comment je lui dis que c’est Joy qui est au cœur de toutes mes pensées ?

— Bizarre, mais on est au vingt-et-unième siècle, non ? Je sais que tu la trouves mignonne aussi, mais ce n’est pas de notre faute si nous ne pouvons résister à ce désir d’être ensemble !

— Je la trouve mignonne ? Parce que je la connais, en plus ? P’pa, me dis pas que c’est une étudiante de l’ESD quand même ?

Ça y est, c’est l’heure de choisir. Soit je lui dis que tout ça, c’était une blague pour tester son ouverture d’esprit, soit j’avoue tout et je ferai face aux conséquences. Je soupire et décide de m’en remettre à ma bonne étoile.

— Kenzo, je te l’ai dit et tu l’as toi même remarqué, on ne tombe pas amoureux forcément d’une personne où tout sera facile. L’amour, quand ça nous tombe dessus, on ne peut rien y faire. Et c’est un peu ça qui se passe avec Joy. Même avant de savoir qu’elle était à l’école, j’ai craqué pour elle.

— Joy ? Très drôle P’pa, ricane-t-il en s’asseyant, j’y ai cru pendant une minute. Qu’est-ce que Joy ficherait avec un homme de ton… Attends, c’est toi le comptable ?

— Oui, c’est moi le comptable, avoué-je en m’asseyant à mon tour et en observant sa réaction que j’ai du mal à discerner en raison de ses lunettes. Tu sais, ça s’est fait tout seul, on a essayé de résister, mais impossible. Ne me juge pas, je t’en prie…

— J’y crois pas, souffle-t-il. Toutes les nanas de l’école te font du gringue, et faut forcément que tu baises ma meilleure amie ? T’aurais pu choper n’importe laquelle, et c’est avec Joy que tu couches ?

— Parce que tu crois que je l’ai choisie ? Si j’avais eu le choix et que j’avais écouté mon cerveau plutôt que mon cœur, je peux t’assurer que c’est avec Marie que je serais, pas avec Joy. Mais elle est juste parfaite… Je l’aime, Kenzo, et j’ai besoin que tu le comprennes…. Que tu l’acceptes…

— Que je comprenne et que j’accepte ? Tu veux que j’accepte que tu couches avec la fille avec qui je voulais être ? Ça me paraît bien compliqué…

— Tu voulais être avec elle ? Je ne savais pas, Kenzo… Mais tu sais, je te le répète, on ne choisit pas, ces choses là. Je crois qu’elle est juste faite pour moi… Et… Si ça te gêne trop parce que ce n’est pas dans les normes, on… J’en discuterai avec elle, mais on ne veut pas arrêter, mon fils. On ne peut pas arrêter….

— Mais je m’en fous des normes, P’pa, c’est juste que… C’est Joy, putain. Théo va te refaire le portrait, et moi, je… Ah, beurk, vous imaginer tous les deux, juste beurk, grimace-t-il.

— On ne veut plus vivre cachés, Kenzo. Tu comprends, le secret, ce n’est pas bon. Ça peut être un peu excitant au début, mais sur le long terme, c’est source d’ennui et de stress. Je ne te demande pas de m'imaginer avec elle mais de nous supporter dans nos choix et notre amour. Tu penses que tu peux au moins y réfléchir ?

— Ouais, je vais y réfléchir… Je peux rien te promettre de plus, je trouve ça trop glauque.

— L’Amour n’est jamais glauque, Kenzo. Je peux t’assurer qu’il n’y a rien de plus pur et de plus beau. Tu verras quand ça t’arrivera.

Il se lève alors et me laisse sans un regard. Je le vois s’éloigner lentement de moi. Ce n’est pas facile pour lui d’accepter la situation, je le sais, et je trouve qu’il prend l’information plutôt bien. Mais il n’a pas non plus sauté de joie ou ne m’a pas félicité. Je crois que ça aurait été une autre de ses copines, il aurait accepté plus facilement. Mais là, sa meilleure amie, une femme sur laquelle il a sûrement fantasmé, je comprends que ce soit difficile à appréhender. Je ne sais pas quelles vont être les conséquences, mais c’est sûr que désormais, on ne pourra plus se cacher. Il connaît notre secret et il a le pouvoir de nous briser. J’espère que son amour pour Joy et moi l’aidera à nous aider plutôt qu’à nous mettre en difficulté. Il n’y a pas de raison qu’il n’en soit pas ainsi, si ?

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