26. La fin des secrets

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Alken

La semaine a passé à une allure folle et je ne sais pas comment c’est possible qu’on soit déjà dimanche. Depuis que nous sommes revenus de Bray-Dunes, les cours se sont enchaînés et j’ai pu passer toutes les soirées avec Joy soit directement en rentrant de l’ESD, soit après son service au Nouveau Départ. J’ai l’impression qu’on vit vraiment en couple et, si ce n’est au sein de l’ESD où nous gardons nos distances, nous ne nous quittons pas. Et j’adore ces moments de complicité, ces partages du quotidien avec elle. C’est naturel et fluide, comme si nous avions toujours vécu ensemble.

J’ai le sourire quand je la regarde assoupie à mes côtés. L’état du lit montre que la sieste n’a pas été de tout repos. Il faut dire que dès que Kenzo est sorti, Joy m’a littéralement sauté dessus. Elle m’a presque arraché mes vêtements et s’est transformée en furie qui ne pensait qu’à une chose : me faire l’amour. Et je me suis laissé faire avec délice dans cette danse sensuelle qu’elle a contrôlée du début à la fin. Autant j’aime la dominer et la contrôler parfois, autant là, j’ai apprécié m’offrir à elle. J’ai eu l’impression de n’être qu’un jouet livré à son désir et à ses fantasmes. Sa bouche s’est faite vorace. Elle a attaché mes mains avec ma chemise et a utilisé mon sexe pour se caresser et se faire plaisir. Quelle merveilleuse sensation quand enfin elle a mis fin au supplice et s’est empalée sur moi, se déchaînant dans une valse des émotions qui nous a menés jusqu’à l’extase.

Je me lève et sors de la chaude étreinte de son corps nu pour aller préparer le dîner. Je ne sais pas encore combien nous serons. Tout dépend du rendez-vous de Kenzo avec Théo. Si tout se passe comme mon fils le désire, ils vont revenir à deux et passer la nuit ensemble ici. S’il revient seul, c’est que leur couple n’est toujours pas d’actualité. Je ne sais ce qu’il faut espérer. J’espère que mon fils est sincère et qu’il ne joue pas avec les sentiments de son ami, mais cela fait une semaine qu’on n’a pas vu Emilie à la maison et j’ose espérer qu’il a vraiment rompu avec elle avant d’essayer quelque chose avec le meilleur ami de ma partenaire.

Toujours nu, je sors sur le balcon récupérer dans les jardinières quelques herbes pour agrémenter le plat que je vais préparer. J’enfile un tablier et me mets à la cuisine. Je coupe les courgettes, fais chauffer de l’eau et prépare rapidement une petite mousse au chocolat, le petit extra de cette fin de weekend pour soit redonner le moral à tout le monde après une semaine difficile, soit célébrer la fin des disputes et des secrets entre nous. C’est fou la situation dans laquelle nous étions arrivés quand même. J’ai bien cru que nous avions perdu Théo et que Joy ne s’en remettrait pas. Mais le petit weekend a fait des miracles. Et le jeune black a retrouvé le sourire. Il a même retrouvé le goût de la danse qu’il avait un peu perdu et cette semaine, j’ai passé un peu de temps avec lui pour préparer quelques auditions où il espère décrocher des contrats. La fin de l’année arrive et tous les deuxièmes années sont en plein stress sur leur avenir.

Alors que je suis penché sur la casserole fumante, je sens deux bras se glisser sous le tablier et une bouche venir embrasser mon cou. La peau nue de ma sirène se colle contre moi et ses seins viennent se frotter contre mon dos. Ses doigts s’enroulent autour de mon sexe qui se dresse sous le tablier.

— Hmm, Joy. J’aime quand tu viens me retrouver en cuisine comme ça.

— Tu devrais faire attention à ta saucisse, Alken. La cuisine à poil, c’est un peu risqué.

— Je crois qu’elle est bien protégée, là, juste entre tes doigts. Tu sais que tu es belle, toi ?

Je me retourne et la serre contre moi pour l’embrasser alors qu’elle m’enlace et ondule en se collant contre mon corps.

— Je me sentais seule au lit, tu devrais avoir honte de m’abandonner comme ça, sourit-elle.

— Il faut bien que quelqu’un prépare le dîner, ma Chérie. Et qui sait qui sera là ce soir ? D’ailleurs, on devrait peut-être s’habiller un peu, ajouté-je en voyant l’heure. Sinon, les gens vont penser qu’on passe notre vie nus, à nous aimer.

— Les gens n’auraient pas tort, rit Joy en s’écartant de moi. Mais tu as raison, je ne voudrais pas choquer ton fils.

Je baisse un peu le feu et la rejoins dans la chambre où nous parvenons à nous habiller malgré les fréquentes interruptions pour des baisers et des câlins qui nous donnent envie de beaucoup plus même si nous parvenons à rester raisonnables. Quand nous entendons la clé tourner dans la porte, nous essayons de ne pas faire trop les curieux, mais nos regards se dirigent vers l’entrée pour voir qui sera des nôtres ce soir. Nous sommes tous les deux comme des petits curieux derrière la porte de ma chambre à peine entrebâillée, à espionner qui va pénétrer dans mon appartement.

Nous voyons Kenzo entrer et refermer la porte derrière lui. J’échange avec Joy un regard triste et résigné. Il n’a pas réussi à ramener Théo et il va falloir lui remonter le moral ce soir. Pourtant, il n’a pas l’air abattu comme il devrait l’être. Je sors de la chambre pendant que Joy finit de s’habiller.

— Bonsoir Kenzo. Tu es seul ? demandé-je malgré le caractère évident de la situation.

— Salut P’pa. Oui, je suis seul, tu crois quoi ? Que j’ai caché un éléphant dans mon sac ?

— Pas un éléphant, non, mais j’espérais que tu reviennes avec Théo. J’y croyais, ajouté-je, résigné.

— Oh, avec les travaux, il est en train de chercher une place dans la rue. Il arrive, sourit mon fils en grand.

— C’est une bonne nouvelle, ça ! m’exclamé-je en le serrant dans mes bras. Vous êtes… En couple ?

— Peut-être bien, mais je ne te demande pas si tu comptes épouser Joy, à ce que je sache, alors occupe-toi de tes oignons, P’pa, rit-il en s’affalant sur le canapé.

— Joy, crié-je alors que la porte s’ouvre sur elle, on sera quatre à table ce soir. Et… Wow. Tu m’avais pas dit que tu avais amené une jolie robe comme ça.

— C’est vrai que tu es canon, mon amie, sourit Kenzo en la matant sans vergogne alors que je m’approche et l’enlace. Tu me ferais presque regretter ma décision.

— Fais gaffe à ce que tu fais, O’Brien fils, je t’ai à l'œil, je te préviens, sourit Joy avant de déposer un baiser sur ma joue.

Elle s’installe sur le canapé aux côtés de mon fils et j’admire la cambrure de son dos nu dévoilé par sa robe et ses longues jambes qu’elle replie sous elle après avoir déposé un bisou sur la joue de mon fils, ce qui me rendrait presque jaloux, mais le regard qu’elle porte sur moi me rassure tout de suite. Je retourne à mes fourneaux quand Théo sonne à la porte et Kenzo bondit pour aller lui ouvrir. Les deux s’embrassent rapidement avant de nous rejoindre au salon.

— Bienvenue chez ton Prof, Théo, rigolé-je de le voir si gêné. Fais comme chez toi, tu sais.

— Merci Prof ! Classe, l’appart’, dit-il en sifflant. Salut Princesse.

— C’est ça quand tu décroches de bons contrats dans de beaux spectacles. Et que tu es prof à l’ESD. Ça donne les moyens de se faire un peu plaisir. Kenzo te fera visiter, si tu veux, mais ce sera après le dîner. C’est prêt et donc, à table, tout le monde !

— Un vrai grand-père, rit Joy en se levant, moqueuse. Pile à l’heure, il ne faudrait surtout pas se coucher trop tard, hein Chéri ?

— C’est plutôt que je n’ai pas envie d’aller au lit trop tard. Qui parle de se coucher, mon Amour ? On peut faire tellement de choses le soir, dans la chambre. Et puis, je suis sûr que Théo meurt de faim, n’est-ce pas, jeune homme ?

— Vous êtes bien classique, Prof, rit Théo en s’installant à table. J’espère quand même que vous n’êtes pas seulement missionnaire au pieu, sinon elle va s’ennuyer, ma Joy.

— Pourquoi dès que vous êtes rassemblés, vous parlez de cul ? Il y a autre chose dans la vie, demandé-je un peu hypocritement en ramenant le plat. D’ailleurs, tu restes dormir ici ? Ce sera Missionnaire ou Andromaque pour vous au menu ?

— C’est toi qui as commencé, Alken, intervient ma Chérie en faisant le service. Et pitié, moi je ne veux pas savoir ! Est-ce qu’on pourrait parler d’autre chose que de nos vies intimes qui n’ont absolument rien de privées, apparemment ?

— Merci pour le repas, P’pa. C’est cool que tu nous aies fait à manger. Et c’est cool que toi et Joy, vous nous acceptiez tous les deux. Ce n’est pas pareil dans toutes les familles. Moi, j’apprécie votre soutien.

Je souris à mon fils alors que tout le monde commence à manger. Nous discutons des auditions de Théo qu’il pense avoir bien réussies. Alors que je me lève pour aller chercher le dessert, Joy pose sa main sur mon bras pour que je reste assis.

— Avant le dessert, j’aimerais qu’on discute de quelque chose vu qu’on est tous les quatre, commence-t-elle.

— Tu veux parler de quoi, mon Amour ? demandé-je, curieux.

— Eh bien, voilà, ces dernières semaines n’ont pas été faciles. Surtout pour moi qui me suis retrouvée entre tous vos secrets et qui ai dû faire face à vos colères et vos énervements. Alors, j’ai envie de vous proposer un petit deal qu’on s’engagerait tous à respecter.

Je la regarde, intrigué car elle ne m’a pas parlé de ça avant de lancer le sujet à table. Quand je vois les expressions des deux garçons, je constate qu’ils sont aussi interrogatifs que moi.

— Plus de mensonges entre nous. Je déteste ça, et ça peine toujours l’un d’entre nous. Et puis, je vais péter les plombs, moi, avec tous ces trucs. Déjà que devoir se cacher avec Alken, c’est compliqué. Alors on ne se ment plus, même si parfois les vérités ne sont pas faciles à entendre. Deal ?

— Deal, dis-je immédiatement en souriant. Sauf que je garde un droit de réserve pour les notes des cours. Il faut me laisser mes effets et vous permettre de vous booster en vous menaçant de mauvaises notes !

— Ok pour moi, soupire Kenzo. J’ai jamais voulu mentir ou avoir des secrets, mais comme pour toi avec mon père, Joy, c’est pas facile de tout dire comme par exemple de découvrir qu’on aime quelqu’un du même sexe. Les choses évoluent, mais on ne sait jamais comment les gens vont réagir. Même ceux qu’on connaît.

— Deal aussi. On n’aurait pas dû te demander de garder ça pour toi, mais en même temps on ne pouvait pas savoir que tu couchais avec Alken et que ça te mettait dans cette position.

— Ah non, on ne parle plus de positions ! s’amuse Kenzo. C’est Joy qui l’a dit ! Tu ne respectes déjà pas ce qu’elle demande, Théo !

— Attends un peu, toi, qu’on se retrouve dans ta chambre. Tu verras qu’on ne parlera pas des positions, mais je te promets qu’on va les essayer ! Tu es prévenu !

Je souris et suis conscient de l’accord que nous avons passé. Ce n’est pas forcément une très bonne chose d’entrer dans de tels rapports d’intimité avec des élèves, mais comment faire autrement quand on a son fils qui est concerné ainsi que sa partenaire de jeu et leur meilleur ami. Impossible de garder ses distances. Et puis, c’est quand même mieux d’en arriver là plutôt que de passer son temps à se disputer. Nous scellons cet accord en partageant la bonne mousse au chocolat que j’ai préparée. Ce sont des moments comme ça qui redonnent foi en la vie. Quand on a l’amour, l’amitié, la famille et du chocolat, tous les voyants sont au vert et on ne peut qu’être heureux.

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